Au tournant du xxe siècle, sir Wilfrid Laurier et le Parti libéral se trouvent au cœur de l’une des plus importantes transformations politiques de l’histoire du Canada : l’adhésion progressive de la province de Québec au Parti libéral. De fait, Laurier :
[…] s’arrangerait pour regrouper sous son aile protectrice les conservateurs modérés, ceux de l’école de sir George-Étienne Cartier*. Des noms tels Arthur Dansereau, Chapleau, Joseph-Israël Tarte* seraient célèbres à cet égard. Cette conquête du Québec conservateur, à ce stade, appartiendrait à Laurier plus qu’à tout autre.
Laurier intervient également dans les affaires provinciales, comme le montre l’extrait suivant de la biographie de Félix-Gabriel Marchand, chef du Parti libéral de la province de Québec et futur premier ministre. La popularité de Laurier et l’efficacité organisationnelle des libéraux fédéraux contribuent à la victoire de Marchand à l’élection provinciale de 1897 :
La popularité de Laurier est à son zénith et la victoire qu’il remporte aux élections fédérales du 23 juin 1896 est de bon augure pour Marchand. Désireux de profiter à plein de cette vague libérale, il effectue une tournée de la province à l’automne de 1896 et, le 28 novembre, à Montréal, il tient un grand ralliement des organisateurs libéraux. De fait, ce sont les hommes de Laurier qui tirent les ficelles et la jeune garde du parti qui se bat farouchement. Dandurand, responsable de la campagne, crée des clubs libéraux partout dans la province et assure le contact entre Laurier et Marchand. De sa retraite de Spencer Wood, Chapleau manœuvre vainement pour susciter une coalition des bleus et des rouges – bien sûr, sans les ultramontains – dirigée par son ami Guillaume-Alphonse Nantel*. La campagne électorale du printemps de 1897 dégénère en une lutte entre Laurier et « le ministère des taxeux », comme on se plaît à caricaturer le gouvernement conservateur, et Marchand a peu d’influence sur son résultat. Le 11 mai, les libéraux sont élus et, le 24, Marchand est assermenté à titre de premier ministre.
Porté au pouvoir par la popularité de Laurier, alors enclin à plaire à l’épiscopat catholique et à rassurer les électeurs, Marchand n’a pas les coudées franches dans la formation de son cabinet. À l’évidence, Laurier a la haute main sur ce cabinet provincial.
L’extrait suivant de la biographie de l’avocat et homme politique Simon-Napoléon Parent donne un autre exemple d’intervention de Laurier dans les affaires politiques provinciales :
Le 25 septembre 1900, la mort du premier ministre Marchand pose un difficile problème de succession. Les dauphins sont nombreux. Laurier, appelé à trancher, […] impose Parent, qui lui voue une loyauté et une admiration à toute épreuve.
Ces relations privilégiées avec la province de Québec ont permis, entre autres, au chef libéral de remporter haut la main les élections fédérales de 1896, 1900, 1904 et 1908. Mais Laurier, s’il peut être idolâtré, a ses détracteurs. La Ligue nationaliste canadienne en rassemble quelques-uns [V. Olivar Asselin]. Ce groupe de pression réclame, d’une part, davantage d’autonomie pour le Canada par rapport à la Grande-Bretagne et, d’autre part, davantage de pouvoirs pour les provinces par rapport au fédéral. La ligue défie Laurier de front et décoche des flèches au gouvernement de Lomer Gouin, premier ministre de la province de Québec et allié de Laurier. Voici un extrait de sa biographie :
La Ligue nationaliste canadienne […] avait d’abord attaqué les politiques de Laurier. Mais elle avait aussi des préoccupations de nature provinciale de sorte que, surtout à partir de 1907, les nationalistes […] ne ménagèrent pas le gouvernement Gouin.
Pour en savoir davantage sur les relations entre Laurier et la province de Québec, nous vous invitons à consulter les listes de biographies suivantes.