Charles Lennox, 4e duc de Richmond et Lennox, a utilisé le sport afin d’obtenir le soutien des élites après sa nomination comme gouverneur en chef de l’Amérique du Nord britannique en 1818 :
Comme il le fit en Irlande, Richmond considérait que son soutien aux activités de loisirs était une manière efficace de rendre son gouvernement populaire, du moins auprès de l’élite. D’après Frederic Tolfrey, officier de la garnison, Richmond, qui avait été « une des meilleures raquettes d’Angleterre » et un excellent joueur de racket-hall, « prenait part avec les officiers qui l’entouraient à toutes les activités sportives viriles, manifestant une courtoisie naturelle et une amabilité qui [le] rendaient populaire auprès de tous ». Il fut le mécène du Garrison Racing Club et encouragea le Tandem Club, mis sur pied pour faire des excursions d’hiver dans la campagne environnante. À tour de rôle avec les principales familles de la ville, il fournissait des provisions aux excursionnistes.
Adepte de plusieurs sports dès sa jeunesse et apôtre de l’activité physique, l’homme d’affaires, fonctionnaire et philanthrope montréalais William Gillies Ross a contribué, à la fin du xixe siècle, au développement du sport organisé, particulièrement dans le domaine des sports sur glace :
À compter de 1890, bien que sa vie professionnelle et familiale l’ait occupé de plus en plus, [Ross] continua d’être actif dans le domaine du sport, tant à titre de compétiteur que d’administrateur. Fermement convaincu que le sport amateur formait le caractère, il travaillait à encourager la participation, à améliorer les installations et à étendre les organisations. Cofondateur de la Canadian Amateur Skating Association en 1886, il en fut président de 1893 à 1895, en 1905 et peut-être d’autres années. En 1894, l’association organisa à Montréal ce qu’il qualifia de « plus grande rencontre de patinage jamais tenue dans le monde ». En 1908, il appartint au Central Olympic Committee.
Promotrice d’un christianisme centré sur la santé du corps, la Young Men’s Christian Association (YMCA) a bénéficié du mécénat de personnes qui, comme le magnat de l’industrie John Rudolphus Booth, valorisaient la pratique d’activités sportives, considérées comme un levier d’affirmation de la masculinité :
À Ottawa, Booth, qui était presbytérien, versa discrètement des sommes d’argent substantielles à des établissements communautaires, notamment le centre de la Young Men’s Christian Association et le St Luke’s Hospital [V. Annie Amelia Chesley*], qu’il aida à fonder en 1897 et dota d’une nouvelle aile en 1914. Décrit comme « un fervent adepte et un généreux protecteur du sport sain et viril », il fut membre de l’Ottawa Amateur Athletic Club et de l’Ottawa Rowing Club […]
Le 27 mars 1920, dans l’une de ses rares apparitions publiques et « aux applaudissements enthousiastes » de la foule, Booth fit la mise au jeu officielle d’un match de la coupe Stanley opposant les Senators d’Ottawa et les Metropolitans de Seattle.
Militaire, professeur et pionnier de l’éducation physique, Henri-Thomas Scott s’est efforcé d’offrir aux jeunes grandissant en milieu urbain des lieux où ils pourraient s’adonner à différents sports, vecteurs d’amélioration sociale et morale :
[L’]arrivée [de Scott à la Commission des écoles catholiques de Montréal (CECM) en 1905] coïncide avec la montée d’un mouvement réformiste à Montréal qui s’inquiète des ravages de la mortalité infantile et de la tuberculose, et qui réclame des parcs, des bains publics, des terrains de jeux, des colonies de vacances et un enseignement plus pratique et mieux adapté à la société industrielle et urbaine […]
Dans sa campagne pour assurer le développement harmonieux des jeunes Canadiens français, Scott a insisté sur la nécessité de pratiquer des sports. Pour en favoriser l’accès, il a obtenu, à l’hiver de 1906–1907, de la CECM, l’autorisation de construire une vaste patinoire à ciel ouvert sur les terrains de l’académie commerciale catholique de Montréal. Afin de donner aux activités sportives une certaine permanence, il travaille à la mise sur pied de divers clubs. Il s’intéresse aussi vivement à la question des terrains de jeux. Il exhorte les autorités municipales à en créer « dans tous les parcs » comme aux États-Unis et il se dit prêt à former des moniteurs. Membre de la Parks and Playgrounds Association of Montreal [V. Grace Julia Parker*], il propose de convertir les piscines et les marchés publics en gymnases pendant l’hiver. Toujours dans le but d’améliorer le sort des enfants de la métropole, il est le premier francophone à fonder et à diriger, à l’été de 1910, une colonie de vacances à Sault-au-Récollet (Montréal), sur les bords de la rivière des Prairies.
Les conditions de vie pénibles de plusieurs citadins au début du xxe siècle nécessitaient, aux yeux du médecin et chroniqueur Joseph-Pierre Gadbois, l’implantation de programmes d’éducation physique dans les écoles, la pratique régulière de l’exercice physique et l’adoption de saines habitudes de vie afin d’assurer la bonne santé du corps et de l’esprit :
Même si Gadbois apprécie les avantages de la ville, il s’inquiète de ses effets sur la santé de ses compatriotes. À la campagne, croit-il, au contact d’une nature difficile mais généreuse, ces derniers ont su conserver force, robustesse et harmonie des formes. Devenus citadins, entassés dans des villes enfumées, confinés dans des logements insalubres et enfermés dans des bureaux, des ateliers ou des magasins mal aérés, ils s’étiolent ; la dégénérescence les guette. Pour lui, l’éducation physique [...] assure la santé et un état équilibré et harmonieux. Il conseille d’éviter les excès de nourriture, préconise les diètes et parfois le jeûne pour nettoyer le corps de ses déchets. Il prône l’abstinence d’alcool, de drogue, de thé et de café et recommande de boire beaucoup d’eau, de manger des légumes, des fruits et des noix. Adepte du végétarisme, il donne, en 1909, une conférence à Québec sous les auspices de la Vegetarian Society of Canada. Il faut, écrit-il, dormir huit heures par jour, ouvrir ses fenêtres été comme hiver, affronter les orages, le chaud, le froid et profiter au maximum du soleil.
Les biographies regroupées dans les listes suivantes permettent d’en savoir davantage sur les promoteurs du sport, de l’exercice physique et de l’éducation physique aux xixe et xxe siècles, de même que sur leurs initiatives et leurs réalisations.