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McTAVISH, SIMON, trafiquant et marchand de fourrures, officier de milice, fonctionnaire, propriétaire foncier, seigneur et homme d’affaires, né vers 1750 dans la Strath Errick, Écosse, fils de John McTavish of Garthbeg ; décédé le 6 juillet 1804 à Montréal.
Simon McTavish est issu d’une famille pauvre. Son père est lieutenant dans le 78e d’infanterie, un régiment de Highlanders, et se trouve à Louisbourg, île Royale (île du Cap-Breton) au moment de la chute de la Nouvelle-France ; il retourne en Écosse lorsque se produit la démobilisation des troupes en 1763. L’année suivante, Simon, encore très jeune et sans le sou, débarque à New York. Il y trouve de l’emploi chez un marchand, écossais peut-être. Alors commence la période d’apprentissage des affaires. En 1771, il envoie une requête au gouverneur de New York dans laquelle il demande l’octroi de 2 000 acres de terre dans le comté d’Albany en faveur de son père. À cette époque, McTavish semble établi à son propre compte et s’intéresse au commerce des pelleteries. En 1772, il est à Detroit, lieu privilégié des trafiquants américains, où il se lie à William Edgar, un des plus importants marchands de l’endroit. L’année suivante, il fait la traite dans la région de Niagara. En décembre 1774, à la suite de l’adoption de l’Acte de Québec, il écrit : « J’ai bien peur que cet acte ne fasse infiniment de tort à notre commerce [...] Mais dans le cas où il ne serait pas abrogé, nous devrons inévitablement rompre nos liens avec cette province et nous ravitailler au Canada. » Cela signifie qu’il commence à prévoir le transfert de ses opérations de New York et d’Albany à Montréal. À cette époque, McTavish est associé à un autre Écossais, James Bannerman, et il oriente ses expéditions de traite au nord-ouest des Grands Lacs contrairement à un grand nombre de marchands américains qui trafiquaient au sud et à l’ouest.
Les raisons qui incitent McTavish à s’établir à Montréal sont d’abord économiques, même si les circonstances politiques précipitent sa décision. En 1775, il est à Detroit. En juin 1776, Bannerman note la rareté des produits nécessaires à la traite et il signale que McTavish a déjà quitté Michillimakinac (Mackinaw City, Michigan) pour Grand Partage (près de Grand Portage, Minnesota). À mesure que la saison avance, les événements semblent confirmer le pessimisme de leurs prévisions. De la fin de juillet jusqu’au 10 août, Bannerman continue d’être d’autant plus inquiet qu’il craint que la pauvreté de la collecte de pelleteries à Michillimakinac et « dans le Nord » ne lui permette pas de rembourser « les gros achats de marchandises, de provisions et d’eau-de-vie » qu’il a dû faire pour parer à la pénurie de ces produits de traite : « j’ai peur, écrit-il, de subir des pertes considérables ». Au milieu du mois d’août, McTavish est de retour à Michillimakinac et se prépare pour une nouvelle expédition à laquelle il associe George McBeath. Malgré les mauvais présages, McTavish, grâce à des arrangements pris à Grand Portage, se retrouve à Montréal vers la fin de septembre, heureux, annonçant son départ pour Londres avec une cargaison de pelleteries qu’il évalue à £15 000. Il déclare : « La fortune s’est montrée pour moi une maîtresse tellement bonne depuis quelques années que je suis peut-être trop enthousiaste ; et la drôlesse est bien capable de me délaisser de façon cuisante en abaissant le prix des fourrures dans la métropole – quoi qu’il en soit, je suis déterminé à aller de l’avant. »
Il est d’usage parmi les marchands, les voyageurs et les engagés de célébrer les retours des pays d’en haut. McTavish n’est pas le dernier â entrer dans la ronde. Son voyage en Angleterre est sans doute un voyage d’affaires et une occasion de revoir l’Écosse où, en parent riche, il s’engage à payer les études secondaires de ses neveux, entre autres Duncan et William* McGillivray ; mais c’est en plus un moment propice à la détente. Il écrit à Edgar en mars 1778 : « Nous avons passé tout notre temps ici à nous divertir, à danser, à fréquenter les clubs, à boire, etc., malgré tout, je n’aime pas l’endroit [...], plus nous vieillissons, plus nous avons de peine à nous contenter [...] Quand je n’étais pas en amour, j’étais toujours comme un poisson hors de l’eau. »
Cette période semble importante dans la carrière de McTavish. Il expérimente tous les aspects du commerce des pelleteries : sur le plan financier, il entretient des liens avec la firme londonienne Phyn, Ellice and Company [V. Alexander Ellice], et son association avec Bannerman lui permet à la fois d’acquérir une riche expérience sur le terrain et de prendre conscience des possibilités offertes par les entreprises conjointes. En mai 1777, Bannerman l’a informé de son intention de se retirer en Angleterre à l’automne de 1778. Peut-être à cause des succès des années précédentes, leurs investissements sont particulièrement importants : en 1777, ils ont équipé 27 bateaux, engagé 108 hommes et acheté des marchandises pour une somme de £15 800 ; en 1778, ils équipent 8 canots, 30 bateaux, engagent 178 hommes et affectent £9 500 à l’achat de produits de traite. Bannerman se retirera seulement après la saison de traite de 1779.
Avant 1779, McTavish ne semble pas s’être avancé très loin dans le Nord-Ouest. Néanmoins, il a commencé à prendre conscience que l’avenir de la traite des pelleteries se situe dans cette direction. Aussi sa rencontre avec les frères Benjamin* et Joseph Frobisher est-elle un événement capital. En effet, ces derniers se sont donné pour mission d’édifier une grande entreprise qui aurait la haute main sur le commerce du Nord-Ouest. En 1779, une coalition qui, outre les Frobisher et McTavish, regroupe Charles Paterson, James McGill, Isaac Todd, Robert Grant et quelques trafiquants d’importance secondaire, met en relief l’émergence de la North West Company. Pour McTavish s’ouvrent alors des perspectives beaucoup plus vastes que celles offertes par son association avec Bannerman. D’ailleurs la lutte pour avoir la haute main sur la traite, telle qu’elle se dessine à partir de 1780, sert bien les intérêts du groupe Frobisher-McTavish. McGill, Todd et Paterson s’intéressent avant tout au commerce du Sud-Ouest. Contrairement aux Frobisher, ils sont convaincus que le traité de paix de 1783 entre la Grande-Bretagne et les États-Unis ne modifiera pas vraiment l’équilibre des forces dans l’économie des pelleteries. Aussi ne font-ils plus partie de la North West Company lors de sa réorganisation au cours de l’hiver de 1783–1784. Ils se contentent de participer au financement des firmes engagées dans ce commerce, se réservant le Sud-Ouest comme champ d’action direct. McTavish et les Frobisher qui détenaient 4 actions sur 16 en 1779, en possèdent 6 en 1783. À cette date, même si McTavish est devenu un participant de taille dans l’entreprise, la prééminence appartient sans aucun doute à Benjamin Frobisher, qui est alors le cerveau de la compagnie. Les autres partenaires, qu’il s’agisse de Grant, McBeath, Nicholas Montour, Peter Pond, Patrick Small ou William Holmes*, ne possèdent pas les attributs qui font les chefs de file.
Malgré sa puissance sur le terrain et la force de ses appuis à Montréal, la North West Company ne réussit pas immédiatement à établir sa suprématie. À partir de 1785, la Gregory, MacLeod and Company, sous la direction de John Gregory, s’engage dans le commerce du Nord-Ouest grâce aux appuis trouvés auprès de la Phyn, Ellice and Company ; cette rivalité deviendra de plus en plus violente et difficile à soutenir financièrement. Mais la lutte est inégale ; en 1787, Gregory ne peut équiper plus de 9 canots alors que la North West Company en prépare 25 et utilise en plus 4 bateaux.
L’année 1787 est décisive pour McTavish. La mort de Benjamin Frobisher en avril va lui fournir l’occasion de se hisser à la tête de la North West Company. En effet, il n’ignore pas que Joseph Frobisher, qui ne possède ni l’expérience ni le talent nécessaires à la conduite d’une grande entreprise, est incapable de succéder à son frère en tant qu’administrateur général de la compagnie. Il sait également qu’une organisation de cette taille ne peut être entièrement dirigée de Montréal ou de Grand Portage. Aussi propose-t-il à Frobisher une fusion de leurs firmes qui possèdent à elles seules, selon lui, la moitié des actions de la North West Company. Frobisher s’empresse, le 22 avril, d’accepter l’offre de McTavish qui est sur le point de partir pour Grand Portage. Lorsque celui-ci y arrive, les esprits sont échauffés à cause du meurtre de John Ross, un des associés de la Gregory, MacLeod and Company, et ancien partenaire de la North West Company. McTavish propose alors une réorganisation de la North West Company qui lui permettrait d’intégrer ses rivaux dans l’entreprise. Ainsi, lorsque la McTavish, Frobisher and Company est créée en novembre 1787, elle monopolise en fait 11 des 20 actions de la compagnie, soit les 7 qu’elle possède en propre et 4 autres détenues par Small et Montour, et ne réserve que 4 actions au total pour Gregory, Normand MacLeod*, Peter Pangman et Alexander Mackenzie. L’entrée de ces hommes de valeur dans la compagnie la renforce et signifie l’élimination de toute opposition venant de l’intérieur du pays.
Depuis ses débuts, la North West Company regroupe un certain nombre de firmes : huit en 1779, le même nombre en 1783–1784 et neuf en 1787. En principe, toutes sont sur un pied d’égalité quant au partage des dépenses et des profits en fonction de leur part respective dans l’entreprise. Cet esprit égalitaire règne aussi dans le domaine des décisions concernant l’aménagement de l’espace et la stratégie de lutte contre les concurrents, aussi bien ceux de l’intérieur que ceux de l’extérieur. Par contre, le financement, l’importation des marchandises de traite, l’engagement des hommes et la vente des pelleteries sur les marchés extérieurs relèvent d’une firme, qui jouit d’une sorte de suprématie sur le plan de la gestion et en retire des bénéfices. Avant 1787, la firme Benjamin and Joseph Frobisher jouait ce rôle maintenant dévolu à la McTavish, Frobisher and Company. Cette structure va permettre à McTavish d’étendre son emprise sur l’ensemble des activités de la North West Company.
L’influence de McTavish sur le destin de la compagnie se fait sentir assez vite. En quelques années, il procède à une réorganisation des rapports de la compagnie avec les milieux d’affaires de Londres. En 1787, il est encore satisfait du système qui lie la compagnie à ses deux fournisseurs londoniens, la Dyer, Allan and Company, et la Brickwood, Pattle and Company : « Comme nous sommes ravitaillés de la métropole par deux firmes auxquelles nous sommes justifiés d’accorder notre estime, nous allons continuer de faire affaire avec elles, moitié avec l’une, moitié avec l’autre, car nous aurons besoin du crédit des deux pour continuer à faire fonctionner l’entreprise sur une grande échelle, comme nous le faisons maintenant. » Mais l’année suivante, la situation se complique, car la Dyer, Allan and Company met fin à ses envois de marchandises. En juin, la Brickwood, Pattle and Company, à laquelle Joseph Frobisher demande d’assumer tout le ravitaillement de sa compagnie, refuse de s’engager davantage, ayant décidé de rétrécir plutôt que d’étendre le champ de son activité commerciale. Finalement, en octobre 1788, la firme Phyn, Ellices, and Inglis accepte de fournir la seconde moitié du ravitaillement de la compagnie. Afin de réduire au minimum les incertitudes qui entourent la vente des pelleteries, l’obtention du crédit et des assurances ainsi que l’achat des marchandises, McTavish décide de fonder sa propre maison à Londres, la McTavish, Fraser and Company. Il en confie la gestion à son cousin John Fraser, homme d’affaires parfaitement au courant des conditions du commerce des deux côtés de l’Atlantique. Cette entreprise semble avoir joui d’une certaine autonomie car, en 1794, Frobisher, James Hallowell père et Gregory, alors aux prises avec une situation économique difficile, écrivent à Fraser : « la seule idée qui doit prévaloir à l’avenir, c’est que les deux firmes doivent être solidaires ». Mais, en 1799, Fraser lui-même rappelle à McTavish que la McTavish, Fraser and Company et la McTavish, Frobisher and Company sont des entreprises distinctes : « Pour toutes ces raisons [...] vous n’allez pas nous entraîner dans des affaires aussi peu attirantes et qui ne rapportent aucun profit. » Quoi qu’il en soit, Fraser joue un rôle extrêmement important. Il surveille avec le plus grand soin les ventes de pelleteries et note les performances des arrivages de la Hudson’s Bay Company. Il préside aux achats de marchandises de traite, les assure et les fait expédier. C’est dans le domaine financier qu’il se révèle le plus indispensable. À son sujet, McTavish écrit : « M. Fraser est capable de tout ce qu’un homme peut faire en matière de finance. » Sur cette question, Fraser multiplie les mises en garde et les remontrances. À Frobisher, il déclare : « Seule une totale ignorance de l’état de vos affaires dans ce pays a pu dicter votre lettre [...], en refusant de donner suite à notre demande, vous vous êtes placé au bord de la ruine. » À McTavish lui-même, il écrit en 1795 : « En bref, mon cher ami, la question a pris une extrême importance et demande la plus sérieuse attention. » En 1793–1794, le chiffre d’affaires de la McTavish, Fraser and Company, sur lequel les deux partenaires retirent une commission, est de £311 400.
Les fluctuations de la demande sur le marché de Londres sont un facteur sur lequel les trafiquants de pelleteries exercent peu de pouvoir. La seule solution à ce problème, accentué à partir de 1793 par les guerres de la Révolution française, se trouve dans une diversification des marchés. Vers 1790, en dehors du marché américain, il n’y a d’accessible que celui de la Chine. C’est dans cette direction que la North West Company oriente dès lors ses efforts. Comme les fourrures doivent emprunter la route de New York, la McTavish, Frobisher and Company est forcée d’étendre le réseau de ses associations. Les expéditions vers la Chine sont donc organisées avec la collaboration de deux marchands liés au commerce des fourrures, Alexander Henry*, de Montréal, et John Jacob Astor, son associé de New York. McTavish et Frobisher utilisent au début des navires américains qui transportent des pelleteries et, au retour, prennent une cargaison de thé, de soieries et de porcelaine. Le coût de ces aventures se chiffre à £13 484 en 1792, £16 260 en 1793 et £22 824 en 1794. L’expansion de cette branche du commerce nécessite la mise en place d’une structure : l’établissement d’un bureau à New York. Lorsque Alexander Mackenzie prend en charge cette succursale, il incite la compagnie à utiliser ses propres navires. En 1798, l’entreprise achète le Northern Liberties, un vaisseau de 340 tonneaux, et fait construire le Nancy. À Londres, Fraser s’inquiète et conseille à McTavish beaucoup de retenue. Selon Fraser, le commerce avec la Chine soulève d’autres problèmes dans le cadre de la compétition avec la Hudson’s Bay Company, puisque les plus belles fourrures sont acheminées vers la Chine. À cet égard, Fraser écrit en 1799 : « Nous avons été très déçus de votre assortiment de [peaux de] castor de qualité [...] d’où nous déduisons que vous avez réservé la meilleure part pour le marché chinois. » On peut aussi croire que l’aventure chinoise facilitait l’accès au marché américain.
L’économie des pelleteries appelle presque nécessairement l’expansion territoriale. Non seulement faut-il répondre à la demande, mais aller à la recherche des plus belles fourrures. L’ampleur de ces extraordinaires prélèvements sur la faune est telle que l’épuisement progressif des ressources devient inévitable. De 1764 à 1786, les exportations au port de Québec s’élèvent à 10 258 350 peaux. Les seuls envois de castor totalisent 2 556 236 peaux. Comme ce processus se poursuit depuis les débuts de la Nouvelle-France, on peut comprendre la nécessité de l’expansion territoriale de la traite. Les réalités auxquelles McTavish fait face ne sont pas nouvelles, mais elles deviennent toujours plus contraignantes. La poursuite des animaux à fourrure incite à un déplacement continuel des centres d’exploitation vers l’ouest et vers le nord et exige la présence d’explorateurs. C’était vrai à l’époque de Pierre Gaultier* de Varennes et de La Vérendrye et ce l’est davantage vers 1790. Les voyages de Mackenzie qui, en 1789, descend le fleuve qui porte son nom jusqu’à l’océan Arctique et, en 1793, se rend jusqu’à l’océan Pacifique, sont inspirés par les besoins de l’économie des pelleteries. Les explorations de David Thompson*, qui se rend jusqu’aux montagnes Rocheuses en 1800 et finira par atteindre l’embouchure du fleuve Columbia en 1811, sont aussi dictées par les mêmes préoccupations. Ce déplacement des centres de production vers la région de l’Athabasca et au delà nécessite plus que jamais l’élimination de toute concurrence, condition essentielle à un contrôle rigoureux des coûts de transport et des salaires, d’autant plus que la tendance des prix est à la hausse.
L’aménagement de l’espace visant à accroître la production et à maintenir une surveillance plus stricte conduit la compagnie à créer de nouveaux postes. Naturellement, dans cette marche incessante vers l’ouest, Grand Portage reste le principal relais construit sous le règne de Benjamin Frobisher. Cependant, lorsqu’à la fin du siècle la cession des postes de la région des Grands Lacs aux Américains est devenue une réalité, on envisage un transfert de Grand Portage à Kaministiquia (Thunder Bay, Ontario). Évaluée à plus de £10 000, cette opération coûteuse, achevée en 1803, illustre bien le rôle capital qu’avait joué ce lieu de rencontre et de transit. Mais la construction des autres relais plus éloignés comporte également des investissements plus considérables qu’autrefois. Ces postes servent d’entrepôts et de centres de distribution pour les pelleteries, les provisions de bouche, tel le pemmican, et les produits nécessaires à la traite. L’importance de chaque établissement dépend aussi du danger que représentent les trafiquants de la Hudson’s Bay Company dans les environs. À ces endroits, le personnel est de plus en plus hiérarchisé, depuis le bourgeois jusqu’au voyageur. Par exemple, en 1804, il existe 17 postes comprenant un total de 837 hommes répartis selon la structure suivante : au sommet, 45 bourgeois, puis 76 commis, 44 interprètes, 15 guides et, enfin, 657 voyageurs.
Ainsi l’empire sur lequel règne McTavish est habité d’abord par les Indiens, ensuite par les « professionnels » de la traite et par la masse des engagés, qui viennent en très grande partie des seigneuries. Ils sont nombreux ceux qui participent à cette aventure, puisque le transport des marchandises de Montréal à Grand Portage mobilise une main-d’œuvre considérable. En 1783, les effectifs engagés dans le commerce des pelleteries atteignent 3 069 hommes. En 1795, le comte Paolo Andriani évalue la main-d’œuvre à 2 540 hommes, soit 40 guides, 1 100 hivernants et 1 400 engagés. Il est bien évident que les salaires représentent une variable importante dans les coûts de la North West Company. Aussi longtemps que l’agriculture est demeurée au niveau de la subsistance, il a été facile de recruter la main-d’œuvre « professionnelle » et saisonnière dont les entreprises de traite avaient besoin. Les salaires étaient alors bas. Mais, depuis 1765, l’agriculture s’est commercialisée de sorte que cette main-d’œuvre rurale est devenue beaucoup moins flexible et disponible. En conséquence, les salaires ont monté rapidement, mettant en danger l’existence même des entreprises. Ces pressions salariales, liées à la rareté de la main-d’œuvre et à l’expansion de la production agricole, se maintiennent pendant toute la seconde moitié du xviiie siècle. En 1793, William Grant (1743–1810) écrit à ce sujet : « Nous avons actuellement engagé plus de deux cents hivernants. Nous manquons encore d’hommes pour le voyage aller-retour [...] Le prix élevé auquel se vend le blé fait hésiter les bons hommes à s’engager. » Cette pénurie de main-d’œuvre a incité les marchands de pelleteries à remplacer dans la mesure du possible le canot par le bateau de façon à réduire les besoins d’engagés et la masse salariale, et à substituer partiellement la voie moins coûteuse du fleuve Saint-Laurent à la route de la rivière des Outaouais. Avec quatre hommes d’équipage seulement, au lieu des dix requis pour mener les canots, les bateaux transportaient le même volume de marchandises. La North West Company a elle-même suivi le mouvement amorcé par les trafiquants de Detroit et de Niagara (près de Youngstown, New York). En 1790, elle avait deux navires, jaugeant respectivement 10 et 15 tonneaux, sur le lac Supérieur ; en 1793, elle possède le Beaver (45 tonneaux) et l’Athabaska (40 tonneaux) sur les lacs Érié, Michigan et Huron et elle affecte l’Otter (75 tonneaux) au trafic sur le lac Supérieur. Ainsi, lorsque McTavish a pris la direction de la compagnie en 1787, il a assumé avec vigueur la politique mise en œuvre par Benjamin Frobisher. Mais ces problèmes de main-d’œuvre préoccupent constamment les responsables de la North West Company. En 1791, Joseph Frobisher écrit à McTavish : « J’ai de même laissé des ordres pour que St Cir parcoure le pays, de sa paroisse jusqu’à Québec [...] J’ai ordonné la même chose à Fainante. » L’année suivante, il écrit encore : « On prêtera bonne attention à ce que vous mentionnez au sujet des hivernants. M. Gregory sera capable d’en rassembler un grand nombre [...] (comme je passerai la plus grande partie de l’hiver à Québec) je tâcherai d’engager autant de jeunes gaillards que je pourrai. On tiendra également compte de vos recommandations touchant les jeunes gens qui pourront être engagés à l’avenir pour le Nord-Ouest. » Cette attention constante au marché de la main-d’œuvre, à ses implications sur les coûts, est dictée par le fonctionnement même de l’entreprise. En 1793, Frobisher revient sur cette question : « Je pars pour La Chine [Lachine] afin d’expédier six bateaux et un canot à [Charles-Jean-Baptiste] Chaboillez, [George Edme] Young et [Bazile] Irelande, ainsi que deux canots à destination du Portage [Grand Portage] ; c’est là tous les hommes que j’ai pu rassembler, et j’ai dû les engager pour St. Mary’s [Sault-Sainte-Marie (Ontario)] à des salaires exorbitants [...] eussions-nous haussé leurs gages pour le Portage, nous aurions été obligés d’augmenter les gages de ceux qui sont montés et nous aurions eu de brandes difficultés à en engager l’hiver prochain. » À mesure que se fait l’expansion territoriale de la traite, la proportion des hivernants par rapport aux saisonniers augmente, et le problème des salaires devient plus délicat. Non seulement la North West Company utilise-t-elle davantage le bateau entre Montréal et le lac Ontario, mais elle exerce des pressions pour obtenir une amélioration des communications entre Montréal et Lachine et investit pour les mêmes raisons à York (Toronto).
Les pressions salariales, l’augmentation des coûts de transport et des prix ont été à l’origine du changement technologique. Les mêmes facteurs ont déterminé une évolution vers la concentration des entreprises. Perçu dans la perspective du contrôle des salaires, ce mouvement visait à l’établissement d’un monopole sur le marché de la main-d’œuvre. Aussi longtemps que le commerce des pelleteries fait l’objet d’une concurrence entre un grand nombre d’entrepreneurs qui se livrent une lutte pour l’obtention des meilleurs employés, le contrôle des salaires est impossible et ceux-ci ne peuvent qu’augmenter plus rapidement dans un contexte de pénurie. Ainsi l’ambition qui animait Benjamin Frobisher et, après lui, McTavish de concentrer tout le commerce des pelleteries dans les mains de la North West Company n’est pas seulement l’émanation de leur personnalité ; elle est stimulée par les conditions économiques et, en partie, par les problèmes de main-d’œuvre. Ce facteur joue aussi longtemps que l’objectif final n’est pas atteint.
En 1787, McTavish aurait pu croire que la North West Company pouvait désormais se contenter d’exploiter son domaine en toute quiétude. Gregory, le plus dangereux adversaire, avait été placé au bord de la faillite et forcé d’entrer dans la compagnie aux conditions posées par McTavish. En 1791, Joseph Frobisher n’était pas loin de penser que son rêve à cet égard s’était réalisé : « la North W[est] Co[mpany] ne s’est jamais trouvée dans une situation aussi extraordinaire et enviable qu’elle l’est présentement, et [...] il faudrait d’immenses capitaux et de grands efforts pour en arriver ne fût-ce qu’à mettre le pied là-bas ». En réalité, ni l’un ni l’autre ne pouvaient entretenir bien longtemps des illusions de ce genre, car les richesses du Nord-Ouest étaient toujours âprement convoitées. Elles l’étaient par ceux qui voulaient entrer dans cette carrière. Elles le seront bien davantage par ceux qui avaient cru que la Révolution américaine ne modifierait aucunement l’équilibre acquis et qui avaient limité leur activité au Sud-Ouest. Ceux-là se voient forcés de se tourner vers les ressources du Nord-Ouest à cause de l’épuisement des ressources, du traité Jay de 1794 et, quelques années plus tard, de l’attitude des Américains qui prétendent monopoliser la traite dans le Sud-Ouest. Dès 1791, les rumeurs relatives à la formation d’une opposition à la North West Company se précisent. Todd et McGill font savoir qu’ils sont intéressés à acquérir une participation dans la compagnie. Cependant, à cette époque, McTavish et Frobisher ne dépendent plus de ces individus du point de vue du financement. Ils sont également indépendants du groupe Ellice-Forsyth-Richardson représenté par la firme Forsyth, Richardson and Company, filiale montréalaise de la Phyn, Ellices, and Inglis, qui désire ardemment prendre part à la traite du Nord-Ouest. Tout ce que ces concurrents éventuels se voient offrir en vue de la réorganisation de la North West Company, prévue pour 1795, c’est un mince bloc de deux actions. Naturellement, ils refusent.
Dès lors se prépare la montée d’une nouvelle puissance concurrente, la New North West Company (appelée parfois la XY Company) [V. John Richardson*]. Après sa fondation en 1798, la nouvelle compagnie attire dans ses rangs John Ogilvy, représentant de la firme Parker, Gerrard, and Ogilvy, ainsi que Daniel Sutherland* et, fait plus important encore, Alexander Mackenzie. Celui-ci, après avoir lutté contre la North West Company aux côtés de Gregory, s’était joint à cette compagnie lors de la fusion de 1787. Puis, à la suite de ses succès comme explorateur, il y avait occupé une place et des fonctions à l’importance grandissante. Comme Mackenzie était ambitieux et qu’il avait ses propres vues sur l’avenir de la compagnie et de l’économie des pelleteries, sa position était devenue de plus en plus difficile vis-à-vis de McTavish, le grand responsable de la politique de l’entreprise, et de son neveu et héritier présomptif, William McGillivray. C’est pourquoi Mackenzie s’associe à la nouvelle compagnie rivale.
Dans l’esprit de McTavish, toute concurrence est néfaste non seulement pour sa compagnie mais pour l’économie des pelleteries dans son ensemble. En 1799, il admet que ses adversaires représentent un danger réel tant du point de vue des capitaux mis en œuvre que de l’expérience des hommes engagés dans la lutte. En août 1800, Fraser écrit de Londres : « Je me réjouis d’avoir des rapports aussi favorables touchant vos profits ; de découvrir que vous l’emportez tellement sur vos concurrents. » Deux ans plus tard, en octobre, Fraser se montre aussi optimiste sur l’issue de la lutte : « Votre union complète va finalement réduire à néant les efforts de vos adversaires, et votre réussite (qui est vraiment extraordinaire en de telles circonstances) vous rendra capable de les combattre avec succès. » En 1804, selon John Askin, la New North West Company avait déjà dépensé £70 000, mais n’avait pas réussi à ébranler sa rivale. Aussi est-elle forcée d’accepter cette année-là les termes d’une fusion proposée par McGillivray, qui, cependant, exclut Mackenzie de l’entreprise. Comme à l’accoutumée, la compétition avait donné lieu à une augmentation des salaires et des prix payés aux Indiens pour leurs pelleteries.
Sous le règne de McTavish, la North West Company est en perpétuelle réorganisation : cinq transformations majeures se produisent entre 1790 et 1804. Ces changements sont sans doute occasionnés par la croissance de la production et par l’expansion du domaine de la compagnie ; mais ils puisent en plus leurs sources dans des circonstances qui se rattachent intimement à la vie de l’entreprise et à la mentalité de son directeur. Ainsi le nombre des actions dans la compagnie de même que le nombre de leurs bénéficiaires ne cessent de s’accroître. Cette situation est commandée en partie par l’existence d’une opposition ouverte ou voilée, de sorte que l’admission dans la compagnie d’un concurrent éventuel ou réel constitue une technique pour renforcer la domination. L’augmentation du nombre des participants sert aussi d’instrument de promotion à l’intérieur de l’entreprise. Les pressions à cet égard viennent surtout des commis et des bourgeois. Vers 1795, Mackenzie, à la suite de suggestions faites par Duncan McGillivray, se fait le porte-parole de ces éléments mécontents : il est significatif que le nombre des actions passe de 20 en 1787 à 46 en 1795 et à 100 en 1804.
Naturellement, la North West Company s’incarna toujours davantage dans la personne de McTavish. D’ailleurs, l’homme sait en imposer et inspirer la loyauté. En 1794, Hallowell lui écrit : « Je me suis habitué à sacrifier mes opinions et mes sentiments au profit des vôtres ; à cause de cela, dois-je l’avouer toutefois, je m’attendais à une certaine considération de votre part. J’ai bien peur que vous n’ayez mal interprété cette déférence – y voyant de la faiblesse d’esprit de ma part et un manque d’opinion personnelle, alors qu’en réalité ma conduite a été dictée par le sentiment de mes devoirs envers vous, la considération que j’ai pour vous et, par-dessus tout, la forte conviction que cette considération était réciproque [...] Au printemps, j’espère que nous vous verrons, ce qui allégera la position où je suis d’être dépendant de tout le monde, alors que vous semblez me tenir responsable de tous. » L’homme est certes autoritaire, et ce penchant s’accentue avec le temps, mais il sait aussi déléguer des responsabilités. Les rencontres de Grand Portage ne sont pas uniquement des séances d’information et les consensus qui s’y dégagent ne dépendent pas surtout de la présence de membres de la famille parmi les partenaires. On peut cependant dire que l’instrument de pouvoir de McTavish, c’est la McTavish, Frobisher and Company. La participation de cette firme dans la North West Company passe de 7 actions sur 20 en 1787 à 75 sur 100 en 1804, et les bénéfices qu’elle en retire sont plus que proportionnels.
La McTavish, Frobisher and Company n’est pas une société rigide et figée, dominée par un personnel inamovible. Les commerçants les plus expérimentés et les plus capables y sont promus et ont la possibilité de se faire valoir. James Hallowell et son fils William, Gregory, les McGillivray, Alexander Mackenzie et son cousin Roderick McKenzie* sont tous des individus qui avaient fait preuve d’efficacité sur le terrain et qui avaient manifesté des talents particuliers. Même si plusieurs membres du clan familial McTavish – pour lequel l’homme éprouve un extraordinaire attachement – en font partie, cette firme n’est pas non plus une entreprise familiale au vrai sens du terme. William McGillivray, avant de devenir le successeur de McTavish, sera obligé de faire la preuve de ses capacités après son arrivée en 1784 : neuf années complètes dans le département de l’Athabasca d’abord, responsabilités étendues et variées par la suite. La même chose vaut pour Duncan McGillivray qui, malgré sa promotion dans la firme, demeure presque toute sa vie un homme efficace sur le terrain et un explorateur. Il n’en reste pas moins que la présence de plusieurs parents dans la North West Company et dans la firme McTavish, Frobisher and Company a bien servi les intérêts de McTavish.
L’organisation de cette firme, qui assume tellement de responsabilités, est faite à partir de critères d’efficacité. Que Joseph Frobisher soit en peu de temps plus ou moins déclassé, n’a pas lieu d’étonner. Après quelques années, sa fonction dans la firme se précise : l’engagement de la main-d’œuvre et les relations extérieures. Quant à Gregory, il se spécialise assez vite en tant que responsable du magasin : préparation des expéditions de traite et préparation des exportations de pelleteries. Son subalterne à Québec, James Hallowell père, un parent de McTavish, est, pour sa part, de plus en plus confiné à la comptabilité et, à ce titre, son autorité s’exerce sur les commis dans l’Ouest et à Grand Portage. Avant 1800, les deux seuls personnages qui semblent vraiment dans la course pour la succession sont Alexander Mackenzie, dont les idées paraissent inquiéter McTavish, et William McGillivray. McTavish s’est certainement préoccupé de prévoir une relève, mais la défection de Mackenzie ne lui laisse guère le choix et il prépare son neveu William McGillivray.
McTavish préside aux destinées d’une organisation bien rodée depuis Montréal jusqu’aux montagnes Rocheuses à l’ouest et jusqu’au Labrador à l’est, où, en 1802, avec ses associés, il fait l’acquisition du bail des postes du roi moyennant £1 025 par année. En outre, la compagnie est bien représentée à Londres, à New York et à Québec. Servie par des hommes efficaces aux talents variés, cette organisation n’est pas seulement destinée à l’établissement d’un monopole contre les concurrents de Montréal, mais elle tend aussi à l’élimination de la concurrence extérieure, tant celle des Américains que celle de la Hudson’s Bay Company. Vers 1790, cette dernière compagnie ne manifeste pas tellement de dynamisme et, à cette époque, les hommes de la North West Company ont le sentiment net de leur supériorité sur le terrain. En 1792, William McGillivray écrit à un agent de la Hudson’s Bay Company, William Tomison* : « Je ne comprends pas tout à fait votre menace concernant les pills, mais si vous entendez par là des balles [de fusil], vous tombez mal ; et si les choses devaient en arriver à une telle extrémité, vous allez voir que nous sommes capables de jouer plus dur et de donner de meilleurs prix aux indigènes, s’il était nécessaire de faire appel à eux, et cela bien plus que vous en êtes capables dans les deux cas. » En 1791, McTavish avait même demandé au premier ministre William Pitt une abolition de la charte de la Hudson’s Bay Company. Ayant essuyé un refus et étant bien conscient au surplus des avantages de la compagnie rivale en ce qui concerne l’acheminement des produits de traite vers l’Ouest, il tente d’obtenir des droits de transit, ce qui naturellement lui est refusé. Par la suite, la lutte contre la Hudson’s Bay Company passe au second plan parce que la réorganisation de cette dernière en matière de stratégie se fait lentement et que la concurrence n’est pas encore vive. Mais un réveil se préparait, et, au tournant du siècle, cette question est remise à l’ordre du jour. McTavish avait certainement envisagé d’acheter sa rivale, mais les circonstances n’avaient pas été favorables. Il décide alors de frapper un grand coup afin de forcer l’adversaire à concéder les droits de transit [V. Duncan Mcdougall]. Il organise deux expéditions vers la baie James : l’une par voie terrestre partant de Montréal et l’autre par mer, avec un navire loué pour la circonstance. En septembre 1803, les deux expéditions se rencontrent à l’île Charlton (Territoires du Nord-Ouest) dont elles prennent possession au nom de la North West Company. Cette rivalité ne prendra fin qu’en 1821, au moment où l’union des deux compagnies marquera l’absorption de la North West Company.
Préoccupé par le commerce des fourrures, McTavish prête peu d’attention à la grande propriété foncière avant 1802, bien que sa souscription à la section montréalaise de la Société d’agriculture au début des années 1790 démontre un intérêt pour le secteur agricole. En 1802, à une époque où l’agriculture est prospère et la terre une source de profits, il obtient 11 500 acres de terre dans le canton de Chester et il achète pour une somme de £25 000 la seigneurie de Terrebonne, près de Montréal. Dès le point de départ, il se révèle un seigneur capitaliste. Il exploite un magasin et deux moulins à farine des plus modernes, construit une boulangerie qui prépare des biscuits pour le Nord-Ouest, bâtit une scierie et encourage l’industrie de la tonnellerie. Il ne se contente pas seulement de percevoir les rentes seigneuriales, il essaie de canaliser les surplus de production de la région vers ses moulins. Le blé qu’il transforme est destiné au marché local et à l’exportation. Évidemment, il est en contact avec d’anciens marchands de pelleteries, tels Francis Badgley* et Pangman. Mais ses relations en ce domaine se font surtout avec les marchands de grains et les exportateurs : Louis Dunière, Jacob Jordan*, les frères John et William Porteous ainsi que Thomas Porteous*, Henry Caldwell, William Burns* et son associé John William Woolsey*, Robert Lester et Robert Morrogh, Adam Lymburner*, David Monro* et Mathew Bell*. Tout cela illustre bien les rapports entre les différents secteurs de l’économie et prouve que les commerçants de fourrures n’étaient pas hostiles à la commercialisation du secteur agricole. Les raisons qui motivent l’achat de la seigneurie de Terrebonne diffèrent certainement de celles qui expliquent le rachat, en 1799, de Dunardary, petit domaine ancestral du clan familial des McTavish dans l’Argyllshire, en Écosse.
La participation de McTavish à la vie publique de sa ville et de la colonie paraît modeste à côté de celle d’autres marchands importants, tels James McGill et John Richardson. Tout au plus a-t-il occupé le grade de lieutenant dans la British Militia of the Town and Banlieu of Montreal de 1788 à 1794 environ et a-t-il reçu une commission de juge de paix du district de Montréal en 1796, commission qui fut renouvelée trois ans plus tard. Toutefois, son élégance, sa personnalité et son habileté lui valurent d’être surnommé « le marquis » par ses contemporains. En octobre 1793, McTavish avait épousé Marie-Marguerite Chaboillez, âgée de 18 ans, fille du marchand de fourrures Charles-Jean-Baptiste Chaboillez. De ce mariage naîtront quatre enfants qui tous mourront dans la vingtaine. Lors de son mariage, McTavish avait acheté la maison qu’il occupait depuis dix ans à titre de locataire, rue Saint-Jean-Baptiste. À la veille de sa mort, il entreprend la construction d’une énorme résidence, encore inachevée au moment de son décès, le 6 juillet 1804. Sa succession se chiffre à plus de £125 000. Son testament est significatif non seulement parce qu’il révèle les liens étroits qu’il entretenait avec tout le clan familial, mais parce qu’il lève le voile sur les rapports d’amitié qu’il avait établis avec ses anciens associés : Frobisher, Gregory et James Hallowell père. À son médecin George Selby* et au fils de ce dernier, il lègue £700. À l’Hôtel-Dieu de Montréal et à l’Hôpital Général de Montréal, il donne £2 000.
Dans la province, Simon McTavish est certainement l’homme d’affaires le plus important de la seconde moitié du xviiie siècle. Comme ses amis Frobisher, il avait du flair, mais il possédait à un plus haut degré le sens de l’organisation et de la gestion. Tout cela montre que le destin des entrepreneurs ne saurait être réduit à des questions de favoritisme ou simplement perçu à partir du volume des capitaux qu’ils possèdent au point de départ.
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Fernand Ouellet, « McTAVISH, SIMON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 17 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mctavish_simon_5F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/mctavish_simon_5F.html |
Auteur de l'article: | Fernand Ouellet |
Titre de l'article: | McTAVISH, SIMON |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 1983 |
Date de consultation: | 17 déc. 2024 |