LANGELIER, CHARLES, avocat, homme politique, fonctionnaire, juge, journaliste et auteur, né le 23 août 1850 à Sainte-Rosalie, Bas-Canada, fils de Louis-Sébastien Langelier, cultivateur, et de Julie-Esther Casault ; le 2 août 1882, il épousa à Québec Marie-Louise-Georgiana-Lucille La Rue, et ils eurent une fille ; décédé le 7 février 1920 à Québec.

Charles Langelier fait ses études à l’école de son village natal, puis au séminaire de Saint-Hyacinthe, au petit séminaire de Québec et à l’université Laval, où il mérite en 1875 une médaille d’argent du gouverneur général, lord Dufferin [Blackwood*]. Reçu avocat le 18 septembre 1875, il pratique le droit à Québec. Entraîné par son frère François, il s’intègre alors au petit cercle libéral formé de Télesphore Fournier*, Luc Letellier* de Saint-Just, Marc-Aurèle Plamondon*, Ernest Pacaud*, Armand La Vergne* et Wilfrid Laurier. Né politicien et tribun, il sera de toutes les rudes batailles de l’histoire politique canadienne et québécoise de la fin du xixe siècle.

Langelier est député de Montmorency à l’Assemblée législative de la province de Québec de 1878 à 1881, ayant glorieusement vaincu le procureur général Auguste-Réal Angers, à la faveur de l’affaire Letellier [V. Luc Letellier de Saint-Just]. Mais il subit ensuite trois défaites électorales : dans Montmorency pour l’Assemblée législative en 1881 et pour la Chambre des communes en 1882 ; puis dans Bellechasse pour l’Assemblée législative en 1886. Ce n’est qu’en 1887 qu’il gagne Ottawa comme député libéral de Montmorency. Il démissionne cependant le 10 juin 1890 pour retourner à Québec, où l’appelle son vieil ami Honoré Mercier*. Il est président du Conseil exécutif, du 30 juin au 29 septembre 1890, puis secrétaire et registraire du gouvernement, du 22 août 1890 au 21 décembre 1891. Compromis avec son chef par le scandale de la baie des Chaleurs, Langelier connaît deux autres défaites : dans Montmorency en 1892 et dans Bonaventure à l’élection partielle du 22 décembre 1897. Il termine toutefois en beauté ses luttes électorales comme député de Lévis à l’Assemblée législative de 1898 à 1901.

Vient alors pour Langelier la récompense politique, qui le déçoit cependant. Il espérait que Laurier le nommerait juge, en retour de sa solide amitié de 25 ans et de ses luttes acharnées en faveur du Parti libéral. Mais le souvenir du scandale de la baie des Chaleurs est encore trop vivant pour qu’une telle fonction lui soit confiée. D’ailleurs, les candidats à la magistrature ne manquent pas en ce début de règne libéral, et Laurier a déjà nommé l’aîné des Langelier, François, à la Cour supérieure en 1898. Pressé par des problèmes personnels, Charles Langelier accepte la fonction de shérif du district de Québec le 26 juin 1901, puis celle de juge de la Cour des sessions de la paix le 29 janvier 1910. Dans cette dernière fonction, il se montre anticonscriptionniste en libérant la plupart des partisans de l’émeute de Québec du printemps de 1918 [V. Georges Demeule], ou en infligeant des amendes mineures aux accusés. Il n’est pas sans intérêt de mentionner que Langelier prend aussi la défense des droits du français en Ontario au cours du débat sur le Règlement 17 qui restreint l’usage du français comme langue d’enseignement dans cette province [V. sir James Pliny Whitney]. Dans les mêmes années, il prend parti contre la prohibition, mouvement qui est dans l’air depuis 20 ans mais qui connaît sa phase décisive dans la consultation populaire de 1917.

Comme il y a beaucoup d’intermèdes dans sa présence à l’un ou à l’autre des Parlements, Langelier mène aussi la lutte politique dans le journalisme. Il collabore à différents journaux, dont la Nation de Saint-Hyacinthe et l’Éclaireur de Québec. Mais c’est principalement dans l’Électeur de Québec qu’il défend les couleurs libérales. De juillet 1883 à janvier 1886, il est copropriétaire et coéditeur de ce journal, avec Ernest Pacaud, dont on le dit « l’inséparable ». Même si elle est irrégulière, sa collaboration est soutenue, ce qui fera dire à Pacaud : « Il fut de toutes nos misères, de toutes nos luttes, de toutes nos espérances et de tous nos succès. » L’Électeur est le premier journal libéral d’importance à Québec et il sera considéré comme le journal officiel du parti jusqu’en 1936. Dans les années 1880, il est donc le porte-parole de Laurier et de Mercier, comme le sont le Courrier du Canada, de Québec, et le Journal de Québec pour les chefs conservateurs.

Langelier écrit par goût personnel. C’est le cas de plusieurs de ses contemporains de formation classique. Il le fait aussi pour s’assurer un revenu supplémentaire, car le droit et la politique rapportent peu à l’époque. Il a à son crédit plusieurs publications. Son ouvrage Souvenirs politiques : récits, études et portraits est le plus important. Le premier tome couvre la période 1878–1890. C’est un ensemble de tableaux sur le Parti libéral : fondation, évolution, luttes ardentes, principes de base, énergie et patriotisme des chefs, influence sur le système politique. La peinture est intéressante, mais forcément partisane et idéalisée. Le deuxième tome, qui porte le sous-titre de Mercier, son renvoi d’office, son procès, sa mort, poursuit l’histoire et l’éloge du Parti libéral de 1890 à 1896, autour de la figure de Mercier, dont Langelier fait « l’idole du peuple de cette province ». En voulant rétablir la vérité, Langelier prétend réhabiliter un homme dont il a été l’ami intime et le bras droit, qu’il a suivi avec enthousiasme et avec lequel il est tombé en 1892. On peut donc penser qu’il veut aussi refaire sa propre image aux yeux de l’histoire. Mais l’auteur est toutefois trop engagé pour produire cet effet. Le lecteur reste sceptique. Il apprécie cependant le récit des événements et les nombreux portraits que présente l’ouvrage.

Il est facile de voir en Charles Langelier l’homme politique typique du xixe siècle, même si sa carrière se joue au sein du Parti libéral et que c’est le Parti conservateur qui est alors au premier plan de la scène politique nationale.

Charles Langelier est décédé dans son sommeil, à sa résidence de la Grande Allée de Québec, le 7 février 1920.

Andrée Désilets

Charles Langelier est l’auteur de : le Chemin de fer de Q.M.O.&O. : administration de M. L. A. Sénécal ; discours prononcé dans la législature de Québec ([Québec ?, 1881 ?]) ; la Question des asiles ; discours [...] sur l’adresse en réponse au discours du trône (Assemblée législative), séance du 10 novembre 1890 ([Québec, 1890]) ; Éloge de l’agriculture prononcé devant l’Institut canadien, à Québec, octobre 1891 ([Québec ?, 1891]) ; Aux électeurs du comté de Montmorency (Québec, 1896) ; Lord Russell de Killowen à Québec : réception officielle du juge en chef d’Angleterre par le banc et le barreau ; résolutions, discours, etc. ([Québec ?, 1896]) ; John-Buckworth Parkin, avocat et conseiller de la reine : conférence donnée devant le Barreau de Québec (Lévis, Québec, 1897) ; l’Honorable Thomas Cushing Aylwin, juge de la Cour du banc de la reine ; conférence donnée devant le Barreau de Québec, novembre MCMIII (Québec, 1903) ; le Trois-centième anniversaire de l’arrivée de M. de Monts à Québec (Québec, 1904) ; Souvenirs politiques ; récits, études et portraits (2 vol., Québec, 1909–1912) ; la Confédération : sa genèse, son établissement (Québec, 1916) ; la Procédure criminelle d’après le Code civil et la jurisprudence (Québec, 1916) ; la Prostitution : ses dangers, son remède ; lettre ouverte à son honneur le maire et à MM. les échevins de la cité de Québec (Québec, 1916).

ANQ-M, CE2-25, 24 août 1850.— ANQ-Q, CE1-1, 2 août 1882.— L’Électeur (Québec), 1880–1896.— La Presse, 9 févr. 1920.— Le Soleil, 27–28 juin 1901, 24 févr. 1909, 9 févr. 1920.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1912).— DOLQ, 2.— DPQ.— J. Hamelin et al., la Presse québécoise, 2.— Le Jeune, Dictionnaire.— Rumilly, Hist. de la prov. de Québec, 2–3.— Wallace, Macmillan dict.

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Andrée Désilets, « LANGELIER, CHARLES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/langelier_charles_14F.html.

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Auteur de l'article:    Andrée Désilets
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
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