ROLPH, JOHN, médecin, avocat et homme politique, né le 4 mars 1793 à Thornbury, Gloucestershire, Angleterre, fils du docteur Thomas Rolph et de Frances Petty, décédé le 19 octobre 1870 à Mitchell, Ontario.

John Rolph était le deuxième enfant d’une famille qui en comptait 18. Son père, un chirurgien, émigra en Amérique aux environs de 1808 et vécut quelque temps aux Cèdres, Bas-Canada, avant de s’installer près de Vittoria dans le comté de Norfolk, Haut-Canada, où il mourut en 1814. La famille se gagna rapidement le respect de tous, et son hospitalité était proverbiale. Deux fils devinrent prêtres de l’Église d’Angleterre : Romaine étudia la théologie sous la direction de John Strachan et fit du ministère dans plusieurs paroisses du Haut-Canada ; Thomas vécut en Angleterre. Un autre de leurs frères, George, devint un avocat réputé. Une des filles épousa George Ryerson*.

John Rolph n’accompagna pas sa famille au Canada mais continua plutôt ses études en Angleterre. En 1809, il fut admis à l’étude du droit à Inner Temple (Londres). Il émigra au Haut-Canada en 1812 et pendant la guerre il occupa les fonctions de payeur de la milice du district de London. Il s’établit sur des terres près de Port Talbot et, durant ces années, il fut avec d’autres membres de sa famille en excellents termes avec le tory inconditionnel qu’était le colonel Thomas Talbot*. En 1817, Rolph prit l’initiative d’instaurer le « Talbot Anniversary » pour commémorer la fondation de l’établissement par le colonel en 1803. Peu après, Rolph retourna en Angleterre pour reprendre ses études. De 1818 à 1821, il étudia à la fois le droit et la médecine au St John’s College de Cambridge et la médecine aux hôpitaux Guy et St Thomas de Londres. Il entreprit également des études en vue d’obtenir un grade universitaire en théologie. Il fut admis au Inner Temple en 1821 et, la même année, peu après son retour en Amérique, au Barreau du Haut-Canada. En 1826, à l’occasion d’une visite en Angleterre, il réussit les examens d’admission au Royal College of Surgeons. Il exerça la médecine dans le Haut-Canada tout au long des années 20, bien qu’il n’ait demandé et obtenu sa licence qu’en 1829. En 1824, il écrivit au colonel Talbot pour le prier de bien vouloir patronner le « Talbot Dispensatory » qu’il se proposait d’ouvrir en collaboration avec le docteur Charles Duncombe dans le double but de donner des consultations médicales gratuites et de former des étudiants. L’idée du dispensaire ne tarda pas à s’estomper ; il se peut que le projet ait eu pour principal motif l’établissement de bonnes relations avec Talbot.

Sa pratique active de deux professions fit connaître Rolph à la grandeur du district de London. Le 2 septembre 1824, William Lyon Mackenzie déclarait dans le Colonial Advocate : « on compte par milliers les gens du district dont il a restauré la santé et la vigueur. » Il fut bientôt amené à se lancer dans la politique et fut élu en 1824 dans le comté de Middlesex qu’il représenta à la chambre d’Assemblée. Rolph sacrifia alors les quelconques liens d’amitié qui l’unissaient à Talbot et ne tarda pas à assumer le rôle de chef de file des membres de l’Assemblée qu’on désignera bientôt sous le nom de réformistes et qui s’opposaient au parti officiel : ce dernier parti sera bientôt connu comme le « Family Compact » ; de fait, les sessions de l’Assemblée de 1825 à 1828 furent largement dominées par l’incessant duel politique entre Rolph et le procureur général, John Beverley Robinson. Dans une Assemblée qui ne se distinguait pas par le haut savoir de ses membres, un individu qui, comme Rolph, possédait une instruction poussée et diversifiée, appartenait à la bonne société et était doué d’une belle éloquence (même si parfois il abusait des fleurs de rhétorique), était des mieux armés pour faire face à l’impérieux et hautement compétent procureur général.

Parmi les questions qu’avait à étudier la nouvelle législature élue en 1824, la plus controversée était incontestablement « la question des étrangers » ; il s’agissait de décider si les colons nés aux États-Unis et passés au Haut-Canada depuis 1783 étaient ou non des étrangers et, dans l’affirmative, de quelle manière les naturaliser. Cette affaire avait des incidences sur le statut politique et peut-être aussi sur les titres immobiliers de plus de la moitié de la population de la province. Bien que né en Angleterre, Rolph embrassa la cause des colons d’origine américaine, très nombreux dans sa circonscription. Pour lui, c’était une cause « populaire », qui faisait l’objet des attaques de l’exécutif et du Conseil législatif. Plus précisément, il dénonça les attaques à l’endroit de tout ce qui était américain que proféraient habituellement les députés conservateurs loyalistes, dont un grand nombre étaient de la partie orientale de la province. Il conjura les habitants du Haut-Canada « de cesser de se complaire dans d’indignes calomnies à l’endroit de nos voisins et amis ». Le Haut-Canada n’avait rien à craindre des colons américains ; ils n’avaient pas fui « un mauvais gouvernement et un sol inhospitalier » mais étaient venus de leur plein gré et très tôt manifestaient « un intérêt personnel profond » envers la province et ses institutions. L’Assemblée ayant adopté des résolutions demandant que les colons résidants d’origine américaine jouissent des mêmes droits qu’on reconnaissait aux sujets britanniques, Rolph se rendit en Angleterre au printemps de 1826 en qualité de porte-parole de la majorité réformiste à l’Assemblée dans le but d’essayer de convaincre le ministère des Colonies de donner suite aux résolutions. À Londres, on le reçut avec courtoisie et on le consulta ; il sembla satisfait de la décision du parlement de donner à la législature provinciale le pouvoir d’adopter une loi de naturalisation de portée restreinte ; cette loi devait contenir des dispositions touchant, notamment, la renonciation à l’allégeance aux États-Unis et un registre public des Américains naturalisés, dispositions qui répugnaient à un grand nombre. En tout état de cause, de retour au Canada, Rolph présenta en décembre 1826 un projet de loi qui différait des instructions impériales et rendait les procédures de naturalisation beaucoup plus faciles et plus acceptables aux colons d’origine américaine. (Il subsiste dans toute cette affaire un élément de mystère comme dans bon nombre d’incidents qui ont marqué la carrière de Rolph.)

La controverse au sujet des étrangers tourna de nouveau à l’aigre en 1827. À la suite de manœuvres législatives compliquées, dans lesquelles Rolph et Robinson jouèrent un rôle prépondérant, l’Assemblée, à contrecœur et de façon quelque peu surprenante, adopta un projet de loi conforme aux instructions du ministère des Colonies, se fondant présumément sur l’hypothèse qu’il n’y avait pas de meilleures mesures possibles. Les réformistes qui s’opposaient au projet de loi étaient déterminés à présenter un autre appel à l’Angleterre et de nouveau comptaient sur Rolph pour les représenter. Celui-ci jugea, semble-t-il, que ses obligations professionnelles lui interdisaient une autre absence prolongée, et c’est Robert Randall* qu’on délégua à sa place. La mission de ce dernier remporta un franc succès : la loi, en grande partie modelée par Robinson, fut désavouée et on invita l’Assemblée à adopter les dispositions qui lui convenaient et c’est ce qu’elle fit en 1828. En raison du rôle de premier plan qu’il avait joué à l’Assemblée, Rolph pouvait s’attribuer une large part du mérite de cette heureuse issue.

De 1825 à 1828, Rolph prit la vedette sur les questions et les débats qui précisèrent et effectuèrent la démarcation entre les partis politiques du Haut-Canada. Il revint sur les torts causés au « martyr » Robert Fleming Gourlay. Il déplora la sévérité du traitement appliqué à son collègue de Middlesex, le capitaine John Matthews*, dont la pension militaire avait été interrompue à la suite de commentaires jugés favorables aux États-Unis. Il défendit Francis Collins*, rédacteur en chef du Canadian Freeman, lors des querelles de ce dernier avec le gouvernement, et principalement avec Robinson. À l’instar d’autres avocats réformistes, il désapprouva la « persécution » dont était l’objet le juge John Walpole Willis*. À l’Assemblée, il se prononça contre les prétentions à l’exclusivité de l’Église d’Angleterre (bien qu’il en fût membre), s’opposa à tout lien entre l’Eglise et l’État et défendit les méthodistes contre les attaques de John Strachan. Il proposa bon nombre de réformes et plus particulièrement un projet de loi visant à abolir la peine d’emprisonnement pour dettes, sur lequel il prononça un éloquent discours. Dans bien des cas, il fit front commun avec Marshall Spring Bidwell*, avec le docteur William Warren Baldwin* et son fils Robert*. À la suite de la victoire réformiste sans équivoque remportée lors des élections de 1828 et de sa facile réélection dans Middlesex, Rolph aurait pu être choisi comme orateur (président) de l’Assemblée ; quoi qu’il en soit, pendant la courte période de 1829–1830, où le parti réformiste eut la majorité à l’Assemblée, un observateur tory antipathique nota qu’il menait « l’Assemblée comme un troupeau de moutons ».

Après cette période d’activité politique intense, Rolph ne fut pas candidat aux élections de 1830. On ne peut que présumer ses motifs : il en était peut-être venu à la conclusion que toute action politique au sein de l’Assemblée était vaine tant que l’Assemblée ne jouissait ni d’autorité ni d’influence sur le lieutenant-gouverneur, sur le « Family Compact » et sur le Conseil législatif. Ou encore, peut-être avait-il perdu contact avec sa circonscription, depuis qu’il s’était fixé quelques années plus tôt à Dundas, située plus à l’est, et qu’il avait passé la majeure partie de son temps à York (Toronto), la capitale provinciale, et aussi en Angleterre (1826). Il se rendait peut-être compte qu’il était impossible d’exercer convenablement ses deux professions et, en même temps, remplir le rôle extrêmement exigeant et souvent ingrat de chef politique. De fait, il avait à choisir entre le droit et la médecine. Au début de 1831, il écrivit à Robert Baldwin : « Tous les jours je deviens de moins en moins compétent en ces matières juridiques » et, quelques mois plus tard, il confiait à William Warren Baldwin : « Tout mon temps est pris par la pratique de la médecine – je ne songe à aucune autre entreprise, je ne m’occupe de rien d’autre : mais c’est laborieux. La pratique de la médecine à la campagne est ainsi faite. » Il refusait toute nouvelle cause judiciaire et, vers 1832, il transmit à son frère George ce qui restait de sa clientèle. (Il en aurait peut-être été amusé s’il avait su que, peu après, le ministre des Colonies écrivit confidentiellement au lieutenant-gouverneur, sir John Colborne, que Rolph était un candidat adéquat pour le poste vacant de solliciteur général.) Au début de 1832, il s’était installé à York où, en plus de se constituer une clientèle, il accepta des étudiants dans ce qui semble avoir été à l’époque la seule « école de médecine » de la province. Il s’occupa également de la fondation du Mechanics’ Institute d’York où il donna des conférences sur de nombreux sujets. Tout comme les autres médecins de la ville, il s’employa à soulager les souffrances des victimes du choléra durant les épidémies de 1832 et de 1834. En cette même année 1834, il épousa Grace Haines, de Kingston, une femme au caractère bien trempé qui seconda entièrement son mari dans sa profession, particulièrement en ce qui avait trait à l’administration de ses différentes écoles médicales. Ils eurent quatre enfants.

Au début de 1834, York fut reconnue officiellement comme ville et prit le nom de Toronto et, aux élections pour le choix des échevins et des conseillers municipaux, Rolph sortit en tête de liste dans le quartier St Patrick. On s’attendait généralement que la majorité réformiste du conseil le choisirait comme premier maire de la ville. Cependant, les conseillers, semble-t-il, considéraient que cet honneur revenait à Mackenzie en compensation des « persécutions » dont il venait d’être la victime. Mis au courant de leurs intentions, Rolph résigna son siège sur-le-champ et tourna le dos à la politique municipale, laissant les gens dans la perplexité quant à ses motifs. Il ne se présenta pas non plus à l’Assemblée aux élections de 1834, où les réformistes remportèrent une victoire retentissante. À partir de ce moment, Rolph semble s’être presque entièrement consacré à la pratique et à l’enseignement de la médecine ; il exerça toutefois les charges de membre du conseil d’administration et de premier président de la People’s Bank fondée en 1835 et à laquelle s’intéressaient activement beaucoup d’autres réformistes influents, notamment Francis Hincks*.

Néanmoins, il apparut très vite que Rolph était toujours une force vive en politique, d’autant plus peut-être qu’il avait été ces derniers temps absent de la scène politique. À la fin de janvier 1836, sir Francis Bond Head* arriva à Toronto pour succéder à Colborne au poste de lieutenant-gouverneur. Il constata que le Conseil exécutif ne comptait que trois membres et qu’il était urgent d’en accroître le nombre. Malgré l’antipathie instinctive qu’il ressentait à l’égard de Mackenzie et de Bidwell, Américain de naissance, Head était prêt à voir des hommes compétents, choisis hors des rangs du parti tory, venir grossir les rangs du Conseil exécutif. Robert Baldwin et Rolph étaient des candidats tout désignés. En dépit de certaines hésitations de la part de Baldwin, ce dernier, et Rolph, de même que le receveur général, John Henry Dunn*, prêtèrent serment comme membres du Conseil exécutif le 20 février 1836. Rolph et Baldwin étaient bien décidés à être autre chose que des nullités ; ils voulaient être consultés régulièrement par le lieutenant-gouverneur, ils voulaient avoir leur mot à dire dans la distribution des faveurs politiques et ils souhaitaient voir « les affaires de la province [...] réparties en départements et désiraient qu’on en réfère aux dirigeants de ceux-ci pour les questions qui relevaient manifestement de l’un ou l’autre de ces départements ». Ils réussirent à convaincre le conseil au complet de préparer un mémoire à l’appui de cette prise de position ; par la suite Head déclarera que ce fut fait à l’instigation de Rolph. Le lieutenant-gouverneur écarta le mémoire d’emblée, déclarant qu’au Haut-Canada lui seul pouvait agir comme « ministre responsable », et il invita les membres du conseil à remettre leur démission s’ils avaient le sentiment que leurs « principes » étaient menacés. C’est ce qu’ils firent le 12 mars, déclenchant ainsi une crise qui empoisonna le climat politique du Haut-Canada pendant de longs mois.

Rolph, toutefois, ne participa pas de façon marquée aux débats entre Head et les « constitutionnalistes » d’une part et les meneurs réformistes et radicaux de l’Assemblée d’autre part. Il s’était nettement identifié au parti réformiste, mais à l’aile modérée et « responsable » à laquelle appartenaient également les Baldwin et aucunement à Mackenzie ou même aux déclarations et gestes de la majorité de l’Assemblée. Aussi, il ne se trouva pas particulièrement en péril lorsque l’opinion de la province changea suffisamment pour battre les réformistes aux élections de 1836. Il est étonnant – et inexpliqué – que Rolph ait choisi ce moment si peu propice pour faire un retour en politique. Bien qu’il résidait alors à Toronto, il se présenta dans le comté de Norfolk où il était avantageusement connu depuis longtemps et il remporta sans peine la victoire.

Les réformistes furent déclassés à trois contre un dans la nouvelle Assemblée ; Mackenzie, Bidwell et Peter Perry* étant parmi les vaincus, et Robert Baldwin encore à l’écart de la politique, Rolph se trouva de nouveau le chef du parti. Il semble avoir complètement partagé l’indignation des réformistes à l’endroit des méthodes qu’on avait, constataient-ils, utilisées pour les vaincre. « La violence orangiste, le chantage et la corruption, des inventions de toutes pièces, des preuves mensongères [...] des rapports officiels malicieux et inexacts, des directeurs de scrutin tories extrémistes et autres abus de même acabit avec l’appui d’un clergé à la solde de l’État ont orienté les élections contre nous [...] il n’y a pas au monde de gouvernement plus vil ou plus dépourvu de principes que celui que nous subissons ici », écrivait Rolph à Baldwin en juillet 1836. Le ton de cette lettre traduit bien le rôle de Rolph à l’Assemblée en 1836 et en 1837, contribuant même à expliquer pourquoi celui-ci était prêt à flirter, à sa façon bien sûr, avec l’idée d’une participation à la rébellion.

À l’Assemblée, Rolph ne pouvait évidemment pas faire approuver ses projets de loi devant l’écrasante majorité tory mais il pouvait réchauffer le cœur des réformistes par ses envolées oratoires et par ses attaques incessantes contre les tories et leurs amis. Le Patriot de Toronto, qui lui était hostile, lui rendait hommage à contrecœur en déclarant le 20 décembre 1836 que Rolph était « le grand chef de la minorité et le seul qui méritât d’être entendu » mais dénonçait en même temps « l’astuce de ses raisonnements spécieux ». Ses deux principales interventions se situent, l’une en décembre 1836 à la faveur d’un débat sur les « réserves » du clergé et l’autre au cours du mois suivant durant « l’enquête consécutive aux accusations de graves délits lors des dernières élections portées contre sir Francis Bond Head ». Le premier discours, qui reçut une large diffusion, consistait partiellement en un débat avec Christopher Hagerman*, dans lequel Rolph affirmait que toute association entre l’Église et l’État se faisait au détriment de la religion tout comme la dotation par l’État de n’importe quelle confession et il refusait l’idée que l’Église d’Angleterre soit l’Église établie dans le Haut-Canada ; il terminait en proposant que les réserves du clergé soient vendues et que « le produit [en soit appliqué] aux fins de l’instruction générale ». Il est vraisemblable que la popularité de Rolph comme chef réformiste pendant toute la durée de sa longue carrière soit en grande partie le fruit de son appui soutenu et vigoureux au principe de la séparation de l’Église et de l’État et des contributions volontaires des fidèles à leur Église. Son second discours contenait une attaque cinglante contre Head : Rolph l’accusait d’avoir parlé « la langue d’un agitateur », d’avoir traité « les partisans de la réforme [...] comme des ennemis » et d’avoir fait appel, « du haut du trône, aux passions du peuple en tant qu’« Anglais, Irlandais, Écossais et Loyalistes américains » et [d’avoir] oublié, oui monsieur, oublié les canadiens ! » Rolph se demandait si le Haut-Canada « reverrait jamais des élections libres ». On ne peut savoir si cette remarque était uniquement une figure de style ou si elle témoignait d’un désespoir véritable quant aux perspectives d’un changement pacifique.

Néanmoins, quelle qu’ait été sa détresse, Rolph ne prit aucune part ouverte à la mobilisation des opinions radicales et à la préparation du soulèvement armé de décembre 1837. Il n’avait jamais été un intime de Mackenzie, ni même un collègue de travail, et tout comme son voisin à Toronto, Marshall Spring Bidwell, et ses amis les Baldwin, il ne participa aucunement à l’activité de plus en plus frénétique du petit rédacteur pendant les derniers mois de 1837. Que savait-il, en novembre, des projets de Mackenzie et dans quelle mesure a-t-il été consulté par ce dernier ? Autant de questions qui resteront probablement sans réponses. En cas de réussite, Mackenzie aurait évidemment eu besoin d’hommes respectables et prestigieux pour assumer les rôles de premier plan, et personne n’était plus qualifié que Rolph pour remplir ces fonctions. Mackenzie dira plus tard, et persistera à le soutenir toute sa vie, que peu de temps avant l’éclatement de la rébellion Rolph avait accepté d’être le « pouvoir exécutif », celui qui dirigerait les opérations dans l’ombre jusqu’à ce que vienne le moment de révéler son identité. Rolph nia cette prétention et nulle preuve n’existe pour corroborer les assertions de Mackenzie. Il est toutefois évident que Mackenzie consulta Rolph et il semble que ce dernier ait été d’accord pour que Mackenzie continue à s’enquérir de l’état des esprits au nord de la ville à la fin d’octobre et en novembre. Plus tard en novembre, Rolph apprit également que Mackenzie avait fixé le jeudi, 7 décembre, pour le rassemblement des insurgés au nord de Toronto et pour la marche sur la capitale. Rolph, semble-t-il, n’eut rien à voir dans cette décision, mais il ne communiqua pas le renseignement aux autorités. Sa complicité alla apparemment beaucoup plus loin : de ce qu’on peut savoir, il ressort qu’il avait consenti, dans l’éventualité d’une victoire, à « assumer la direction du gouvernement civil », selon l’expression de John Charles Dent*.

Vu sa situation privilégiée dans Toronto et son accès facile aux nouvelles et aux rumeurs, Rolph apprit tard le 2 décembre que le gouvernement avait l’intention d’arrêter Mackenzie et de prendre d’autres mesures préventives. Rolph se rendit bien compte que l’insurrection serait étouffée dans l’œuf et il envoya un message à Samuel Lount* lui conseillant d’avancer sur la ville immédiatement avec 300 hommes afin de ne pas perdre l’avantage de la surprise. Lount reçut la dépêche le jour suivant et les rebelles commencèrent effectivement à se rassembler à la taverne de John Montgomery* lundi, le 4 décembre. Mackenzie était furieux de la tournure des événements car il y avait encore beaucoup à faire avant de pouvoir mettre en marche une opération fructueuse. Le même jour, il conféra avec Rolph à l’extérieur de la ville, et ce dernier lui conseilla apparemment de renoncer au soulèvement. Mais il était alors trop tard : les hommes avançaient déjà dans la rue Yonge.

Mardi, le 5 décembre, se produisit l’épisode le plus discutable de la longue carrière de Rolph. Dans la matinée, Head décida d’envoyer un message aux rebelles, sous la protection d’un drapeau parlementaire, leur conseillant de retourner paisiblement chez eux. Après avoir écarté un ou deux noms suggérés, il choisit Robert Baldwin et Rolph et ceux-ci consentirent à remplir la mission. Ils rencontrèrent les chefs des rebelles qui exigèrent que la communication du lieutenant-gouverneur leur soit présentée par écrit. Baldwin et Rolph retournèrent à la ville pour constater que Head avait décidé de ne plus parlementer avec les rebelles. Ils rapportèrent cette nouvelle aux rebelles, toujours sous la sauvegarde du drapeau parlementaire, et la mission prit fin. La controverse au sujet de l’affaire éclata plus d’un mois plus tard, lors de la capture de Lount ; celui-ci, avant son exécution, raconta que lors de sa première mission « [Rolph l’]avait d’un petit signe de l’œil attiré à l’écart, où il [le] pria de ne pas écouter le message mais de continuer [leurs] opérations ». Si l’allégation est exacte, Rolph a indiscutablement joué double jeu, il a véritablement trahi en se faisant passer pour un loyal émissaire du lieutenant-gouverneur tout en conseillant aux insurgés d’attaquer la ville. Dans sa version de l’affaire, Rolph soutint qu’il avait donné ce conseil à Lount lors de son second voyage, après avoir communiqué le message de Head, une fois terminée sa mission de paix.

À son retour en ville vers le milieu de l’après-midi de mardi, Rolph s’employa apparemment à presser les radicaux de s’armer pour se joindre aux hommes de Mackenzie dont l’arrivée, croyait-on, était imminente. Mais les heures s’écoulèrent, et, dans le cours de la soirée, on apprit que les rebelles, après un échange de coups de feu avec une garde d’avant-poste, avaient précipitamment battu en retraite. Aux environs de minuit, les troupes loyalistes étant nettement renforcées et de plus en plus confiantes, Rolph se rendit à l’évidence que la cause des insurgés était sans espoir et il leur envoya un messager leur conseillant de se disperser. Jusque-là, sa participation au mouvement n’était pas parvenue à la connaissance des autorités, mais, le matin du 6 décembre, lorsque le docteur Thomas David Morrison* fut mis en état d’arrestation et que les autorités firent perquisitionner à la maison et au bureau de Mackenzie, Rolph eut la conviction que les preuves de sa complicité seraient probablement mises au jour. Avec son sang-froid habituel, il quitta tranquillement le centre de la ville à pied, en direction ouest, vers un endroit où l’un de ses étudiants en médecine l’attendait avec un cheval sellé. Il fut intercepté une fois par des volontaires loyalistes puis autorisé à continuer sa route après qu’un docteur (un de ses anciens élèves) s’en fut porté garant ; après une nuit de cheval, il atteignit la rivière Niagara et gagna les États-Unis pour s’y exiler. Le 11 décembre, le lieutenant-gouverneur émit une proclamation dans laquelle il déclarait que des faits avaient été portés à sa connaissance indiquant que Rolph « avait été mêlé à la tentative perfide [...] de renverser le gouvernement de la province » et il offrait une récompense de £500 pour sa capture. Head affirma plus tard à lord Glenelg que « la preuve avait été faite que le docteur Rolph s’était révélé le [...] plus rusé, le plus sanguinaire, le plus perfide, le plus lâche et [...] le plus infâme de tous les traîtres qui nous ont récemment attaqués ». Il signala de plus que le 20 janvier 1838, Rolph, accusé d’avoir « comploté, conspiré et pris fait et cause pour les rebelles », avait été expulsé de l’Assemblée.

Rolph vécut au-delà de cinq ans aux États-Unis, surtout à Rochester. Au début, il manifesta quelque intérêt pour les activités des « Patriotes » le long de la frontière et il correspondit occasionnellement avec des exilés tant du Bas-Canada que du Haut-Canada. Il se dissocia bientôt de ces activités et recommença à s’intéresser à l’exercice de sa profession et à son enseignement médical. Quelques étudiants canadiens vinrent travailler sous sa direction. Il s’arrangea pour faire sortir de Toronto une bonne partie de ses biens, et sa femme alla le rejoindre. Il ne fait pas de doute que l’exil lui fut pénible, mais sa situation était infiniment plus confortable que celle de nombre de ceux qui avaient pris part à la rébellion, notamment de Mackenzie qui déclara par la suite que Rolph s’était bien gardé de le traiter en ami quand il avait été emprisonné à Rochester. Cette indifférence de la part de Rolph, en plus d’être caractéristique de l’homme, était peu surprenante si on songe aux accusations que Mackenzie avait publiées à son sujet. Mackenzie affirmait qu’il avait été tout au plus l’instrument de John Rolph, c’est-à-dire « du pouvoir exécutif », que Rolph avait anéanti toutes les chances de succès en changeant la date du soulèvement et que son apparition chez les insurgés avec le drapeau parlementaire avait démoralisé les hommes de troupe. Rolph rédigea une « Review of Mackenzie’s publications [...] » mais ne la publia pas ; il y accusait Mackenzie d’avoir mis en danger la vie et la liberté des réformistes, en laissant à Toronto la preuve des plans des rebelles et en rendant public le nom de ceux qui étaient reliés au mouvement. Il attribuait l’échec de la rébellion à la mauvaise direction de Mackenzie lui-même, en particulier au retard qu’il mit à marcher sur la ville quand eut pris fin la mission des parlementaires. Cette analyse, trouvée plus tard parmi ses papiers, était rédigée à la troisième personne et, comme d’habitude, ne fournissait aucune indication sur les faits et gestes ou les mobiles de Rolph.

L’amnistie promulguée en 1843 permit à Rolph de rentrer à Toronto au mois d’août de cette année. L’événement fut signalé par des commentaires de nature strictement partisane : l’Examiner salua le retour « de l’homme dont les grands talents sont de nature à ornementer n’importe quel domaine de la vie » ; à l’Assemblée, le docteur William Dunlop* remarqua que Rolph et d’autres « étaient restés dans l’ombre et avaient poussé à l’avant-scène des hommes qui les dépassaient en valeur afin qu’ils supportent le choc de la lutte. Si l’onctueux et astucieux traître qu’a été Rolph reçoit son pardon [...] pourquoi n’en serait-il pas de même pour Mackenzie ? » Rolph retourna dans son ancienne demeure et ne tarda pas à reprendre son école et sa pratique de la médecine. À cette époque, King’s College n’était qu’au stade de la mise en œuvre et l’école de Rolph s’adressait « aux étudiants en médecine qui n’ont pas l’intention d’entrer à l’université. [...] Ils suivront le cours habituel des études médicales [...] et seront préparés à obtenir leur diplôme du Medical Board. » Rolph réunit un personnel compétent, et l’école – reconnue juridiquement en 1851 sous le nom de Toronto School of Medicine – fut florissante pendant un certain temps.

Dans l’intervalle, Rolph avait de nouveau pris la vedette dans les journaux comme figure controversée. En avril 1848, le gouvernement de Robert Baldwin et de Louis-Hippolyte La Fontaine congédia le docteur Walter Telfer*, directeur médical de l’asile d’aliénés provincial, et le remplaça par le docteur George Hamilton Park, beau-frère de Rolph. Ce congédiement était tout à fait justifié, et Park semble avoir été un choix judicieux, mais dans la petite ville où tout ce qui touchait au « patronage » était scruté à la loupe et où foisonnaient les inimitiés personnelles, cet incident devint le centre d’âpres récriminations partisanes dans les journaux. L’affaire prit de l’ampleur lorsque Rolph, agissant en qualité de directeur suppléant en l’absence de Park, entra en conflit avec la commission chargée d’administrer l’asile. Les rapports personnels entre Baldwin et Rolph n’étaient jamais redevenus tout à fait les mêmes depuis l’incident du drapeau parlementaire, et les partisans de Baldwin voyaient les activités de Rolph d’un fort mauvais oeil. James Hervey Price* l’appelait « la canaille à l’âme noire » décidée « soit à démolir le ministère Baldwin soit à obliger le ministère à modifier le projet de loi sur l’asile d’aliénés pour donner tout pouvoir à Park afin que Rolph et son école de médecine puissent diriger l’asile à l’avantage de l’école ». Le fossé s’élargit encore lorsque le gouvernement Baldwin remercia Park en janvier 1849.

L’incident coïncida avec une aggravation de la scission au sein du parti réformiste : l’aile radicale ou « démocratique » (bientôt connue sous le nom de Clear Grits) devenait de plus en plus impatiente face à la politique modérée et prudente du gouvernement Baldwin. Les élections partielles de 1849 et de 1851 affermirent le pouvoir grandissant de ce groupement, et, à l’automne de 1851, las et découragé, Baldwin donna sa démission. C’est à Francis Hincks qu’il incomba de relever la section haut-canadienne du gouvernement et il décida pour la bonne harmonie du parti d’inclure deux Clear Grits dans le cabinet. L’homme que les grits voulaient par-dessus tout voir entrer au cabinet était Rolph.

Le motif pour lequel ils désiraient Rolph est moins clair. Comme dans bien d’autres cas, le rôle que joua Rolph dans la montée des Clear Grits est ambigu, quoiqu’on ait accusé celui-ci d’avoir écrit des articles contre Baldwin sous le couvert de l’anonymat dans l’Examiner. Peut-être les Clear Grits voulaient-ils au cabinet un porte-parole qui fût un orateur vigoureux et qui s’identifiait aux principes réformistes depuis plus de 25 ans. L’Examiner déclara : « Il n’y a pas un seul homme dans les rangs de notre parti que les tories craignent autant que le docteur Rolph. » En fait, comme le signalait le Globe en novembre, Hincks avait réussi un coup de maître. Dès que deux de leurs membres (l’autre étant Malcolm Cameron*) eurent accepté la responsabilité d’un poste dans le cabinet, les Clear Grits avaient les mains liées et étaient réduits à l’impuissance.

Rolph fut nommé commissaire des Terres de la couronne lorsque le gouvernement de Hincks et d’Augustin-Norbert Morin entra en fonction le 28 octobre 1851. Le gouverneur général, lord Elgin [Bruce], sans doute inquiet à l’idée que le ministre des Colonies puisse mettre en doute la sagesse d’avoir inclus dans le gouvernement un personnage « dont la conduite en 1837 n’avait pas été au-dessus de tout soupçon », signala que Rolph « était un Anglais, éduqué dans une de nos universités et dont un frère est rector ». En outre, le qualificatif de « rebelle » avait perdu beaucoup de son impact depuis la flambée de violence tory en 1849. Quelques semaines plus tard, lors des élections générales, Rolph se porta candidat dans le comté de Norfolk et remporta aisément la victoire. De fait, sa popularité chez les Clear Grits était si grande qu’on avait mentionné son nom comme candidat possible dans plusieurs circonscriptions.

Le gouvernement Hincks-Morin, qui détint le pouvoir jusqu’en septembre 1854, ne se distingua pas particulièrement et Rolph ne fit rien pour l’aider. Il se querella avec son collègue clear grit Malcolm Cameron et continua à affaiblir le moral des grits en évitant d’exercer des pressions au sein du gouvernement pour mousser les mesures à l’égard desquelles les grits avaient pris des engagements, notamment la sécularisation des réserves du clergé. Rolph avait perfectionné l’art de disparaître à la veille des mises aux voix critiques. Il semble avoir été plutôt inefficace au département des Terres de la couronne, et on le muta à la présidence du conseil et au bureau d’Agriculture en 1853. Un observateur prétend que Rolph, en tant que ministre, avait « démontré combien il était peu doué ». En 1853, bon nombre de réformistes s’écartaient de lui en raison de son association suivie avec Hincks, malgré le fait que les tractations de ce dernier relativement aux chemins de fer commençaient à être mises au jour. Le Globe dénonça Rolph comme « un homme au visage doucereux [...] astucieux, noir, intrigant, cruel, malfaisant, perfide [...] aux manières polies et insinuantes. [...] On le dit souple – ce qui est certain, c’est qu’il est rusé. » Hincks, qui avait lui-même été la cible des attaques du Globe plus souvent qu’à son tour, en vint à partager ce dur jugement le jour où Rolph, mécontent de la politique de Hincks et souhaitant rétablir sa position auprès des réformistes indépendants, quitta le gouvernement en septembre 1854. Le ministère bascula et les deux hommes se séparèrent au milieu d’accusations réciproques.

Trois événements dans la vie de Rolph pendant les années du gouvernement Hincks-Morin valent d’être cités. Le premier fut l’évocation, par un membre du parti conservateur de Toronto, William Henry Boulton*, de la controverse au sujet du drapeau parlementaire. Rolph devait apparemment s’attendre à une attaque dans ce sens parce qu’il avait pris la peine, deux mois plus tôt, d’obtenir une déclaration assermentée de Hugh Carmichael, celui qui avait été le porte-drapeau et qui était maintenant à l’emploi de Rolph ; sa déclaration corroborait point pour point la version de Rolph : il y affirmait qu’au cours de la mission elle-même, Rolph n’avait pas communiqué isolément avec Lount ou dit « quoi que ce soit qui fût non pertinent au drapeau parlementaire ou contre sa bonne foi ». Boulton accepta les explications de Rolph mais un autre membre de l’Assemblée, nul autre que Mackenzie, se sentit obligé de défendre la mémoire de Lount et de revenir sur toute l’affaire dans des discours, des éditoriaux et, pour finir, dans un pamphlet. David Gibson prépara une réplique à Mackenzie pour le compte de Rolph, mais ce dernier ne l’utilisa pas ; il écrivit à Gibson que « le temps n’[était] pas encore venu » de « réfuter » les accusations de Mackenzie.

Le second incident remettait en cause cette vieille histoire déjà débattue de l’asile d’aliénés. En 1853, le gouvernement, à l’instigation de Rolph, fit adopter un projet de loi touchant la réorganisation de l’asile ; par la suite, le docteur Joseph Workman*, un collègue de Rolph, fut nommé à la direction de l’hôpital, et un autre membre de l’école de Rolph devint médecin consultant. Cette réorganisation apporta une amélioration dans l’administration de l’hôpital mais l’événement, pour les détracteurs de Rolph, constitua un exemple de plus des méthodes sinueuses de Rolph.

Le troisième incident éveilla lui aussi les soupçons que Rolph utilisait son influence auprès du gouvernement pour servir les intérêts de son école de médecine. Dans ces années-là, le parlement siégeait à Québec et, par la force des choses, Rolph était loin de son école. Les lettres de son personnel indiquaient que l’école périclitait, étant dans l’incapacité de soutenir la concurrence avec la faculté de médecine de l’University of Toronto et souffrant probablement aussi de la compétition que lui livrait l’Upper Canada School of Medicine, de fondation récente et affiliée au Trinity Collège. En 1852–1853, un projet de loi fut adopté par le parlement dans le but de réorganiser l’université pour en faire un établissement doté du droit de faire passer des examens mais non pas d’enseigner, abolissant par le fait même l’enseignement dans les facultés de médecine et de droit. L’école de Rolph n’avait plus à soutenir la concurrence de l’université.

En 1854, lors des élections qui suivirent la dissolution du ministère Hincks-Morin, Rolph fut réélu dans Norfolk mais dans l’opposition cette fois. Il continua à faire partie de l’Assemblée jusqu’en 1857 mais assistait rarement aux séances et il était plus que jamais le représentant d’une époque révolue.

Pendant les 15 dernières années de sa vie, Rolph reprit sa carrière d’administrateur médical, mais avec un succès mitigé. En 1854, la Toronto School of Medicine s’affilia au Victoria Collège, permettant ainsi à ses diplômés d’obtenir un grade de cet établissement d’enseignement même si ce dernier était toujours situé à Cobourg. Deux ans plus tard, toutefois, tout le personnel de l’école de Rolph donna sa démission en bloc le même jour afin d’échapper à sa direction despotique et inefficace. Ces gens fondèrent un établissement rival sous l’ancien nom et prirent des mesures judiciaires qui empêchèrent Rolph d’utiliser ce nom. Néanmoins, les élèves de Rolph lui demeurèrent fidèles ; celui-ci engagea un nouveau personnel et continua à agir comme doyen de la faculté de médecine du Victoria Collège, lequel lui conféra le grade honoraire de docteur en droit en 1859. Pendant les dix années qui suivirent Rolph continua à jouir d’une haute considération comme professeur et il exerçait toujours sa profession en dépit de capacités amoindries à la suite d’une attaque d’apoplexie en 1861. Il n’était plus en mesure de remplir adéquatement ses fonctions de doyen mais refusait d’abandonner son poste. Finalement, au début de 1870, il fut effectivement contraint de se retirer et il alla demeurer chez sa fille et son gendre dans le comté de Perth où il mourut quelques mois plus tard.

Au moment de la mort de Rolph, les controverses reliées à sa carrière politique furent reléguées dans l’oubli ; on était tout disposé à lui rendre hommage en tant que chef réformiste, en tant que professeur de médecine et en tant qu’orateur, et aussi à glisser sur ses faiblesses. Néanmoins, 15 ans plus tard, la querelle surgit de nouveau à la suite de la publication du premier volume de l’ouvrage de Dent, The story of the Upper Canadian rebellion, qui discréditait Mackenzie et louangeait Rolph. Les vieux réformistes bondirent à la défense de Mackenzie, exhumèrent toutes les anciennes accusations selon lesquelles Rolph était sinueux, rusé, intéressé et ils ont vraisemblablement contribué à fixer le portrait qui prévaut généralement. La réserve habituelle de Rolph et l’absence de papiers personnels pertinents ne permettent pas de tracer un portrait complet et sympathique. Toutefois, la contribution qu’il apporta au mouvement réformiste naissant au cours des années 20 et à l’enseignement médical pendant une très longue période perpétue sa mémoire, et le personnage complexe qu’il était demeure toujours un sujet de fascination.

G. M. Craig

[John Rolph], Dr. John Rolph’s own account of the flag of truce incident in the rebellion of 1837, C. B. Sissons, édit., CHR, XIX (1938) : 56–59 ; The speech of the Hon. John Rolph, M.P.P., delivered on the occasion of the late inquiry into charges of high misdemeanors at the late elections, preferred against His Excellency Sir Francis Bond Head [...] (Toronto, 1837) ; Speeches of Dr. John Rolph and Christop’r A. Hagerman [...] on the bill for appropriating the proceeds of the clergy reserves to the purposes of general education [...] (Toronto, 1837).

S. E. Gibson, Willowdale, Ont., possède des papiers de David Gibson (mfm aux PAO).

Academy of Medicine, Toronto, William Thomas Aikins papers.— APC, MG 24, B24 ; B40, J. H. Price to George Brown, 28 déc. 1848.— MTCL, Robert Baldwin papers ; William Warren Baldwin papers ; J. H. Richardson, Reminiscences of the medical profession in Toronto, 1829–1905.— PAO, Clarke (Charles) papers ; Macaulay (John) papers, R. Stanton to J. Macaulay, 21 janv. 1830 ; Mackenzie-Lindsey papers.— PRO, CO 42/380.— Victoria University Library (Toronto), Victoria University records, papers relating to the Medical Department.— Coll. Elgin-Grey (Doughty), III : 917.— H.-C., House of Assembly, Journal, 1825–1838.— F. B. Head, A narrative (Londres, 1839).— Canadian Freeman (York [Toronto]), 1825–1827.— Colonial Advocate, 1826–1834.— Examiner (Toronto), 1843–1844, 1848.— Globe, 1848–1854.— Long Point Reformer (Simcoe, Ont.), 1853–1854.— Mackenzie’s Gazette (New York), 1838.— Mackenzie’s Weekly Message (Toronto), 1852–1854, comprenant des « extra » publiés sous le titre de Head’s flag of truce, or a defence of the memory of the late Colonel Samuel Lount [...] ([Toronto, 1854]).— North American (Toronto), 1850–1851.— Simcoe Standard and Agricultural, Commercial, and Literary Gazette (Simcoe, Ont.), 1852.— Canniff, Medical profession in U.C.— Dent, Upper Canadian rebellion.— C. O. Ermatinger, The Talbot regime ; or the first half century of the Talbot settlement (St Thomas, Ont., 1904).— [John King], The other side of the « story », being some reviews of Mr. J. C. Dent’s first volume of The story of the Upper Canadian rebellion, and the letters in the Mackenzie-Rolph controversy [...] (Toronto, 1886).— Lindsey, Life and times of Mackenzie.— G. M. Craig, Two contrasting Upper Canadian figures : John Rolph and John Strachan, SRC Mémoires, 4e sér., XII (1974), sect. ii : 237–248.— N. B. Gwyn, A chapter from the life of John Rolph, Academy of Medicine, Toronto, Bull., IX (1935–1936) : 137–144.— John Muggeridge, John Rolph – a reluctant rebel, OH, LI (1959) : 217–229.— M. A. Patterson, The life and times of the Hon. John Rolph, M.D. (1793–1870), Medical History (Londres), V (1961) : 15–33.

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

G. M. Craig, « ROLPH, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/rolph_john_9F.html.

Information à utiliser pour d'autres types de référence bibliographique


Permalien: https://www.biographi.ca/fr/bio/rolph_john_9F.html
Auteur de l'article:    G. M. Craig
Titre de l'article:    ROLPH, JOHN
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1977
Année de la révision:    1977
Date de consultation:    21 déc. 2024