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MURE, JOHN, homme d’affaires, juge de paix, officier de milice, homme politique et fonctionnaire, né probablement dans la paroisse de Kilmarnock, Écosse ; décédé le 17 janvier 1823 à Glasgow.
John Mure dut être attiré dans la province de Québec par le réseau d’anciens habitants écossais de l’Ayrshire et du Lanarkshire qui faisaient du commerce dans la colonie. Son oncle John Porteous, membre d’une famille de l’Ayrshire, s’était établi à Montréal dans les années 1760 et le cousin de ce dernier, John Paterson, était un associé de l’une des premières firmes britanniques installées à Québec, la Paterson and Grant. En 1782, Mure se trouvait déjà dans la province, sans aucun doute à Montréal, mais dès 1788 il était apparemment commis à Québec chez James Tod*, qui avait déjà travaillé pour la Paterson and Grant. En l’espace de quelques années, Mure se lança à son propre compte dans la traite des fourrures et l’importation.
Au cours des années 1790, profitant du développement économique sans précédent que le Bas-Canada et d’autres colonies britanniques d’Amérique du Nord allaient connaître jusqu’en 1815, Mure parvint à se tailler une place de choix parmi les marchands engagés dans le commerce transatlantique. Son entreprise, installée dans des magasins du quai de la Reine, dans la basse ville où il vivait, présentait la diversité typique des sociétés d’importation. Non seulement Mure importait-il des cargaisons de sel (surtout en provenance de Liverpool) et des produits comme du vin, de la vitre, des cordages et des « harengs d’Écosse », mais il vendait du blé aux enchères et offrait en vente de la morue séchée de la Gaspésie ainsi que de la farine produite dans les moulins d’Antoine Juchereau* Duchesnay à Beauport. En outre, plusieurs responsabilités lui étaient confiées en raison de ses liens avec d’autres marchands ; ainsi, il était le fondé de pouvoir ou le curateur des biens de nombre de gens, dont Hugh Finlay* et Jean Renaud*. En 1796, avec Tod et deux autres personnes, il fit l’acquisition des fiefs de la Grosse-Île et de Grandville, renommés pour leur foin, leur bois et la proximité des pêcheries de marsouin et d’anguille. Le 11 janvier 1798, en épousant sa cousine Margaret Porteous, fille de John Porteous, il consolida sa position parmi les marchands écossais de la colonie. Le mariage, célébré par le ministre presbytérien Alexander Spark*, eut pour témoins les marchands James McGill* (ami de la famille Porteous), John Blackwood* et Isaac Todd*. L’union connut cependant une fin tragique : Margaret Porteous mourut en 1799 et l’enfant auquel elle avait donné naissance mourut en bas âge.
Entre 1795 et 1799 environ, grâce encore une fois à ses liens avec des gens de l’Ayrshire, Mure entra dans une vaste société qui était née de la fondation à Montréal, en 1795, de la Parker, Gerrard, and Ogilvy. En 1800, cette association regroupait William Parker, originaire de Kilmarnock, Samuel Gerrard*, John Ogilvy*, John et George* Gillespie, Thomas Yeoward et Mure. Par l’intermédiaire de sociétés ou de bureaux installés à Londres, à Québec (où Mure dirigeait les activités), à Montréal et à Michillimakinac (Mackinac Island, Michigan), les associés faisaient la traite des fourrures, ravitaillaient des trafiquants comme Robert Dickson, exploitaient un service d’expédition transatlantique et approvisionnaient des marchands à Detroit, à Queenston et à Kingston, notamment Thomas Clark et Richard Cartwright*. Même si aucune des firmes membres de cette société en nom collectif n’était énorme en elle-même, elles formaient ensemble une organisation puissante, la plus structurée après la Hudson’s Bay Company et la North West Company. De 1799 à 1803 par exemple, Mure et la Parker, Gerrard, Ogilvy and Company exportèrent ensemble plus de potasse du Bas-Canada que quiconque, laissant loin derrière eux James Dunlop* et James Irvine.
Des circonstances indépendantes de sa volonté amenèrent Mure à participer peut-être plus qu’il ne l’aurait souhaité à la traite des fourrures. En juillet 1800, Ogilvy avait pris l’initiative de former une association au sein de la New North West Company (appelée parfois XY Company), elle-même fondée peu de temps auparavant pour concurrencer la North West Company. Les membres de la Parker, Gerrard, Ogilvy and Company se trouvaient à en faire partie sans même avoir été consultés, et Gerrard, George Gillespie et Yeoward décidèrent de la quitter en octobre. Selon Mure, Ogilvy n’avait eu « d’autre choix que de former [cette] association ou de sacrifier presque complètement l’expédition » qu’il avait envoyée dans le Nord-Ouest. En dépit du désaccord survenu parmi ses membres, la Parker, Gerrard, Ogilvy and Company devint l’un des fournisseurs de l’association, formée notamment d’Ogilvy, de Mure, d’Alexander Mackenzie* et de James Leith*. En fait, en octobre 1803, on réorganisa même la société en nom collectif dans le but premier d’y inclure MacKenzie et ainsi d’engager davantage la société dans la traite des fourrures. Par la suite, cependant, d’après Robert Gillespie*, commis de la compagnie montréalaise, « cette branche d’activité devint ruineuse à cause de la situation politique de [...] l’Europe, lieu de vente d’une grande partie des fourrures du Canada ». Mure essuya aussi des pertes à titre d’actionnaire de la New North West Company, car cette société subissait non seulement les contrecoups du blocus des ports européens mais aussi les effets d’une rude concurrence dans le Nord-Ouest. Le 5 novembre 1804, incapable d’absorber plus longtemps ses pertes, la société fut accueillie comme coassociée au sein de la North West Company. En une semaine, les associés de la New North West Company se répartirent leurs actions dans la North West Company remaniée ; Mure détenait trois actions en commun avec Ogilvy. La société en nom collectif fut de nouveau réorganisée en 1807 ; à ce moment-là, la firme de Mure prit le nom de John Mure and Company.
Mure eut plus de succès dans le commerce du bois et le transport maritime, qui étaient alors en pleine expansion à Québec. En 1802 et 1807, pour entreposer du bois, il loua des ursulines l’anse des Mères, près de la ville. À compter de juin 1804, il se joignit d’abord au marchand Henry Usborne*, puis à la Blackwood, Paterson and Company et enfin à la Monro and Bell pour négocier le droit d’utiliser et de louer à d’autres les anses situées entre l’anse des Mères et Pointe-à-Pizeau. Avant le printemps de 1806, Mure forma avec James Hare Jolliffe une société d’exportation de bois équarri et de bois de sciage. Moins d’un an après, les associés devenaient les représentants de la Scott, Idle and Company, de Londres, qui faisait le commerce des vins et des douves et fournissait à l’Amirauté une grande quantité de mâts, d’espars et de douves venant des colonies. Plus d’un concurrent tenta de ravir. à cette entreprise son contrat avec l’Amirauté et d’enlever à la Mure and Jolliffe son titre de représentant ; Usborne, en particulier, s’efforça d’empêcher les constructeurs de navires de la colonie de « faire affaire » avec Mure et Jolliffe. Le bois équarri et les espars de Mure et de Jolliffe devinrent la cible des voleurs et des saboteurs, mais eux-mêmes ne se montraient pas moins féroces dans leur lutte contre leurs rivaux.
De 1807 à 1813, les associés achetèrent du bois équarri et des planches à des sous-traitants établis à Plattsburgh et à Peru, dans l’état de New York, à Kingston et à York (Toronto), dans le Haut-Canada, ainsi qu’à John Crysler* et à Joel Stone, le long du haut Saint-Laurent. La société procédait souvent à des coupes sauvages dont les porte-parole des régions touchées, le révérend Alexander McDonell*, de Glengarry, par exemple, se plaignaient en vain. En 1809, la Mure and Jolliffe, la John Mure and Company et la société londonienne Linthorne and Jolliffe étaient si bien implantées dans le commerce du bois qu’elles louaient presque toutes les anses de Québec. Elles remplissaient bien des navires avec leur bois équarri et leur bois de sciage, et lorsqu’un de ces bâtiments accostait à Québec, Mure vendait le lest, constitué en général de sel. Son association avec Jolliffe prit fin lorsque, vers 1813, celui-ci fit faillite avec Benjamin Linthorne ; Mure, Peter Patterson* et James Henderson furent alors nommés syndics de la compagnie londonienne.
À Québec, Mure occupait une position de premier plan, car c’est lui qui dirigeait le service de transport transatlantique des grandes sociétés auxquelles il appartenait. De 1800 à 1811, il fit l’acquisition d’au moins 16 schooners, bricks et autres bateaux, dont un grand nombre avaient été construits ou reconstruits pour lui par des constructeurs de navires aussi éminents que John* et Alexander* Munn ou John Goudie. Parmi ces bâtiments, il en était un « neuf, remarquablement beau, rapide, étanche, aux bordages fixés par du cuivre », le Fame ; il était petit en comparaison des énormes navires marchands de l’East India Company mais, de ses 876 tonneaux, il éclipsait la plupart des bâtiments ancrés à Québec. Pour faire connaître l’efficacité du service de transport transatlantique qu’il dirigeait, Mure faisait paraître dans les journaux des notices sur les bateaux qui réussissaient à faire la traversée en un temps particulièrement court. En avril 1801, il annonça que le Nancy était venu de Liverpool en 28 jours seulement, ce qui constituait « la traversée la plus courte jamais vue à partir de la Grande-Bretagne ». Moins de trois semaines plus tard, le Nancy était prêt à reprendre la mer pour terminer le premier des deux allers-retours annuels (printemps et automne) que les transatlantiques faisaient habituellement à l’époque entre l’Amérique du Nord et la Grande-Bretagne.
Mure pratiquait l’intégration des activités et c’était là un élément important de ses entreprises. Il fournissait souvent les madriers et les planches nécessaires à la construction des navires et exploitait un chantier naval près du pont Dorchester. Plusieurs bâtiments étaient enregistrés au nom de Mure et de ses associés dans le commerce canadien, notamment Jolliffe, Linthorne, Christopher et Jonathan Idle, ou de ses coassociés de Londres et de Montréal. Tous les membres de la société en nom collectif avaient accès aux navires que Mure possédait en propre et à la flottille dont il était le représentant. Les historiens ont longtemps soupçonné qu’il y avait un lien entre le secteur de la traite des fourrures et celui de la construction des navires ; l’existence en est attestée par l’Olive Branch, navire de 474 tonneaux construit par Mure seul en 1809 pour transporter à Londres le produit canadien dont chaque cargaison représentait encore la plus haute valeur parmi toutes les exportations : les fourrures. Par ailleurs, plusieurs faits témoignent de l’ampleur des intérêts commerciaux de Mure. Pendant la brève saison maritime, la congestion régnait autour de son quai, des navires arrivant ou partant pour les Antilles ou la Grande-Bretagne et, durant les guerres napoléoniennes, circulant parfois armés ou en convois. On peut mentionner encore les différends de Mure avec les douaniers, la réclame importante qu’il faisait, les enchères qu’il tenait au bord de l’eau, sans oublier son rôle de fournisseur de l’armée.
Mure prit d’autres mesures pour consolider sa base commerciale à Québec. En 1809, il obtint du gouvernement un bail de 21 ans pour la location du quai du Roi, rue Champlain. Cette vaste surface de chargement, de déchargement et d’entreposage devint le foyer de ses activités ; plus tard, Mure partagea le quai avec l’Irvine, McNaught and Company [V. James Irvine]. L’année suivante, grâce à un emprunt de £2 095 contracté auprès du marchand Étienne-Claude Lagueux, Mure acheta de John Richardson, un de ses amis intimes et exécuteur testamentaire de William Grant*, la partie sud-ouest du tout nouveau faubourg Saint-Roch. Cette transaction allait s’avérer extrêmement profitable : Mure créa 166 lots dont les loyers lui rapporteraient, dès 1823, près de £590 par an. En 1811, il fit don d’un terrain dans Saint-Roch pour la construction d’une église catholique.
Les nombreux liens que Mure avait dans le monde des affaires contribuèrent sans doute beaucoup à sa réussite à Québec, où il devint de plus en plus important, tant dans le commerce que sur la scène publique. En mars 1799, il avait été élu président de la Société du feu et, en juin, on le nomma juge de paix. L’ingénieur militaire britannique George Thomas Landmann* a décrit Mure comme « un magistrat actif, un homme persévérant, extrêmement optimiste, un bel Écossais corpulent, aux épaules carrées, un parfait gentilhomme, assez content de ses capacités en tant que magistrat ». En 1800, il devint enseigne dans le Quebec Battalion of British Militia. Toujours en 1800, il se présenta aux élections générales, dans Gaspé, mais il fut battu à plate couture par William Vondenvelden*. Quatre ans plus tard, résolu à mesurer sa popularité dans la circonscription de la Basse-Ville de Québec en se portant candidat à la chambre d’Assemblée, il fit face à un « torrent d’influence indue » et fut défait de justesse par le marchand John Young*, élu deuxième député. Selon un observateur, Mure perdit en raison de son « amour immodéré de la gloire ». Ce sont des Canadiens surtout, plutôt que des Britanniques, qui avaient voté pour lui. Quelques semaines plus tard, cependant, il remportait un des sièges de la circonscription d’York, dans la vallée de l’Outaouais. Entre-temps, en 1802, il était entré au Board of Pilots de Québec et, l’année suivante, avait été nommé commissaire chargé de réglementer la navigation sur le Saint-Laurent. De 1807 à 1811, il fut coroner intérimaire du district de Québec. En 1809, James Irvine, John Jones*, lui-même et d’autres grands marchands de la ville lancèrent le Committee of Trade de Québec, afin de promouvoir leurs intérêts sur les marchés impériaux.
À la chambre d’Assemblée, Mure devint l’un des principaux représentants de la communauté des marchands. Lors des débats et au sein de comités, il défendit leurs intérêts quand était soulevée une question à incidence commerciale, que ce soit la réglementation du commerce du bois ou les désertions de navigateurs appartenant à la marine marchande. En 1805 et 1806, il se battit pour que les nouvelles prisons soient financées par un impôt sur les terres plutôt que sur les importations, position que soutenait à Londres la sir Alexander Mackenzie, Gillespie, Parker and Company avec qui il était associé. Après que Young et Richardson eurent quitté l’Assemblée en 1808, Mure s’y imposa comme le principal porte-parole du parti des bureaucrates, qui appuyait le gouverneur sir James Henry Craig* contre le parti canadien. Inquiet des guerres napoléoniennes et de la perspective « menaçante » que le Bas-Canada ne tombe aux mains d’une puissance étrangère, Mure s’opposa aux efforts que l’Assemblée nationaliste déployait pour s’assurer le contrôle des dépenses publiques. En outre, il soutint en 1809 que le Juif Ezekiel Hart* avait le droit de siéger à l’Assemblée et, révisant sa position sur la candidature des juges, il prit en février 1810 le parti de Pierre-Amable De Bonne*.
Après avoir d’abord refusé de se présenter aux élections de 1810, Mure changea d’avis et fut élu avec Pierre Bruneau* dans la Basse-Ville. Pendant les quatre années où il représenta cette circonscription, il croisa le fer avec les porte-parole du parti canadien au sujet des dépenses publiques, des questions de milice, de la menace d’un conflit armé avec les États-Unis et, pendant la session de 1812–1813, c’est-à-dire en pleine guerre, au sujet de l’épineuse question de la loi martiale. Le 6 janvier 1812, sur la recommandation du gouverneur sir George Prevost*, il avait été fait membre honoraire du Conseil exécutif ; le 26 juin, il en devint membre à part entière, avec droit de vote. En 1811, il avait été nommé commissaire chargé de la construction d’une prison et d’un palais de justice à Québec et commissaire chargé de faire dresser les plans d’un nouvel édifice parlementaire.
Mure participa à la guerre de 1812 tant en qualité d’officier de milice que de marchand. En mars 1812, il avait été promu capitaine dans le 3e bataillon de milice de la ville de Québec. L’année suivante, il devint major du bataillon de milice de l’île d’Orléans puis du 6th Select Embodied Militia Battalion. Étant à la fois officier supérieur et commerçant chevronné, il siégea à un conseil formé en août 1812 pour créer un bureau qui superviserait l’émission, par le gouvernement, des billets de l’armée [V. James Green], émission que Mure et d’autres avaient recommandée à Prevost comme monnaie d’échange supplémentaire. Ces billets stimulèrent l’économie de la province et Mure en manipula un grand nombre dans ses transactions personnelles. Après la guerre, en 1816, il appuya le projet de fonder une banque qui viendrait remédier à la pénurie de numéraire résultant de la fin de l’émission des billets de l’armée et qui fournirait les gros capitaux dont avaient besoin le commerce du bois et les autres secteurs montants de l’économie. Mure fut aussi l’un des premiers promoteurs de la Bourse de Québec, fondée en 1816 pour faciliter la cueillette de renseignements commerciaux et les transactions commerciales ; en mai 1817, il en était l’un des vice-présidents.
À compter de 1814, Mure consacra beaucoup d’énergie à des associations éducatives telles que le Book Society Committee, qui donnait des livres aux écoles. Au printemps de 1815, il appuya vigoureusement l’ouverture d’une école non confessionnelle par le Committee for Promoting the Education of the Poor in Upper and Lower Canada, fondé sur l’initiative du révérend Thaddeus Osgood*. Mure ne tarda pas à devenir président de la section bas-canadienne de ce comité, qui réussit à ouvrir une école à Québec dès la mi-mai. En 1815, il devint aussi commissaire chargé d’administrer les biens des jésuites, dont les recettes servaient a financer l’éducation. L’année suivante, il fut nommé commissaire chargé de la construction et de la réparation des églises du district de Québec.
Pendant les années de guerre et d’après-guerre, les entreprises commerciales auxquelles participait Mure connurent des réaménagements importants. En mai 1812, la John Mure and Company s’était retirée de la société en nom collectif, peut-être en partie à cause des graves revers que celle-ci avait subis dans la traite des fourrures. En raison de la guerre et de la complexité des activités de la société, il fallut attendre au moins jusqu’à l’automne de 1814 pour qu’ait lieu à Québec et à Londres la liquidation de ses biens, y compris les navires, le bois équarri et le bois de sciage, les terrains, les immeubles et les dettes actives. En octobre 1814, Mure écrivait à Gerrard : « Je suis très impatient d’en arriver à diriger seul mes affaires. » Aussi acheta-t-il à Ogilvy la part des intérêts que celui-ci avait dans la North West Company (qui allait être vendue avec sa part à Edward Ellice* par ses héritiers en 1832) et réorganisa-t-il la John Mure and Company. Il conserva néanmoins quelque forme d’association avec ses anciens collègues, outre celle qu’exigeait la liquidation de leurs affaires ; en octobre 1814, il conseillait encore Gerrard sur la répartition géographique des associés et sur les responsabilités à assigner à chacun. Lui-même demeura dans le commerce d’importation à un moment où l’inflation frappait les produits importés, mais il fit en sorte de réduire la participation de sa compagnie à la traite des fourrures. Même s’il était toujours actionnaire de la North West Company, il servait d’agent maritime pour lord Selkirk [Douglas*], avec qui il correspondit au sujet du conflit qui naquit en 1814 entre la North West Company et la Hudson’s Bay Company à la colonie de la Rivière-Rouge. Mure recommanda alors à Selkirk de vendre les droits de traite de la Hudson’s Bay Company ou de louer toute son organisation de traite à la North West Company. Cette dernière solution aurait cependant nécessité la reconnaissance de la charte de la Hudson’s Bay Company par la North West Company, ce que, Mure le savait, ses associés n’étaient pas « disposés à faire ». En mai 1816, Selkirk rejeta les suggestions de Mure en les qualifiant de « totalement et radicalement inadmissibles ». Apparemment, ce désaccord ne provoqua pas de rupture dans leurs relations d’affaires.
À la fin de 1815, au cours d’une période de sérieux malaise économique dans le Bas-Canada, Mure s’employa à louer son chantier naval et son dépôt de bois. En février 1817, il mit en location un entrepôt construit depuis peu sur le quai du Roi ; d’une capacité de 30 000 boisseaux, c’était l’un des plus vastes du bord de l’eau. Entre ce moment et le mois d’août, il liquida la John Mure and Company, fit de William Finlay (son premier commis et le cousin de son neveu William Steel) son mandataire personnel et le fondé de pouvoir de la Mure and Jolliffe, puis annonça son intention de s’embarquer pour la Grande-Bretagne le 10 août.
D’autres raisons rendaient ce moment propice au départ de Mure, qui était dans le Bas-Canada depuis 35 ans environ. En novembre 1816, sa fille Charlotte, qu’il avait eue avec une maîtresse, Louise Picard, avait épousé un autre marchand de Québec, François-Xavier Pinguet, et un arrangement semblait possible pour la garde des deux garçons, James et William, qui étaient nés d’une liaison de Mure avec Marie-Anne Chasseur. De toute évidence, Mure avait mené une vie de gentleman : il fallut trois jours pour vendre aux enchères des effets qui comprenaient des meubles en acajou, de l’argenterie, plus de 300 livres, des gravures, des fusils, de l’attirail de pêche, des éperons d’argent et des épaulettes d’or, des vins de choix et, entre autres voitures, un cabriolet de fabrication londonienne. Il laissait la colonie à un moment où elle traversait une période relativement calme sur le plan politique [V. sir John Coape Sherbrooke].
Installé à Glasgow, Mure ne se désintéressa pas du Bas-Canada et correspondit avec d’autres membres du groupe des marchands de Grande-Bretagne qui avaient déjà travaillé au Canada. De 1818 à sa mort, il fit faire au moins 14 ventes judiciaires pour se faire rembourser des dettes ; dans la plupart des cas, il s’agissait de débiteurs canadiens. Quand, en 1819, l’église St Andrew, de Québec, chercha un successeur à Alexander Spark, elle confia à Mure et à John Greenshields le mandat d’en trouver un ; ils proposèrent James Harkness et versèrent de l’argent pour faciliter la reprise des offices religieux. En 1820, de toute évidence à la demande de Selkirk, Mure accepta d’aider un employé de la Hudson’s Bay Company, Colin Robertson*, à se libérer de ses dettes.
John Mure mourut à Glasgow, en 1823, mais il habitait à Dalserf House, localité située à 16 milles au sud-ouest de la ville. Parmi ses effets mis à l’encan, au mois de mars, se trouvaient 2 400 bouteilles de vin. Mure léguait plus de £10 150, principalement à des parents lointains ou proches, y compris sa fille et ses fils, ces derniers étant sous la garde de William Finlay à Québec. De plus, il avait prévu des pensions pour Louise Picard et Marie-Anne Chasseur.
ANQ-M, CN1-187, 28 août 1816 ; CN1-269, 8 oct. 1795 ; CN1-290, 19 juin 1782, 20 déc. 1784, no 1913.— ANQ-Q, CE1-66, 11 janv. 1798 ; CN1-16, 31 août, 25 sept., 13 oct., 12, 26, 28 nov. 1807, 23, 30 juill. 1808, 18 janv., 28 avril, 17 oct. 1809, 22 févr., 11. sept. 1810, 6 mars, 8 avril, 11 mai, 27 juill., 29 nov., 18 déc. 1811, 31 janv. 1817, 15 août, 20 oct. 1823 ; CN1-26, 8 avril 1808, 2 mai 1810 ; CN1-49, 26, 28 nov. 1814 ; CN1-178, 10 avril 1804 ; CN1-197, 22 juill. 1816 ; CN1-230, 27 avril 1802, 20 sept. 1807.— APC, MG 19, A2, sér. 3, 173 ; E1, sér. 1, 6 : 1993–1995, 2074–2075 ; 7 : 2184–2186, 2227–2230 ; 8 : 2811–2814 ; 15 : 4860–4861 (copies) ; MG 23, HII, 1, vol. 1 : 36–37 ; MG 24, B1, 2 : 425–426 ; 20 : 77–85 ; 188 : 3818–3822, 3824, 3826 ; D8 : 189–190 ; L3 : 7482–7483, 7504–7505, 7512–7513, 7519–7522, 8107–8108, 8127, 8847–8851, 8853–8859, 8910–8912, 8928, 8930–8941, 8953–8959, 8960–8967, 8972–8973, 25039–25040, 25718–25725 ; MG 30, D1, 22 : 656–681 ; MG 55/24, no 40 (William Hutchison) ; RG 1, L3L : 172, 572, 580, 649–651, 705, 2765–2766, 3002, 3019, 33742–33951, 37580–37586, 72641–72657, 72772–72791, 88985–89016, 92039–92076, 95851–95852 ; RG 4, A1 : 21707–21711, 21733, 24515, 24812–24813, 30322, 32890–32892, 35083, 35715, 37252, 38558, 39612, 41030–41032, 41101–41103, 41850 ; 144 : 195–202 ; 167 : 85 ; B 17, 41, 25 mars 1820 ; B46, 2 : 667–669 ; RG 5, A1 : 2872–2875, 3657–3658, 3770–3773, 3901–3902 ; RG 8, I (C sér.), 14 ; 110 ; 114 ; 115E–115F ; 117 ; 279–280 ; 329–330 ; 363 ; 372 ; 388–389 ; 599 ; 688E ; 704 ; 909 ; 1061 ; 1203 1/2 ; 1220 ; 1223–1224 ; 1695 ; 1717 ; RG 9, I, A5, 2 : 171 ; RG 42, E1, 1381–1382 ; RG 68, General index, 1651–1841 : 59, 70, 161, 223–224, 226, 259, 271, 278, 280, 336, 338, 344–346, 348, 351–352, 543, 637.— Arch. judiciaires, Québec, Testament olographe de John Mure, 13 nov. 1823 (Voir P.-G. Roy, Inv. testaments, 3 : 102).— ASQ, Lettres, Z, 41 ; Polygraphie, XXV, no 19H.— AUM, P 58, U, Mure à Gerrard, 6 nov. 1800.— NLS, Dept. of
David Roberts, « MURE, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mure_john_6F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/mure_john_6F.html |
Auteur de l'article: | David Roberts |
Titre de l'article: | MURE, JOHN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
Année de la révision: | 1987 |
Date de consultation: | 2 déc. 2024 |