RAMSAY, GEORGE, 9e comte de DALHOUSIE, officier et administrateur colonial, né le 22 octobre 1770 à Dalhousie Castle, Écosse, fils aîné de George Ramsay, 8e comte de Dalhousie, et d’Elizabeth Glene ; le 14 mai 1805, il épousa Christian Broun, et ils eurent trois fils ; décédé le 21 mars 1838 à Dalhousie Castle.

George Ramsay reçut d’abord sa formation scolaire de sa mère, puis il étudia à la Royal High School d’Édimbourg et à l’University of Edinburgh. Après la mort de son père, survenue en novembre 1787, il crut de son devoir, peut-être pour des raisons financières, d’embrasser la carrière des armes ; aussi acheta-t-il en juillet 1788 une commission de cornette dans le 3rd Dragoons. Promu en janvier 1791 capitaine dans une compagnie indépendante qu’il avait levée lui-même, il rejoignit plus tard le 2e bataillon du 1st Foot, alors à Gibraltar. En juin 1792, il acheta la commission de major du 2nd Foot et, en décembre 1794, accéda au grade de lieutenant-colonel. Commandant du 2e bataillon de ce régiment aux Antilles à compter de 1795, il fut blessé en décembre au cours d’une attaque manquée contre un détachement français à la Martinique. Affecté en Irlande pendant la rébellion de 1798, Dalhousie participa l’année suivante à une expédition contre Le Helder (Pays-Bas) et reçut le grade honoraire de colonel en janvier 1800. Après avoir servi à Belle-Île-en-Mer, en France, et à Minorque, il commanda en 1801 des assauts contre les forts d’Aboukir et de Rosette (Rachîd), en Égypte. De retour à Gibraltar en 1802, il rejoignit l’état-major en Écosse l’année suivante en qualité de général de brigade et profita de l’occasion pour passer quelque temps dans son domaine, où il procéda à des améliorations agricoles.

Promu major général en avril 1808, Dalhousie prit part à la malheureuse expédition contre l’île Walcheren (Pays-Bas) et devint colonel du 6th Garrison Battalion en août 1809. À l’automne de 1812, on le plaça à la tête de la 7th Division, sous les ordres du marquis de Wellington, dans la péninsule Ibérique, et on le nantit pour la durée de son séjour en Espagne du grade de lieutenant général, qui lui serait accordé à titre permanent en juin 1813. Il participa à des engagements à Vitoria, en Espagne, dans les Pyrénées et à Toulouse, en France. En mai 1813, Dalhousie devint colonel du 26th Foot, distinction qu’il allait conserver toute sa vie. Même si, porté à la lenteur et au pédantisme, il ne comptait probablement pas parmi les meilleurs commmandants de Wellington, il reçut plusieurs honneurs, dont des remerciements de la part des deux chambres du Parlement pour ses services, un titre de chevalier en 1813 ainsi que la grand-croix de l’ordre du Bain en 1815, en même temps que la dignité de baron Dalhousie, pair du Royaume-Uni. Élu en 1796 au nombre des représentants des pairs d’Écosse, il siégeait depuis, en cette qualité, à la chambre des Lords. Il allait être promu général en juillet 1830.

À l’exemple d’un grand nombre d’officiers qui avaient servi sous Wellington dans la péninsule Ibérique, Dalhousie bifurqua vers l’administration coloniale une fois les hostilités terminées. Au printemps de 1816, il demanda à prendre la relève de sir John Coape Sherbrooke* au poste de lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-Écosse. De cette façon, il escomptait remplacer un jour Sherbrooke au commandement en chef des troupes du Canada et être libéré d’une part de ses « soucis financiers », conséquence des lourdes dépenses qu’avaient entraînées les constructions qu’il avait faites dans son domaine « en ces temps difficiles pour tous ». Nommé en juillet, Dalhousie arriva à Halifax le 24 octobre. Il avait alors 46 ans. Intelligent, l’esprit bien meublé, il était animé d’un sens extrême du devoir, aimait à commander et s’attendait à être obéi, était froid, distant, quelque peu hautain, et avait une personnalité irritable que venait accentuer une foi austère de presbytérien écossais. Consciencieux jusqu’au scrupule et curieux de tout, il se lança tout de suite à la découverte de la province. Les paysages accidentés lui plaisaient, le progrès agricole le passionnait ; il prit donc l’habitude de faire à la campagne de fréquentes tournées dont il rapportait les impressions dans son journal. Pour rendre d’une façon plus vivante les détails de la vie provinciale, il emmenait avec lui un dessinateur officiel, John Elliott Woolford*, dont il parrainait la production, comme celle de quelques autres artistes.

L’attention de Dalhousie se porta immédiatement sur le sort des colons pauvres et sur celui des immigrants, alors de plus en plus nombreux. S’occuper des réfugiés noirs venus des États-Unis pendant la guerre de 1812 était urgent. Afin de les sauver de la famine, il renouvela la distribution de rations gouvernementales jusqu’en juin 1817 dans l’espoir qu’à cette date, s’ils étaient établis sur des terres et recevaient des semences et des outils, ils pourraient assurer eux-mêmes leur subsistance. Puis, comme le gouvernement britannique prêchait l’épargne, il réduisit de moitié le nombre des bénéficiaires à l’été de 1817 et réserva alors les rations aux vieillards, aux infirmes et aux familles qui avaient défriché leur lot. Néanmoins, il admettait que la plupart des réfugiés auraient encore longtemps besoin d’assistance, ce qui n’éveillait l’enthousiasme ni du Parlement néo-écossais ni des habitants. « Formés et accoutumés à l’esclavage, notait-il avec désespoir, délivrés de la menace du fouet, [les Noirs] confondent la liberté avec l’oisiveté et ne sont donc pas capables de travailler. » On parlait de les rapatrier aux États-Unis ou de les envoyer rejoindre en Sierra Leone les Noirs qui avaient déjà quitté la Nouvelle-Écosse, mais ils refusaient d’aller aux Antilles par crainte de retomber aux mains des négriers.

Dalhousie envisageait à peu près de la même façon la situation misérable des Indiens micmacs. Critique à l’égard de leur air d’indolence, il était disposé à placer des terres en fiducie pour ceux qui se montraient « prêts à s’établir et à cultiver la pomme de terre ». Il appuyait les initiatives humanitaires des prêtres catholiques et des réformateurs sociaux, tel Walter Bromley, mais il s’opposait aux efforts déployés par celui-ci et d’autres pour détourner les Micmacs de leurs coutumes et du catholicisme ; selon lui, cette attitude était « inconvenante » et tendait à « ruiner le projet de les rendre sédentaires ».

Au vu des difficultés que les immigrants britanniques éprouvaient eux aussi à s’établir, Dalhousie vantait les bienfaits que la société retirerait à long terme si le gouvernement les aidait à démarrer en leur fournissant des rations, des instruments aratoires et des semences. Acquérir une terre était si compliqué pour eux qu’il comprit bientôt la nécessité de s’attaquer à tous les obstacles qui se dressaient sur leur chemin : lourds honoraires perçus pour l’établissement des titres, déficiences des levés d’arpentage, fraudes des spéculateurs et grandes étendues de terre en friche qui appartenaient à des particuliers. La perspective d’avoir un petit lot bien à eux attirait sans doute les immigrants, mais Dalhousie caressait plutôt le projet de confier de vastes étendues à des propriétaires plus riches qui les loueraient ensuite à long terme aux nouveaux colons. « Tout homme [...] est laird ici, constatait-il, et les classes [...] constituées en Angleterre par les tenanciers et les paysans n’existent pas dans ces provinces et ne se formeront probablement pas tant qu’on n’aura pas tout à fait éliminé le régime de concessions foncières » pour le remplacer par la vente publique.

Dalhousie était impatient de promouvoir l’amélioration des techniques agricoles. Il noua des relations fructueuses avec John Young, Écossais comme lui et marchand de Halifax qui lui dédia par la suite ses célèbres Letters of Agricola [...], d’abord publiées de 1818 à 1821. Il pressa le Parlement, réfractaire, d’importer à ses frais, de Grande-Bretagne, des graines et du bétail de race supérieure. Il parraina et présida le Central Board of Agriculture, formé à Halifax. Des sociétés locales qui tenaient des foires annuelles et décernaient des prix suscitèrent un engouement monstre qui cependant s’éteignit bientôt, ce qui poussa Dalhousie à observer : « Il y a dans ce nouveau monde une aversion obstinée contre le progrès, qu’on peut maîtriser mais non déraciner ; une lenteur exaspérante pour un homme de l’autre hémisphère qui a vu combien les sciences et les arts bouillonnent dans les nations d’Europe et qui éprouve le désir de rendre les hommes d’ici aussi curieux, aussi énergiques que ceux de là-bas – mais ils tiennent à leur rythme, et il faudra plus qu’une vie d’homme pour accomplir ce qui selon moi pourrait être fait en quelques années à peine. »

Dalhousie avait cette conviction que le gouvernement provincial pouvait accélérer le développement en construisant des routes : elles ouvriraient la colonie au peuplement et au commerce, favoriseraient la circulation de l’information et pourraient servir aussi à des fins militaires. C’est dans cet esprit qu’on établit des soldats licenciés le long d’un chemin rural qui reliait Annapolis Royal à la côte sud. On réétudia avec sérieux la réunification du Cap-Breton à la partie continentale, envisagée depuis longtemps, car elle signifiait l’intégration de nouveaux habitants et de mines de charbon à une province en pleine évolution. Cependant, même si la Nouvelle-Écosse était « susceptible de grandes améliorations », l’intervention gouvernementale ne pouvait avoir que des effets limités, et Dalhousie était prompt, chaque fois que ses tournées lui permettaient d’en constater des indices, à louer les habitudes individuelles de travail et de sobriété ou à condamner la paresse et l’imprévoyance des couches inférieures.

Issu d’un milieu aristocratique, Dalhousie se sentait à l’aise surtout parmi l’élite civile et militaire de Halifax, dont lady Dalhousie a caricaturé certains des membres dans des portraits délicieusement espiègles. Aussi prêt à se lier avec des non-conformistes qu’avec des anglicans, il préférait sans aucun doute les conseillers aux députés et faisait une distinction entre « les hommes hautement respectables – disposés à appuyer le gouvernement en raison de leur loyauté et de leurs justes principes », et les « politiciens fourbes de Halifax, ou les colonels de province, bien plus portés sur le rhum et le prêche que soucieux de promouvoir le bien de l’État ». Son attitude envers les marchands de la colonie était plus ambivalente, sauf s’ils avaient la chance d’être des compatriotes écossais, mais il appuya avec vigueur les pétitions adressées au gouvernement britannique à propos des clauses de la convention anglo-américaine de 1818 sur le commerce. Les restrictions imposées par le Congrès à l’accès des navires étrangers aux ports américains menaçaient aussi bien la prospérité du secteur néo-écossais de transport des marchandises que l’importation, en provenance de la Nouvelle-Angleterre, d’approvisionnements nécessaires. Dalhousie se réjouit donc lorsque la Grande-Bretagne fit de Halifax un port franc, car ainsi les produits manufacturés qui passaient de la Grande-Bretagne aux États-Unis et les produits agricoles américains destinés aux Antilles pourraient continuer d’y transiter. Selon lui, c’était là « l’unique mesure susceptible de raviver l’initiative et l’humeur des marchands, [alors] au plus bas ». Par contre, comme l’ensemble de la population, Dalhousie s’inquiétait de la réadmission des Américains dans les territoires de pêche, et il appréhendait que de cette façon ils ne resserrent leurs liens commerciaux, et peut-être politiques, avec les petits villages de pêcheurs de la province.

En raison de la formation qu’il avait reçue en Écosse et de sa passion pour le progrès, Dalhousie déplorait le piètre état des études supérieures en Nouvelle-Écosse. Le King’s College, incommodément situé à Windsor, donc à 40 milles de l’animation de la capitale, manquait de fonds, occupait un édifice délabré et pâtissait de la « violente guerre ouverte » que se livraient le directeur Charles Porter* et son adjoint William Cochran*. Pire encore selon Dalhousie, il n’accueillait que les anglicans, ce qui n’allait pas du tout dans une colonie formée aux trois quarts de non-conformistes. Décidé à briser le monopole de l’Église d’Angleterre et à soustraire l’éducation aux rivalités religieuses [V. Thomas McCulloch], Dalhousie conçut le projet de fonder un collège pour les jeunes de toutes confessions et de toutes classes sociales. Après avoir consulté George Husband Baird, recteur de l’University of Edinburgh, il envisagea d’imiter cet établissement, notamment en offrant des cours d’humanités, de mathématiques et, par la suite, de philosophie morale et naturelle. Le collège s’élèverait carré Grand Parade, à Halifax, et serait d’abord financé par des droits de douane perçus en 1814–1815 à Castine (Maine) pendant l’occupation britannique. Le 22 mai 1820, à l’occasion d’une grande cérémonie maçonnique et militaire, Dalhousie posa la pierre angulaire de l’établissement que, malgré ses sincères réticences, on avait baptisé en son honneur. La difficile tâche de réunir de l’argent pour achever les travaux, d’obtenir une charte royale et d’engager les premiers professeurs retomberait cependant sur les épaules de son successeur et ami sir James Kempt*. Dalhousie lui-même ne pourrait guère qu’observer de loin, impuissant, cette entreprise prématurée, déficitaire et encore sans vie faire long feu au milieu de l’indifférence du Parlement et de l’antipathie inquiète des anglicans de la Haute Église et de leur chef, le révérend John Inglis, dont Dalhousie dirait plus tard qu’il était un « jésuite hypocrite ».

Malgré tout ce qu’il trouvait à redire contre l’exclusivisme des anglicans, Dalhousie n’était pas toujours sensible aux revendications des non-conformistes. En réponse à un déluge de pétitions, le Parlement provincial adopta en 1819 un projet de loi controversé qui donnait aux ministres de toutes les confessions le droit, jusqu’alors réservé au clergé anglican, de célébrer des mariages avec dispense de bans. Dalhousie retint ce projet pour le soumettre au jugement impérial. Deux choses lui paraissaient inacceptables dans la façon habituelle de faire : il n’aimait pas signer des liasses de formules vierges et il considérait dangereuse la coutume suivant laquelle des ministres anglicans, moyennant rétribution, réacheminaient ces permis à leurs collègues non conformistes afin qu’ils puissent officier selon leurs rites. Si l’on devait changer le système, Dalhousie voulait que le mariage avec dispense de bans demeure un privilège et qu’il ne soit assurément pas étendu à des ecclésiastiques autres que ceux de l’Église d’Écosse. Il existait d’amples garanties quant aux principes solides et à l’intégrité du clergé des deux Églises établies, croyait-il, mais non quant à ceux des prédicateurs improvisés qu’entretenaient les congrégations non conformistes.

Dalhousie n’était donc pas d’accord avec l’Assemblée sur les dispenses de bans, mais la réforme de la milice provinciale les opposait bien davantage. Inquiet de la vulnérabilité de la colonie, de ses casernes et fortifications en ruine, du fait que les soldats britanniques suffisaient à peine au maintien d’une garnison régulière à Halifax, Dalhousie tenait beaucoup à une milice efficace. Or, à compter de 1818, deux Assemblées refusèrent successivement d’accueillir ses propositions de réorganisation et d’inspection de la milice parce qu’elles allaient probablement entraîner une hausse des dépenses. Ce débat envenima tant les dissensions que le contrôle des finances suscitait entre le lieutenant-gouverneur et l’Assemblée qu’en 1820 leurs relations jusque-là cordiales s’en trouvèrent rompues. À la fin de la session, tandis qu’il se préparait à aller occuper le poste de gouverneur à Québec, Dalhousie découvrit, trop tard, que l’Assemblée avait omis d’affecter des crédits à l’inspection de la milice, une manœuvre en sous-main, selon lui, bien caractéristique de l’irritabilité grandissante de l’Assemblée. Ne montrait-elle pas depuis quelque temps une propension aux tractations secrètes, irrégulières, « une espèce de jalousie envers le Conseil et une inclination à refuser en cours de session tout rapport avec le gouvernement exécutif » ? Le geste de l’Assemblée était aussi, pour Dalhousie, une insulte personnelle au représentant du roi. « Je suis déçu et irrité, notait-il, qu’une poignée de Yankees intrigants [...] m’aient trompé et vaincu ». Dans un accès de colère, il refusa l’étoile et l’épée d’une valeur de 1 000 guinées que l’Assemblée avait décidé de lui remettre en gage d’estime, à l’occasion de son départ. Puis, blâmant le président de la chambre, Simon Bradstreet Robie*, il déclara qu’il n’aurait pas accepté de nouveau, dans cette haute fonction, cet « avocaillon sournois », inconstant et chicanier. Peut-être valait-il mieux, tant pour le climat politique de la Nouvelle-Écosse que pour sa propre tranquillité d’esprit, que Dalhousie soit sur le point de passer ses pouvoirs à Kempt, plus souple.

Dalhousie avait toujours considéré son séjour en Nouvelle-Écosse comme un apprentissage essentiel en vue du « haut et important commandement du Canada ». Dans son esprit, lui et le comte Bathurst, secrétaire d’État aux Colonies, avaient convenu tacitement qu’il succéderait à Sherbrooke qui au début de 1818, après une attaque d’apoplexie, avait appuyé publiquement sa candidature. Aussi avait-il été blessé et fâché d’apprendre que le commandement qu’il convoitait tant était allé au duc de Richmond [Lennox*], l’impécunieux beau-frère de Bathurst. Au cours d’une grande tournée du Canada, à l’été de 1819, il avait rencontré Richmond et l’avait informé de son intention de démissionner à l’automne. Puis, en septembre, il apprit que le duc était mort de la rage. Dalhousie se retint cette fois de solliciter le poste et attendit de voir s’il irait à Québec ou se retirerait en Écosse. Entre-temps, il médita sur le défi que représentait le Bas-Canada, « contrée où de violents sentiments partisans sépar[aient] depuis longtemps les deux classes distinctes de sujets du roi – les Anglais et les Français ». Occuper ce commandement, songeait-il, serait « jouer quitte ou double ; en réussissant [il se] couvrirai[t] d’honneurs, en échouant [il] perdrai[t] la petite part de considération dont [l’avait] gratifié [son] pays ». Il apprit en novembre, avec un mélange de bonheur et de crainte, qu’il serait gouverneur en chef de l’Amérique du Nord britannique à compter du 12 avril 1820.

Dalhousie quitta Halifax le 7 juin, en emportant avec lui de bons souvenirs et en laissant des regrets sincères parmi ses amis et les conseillers de la province. Il arriva à Québec le 19. Certes, la capitale occupait un site assez majestueux, comme il convenait à la ville d’un vice-roi, mais les rues étaient « étroites et sales, les gens bruyants et criards », et l’on se butait « à chaque tournant [sur] des moines et des religieux ». Le château Saint-Louis, sa résidence officielle, le consterna. L’un après l’autre, les gouverneurs s’étaient transmis, à des prix exorbitants, leurs meubles dépenaillés, ce qui donnait « des appartements bigarrés dans lesquels chaque génération a[vait] payé pour les guenilles de la précédente et, se débarrassant du pire, a[vait] ajouté un peu de neuf pour assurer tant bien que mal son confort ». Contraint de débourser £5 000 avant même d’avoir touché un seul shilling de son salaire, Dalhousie se plaignit de ne pouvoir se payer « le genre de mobilier qui [seyait] à la résidence officielle du gouverneur général des dominions américains de Sa Majesté ».

Comme des élections générales étaient en cours et qu’il n’avait pas à convoquer le Parlement avant plusieurs mois, Dalhousie put tranquillement passer l’été à se familiariser avec le Bas-Canada, ses habitants et leurs affaires. Il s’offrirait ainsi chaque année l’agrément de longues excursions dans le Haut et le Bas-Canada et se réfugierait aussi souvent que possible à la maison du gouverneur à William Henry (Sorel), car il détesterait de plus en plus Québec. Dès le début, il tint à continuer de consacrer seulement trois jours par semaine à ses fonctions officielles, réservant les autres à ses occupations personnelles, à sa correspondance privée et à ses lectures. Malheureusement, le cottage de William Henry était si exigu qu’offrir à des amis un lit pour la nuit ou recevoir des invités à dîner était impossible. Pendant quelques années, Dalhousie tenta en vain de persuader les autorités britanniques de construire dans ce lieu stratégique une maison plus digne de son titre de commandant des troupes. Son échec montre bien que les Britanniques se souciaient comme d’une guigne de ce que le gouverneur ait ou non de quoi tenir son rang, « très mauvaise politique », maugréait-il, dans une province où « une bonne part des maux prov[enaient] du réel état de mépris dans lequel le représentant du roi [était] tenu, sans une maison où mener une existence convenable ni pouvoir de récompenser le mérite ou les contributions au bien public ».

Comme en Nouvelle-Écosse, Dalhousie se lança dans l’agriculture. En 1821, il acheta 50 acres adjacentes à la propriété de William Henry pour la somme de £400. Dès 1823, il avait 41 acres de trèfle, 200 moutons et 6 vaches ; de plus, il avait asséché 20 acres de marécages où il cultiva ensuite de l’avoine et de l’herbe. En 1821, il loua 50 acres à Wolfesfield, aux abords de Québec. La même année, il manifesta plus d’ambition en louant, des commissaires des biens des jésuites, un établissement de 250 acres à Beauport où il entendait « aménager pour les gouverneurs futurs une ferme qui servira[it] de dépendance au château, ce qui pourrait non seulement se révéler un exemple pour la population mais aussi être utile à la famille ». Cependant, une mauvaise administration et de « lourdes dépenses » le forcèrent à abandonner moins d’un an plus tard. Lui-même et sa femme commencèrent aussi un jardin botanique et échangeaient assidûment des plantes avec Dalhousie Castle.

Les Dalhousie parrainaient avec dynamisme des organismes sociaux et culturels qui pourraient éveiller au Canada le « progrès intellectuel » alors évident en Grande-Bretagne. Le gouverneur soutenait la Quebec Bible Society et la Société d’école anglaise et canadienne de Montréal [V. William Lunn*] et donnait des livres et de l’argent à des bibliothèques de village. Il remit des castors et des ours à une société zoologique et envoya même une collection d’oiseaux empaillés au musée du collège d’Édimbourg. Afin de préserver les volumineuses notes que les jésuites et d’autres communautés religieuses avaient amassées sur le passé des tribus indiennes et afin de stimuler la recherche, Dalhousie joua un rôle important en 1824 dans la fondation de la Société littéraire et historique de Québec. Puisqu’« en Angleterre, rêvait-il, ces sociétés favoris[aient] toutes les formes d’avancement, celui du loisir, de l’instruction, de la morale et de la religion, au Canada elles [allaient et même devraient] favoriser d’abord l’harmonie dans la vie privée ; l’usage des livres abattra[it] la tyrannie étriquée du clergé catholique, fera[it] éclore de nouvelles idées, de nouveaux sentiments mieux adaptés à l’état présent du monde civilisé ». Il versait £100 par an à la société car, « si on ne lui imprim[ait] pas un élan tout de suite, [...] elle risqu[ait] de se faner et de mourir, comme il arriv[ait] dans la province à presque toutes les plantes européennes ou étrangères ». La société fit venir de Londres des livres, des instruments et un cabinet de spécimens minéralogiques. Cependant, l’assistance aux réunions demeurait faible. « Nous progressons avec une misérable lenteur, se lamentait-il en 1827 ; le manque de talents, d’éducation et de sentiment libéral dont souffre cette terre catholique élève de tristes obstacles devant toute tentative comme celle-là. » La même année, lady Dalhousie présenta à la société un exposé sur la flore canadienne. Si elle montrait pour les sciences un intérêt exceptionnel chez une femme de son époque, elle jouait aussi avec enthousiasme le rôle plus conventionnel qui revenait à l’épouse d’un gouverneur, celui de marraine de la littérature et des arts. En 1824, l’écrivaine Julia Catherine Beckwith* lui avait dédié son roman St Ursula’s convent [...].

Pendant l’été de 1820, avant d’être absorbé par les affaires des colonies, Dalhousie avait entrepris, surtout à des fins militaires, une visite des établissements de l’est du Haut-Canada, de la vallée de l’Outaouais et du sud-ouest du Bas-Canada. L’année suivante, en compagnie de Woolford, il se rendit jusqu’au lac Supérieur. Il renonça à présenter ses lettres de créance de gouverneur du Haut-Canada au Conseil législatif afin de ne pas effaroucher le susceptible lieutenant-gouverneur, sir Peregrine Maitland*. Toutefois, il était convaincu que « le gouverneur en chef devait prendre une part active à l’administration des divers gouvernements confiés à ses soins » ; sans vouloir s’ingérer dans les pouvoirs locaux des lieutenants-gouverneurs, il pensait que ceux-ci devaient le tenir « au courant, par voie confidentielle, des mesures publiques et de la situation générale des provinces ».

Ces tournées d’inspection raffermirent en Dalhousie la conviction qu’il serait utile d’affecter des fonds coloniaux et britanniques à l’amélioration des communications par terre et par eau dans le Haut et le Bas-Canada : la défense militaire s’en trouverait renforcée et de nouvelles régions s’ouvriraient au peuplement. Il fallait en particulier de grandes routes pour relier Montréal à Bytown (Ottawa) et aux Cantons-de-l’Est ainsi que des chemins vicinaux pour desservir les établissements qui se multipliaient dans les districts de l’Ouest. Comme d’autres militaires, Dalhousie favorisait ardemment la canalisation, surtout dans le bassin des rivières des Outaouais et Rideau. On parlait abondamment de la possibilité que l’Assemblée bas-canadienne participe aux frais et, dès 1825, après qu’une commission militaire dirigée par sir James Carmichael Smyth eut présenté un long rapport sur les besoins du Canada en matière de défense et les crédits qu’il faudrait y affecter, on chargea le Board of Ordnance de creuser et de financer le canal Rideau. En 1826 et 1827, Dalhousie visita le chantier grandiose du colonel John By, qui allait coûter bien cher au contribuable britannique. Il fut également impressionné par l’importance d’un autre ouvrage public, le canal de Lachine [V. John Richardson*], qu’il alla voir en mai 1826 et auquel, à son grand regret, les Canadiens ne s’intéressaient pas plus qu’à la splendide église Notre-Dame, alors en construction à Montréal [V. James O’Donnell*]. « Il faut conclure, disait-il, qu’il n’existe [ici] aucune disposition naturelle pour les travaux d’utilité générale – [les Canadiens] resteront jusqu’à la fin des temps indolents, satisfaits, dépourvus d’ambition et d’initiative. »

Dalhousie fit valoir aux autorités britanniques que l’aménagement de canaux offrirait en outre des emplois immédiats aux immigrants qui arrivaient en masse à Québec mais dont les deux tiers se laissaient attirer par les États-Unis au lieu de grossir les rangs épars de la population canadienne. La manière dont les Américains s’installaient dans les régions qui entouraient la frontière ouest l’inquiétait profondément ; « [ils se placent], notait-il, entre nous et les dernières tribus de guerriers de cette région pour mettre fin à notre alliance avec elles et [les soustraire] à notre influence ». Il fallait encourager des gens loyaux à s’établir dans l’Ouest et s’atteler à former parmi eux une milice efficace qui ferait preuve de bonne volonté. Par ailleurs, concluait-il, l’afflux d’immigrants britanniques permettait d’interrompre l’établissement de colonies militaires, qui était coûteux.

Au début des années 1820, quelque 10 000 immigrants débarquaient chaque année à Québec. Parmi eux, un bon nombre d’Irlandais pauvres mettaient la générosité et la bonne volonté des colons à rude épreuve, car le Parlement provincial et le gouvernement britannique n’étaient guère disposés à dépenser des fonds publics pour des miséreux dont la venue n’était pas souhaitée. Inquiet de l’invasion de ces Irlandais nécessiteux et turbulents, Dalhousie s’opposait fermement aux programmes d’assistance à l’émigration sanctionnés par le ministère des Colonies en 1823 et 1825. Les nouveaux colons amenés par Peter Robinson, alléguait-il, n’étaient pas assez encadrés et occupaient, dans le Haut-Canada, des terres trop isolées et trop proches de la frontière américaine. Selon lui, les fonds publics devaient servir non pas à faire venir des Britanniques, qui de toute façon payaient leur traversée par milliers, mais à préparer des lieux de peuplement. De plus en plus, il en vint à considérer la baie des Chaleurs, en Gaspésie, comme un meilleur endroit pour les immigrants, car elle était accessible par bateau, facile à approvisionner et n’offrait aucune distraction aux individus, qui n’avaient donc d’autre alternative que de travailler ou de mourir de faim.

Comme l’immigration avait pris beaucoup d’importance, les problèmes de l’administration foncière au Canada retenaient encore plus l’attention de Dalhousie qu’ils ne l’avaient fait en Nouvelle-Écosse. Des milliers d’acres détenues par des propriétaires absentéistes demeuraient à l’état sauvage ; la couronne devait donc avoir le pouvoir de confisquer toutes les concessions en friche. En outre, le peuplement et les communications étaient ralentis par une pratique « contraire tout à la fois à la sagesse, à la saine politique et au bien », celle qui consistait à réserver à la couronne et au clergé, à titre de dotations, des terres qui jusque-là n’avaient rapporté que des revenus négligeables. Personne n’allait accepter de louer une terre de ce genre s’il pouvait avoir un petit lot bien à lui. Quant au monopole anglican sur les réserves du clergé, donc au fait que l’Église établie d’Écosse n’avait droit à aucune part des dotations foncières, il ulcérait le gouverneur presbytérien. Cette iniquité qui, soutenait-il, avait « engendré beaucoup de rancunes et de sentiments peu charitables » entre les clergés anglican et presbytérien devait « être éliminée, sans quoi l’irritation [qu’elle provoquait] se transformera[it] en un mécontentement profond puis [...] finalement en déloyauté ». Tant dans le cas des réserves de la couronne que du clergé, Dalhousie favorisait le remplacement des concessions et des baux par des ventes. Nullement opposé aux grands propriétaires, il rejetait néanmoins le recours à des compagnies de colonisation monopoleuses et spéculatrices, telles la Canada Company [V. John Galt] et la Lower Canada Land Company [V. William Bowman Felton], pour accélérer le peuplement, qui était nécessairement un lent processus.

Dalhousie souhaitait non seulement resserrer l’autorité du gouvernement sur l’octroi des terres mais renforcer l’appareil qui assurait la loi et l’ordre. « Le pays est devenu trop grand pour les vieux règlements établis, disait-il à Kempt. Il faut maintenant dans chaque comté ce qui, il y a 50 ans, suffisait à toute la province. Le tribunal itinérant, le jury d’accusation et les Sessions t. [la Cour des sessions trimestrielles] ne suffisent plus dans les districts ; étant donné l’immensité de la population, il faut plus de magistrats, plus de prisons et une plus fréquente application des lois qu’il n’en fallait autrefois. »

Soucieux de faire régner le calme en politique, Dalhousie était décidé à se tenir au-dessus des querelles partisanes qui avaient agité le Bas-Canada peu de temps auparavant. « On dirait [...] que la popularité a été l’unique objectif de [...] tous les gouverneurs du Canada, et deux chemins seulement y menaient : [appuyer] les Français ou les Anglais, les catholiques ou les protestants, [...] et immanquablement, chaque chef a emprunté la voie contraire à [...] celle de son prédécesseur – il n’y a ni constance ni prudence [...] et le mal a été d’autant plus grand que les gouverneurs ont changé souvent. » Dalhousie voulait n’être redevable à personne, éviter les « manœuvres politiques qui [... avaient] conduit le gouvernement lui-même à être la cause des problèmes ». Ce n’était pas facile dans une collectivité divisée où les hommes politiques poursuivaient les faveurs avec un « appétit vorace ». Comme il ne connaissait personne, il décida de se « méfier surtout des conseils de ceux qui dét[enaient] le pouvoir, parce qu’ils risqu[aient] davantage d’avoir eu l’esprit faussé ou influencé par des discussions antérieures ». Pour les avis politiques et l’assistance administrative, il devait donc se rabattre sur des fonctionnaires ordinaires qui avaient peu de poids. Ainsi son secrétaire civil à compter de 1822, Andrew William Cochran, était un assistant et un confident aux qualités admirables mais, hors du cercle des fonctionnaires britanniques, il avait peu de relations politiques utiles. Par choix et en raison des circonstances, Dalhousie comptait sur ses propres ressources ; il était donc vulnérable et bien seul.

Au début, Dalhousie entendait aussi prêter aux Canadiens toute l’attention qu’ils méritaient. Il se sentait spontanément attiré par les simples habitants, qu’il trouvait soumis et respectueux, pleins de « civilité et même de raffinement ». Peut-être lui rappelaient-ils les petits fermiers des Highlands, tout comme les seigneurs canadiens ressemblaient assez aux lairds d’Écosse. « S’il y a de l’agitation et du mécontentement [parmi les Canadiens], notait-il, c’est du côté des avocats, qui de tout temps se sont plu en eaux troubles. » Néanmoins, « la justice exige[ait] que le chemin des honneurs soit ouvert, dans toutes les branches de la fonction publique, aux fils des vieilles familles canadiennes ». Au bout du compte, on gagnerait la loyauté de tous en désavouant toute distinction, religieuse ou ethnique, et en ne distribuant les charges ou les faveurs qu’« en fonction de la compétence ou de la conduite ». Conséquemment, en décembre 1820, Dalhousie nomma le président de l’Assemblée, Louis-Joseph Papineau*, au Conseil exécutif. Non pas parce qu’il l’aimait ; au contraire, c’était d’après lui un « avocat malcommode et maussade, quoique habile, [qui] connai[ssait] à peine les règles de la bonne société ». Il n’entendait pas non plus, par son geste, « flatter ou cajoler » l’Assemblée. Il voulait plutôt que la population « sache qu[‘il] jou[ait] franc jeu avec elle, sans recourir à l’intrigue ni à l’artifice », et espérait ainsi « pousser chaque homme public à remplir au mieux les devoirs de sa charge et favoriser l’unanimité et la coopération cordiale dans les affaires publiques ».

Cependant, les relations de Dalhousie avec les députés canadiens mirent à rude épreuve ses réserves d’impartialité et de patience. En dépit de ses bonnes intentions, il présentait toujours deux faiblesses funestes : un tempérament irascible et un conservatisme politique mal adapté à la conjoncture. En lisant l’histoire de la Grande-Bretagne, il s’identifiait aux premiers rois de la maison des Stuart et se voyait, comme eux, défendre la prérogative de la couronne contre les empiétements du Parlement. Mais leur situation avait beau lui paraître « particulièrement semblable » à la sienne, elle ne lui fournissait pas un exemple adéquat pour faire face à une Assemblée coloniale résolue à élargir ses pouvoirs aux dépens du gouverneur et des deux conseils. Dalhousie considérait la prérogative royale comme une forme constructive d’autorité et estimait que « le représentant du roi dans les provinces [du Canada devait] servir de guide et de timonier chaque fois qu’une mesure publique touch[ait] l’ensemble des intérêts de la population ». L’Assemblée avait un rôle tout à fait subalterne, et son devoir était d’obéir aux directives de l’exécutif. Dans les inévitables querelles qui l’opposèrent à la chambre, Dalhousie se montra extrêmement jaloux de son autorité et de sa dignité de représentant du souverain et, d’instinct, fit de toute attaque ou de tout revers une affaire personnelle. Faute de souplesse et de sens des proportions, il laissa de banals incidents se transformer en de grands débats constitutionnels. À l’instar de tous les administrateurs impériaux qui se voyaient assiégés, à l’époque comme par la suite, il attribuait les initiatives, les critiques et la résistance de l’Assemblée à une poignée d’agitateurs ambitieux qui ne représentaient pas la portion éclairée de la collectivité mais exerçaient une séduction temporaire sur une masse ignorante.

À la fois sujets satisfaits et politicailleurs turbulents : tels étaient les Canadiens aux yeux de Dalhousie, qui avait une perception tout aussi ambivalente de l’Église catholique du Bas-Canada. La religion catholique, reconnaissait-il, pouvait être une force conservatrice et stabilisatrice ; elle pouvait protéger la colonie contre l’influence américaine, sinon inculquer la loyauté envers l’Empire. Selon lui, on ne devait rien ménager pour encourager l’Église à promouvoir l’instruction de la jeunesse canadienne. Aussi fit-il valoir au secrétaire d’État aux Colonies, fermement mais en vain, qu’il serait avantageux de retirer la surintendance des écoles catholiques à l’Institution royale pour l’avancement des sciences, dominée par les protestants, et de la confier à un organisme parallèle mais catholique [V. Joseph Langley Mills*]. En se faisant le champion des activités éducatives et pastorales du clergé catholique, Dalhousie aurait pu s’assurer de sa part un appui inestimable. Mais il était trop presbytérien pour ne pas se méfier du catholicisme et soupçonner invariablement le prêtre qui se mêlait de politique.

La méfiance de Dalhousie s’étendait à l’influent archevêque de Québec, Joseph-Octave Plessis*, qui aurait pu lui apporter l’appui des Canadiens modérés s’il avait cherché un terrain d’entente avec lui, comme l’avaient fait avec profit sir George Prevost* et Sherbrooke. Dès l’abord, Dalhousie accusa plutôt ses deux prédécesseurs d’avoir trop penché en faveur des Canadiens et de ne pas avoir évité le piège de la partialité. En outre, même s’il partageait avec Plessis certaines vues sur l’éducation, il s’inquiétait du prestige et de l’autorité de l’archevêque et craignait que le clergé ne finisse par avoir une telle emprise sur la province qu’il en devienne outrecuidant. D’abord source de perplexité pour le gouverneur, l’indépendance de Plessis au Conseil législatif l’irrita ensuite, probablement parce qu’il subissait l’influence de Herman Witsius Ryland et de Andrew William Cochran. De plus en plus, il voyait en Plessis l’un des inspirateurs du parti canadien, un fauteur de discorde entre les deux chambres, un « sombre hypocrite et [un] intrigant ». Selon lui, l’empire de l’archevêque sur les députés, curés et simples électeurs catholiques était si puissant qu’il faussait la liberté des débats et le jeu de la constitution. Le gouverneur ne voyait pas d’un meilleur œil les « pernicieuses machinations » de Jean-Jacques Lartigue, cousin de Papineau et de son allié Denis-Benjamin Viger* et suffragant montréalais de l’évêque de Québec. Aussi en vint-il à souligner à Bathurst l’urgence de réaffirmer l’autorité de la couronne sur l’Église et même à prétendre que les prêtres les plus respectables – soit particulièrement, d’après lui, François-Xavier Pigeon et Augustin Chaboillez* – voulaient que le gouvernement le fasse.

Au fil des ans, à mesure que ses relations avec l’Assemblée et le clergé se détérioraient, Dalhousie perdit sa sympathie première pour les catholiques canadiens. Bientôt, sa défiance devint telle que son intention de les accueillir dans l’administration coloniale s’en trouva affaiblie. Il prétendait que la rareté des candidats qui satisfaisaient à ses critères élevés de compétence et de conduite annihilait ses efforts dans ce sens.

Pourtant, Dalhousie avait abordé avec un optimisme considérable sa première session législative, celle de 1820–1821. Les seuls litiges surgiraient probablement autour des finances et devraient être promptement réglés si le gouvernement britannique affirmait sans équivoque que l’affectation des revenus de la couronne et celle des revenus provinciaux devaient demeurer distinctes. Depuis des années, l’Assemblée tentait de grignoter le pouvoir de l’exécutif, notamment en alléguant son droit au contrôle de l’affectation de tous les revenus. En 1818, Sherbrooke avait aménagé un compromis qui aurait pu se révéler un précédent fructueux. Cependant, son successeur, Richmond, avait adopté la ligne dure, recommandant à Bathurst qu’aucun projet de loi sur la liste civile ne soit approuvé à moins qu’on n’ait voté inconditionnellement et de manière permanente le total des crédits demandés. Accepté, cet avis avait été transmis à Dalhousie pour sa gouverne.

Cette stratégie musclée convenait aux inclinations personnelles de Dalhousie. En 1820–1821, il demanda au Parlement provincial d’adopter un projet de loi de finances pour toute la durée de la vie du roi, ce qui provoqua tout de suite un affrontement entre les deux chambres. Sur l’initiative de John Richardson, leader des marchands de Montréal, le Conseil législatif, non content de rejeter le projet de loi, adopta une série de résolutions qui s’intégrèrent au règlement de la Chambre haute. Au mépris de l’usage constitutionnel anglais, et en des termes insultants pour la Chambre basse, le conseil affirma son autorité sur la forme et la procédure d’adoption des futurs projets de loi de finances. Heureux que le conseil montre tant d’audace devant l’Assemblée, qui avait tenté « par un coup de force de dicter toutes les mesures gouvernementales », Dalhousie se rangea d’instinct à ses côtés. À la session de 1821–1822, il redemanda une liste civile permanente, mais l’Assemblée refusa d’adopter un quelconque projet de loi portant affectation de crédits avant que le conseil n’ait retiré ses résolutions offensantes. Lorsque celui-ci parut près de céder, le gouverneur, flairant l’influence de Plessis, alla jusqu’à menacer de destitution ceux qui, parmi les conseillers hésitants, étaient des employés de l’État – tactique qui eut « les meilleurs effets », nota-t-il avec complaisance. Dalhousie était convaincu que les députés avaient beaucoup trop présumé de leur puissance et qu’ils seraient désavoués par leurs électeurs dès que l’impasse financière aurait entraîné une suspension des services provinciaux. De même, les autorités londoniennes les verraient enfin sous leur vrai jour. Il décida donc de s’accorder un moment de répit et d’attendre le salut d’un projet de loi qui, présenté au Parlement impérial en juin 1822, proposait de réunir le Bas et le Haut-Canada, ce qui aurait pour effet de créer un Parlement à majorité anglophone. Même s’il n’avait pas été consulté au sujet de ce projet de loi, il déclara à Cochran : « Je me réjouis de cette percée de soleil sur la province », car il considérait n’avoir sous la constitution de l’époque qu’un « pouvoir de façade ». Mais ses espoirs furent déçus : critiqué à la chambre des Communes, le projet fut retiré par les ministres en juillet.

En 1823, tandis que Papineau était à Londres pour contrer le retour en chambre du projet de loi sur l’union et qu’un homme plus conciliant, Joseph-Rémi Vallières de Saint-Réal, occupait la présidence de l’Assemblée, les leaders canadiens acceptèrent un accommodement partiel et temporaire quant aux finances. L’Assemblée se montra même si généreuse dans l’affectation de crédits à des fins provinciales qu’elle coupa l’herbe sous le pied à Dalhousie qui, en réaction à l’impasse financière des années précédentes, tentait de sabrer dans les dépenses gouvernementales. En se montrant économe, pensait-il, il aurait assez d’argent pour toutes les dépenses raisonnables, une fois qu’on aurait tiré au clair les comptes publics. Toutefois, il n’avait pas prévu qu’on se rendrait compte cette année-là que le receveur général John Caldwell avait détourné quelque £96 000 des fonds publics pour faire de la spéculation commerciale. Ce geste, qui éclaboussa le gouvernement de Dalhousie, se mérita un blâme des plus sévères de la part de ce dernier. Au cours de la session de 1824, l’Assemblée enquêta sur l’affaire Caldwell et fit appel à « la justice et [à] la générosité des Britanniques afin qu’ils payent le déficit à la province » ; après tout, Caldwell était un fonctionnaire impérial, et c’était à eux qu’incombait la vérification de ses comptes. En même temps, elle produisit de nouveau une liste d’injustices commises par la métropole, annonçant ainsi qu’elle n’avait plus l’humeur à la conciliation. Elle refusa de voter les crédits, et Dalhousie déplora l’évidente faiblesse du gouvernement en chambre : aucun puissant porte-parole n’était là pour présenter ou défendre le point de vue de l’exécutif ni servir d’intermédiaire entre celui-ci et l’Assemblée. En mettant fin à une session stérile, le gouverneur espérait à part lui qu’aux élections suivantes « les citoyens sensés du pays » rejetteraient les chamailleurs qui leur servaient de représentants et qu’à ce moment le Parlement impérial interviendrait en présentant un nouveau projet d’union.

Dalhousie se mit alors à songer à un prochain congé en Grande-Bretagne et à des projets plus lointains. Périodiquement, depuis ses premiers jours à Québec, il souffrait du mal du pays et pestait contre sa situation. À la fin de 1821, il avait fait ces réflexions : « Je suis irrité et fatigué [...] de gaspiller ma vie ici. Je quitterais volontiers mon commandement [...] si je pouvais le faire dans l’honneur. Mais puis-je abandonner ma tâche simplement parce qu’elle est assommante, malaisée et difficile ? [...] Puis-je m’avouer incapable d’occuper un poste où je me suis en quelque sorte imposé ? Puis-je confesser à mon souverain que mon manque de fermeté et de persévérance me rend indigne de sa considération ? Quoi qu’il advienne, je ne puis m’infliger pareille disgrâce. »

Néanmoins, Dalhousie ne pouvait faire totalement abstraction de ses difficultés personnelles. En 1821, il s’alarma de plus en plus des écarts que présentaient les états financiers de ses représentants en Écosse. Pendant l’été de 1822, il souffrit de nouveau d’une inflammation oculaire et d’une vue embrouillée, malaises qui s’étaient manifestés pour la première fois à la veille de son départ de la Nouvelle-Écosse. La plupart du temps, il restait confiné dans une chambre obscure à William Henry ; ni les ventouses ni les médicaments ne le soulageaient beaucoup. En 1823, on l’autorisa à partir en congé, mais il différa son départ pour faire une visite officielle en Nouvelle-Écosse pendant l’été. Ses vieux amis et admirateurs le reçurent royalement, et il eut droit à des adresses flatteuses. Heureux comme un poisson dans l’eau, il vit dans ces égards « la récompense de [ses] services ». Enfin, le 6 juin 1824, il quitta Québec pour la Grande-Bretagne, sans savoir s’il reviendrait.

Ce voyage, Dalhousie l’entreprenait en partie pour éclairer le ministère des Colonies sur les problèmes bas-canadiens ; les résultats en furent désastreux pour lui, tant du point de vue personnel que politique. Sagace, courtois et conciliant, Bathurst trouvait que le gouverneur n’était qu’un Écossais austère, terne et ennuyant, et il prit bien garde de l’inviter à sa maison de campagne du Gloucestershire, où il recevait pourtant nombre de visiteurs du Canada. Dalhousie lui-même observa : « Je n’abordais jamais les affaires canadiennes avec lui sans qu’il ne m’écoute avec impatience, et il paraissait soulagé quand je me levais pour prendre congé. » Le gouverneur se retira dans son château en Écosse pour régler des affaires personnelles et laissa Cochran discuter de questions officielles à Londres en son nom.

À son départ de Québec, Dalhousie avait confié la suppléance au lieutenant-gouverneur sir Francis Nathaniel Burton* en l’avisant de retarder jusqu’à son retour la convocation de la nouvelle chambre, qui devait être élue à l’été de 1824, à moins qu’il ne se sente prêt à la désagréable tâche de refuser la nomination de Papineau à la présidence. Cependant, conseillé par Herman Witsius Ryland, qui avait une dent contre Dalhousie, Burton entrevit bientôt de quelle gloire il pourrait se couvrir s’il dénouait la crise financière par une initiative audacieuse. Il convoqua le Parlement en 1825, persuada l’Assemblée de voter les crédits pour un an sans soulever d’inopportunes questions de principe puis, surtout par l’intermédiaire de Ryland et de Plessis, obtint que le Conseil législatif approuve le projet de loi. Quand Dalhousie eut vent de ce coup d’éclat, triomphalement rapporté au ministère des Colonies, il protesta que l’arrangement concédait implicitement à l’Assemblée le droit d’affecter les revenus de la couronne. Ses arguments convainquirent Bathurst qui, en juin 1825, blâma Burton d’avoir désobéi aux instructions de 1820–1821 sur les questions financières. Dalhousie revint à Québec à la mi-septembre, confiant d’avoir l’appui de ses supérieurs dans le différend financier, et Burton s’embarqua pour Londres.

La sérénité de Dalhousie fut vite ébranlée. Burton se défendit de manière convaincante et fut lavé de tout blâme par le secrétaire d’État aux Colonies ; triomphant, il informa Papineau et ses amis que Dalhousie avait perdu la confiance de ses supérieurs. Furieux, celui-ci compara à « l’excuse d’un écolier » la prétention de Burton selon laquelle il ignorait les instructions de 1820–1821 parce que Dalhousie les avait emportées en Grande-Bretagne. « Il en connaissait fort bien la substance quand il était au Canada, répliqua-t-il, pour avoir entretenu pendant deux ans avec moi des rapports confidentiels et des relations d’amitié. » En retirant sa réprimande, se plaignait-il, Bathurst le dépouillait de l’autorité nécessaire au rejet d’un projet de loi semblable à celui de Burton.

Profitant, en 1826, d’une visite personnelle du juge en chef Jonathan Sewell en Angleterre, Dalhousie tenta de convaincre le secrétaire d’État aux Colonies d’intervenir fermement et de faire modifier la constitution provinciale par le Parlement britannique pour sauver l’autorité du représentant de la couronne dans la colonie. Cependant, Sewell affaiblit la position de Dalhousie en soutenant, à l’instar de Burton, que le projet de loi de finances de 1825 n’avait pas remis en cause le droit de l’exécutif de disposer des revenus placés sous son autorité. Les légistes de la couronne parvinrent à la même conclusion, après quoi le sous-secrétaire, Robert John Wilmot-Horton, tança vertement Dalhousie et Cochran pour avoir trompé le ministère des Colonies sur la question.

Abattu, Dalhousie envisagea encore une fois de quitter ce poste ingrat. Cependant, tant qu’il demeurait à la barre, il était résolu à défendre les prérogatives de la couronne contre les prétentions de l’Assemblée. Papineau et Viger se montraient courtois, mais ils ne tardèrent pas à réclamer de nouveau le contrôle des finances, car ils ne voulaient pas abandonner leurs gains de 1825. Comme Dalhousie refusait de sanctionner un autre projet de loi du même genre, aucun crédit ne fut voté. Les députés avaient eu beau être « tout miel et tout sucre », écrivit-il, ils ne s’en étaient pas moins révélés de « détestables dissimulateurs ». « Ils sont vraiment français jusqu’à la moelle – il n’y a pas en eux la moindre parcelle de l’honneur britannique ou d’intégrité, ni de loyauté ou de patriotisme – une demi-douzaine d’avocats démocrates mènent par le bout du nez un groupe de fous ignorants qui, ne sachant pas lire, ne peuvent connaître ni la constitution ni les lois de leur pays – ils sont [...] indignes des hautes responsabilités qui leur ont été dévolues. » Une seule conclusion était possible : « Le pays n’est pas assez évolué pour une institution comme le Parlement » ; la lui avoir accordée était aussi « insensé que de faire jouer un singe ou un ours avec un voile de dentelle ».

Le gouverneur songea à dissoudre le Parlement, mais Sewell et John Richardson, qui avec l’homme d’affaires Mathew Bell étaient ses principaux conseillers, l’en dissuadèrent ; des élections, loin de régler les choses, les envenimeraient. Comme les revenus de la couronne ne suffisaient pas aux dépenses essentielles, Dalhousie se tourna vers Londres. Tout en n’étant pas prêt à restructurer la constitution, le ministère des Colonies l’approuvait de vouloir préserver l’indépendance financière du pouvoir exécutif en n’acceptant d’abandonner les revenus de la couronne qu’en échange d’une liste civile permanente. En conséquence, on autorisa Dalhousie à déposer dans la caisse militaire, ostensiblement à titre de garantie, les recettes excédentaires perçues en vertu des lois provinciales, dont le Parlement avait le droit de disposer, et à y faire des « emprunts » pour acquitter les dépenses gouvernementales.

À l’été de 1826, Dalhousie connut un intermède heureux en Nouvelle-Écosse, où « le champagne coula à flots » au milieu d’« un débordement continuel de plaisirs ». Après une tournée plus calme au Nouveau-Brunswick et en Gaspésie, il alla inspecter le chantier du canal Rideau, dans le Haut-Canada. Le Parlement bas-canadien se réunit en janvier 1827 ; quand, en mars, l’Assemblée rejeta sa demande de crédits, il prorogea abruptement la session, puis dissolut le Parlement, « surtout afin de refuser la présidence à Papineau dans l’avenir ». Peut-être espérait-il aussi que le nombre de députés britanniques ou modérés élus serait suffisant pour offrir en chambre un leadership à ceux qui souhaitaient changer de camp. Pour réaliser cet objectif, il fallait que les représentants du gouvernement interviennent davantage qu’ils ne l’avaient fait jusqu’alors. Tout en professant une tranquille impartialité dans ses dépêches à Londres, Dalhousie se lança avec vigueur dans la campagne, bien résolu à être sans pitié. À titre de résident de William Henry, il en appuya ouvertement le candidat, le procureur général James Stuart*, et blâma le curé de l’endroit, Jean-Baptiste Kelly*, d’encourager l’hostilité envers le gouvernement. À Montréal et à Québec, des opposants furent radiés de la liste des magistrats. Dans toute la province, une purge frappa des officiers de milice, accusés d’avoir refusé de participer aux rassemblements d’été, d’avoir manifesté un esprit de désobéissance (en pensant que, parce que l’Assemblée n’avait pas renouvelé la loi existante sur la milice, aucune n’était en vigueur) ou d’avoir critiqué le gouvernement à des réunions publiques [V. Nicolas-Eustache Lambert* Dumont]. Un recours aussi flagrant à l’intimidation exacerba l’hostilité des paroisses rurales, et par ce chef-d’œuvre de mauvais calcul Dalhousie se trouva devant une Assemblée où il comptait encore moins d’alliés qu’auparavant. Il mit encore une fois la faute sur une poignée d’agitateurs menés par Papineau et soutenus par quelques journaux de Québec et de Montréal. Derrière eux, il y avait « les sombres complots du clergé [...], disait-il, et c’[était] principalement à eux que tout le monde attribuait l’étonnante influence de la faction de Papineau, qui autrement ne s’expliqu[ait] pas ». Ainsi, se dissimulant la vérité ou espérant la rendre conforme à ses vœux, Dalhousie pouvait rassurer les fonctionnaires londoniens : « vraiment, le calme, le contentement, le bonheur des habitants du Bas-Canada sont quasi proverbiaux [...] absolument rien n’autorise à [...] parler de « troubles au Canada ».

Rassuré à la pensée qu’il avait toujours suivi fidèlement les instructions que lui avait données Bathurst en 1820–1821, Dalhousie estimait qu’à partir des résultats de la session suivante « le ministre [allait] devoir juger s’il nommera[it] ou non quelqu’un de nouveau ». En fait, il avait déjà demandé officieusement un congé pour aller régler des affaires personnelles en Grande-Bretagne, car il avait eu en octobre 1826 la confirmation d’un malheur qu’il pressentait : la faillite d’un agent de son régiment en qui il avait placé sa confiance. Ses pertes, selon ses estimations, se situaient entre £10 000 et £12 000. Six mois plus tard, il apprit qu’il obtiendrait peut-être un commandement militaire en Inde. Pendant qu’il attendait son congé, le ministère des Colonies l’autorisa à demander une liste civile permanente d’un montant restreint. Il craignait qu’une réduction ne nuise par trop aux activités gouvernementales, et il confia à Kempt qu’il se serait objecté à une pareille reddition s’il n’avait pas été « prêt à [s]’envoler vers d’autres cieux ». « Je ne resterais pas pour céder un seul pouce du terrain que j’ai défendu jusqu’à maintenant. »

Réunie en novembre 1827, l’Assemblée élut, évidemment, Papineau à la présidence. Dans un geste d’éclat, Dalhousie, pour affirmer une dernière fois la prérogative royale, la somma de faire un autre choix. Après que la chambre eut confirmé Papineau dans sa fonction et adopté des propositions à l’effet que « l’approbation du roi n’[était] que simple formalité, mots creux, et tout à fait accessoire », Dalhousie prorogea la session. Il n’avait pu accepter comme président, expliqua-t-il au secrétaire d’État aux Colonies, quelqu’un qui était si intimement lié à des journaux séditieux, occupait « son fauteuil avec une absence aussi notoire de justice, d’impartialité et de modération et annon[çait] publiquement son intention d’user de toute son influence pour contrer les désirs d’accommodement du gouvernement ». Pour Dalhousie, Papineau était l’incarnation même des forces diaboliques contre lesquelles il avait à lutter. Les finances n’étaient plus, si jamais elles l’avaient été, le réel objet de litige. « Son but est le pouvoir – son aiguillon, une animosité personnelle et vindicative envers moi, « le gouverneur » – [c’est un homme] arrogant, têtu, obstiné. » Dalhousie espérait qu’on suspendrait la constitution de 1791 puisque, « au lieu de nouer entre les sujets canadiens et britanniques une amitié mutuelle et une communauté d’habitudes sociales, au lieu de les unir dans l’admiration des principes de la constitution qui leur a[vait] été donnée – [elle] a[vait] eu exactement l’effet contraire ; [...] le Canadien détest[ait] son voisin britannique comme le Britannique détest[ait] le Français : ils [avaient] ça dans le sang ». « Les Canadiens, ajoutait-il, ont réussi à obtenir la majorité des voix à la chambre des Communes de la province – jaloux, haineux de voir que [leur] voisin britannique est plus instruit et plus industrieux, [ils] en [sont] venus à croire que perdre cette majorité signifierait perdre aussi la liberté, les lois, la religion, la propriété et la langue, tout ce qui est précieux sur terre. » L’autre grande source des maux de la province, maintenait Dalhousie, était l’indifférence, la négligence persistante du ministère des Colonies. « Une plus grande confiance dans le gouverneur de la province aurait immédiatement un effet pacificateur, unificateur, et mettrait fin à toutes les manœuvres de quelques démagogues séditieux », pensait-il.

En rejetant Papineau, Dalhousie sema la consternation à Londres, où la confiance ministérielle lui était de moins en moins acquise. Le nouveau secrétaire d’État aux Colonies, William Huskisson, conclut que la situation ne se réglerait probablement pas tant que Dalhousie resterait dans la province. Peut-être grâce à son protecteur écossais, lord Melville, premier lord de l’Amirauté et ancien président de l’India Board of Control, Dalhousie fut nommé commandant en chef de l’armée de l’Inde. On repoussa cependant sa demande de congé et on l’invita au début de 1828 à partir pour l’Inde le plus tôt possible, sans s’attarder en Grande-Bretagne pour expliquer sa conduite. Jamais il n’avait ambitionné plus haute distinction ; ce commandement était, à ses yeux, « la plus haute marque d’approbation que le roi pouvait donner à [sa] conduite [dans la colonie] ». Toutefois, comme son gouvernement pouvait être critiqué, il voulait une déclaration d’appui non équivoque de la part du secrétaire d’État aux Colonies. D’ailleurs, les chefs du parti patriote ne chômaient pas : ils multipliaient adresses et pétitions de griefs, en recourant, accusait Dalhousie, au secret, à l’intrigue et à l’intimidation pour recueillir des signatures ou convaincre de naïfs habitants canadiens d’apposer une croix sur des rouleaux de parchemin vierges. Pour s’assurer que Londres entendrait son point de vue, il l’exposa à des connaissances et à des parents écossais et envoya l’avocat montréalais Samuel Gale* porter des adresses composées par des citoyens « loyaux, respectables et bien informés », venant surtout des Cantons-de-l’Est, dont celui-ci représentait aussi les intérêts. Gale n’avait pas de relations en Angleterre et ne connaissait pas bien le pays, admettait Dalhousie, mais « il ne [pouvait] manquer d’être bien reçu, car c’[était] un parfait gentleman ».

Loin de craindre qu’un examen des questions bas-canadiennes par les ministres et le Parlement ne lui nuise, Dalhousie y voyait le prélude à une législation correctrice. Au début, les lettres personnelles qu’il reçut de Grande-Bretagne suggérèrent d’ailleurs que dans l’ensemble on approuvait sa conduite. En mai 1828, Huskisson défendit son gouvernement aux Communes et préconisa de modifier l’Acte constitutionnel de 1791. De mai à juillet, un comité spécial entendit les parties intéressées [V. Denis-Benjamin Viger]. Par la suite cependant, l’absentéisme des députés gouvernementaux permit à l’opposition d’adopter le rapport du comité, qui était attentif aux doléances de l’Assemblée et critique envers Dalhousie. Le rapport avait changé par suite de l’arrivée à Londres, après la clôture des audiences du comité, d’une pétition de 87 000 signatures contre la purge faite par Dalhousie dans la milice et la magistrature. Les allégations avaient été ajoutées en annexe au rapport, sans commentaire, mais Huskisson lui-même blâma l’action de Dalhousie.

Juste avant de quitter la colonie, Dalhousie présida la cérémonie au cours de laquelle on coiffa un monument à la mémoire de James Wolfe* et de Louis-Joseph de Montcalm* de son pyramidion. Placé bien en évidence non loin du château Saint-Louis, en un point qui dominait le fleuve, cet obélisque que Dalhousie considérait comme le « monument de Wolfe » était une idée à lui et avait été achevé grâce à ses propres dons, car les Canadiens n’y portaient guère d’intérêt. Pour Dalhousie, il était clair que la cérémonie avait une importance toute particulière, comme celle qui avait entouré la pose de la pierre angulaire du Dalhousie College à son départ de la Nouvelle-Écosse. « J’ai, notait-il, la vanité de croire qu’en un sens c’est un monument en mon propre honneur, en cette dernière heure où je dirige le gouvernement du pays. » Le lendemain, 9 septembre 1828, son successeur Kempt prêta le serment d’office et lui-même partit, entouré de « toute la pompe, [de] tout l’apparat, [de] tout le faste qui [lui] étaient dus à titre de représentant du souverain ».

En Angleterre, Dalhousie lut avec un « ébahissement profond » les témoignages et le rapport du comité spécial et s’offusqua surtout des paragraphes de conclusion, qui le condamnaient unilatéralement. Pire encore, il se buta à un manque évident de sympathie de la part du nouveau secrétaire d’État aux Colonies, sir George Murray, officier qui avait servi comme lui sous Wellington et dont il aurait attendu meilleur accueil. Murray ne lui laissa aucun espoir de bénéficier d’une enquête officielle ni d’une défense publique et le pressa plutôt de conserver un silence plein de dignité. En privé (mais non officiellement), il accepta cependant que Dalhousie fasse imprimer et circuler parmi des amis ses commentaires sur les pétitions et témoignages présentés au comité. Dalhousie se contenta donc d’en envoyer des exemplaires à Cochran pour qu’il les distribue à ses proches dans le Bas-Canada. Comme Murray se montrait « froid et insensible », il n’était pas question d’en appeler à Wellington, alors premier ministre. « Autant m’adresser à un mur de pierre », pensait Dalhousie, puisque Wellington serait mille fois plus glacial et indifférent devant quelqu’un qui n’avait pas le « tempérament d’un courtisan ». Dalhousie partit donc pour l’Inde en juillet 1829 sans avoir obtenu la défense désirée.

Le sentiment d’avoir été injustement traité continua de le hanter là-bas, et il conclut, semble-t-il, que sa seule chance d’obtenir réparation était d’exposer son cas au roi. Cependant, la mort de George IV et l’arrivée d’un cabinet whig, en 1830, durent anéantir ses derniers espoirs. La chaleur du pays, qu’il trouvait oppressante, n’améliorait pas son humeur. Il souffrit peut-être d’une crise cardiaque en mars 1830, mais il était assez bien pour faire une tournée en Birmanie l’année suivante, et il trouva quelque soulagement à résider à Simla, station en altitude où l’air était plus frais. Toutefois, comme sa santé était vraiment trop précaire pour ses lourdes responsabilités, il démissionna de son commandement et rentra en Grande-Bretagne en avril 1832. Six mois plus tard, il fit une syncope ; en février suivant, une autre attaque le « clou[a] au lit », et il passa plusieurs mois sans pouvoir voir ni écrire. En 1834, après au moins un an à l’étranger – à Nice (France) et à Strasbourg ainsi qu’à Wiesbaden (République fédérale d’Allemagne), il retourna à son cher Dalhousie Castle. C’est là qu’il passa ses dernières années, usé, souffrant, puis aveugle et sénile. Il mourut le 21 mars 1838. Venu en réponse à une invitation à dîner, un ancien adversaire, l’évêque John Inglis, assista plutôt à ses funérailles, où il fut seul à représenter tous ceux qui, dans la colonie, gardaient du gouverneur un souvenir affectueux ou désagréable. Sa femme bien-aimée, « lady D », mourut moins d’un an plus tard, le 22 janvier 1839. Elle avait suivi son mari partout où il avait exercé sa charge d’administrateur civil, partageant ses intérêts et ses épreuves, et comme lui s’était acquittée de ses devoirs consciencieusement, avec dignité et charme.

Le géologue John Jeremiah Bigsby* a dit de Dalhousie qu’il était « un homme tranquille, studieux, casanier, fidèle à sa parole et aimable, quoique plutôt sec », à quoi il ajoutait : « il parlait et agissait avec précaution, comme s’il s’était trouvé en territoire ennemi ». Un Bas-Canadien anonyme en a laissé une description plus sévère : « homme court, ramassé, aux jambes torses [...] souvent surnommé le laboureur écossais », avare – « en fait, épargner était son obsession » – et vaniteux à l’extrême, « passionné et tyrannique ou aimable selon les circonstances », porté à imputer ses difficultés à ses subalternes, il « se mesurait aux hommes de toutes tendances et les quittait fâché ». « La malchance lui collait aux semelles », concluait cet observateur. Malgré leurs différences, ces deux portraits – celui de Bigsby parce qu’il évoque le solitaire qui se tient sur la défensive – indiquent que Dalhousie n’était pas fait pour gouverner une colonie agitée et dotée d’institutions représentatives, théâtre d’inévitables affrontements d’idées et de luttes de factions. Un autre contemporain, l’écrivain John Richardson*, affirma plus tard que Dalhousie n’avait pas « toute la vivacité et la souplesse d’esprit [...] nécessaires au gouverneur d’un pays aussi turbulent », contrairement à l’un de ses successeurs, lord Sydenham [Thomson]. Certes, il n’était pas un lourdaud – plein de curiosité intellectuelle, il lisait beaucoup, avait de vastes intérêts et était sensible aux beautés de la nature – mais il montrait dans l’administration civile la tendance à la lenteur et au pédantisme qui l’avait caractérisé quand il était commandant dans l’armée.

Dalhousie était accoutumé à la hiérarchie d’une société écossaise et militaire où il donnait les ordres et où les autres obéissaient. Ceux qui se montraient irrévérencieux, défiaient l’autorité ou, s’ils appartenaient à la classe inférieure, avaient des velléités de se hisser au-dessus de leur condition, l’exaspéraient. Chez les Bas-Canadiens, ce genre d’attitude provenait en bonne partie, croyait-il, d’une « négligence totale à l’égard de l’éducation ». Dans son monde, les dirigeants veillaient au bien du peuple avec l’autorité d’un père et servaient l’État avec désintéressement, comme le voulait la tradition aristocratique de la Grande-Bretagne. Prôner sans relâche le progrès, tant économique qu’intellectuel, faisait partie intégrante de ce rôle. Cette préoccupation lui avait été inculquée par la formation qu’il avait reçue en Écosse, par la culture dans laquelle il avait baigné et par un certain milieu écossais où les dirigeants, en donnant l’exemple, apportaient à la société la clé du progrès.

En Nouvelle-Écosse, à l’époque de Dalhousie, le mécontentement populaire ne s’était pas encore canalisé dans un courant proprement politique, et la colonie était assez élitiste et déférente pour qu’il puisse jouer le rôle de père bienveillant dont il se croyait investi. À Québec, par contre, il ne put que constater combien son titre de gouverneur le laissait démuni : sans pouvoirs, sans ressources, sans droit de distribuer des faveurs. Incapable de promouvoir le bien public par des actions réfléchies, il en vint à condamner la constitution, à la dire tout à fait inadaptée aux besoins et au caractère de la colonie. « Le gouvernement est vraiment le pire appareil que j’aie jamais manœuvré, déplorait-il ; la Constitution britannique aurait convenu tout aussi bien à des chats et à des chiens qu’aux protestants et aux catholiques qui se chamaillent dans ce pays. » Résultat de son austère presbytérianisme et d’années passées à combattre la France, son aversion bien ancrée pour les catholiques et les Canadiens aggravait sans doute son animosité envers ses opposants politiques du Bas-Canada et lui donnait un aspect particulier.

Il reste que Dalhousie aurait probablement réagi de façon semblable à la critique ou au défi dans n’importe quelle colonie où régnait la dissension. Il n’avait pas le détachement du philosophe. Ses réactions étaient dictées davantage par son tempérament que par son conservatisme politique. Peut-être inquiet d’avoir à croiser le fer avec des hommes politiques plus sagaces que lui, il en vint à voir des complots partout. Il prenait les critiques pour des affronts personnels ; les revers qu’il essuyait l’obsédaient. Chez lui, la propension à ruminer – que ses profondes convictions religieuses encourageaient et apaisaient tout à la fois – était si forte, maladive même, qu’il sombrait facilement dans la mélancolie. À cause de ces dispositions, sa carrière dans l’administration publique lui inspirait les sentiments les plus contradictoires. Sans être de ces hommes qui en imposent par leurs qualifications, il avait rêvé d’atteindre les plus hauts commandements et de gagner ainsi honneur, renommée et sécurité financière. Néanmoins, il demeurait douloureusement conscient que cette carrière l’avait souvent obligé à sacrifier sa tranquillité d’esprit, qu’elle l’empêchait de se vouer à sa vie domestique, à ses passions, à ses amis, et il entretenait une nostalgie perpétuelle de son Écosse natale. Enfin, les circonstances de son départ du Bas-Canada imprimèrent en lui un sentiment d’injustice, d’ingratitude qui le blessa jusqu’à la fin de ses jours. Malgré tout ce que Dalhousie accomplit à titre de gouverneur colonial, il n’avait pas l’envergure que requiert pareil destin.

Peter Burroughs

George Ramsay, 9e comte de Dalhousie, est le coauteur, probablement avec son secrétaire civil Andrew William Cochran, de : Observations on the petitions of grievance addressed to the imperial parliament from the districts of Quebec, Montreal, and Three-Rivers (Québec, 1828). Les journaux de Dalhousie se trouvent au SRO, GD45 (les APC en ont une copie sur microfilm). Une partie de ces journaux a été éditée par Marjory Whitelaw et publiée sous le titre de Dalhousie journals. Des portraits de Dalhousie se trouvent à la National Gallery of Scotland (Édimbourg) et à la Dalhousie Univ. (Halifax) ; les APC possèdent une silhouette. Les dessins et peintures de John Elliott Woolford exécutés pour Dalhousie et les caricatures peintes par lady Dalhousie faisaient partie d’une collection considérable de dessins, aquarelles, gravures, cartes, plans et autres documents réunie par Dalhousie. Dans les années 1980, cette collection a été ramenée d’Écosse au Canada pour être distribuée à cinq établissements : le N.S. Museum (Halifax), les APNB, le Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa), la Dalhousie Univ. et les APC. Pour de plus amples informations, on consultera Marie Elwood, « The study and repatriation of the Lord Dalhousie Collection », Archivaria (Ottawa), no 24 (été 1987) : 108–116.

APC, MG 23, GII, 10 ; MG24, A64 ; B1 ; B2 ; B3 ; B6 ; B16.— GRO (Édimbourg), Cokpen, reg. of births and baptisms, 18 nov. 1770 ; reg. of deaths, 21 mars 1838.— PANS, MG 1, 253 ; RG 1, 63 ; 111–112 ; 288–289.— PRO, CO 42/185–216 ; 43/25–27 ; 217/98–139 ; 218/29 ; 323/147–157 ; 324/73–90.— B.-C., chambre d’Assemblée, Journaux, 1820–1828.— J. J. Bigsby, The shoe and canoe, or pictures of travel in the Canadas, illustrative of their scenery and of colonial life ; with facts and opinions on emigration, state policy, and other points of public interest [...] (2 vol., Londres, 1850), 1 : 27.— Robert Christie, Memoirs of the administration of the government of Lower Canada, by the Right Honorable the Earl of Dalhousie, G.C.B., comprehending a period of eight years, vizt : – from June, 1820 till September, 1828 (Québec, 1829).— G.-B., Parl., Hansard’s parliamentary debates (Londres), 3e sér., 19 (1828) : 300–344 ; House of Commons paper, 1828, 7, no 569, Report from the select committee on the civil government of Canada (réimpr., Québec, 1829).— John MacGregor, British America (2 vol., Édimbourg et Londres, 1832), 2 : 54–56.— N.-É., House of Assembly, Journal and proc., 1816–1820.— [John] Richardson, Eight years in Canada ; embracing a review of the administrations of lords Durham and Sydenham, Sir Chas. Bagot, and Lord Metcalfe, and including numerous interesting letters from Lord Durham, Mr. Chas. Buller and other well-known public characters (Montréal, 1847), 187.— G.-B., WO, Army list, 1787–1838.— H. J. Morgan, Sketches of celebrated Canadians, 248–251.— The Scots peerage, founded on Wood’s edition of Sir Robert Douglas’s peerage of Scotland [...], J. B. Paul, édit. (9 vol., Édimbourg, 1904–1914).— Wallace, Macmillan dict.— Susan Buggey, « Churchmen and dissenters : religious toleration in Nova Scotia, 1758–1835 » (thèse de m.a., Dalhousie Univ., 1981).— Christie, Hist. of L.C. (1848–1855), 2–3.— Judith Fingard, « The Church of England in British North America, 1787–1825 » (thèse de ph.d., Univ. of London, Londres, 1970).— K. E. Killam, « Lord Dalhousie’s administration in Nova Scotia » (thèse de m.a., Univ. of Toronto, 1931).— Lambert, « Joseph-Octave Plessis ».— William Lee-Warner, The life of the Marquis of Dalhousie (2 vol., Londres, 1904), 1.— Helen Taft Manning, Revolt of French Canada ; « The civil list of Lower Canada », CHR, 24 (1943) : 24–47.

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Peter Burroughs, « RAMSAY, GEORGE, 9e comte de DALHOUSIE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 16 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/ramsay_george_7F.html.

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Auteur de l'article:    Peter Burroughs
Titre de l'article:    RAMSAY, GEORGE, 9e comte de DALHOUSIE
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1988
Année de la révision:    1988
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