Provenance : Bibliothèque et Archives Canada/MIKAN 3635422
SCOTT, WILLIAM HENRY, officier de milice, marchand, homme politique et patriote, né le 13 janvier 1799 en Écosse, fils de William Scott et de Catherine Ferguson ; décédé le 18 décembre 1851 à Saint-Eustache, Bas-Canada.
William Henry Scott naquit dans une famille écossaise protestante de stricte obédience presbytérienne, vaguement apparentée à sir Walter Scott. Ses parents immigrèrent au Bas-Canada vers 1800. Il était encore très jeune lorsque son père s’installa comme marchand à Montréal où il mourut en 1804. On ne sait à peu près rien de la formation de William Henry, si ce n’est que, du fait qu’il vivait dans cette ville, il apprit très bien le français.
On ignore quand exactement Scott arriva à Saint-Eustache, mais, en juin 1827, il faisait partie d’un comité constitutionnel du comté d’York, formé en vue de protester à Londres contre les injustices causées aux Canadiens français. Bien que ce comité n’eût rien de très révolutionnaire, il n’eut pas l’heur de plaire au loyaliste Nicolas-Eustache Lambert* Dumont, coseigneur des Mille-Îles, qui ne tarda pas à en dénoncer les membres à lord Dalhousie [Ramsay*]. En juillet, Scott, ainsi que Jacques Labrie*, Ignace Raizenne et Jean-Baptiste Dumouchel*, entre autres, se voyaient déchus de leur fonction d’officier de milice pour avoir pris part aux assemblées du parti patriote lors de la campagne électorale de cette année-là.
En 1829, Scott était établi comme marchand général à Saint-Eustache. Lors d’une élection partielle tenue cette année-là, il fut élu codéputé de la circonscription d’York à la chambre d’Assemblée du Bas-Canada en remplacement de Jean-Baptiste Lefebvre, mort accidentellement. L’autre député de la circonscription était Labrie. En 1830, la circonscription fut subdivisée en trois – Deux-Montagnes, Vaudreuil et Ottawa –, et Scott et Labrie continuèrent de siéger comme députés de la nouvelle circonscription de Deux-Montagnes.
Bien que d’origine écossaise, Scott, imprégné d’idées libérales, se rangea du côté du parti patriote à la chambre d’Assemblée. En 1832, il s’engagea à fond dans la lutte constitutionnelle, étant déjà lié d’amitié avec Louis-Joseph Papineau* et Wolfred Nelson*. Cette année-là, il signait à la porte de l’église de Saint-Benoît (Mirabel), village voisin de Saint-Eustache, une affiche dénonçant la spéculation sur les terres et autres abus criants, dont les réserves du clergé et les écoles anglaises, que les Britanniques commettaient au détriment des Canadiens français.
Aux élections générales de 1834, Scott, qui venait de voter en faveur des Quatre-vingt-douze Résolutions, où se trouvaient exposés les principaux griefs et demandes de la chambre d’Assemblée, se présenta de nouveau avec Jean-Joseph Girouard comme candidat du parti patriote dans la circonscription de Deux-Montagnes. Ils eurent pour adversaires les représentants du parti tory, Frédéric-Eugène Globensky et son beau-frère, James Brown*. Un groupe d’Écossais et d’Irlandais orangistes des cantons avoisinants tentèrent d’intimider les électeurs canadiens-français et de les détourner de Scott et de Girouard à St Andrews (Saint-André-Est) où le vote favorisa effectivement les candidats loyalistes. Scott se proposa aussitôt de contester les résultats à cause des irrégularités commises au cours du scrutin et quelques Ecossais l’assaillirent à coups de bâton. À Saint-Eustache, les partisans de Globensky et de Brown, avec à leur tête Lambert Dumont, Maximilien Globensky* et Eustache-Antoine Lefebvre de Bellefeuille, autres coseigneurs des Mille-Îles, en profitèrent pour intimider de nouveau les Canadiens français, mais leurs manœuvres faillirent déclencher une émeute au cœur du village dont ils durent se retirer. En dépit de plusieurs tactiques plus ou moins terrorisantes, Scott et Girouard finirent par triompher de Globensky et de Brown.
Lorsque la rébellion éclata en 1837, Scott, alors riche marchand de Saint-Eustache et député aimé de ses commettants, devint l’un des chefs naturels de son village d’adoption. Mais même si, pendant toute la genèse de la rébellion, il avait proféré des paroles violentes à l’égard des autorités, il restait un ferme partisan du non-recours à la force des armes. Voyant que les choses menaçaient de tourner au désastre à Saint-Eustache, il tenta, avec l’appui du curé Jacques Paquin*, d’apaiser l’ardeur combative de ses amis Jean-Olivier Chénier* et le « général » Amury Girod*, mais en vain.
Scott se trouvait désormais dans une situation intenable. Sa tête mise à prix par lord Gosford [Acheson*], le 1er décembre 1837, d’une part, et menacé d’un procès pour trahison par les patriotes eux-mêmes, d’autre part, il n’avait d’autre choix que de fuir. De fait, peu avant la mi-décembre, Scott quittait Saint-Eustache dans le plus grand secret. Il se rendit d’abord chez son frère Neil à Sainte-Thérèse-de-Blainville (Sainte-Thérèse). Puis, caché dans un tonneau vide, il gagna Montréal où, le 19 décembre, il fut capturé et incarcéré à la prison de l’endroit. Entre-temps, sa résidence et son magasin furent mis à sac au cours de la bataille de Saint-Eustache. Inculpé de haute trahison envers le gouvernement, il ne fut libéré que le 10 juillet 1838, moyennant un cautionnement de £5 000.
On perd ensuite complètement la trace de Scott jusqu’en 1844. Lors des élections générales tenues cette année-là, il fut élu de nouveau député de la circonscription de Deux-Montagnes à l’Assemblée législative de la province du Canada. Dès l’ouverture de la session, il devint membre d’un comité de la chambre chargé d’étudier la question des indemnités réclamées par le curé Paquin en vue de restaurer l’église et le presbytère de Saint-Eustache ravagés par les combats de 1837.
Une fois cette affaire réglée, Scott commença sérieusement à s’occuper de régulariser sa liaison avec sa conjointe : Vers 1829, Scott avait uni sa vie à une Canadienne française de Saint-Eustache, Marie-Marguerite-Maurice Paquet. Comme il était presbytérien et que celle-ci était catholique, le curé Paquin avait refusé catégoriquement de bénir leur union. De cette union étaient nés quatre fils et une fille, Caroline, qui épousera Alfred Nelson, fils de Wolfred Nelson, en 1852, un an après la mort de son père. En 1845, Scott faisait venir Félix Martin*, supérieur des jésuites du Bas-Canada, afin de mettre fin à une situation qui ne devait guère être confortable pour un homme public. Malheureusement, cette première démarche s’avéra infructueuse, à cause de l’intransigeance des deux protagonistes. L’affaire n’en demeura cependant pas là, car Scott continuera de chercher une solution à ce lancinant problème jusqu’à sa mort.
La même année, Scott avec plusieurs députés réformistes bas-canadiens, d’anciens patriotes, dont Louis-Hippolyte La Fontaine*, Papineau et Nelson, prit part à l’Assemblée législative au débat sur le projet de loi visant à indemniser les personnes qui avaient subi des pertes durant la rébellion de 1837. Aux élections générales de 1848, il fut réélu député de sa circonscription sous l’étiquette de réformiste. Le 9 mars 1849, par un vote de 47 voix contre 18, les réformistes du Bas et du Haut-Canada obtenaient gain de cause : une somme de 400 000 $ était accordée à ceux qui avaient subi des pertes matérielles pendant la rébellion [V. James Bruce*]. Scott lui-même bénéficiait ainsi d’une somme importante en compensation de la perte de sa maison et de ses meubles.
En 1851, après une dernière campagne électorale où il avait consacré toutes ses énergies à sa réélection, tout en s’étant laissé aller à son penchant pour l’alcool, Scott rentra à sa résidence de Saint-Eustache, le 15 décembre, épuisé et malade. Il y mourait des suites d’un accès de delirium tremens trois jours plus tard, à l’âge de 52 ans. Il fut inhumé dans le cimetière de l’église presbytérienne de l’endroit le lendemain.
L’avant-veille de sa mort, William Henry Scott était parvenu à faire fléchir l’évêque de Montréal, Mgr Ignace Bourget*, de sorte que son mariage avait enfin été célébré et que ses cinq enfants avaient été légitimés. Une de ses sœurs, Ann, demeurant à Montréal, contesta ce mariage in extremis, peut-être par appât de la succession ou par sectarisme religieux, d’abord devant la Cour supérieure du Bas-Canada en 1854, puis devant la Cour du banc de la reine du Bas-Canada en 1857 et enfin jusque devant le Conseil privé à Londres en 1867. Ces tribunaux entendirent à tour de rôle cette cause et déboutèrent la requérante chaque fois. On peut voir aujourd’hui sur la porte de l’ancienne résidence de Scott (devenue le magasin général de J.-A. Paquin) une plaque commémorant son nom et son rôle politique.
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Jacques Gouin, « SCOTT, WILLIAM HENRY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/scott_william_henry_8F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/scott_william_henry_8F.html |
Auteur de l'article: | Jacques Gouin |
Titre de l'article: | SCOTT, WILLIAM HENRY |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |