McCALLUM, JAMES, homme d’affaires, seigneur, fonctionnaire et homme politique, né vers 1762 ; il épousa une prénommée Janet, et ils eurent au moins dix enfants ; décédé le 19 décembre 1825 à Québec.
En 1794, James McCallum était maître boulanger rue Saint-Pierre, dans le quartier des affaires de Québec. Cette année-là, il s’associa aux frères Philip et Nathaniel Lloyd pour exploiter les pêcheries et territoires de chasse du Labrador et y faire de la traite avec les Indiens. McCallum, qui avait apparemment des capitaux, devait acheter un bateau, fournir les vivres et le matériel, puis mettre les produits en marché, le tout en retour de la moitié du bénéfice. Toutefois, dès mars 1797, les associés ne s’entendaient plus et McCallum, qui n’avait pas respecté ses engagements, vendit ses intérêts à une compagnie rivale, la Lymburner and Crawford, pour la somme de £622. Les frères Lloyd poursuivirent McCallum en justice ; il semble qu’en 1799 ils le forcèrent à dissoudre son association avec eux moyennant une compensation considérable, mais l’affaire mit des années à se régler.
McCallum s’était désintéressé de son contrat avec les frères Lloyd parce qu’il désirait se lancer dans le commerce des céréales et de la farine sur la rive sud du Saint-Laurent, en aval de Québec. En 1796, il avait acquis pour £438 comptant le titre de seigneur ou de coseigneur de L’Islet-de-Bonsecours. En son propre nom aussi bien qu’avec Pierre Casgrain, de Rivière-Ouelle, il se mit à acheter de grandes quantités d’orge pour la brasserie et la distillerie que John Young* exploitait près de Québec. En février 1798, McCallum et John McCallum, de l’île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard), s’associèrent à Casgrain pour faire le commerce du grain et d’autres produits de la rive sud et spéculer sur ces denrées. James McCallum devait non seulement avancer la moitié du capital d’exploitation, mais aussi construire un entrepôt dans la paroisse de Saint-Roch-des-Aulnaies et gérer les activités de la société à Québec. Casgrain résidait à Rivière-Ouelle et John McCallum, probablement à Saint-Roch-des-Aulnaies. En mars, James McCallum et Casgrain convinrent en outre de faire en commun, pendant sept ans, tous leurs achats de grains sur la rive sud et de réserver chaque année les 100 000 premiers minots à Young, dont ils étaient apparemment les seuls fournisseurs dans cette région.
En janvier 1801, McCallum diversifia ses activités en achetant de Young, pour £3 750, les deux tiers du quai St Andrew, situé dans un endroit stratégique à Québec ; il en acquit l’autre tiers en mars lors d’une vente judiciaire. Il fit construire à grands frais deux vastes entrepôts de pierre sur ce quai qu’il loua à bail jusqu’en 1805, pour la somme de £500 par an, d’abord à Henry Caldwell* et ensuite à la Monro and Bell [V. David Monro] ; en 1812, il en tirait déjà un revenu annuel de £1 000. McCallum continuait d’approvisionner Young, dont la société appelée Young and Ainslie lui devait déjà près de £3 000 en octobre 1803. Young payait une partie de ses céréales en bière et en spiritueux, que McCallum vendait peut-être au détail dans une taverne de la rue Saint-Pierre et en gros à des gens comme Casgrain (qui avait accepté de n’en acheter que de lui) et le marchand John Painter*.
McCallum possédait en outre des moulins à farine. En 1803, il loua le moulin seigneurial de L’Islet-de-Bonsecours au meunier Archibald McCallum, qui était probablement un parent ou un membre de son clan, en échange des deux tiers de la mouture. Neuf ans plus tard, il le loua à un autre meunier moyennant le quart du bénéfice et le droit de faire moudre son grain à bon prix. En 1809, il avait acheté lors d’une vente judiciaire un grand moulin à Beauport, qui appartenait à Young. À compter de 1813 au moins, il loua d’Antoine-Louis Juchereau Duchesnay, seigneur du lieu, une partie des terres qui entouraient le moulin pour y faire la culture des céréales. Dès le début, il produisit de la farine pour sa boulangerie, pour la vente locale et pour l’exportation ; il l’expédiait, avec du blé, dans des navires loués de John Goudie et probablement d’autres personnes. En 1818, il devint inspecteur des farines à Québec et, deux ans plus tard, examinateur des candidats au poste d’inspecteur.
Dès 1815, McCallum fondait avec un de ses fils, John, la James McCallum and Company, qui vendait des spiritueux jamaïquains et du rhum, du sel, de l’huile, des douves, des pois et du grain. En avril 1817, elle obtint un contrat de £4 450 en vertu duquel elle devait approvisionner en semences les commissaires du gouvernement, qui les distribueraient aux fermiers touchés par la récolte désastreuse de l’automne précédent.
En juin 1813, McCallum avait acheté la St Roc Brewery de la femme de Young, Christian Ainslie, qui était submergée par les dettes de son mari. Le prix convenu était de £16 000, plus £2 177 pour les stocks en magasin ; dès septembre, McCallum avait tout payé. Il entreprit sans délai des travaux, qui à la fin coûtèrent probablement plus de £1 000 et comprenaient la construction d’un grand quai, qu’il fallut cinq ans pour achever. En outre, il embaucha un brasseur et un malteur, qu’il payait respectivement £150 et £90 par an, et se mit bientôt à importer du houblon de la James Hunter and Company de Greenock, en Écosse. Il semble qu’il fabriquait des contenants pour la bière et les spiritueux car, en 1815, la James McCallum and Company obtint du Transport Board des commandes de tonneaux et de fûts totalisant environ £8 000. Au début des années 1820, la brasserie était exploitée par la McCallum and Sons, qui se composait de James et de deux de ses fils, James et Duncan.
McCallum mit également en valeur des propriétés foncières. En 1802, il avait acheté plusieurs lots dans le canton de Godmanchester et, quatre ans plus tard, il loua de la couronne 1 168 acres dans celui de Hemmingford. En avril 1810, il paya à Jacob Mountain la somme de £833 pour quelque 4 000 acres qui venaient juste d’être concédées à l’évêque anglican dans le canton de Sherrington. En juin 1813, il acheta de Young environ 7 200 acres dans le même canton, moyennant £1 672. Son intérêt pour le canton de Sherrington tenait à ce qu’il y avait là une possibilité de produire rapidement du grain. Dans sa description du Bas-Canada publiée en 1815, l’arpenteur général Joseph Bouchette* notait que Sherrington était entouré de villages et que, « possédant en lui-même de grandes ressources pour les habitans, [il] deviendra[it] probablement dans quelques années un terrain trèsfertile et très-précieux ». En 1824, afin de mettre un terme à de coûteux litiges avec les Canadiens qui étaient déjà établis sur les terres au moment où il en avait fait l’acquisition, et en échange d’une promesse du gouvernement de concéder les réserves du clergé comprises à l’intérieur de leurs limites, McCallum obtint que ses propriétés du canton de Sherrington soient converties en seigneuries sous les noms de Saint-James et de Saint-Normand. Environ quatre ans plus tôt, il avait acheté de Bouchette 700 acres dans le canton de Hinchinbrook, pour lesquelles les lettres patentes n’avaient pas encore été délivrées.
Par ailleurs, McCallum louait plusieurs maisons qui lui appartenaient dans la basse ville de Québec, généralement à des fins commerciales. À titre de propriétaire immobilier, il avait été membre de la Société du feu de Québec et avait siégé, à l’occasion, au sein de son conseil d’administration. Actionnaire de la Compagnie d’assurance de Québec contre les accidents du feu dès 1819, il en fut l’un des administrateurs à compter de 1820. Ces titres, comme son élection en 1818 au conseil d’administration de la Banque de Québec, de fondation récente, faisaient de lui un des chefs de file du milieu des affaires québécois.
Apparemment, McCallum était aussi déterminé en politique qu’en affaires. En 1817, il battit John Neilson* lors d’une élection partielle dans la circonscription de Québec, où Beauport était situé, mais sa victoire fut annulée après que Neilson eut prouvé à la chambre d’Assemblée qu’il avait employé des hommes de main et versé des pots-de-vin. Neilson fut élu au début de 1818. Lors des élections générales de mars 1820, McCallum se retira de la course dans la circonscription de Devon, qui comprenait L’Islet-de-Bonsecours, après avoir recueilli seulement quatre voix en deux jours, et fut défait par Neilson et Louis Gauvreau dans la circonscription de Québec. Il fit valoir que Félix Têtu, directeur du scrutin dans Québec, avait accordé par erreur une faible majorité à Gauvreau, mais il semble que sa protestation fut rejetée. McCallum réussit cependant à se faire élire dans la circonscription de la Basse-Ville de Québec en juillet. Il en fut député jusqu’en 1824, puis perdit son siège au profit de Thomas Ainslie Young*. Il soutint que ce dernier avait recouru à la corruption, mais l’Assemblée n’examina jamais à fond sa plainte.
À compter de 1800, l’expansion rapide des affaires de McCallum reposait de plus en plus sur des capitaux d’emprunt. Cependant, en juin 1813, il avait dépassé la mesure en achetant la St Roc Brewery et les terres du canton de Sherrington. En 1814, il devait £2 200 à un forgeron de Québec, David Douglas ; un an plus tard, il emprunta au total £4 000 à John Painter* ; en 1816, il obtint £4 000 de George Pozer* et £1 100 d’une veuve de Québec, Ann Purcell. En 1819, sa dette envers Douglas s’élevait déjà à £15 000. L’année suivante, près des deux tiers de cette dette avaient été transférés à la Banque de Québec ; impatientée d’attendre ses paiements, la banque l’obligea en 1824 à lui louer pour cinq ans le quai McCallum et deux maisons de la rue Saint-Pierre, les loyers devant être déduits de la dette. En 1822, la McCallum and Sons avait été dissoute et, le 6 octobre 1825, McCallum transféra tous ses biens immeubles à trois de ses fils, qui s’étaient engagés à acquitter ses dettes de quelque £23 000 envers la succession de Painter, envers François Desrivières, de Montréal, et envers Pozer, à qui il devait £18 000. À sa mort en décembre, McCallum était insolvable : il devait près de £6 600 à la banque et £4 000 à Pozer.
McCallum est représentatif d’une partie de la deuxième génération d’hommes d’affaires britanniques installés à Québec. Ce groupe, qui succéda au début du xixe siècle à William Grant*, à George Allsopp* et à Adam Lymburner*, et qui comprenait notamment John Young, John Mure et William Burns, se composait surtout d’Écossais. Ces hommes tentèrent de profiter du développement rapide du Haut-Canada, souvent en s’alliant à des marchands de Montréal, car ceux-ci avaient directement accès à cette colonie. Toutefois, en raison de leur situation géographique, McCallum et ses confrères de Québec furent plus naturellement portés à exploiter les pêcheries du Labrador et du golfe du Saint-Laurent et à y faire la traite des fourrures, ou à se tourner vers les riches terres agricoles de la rive sud, en aval de Québec, pour y tenir des brasseries, des distilleries et des moulins à farine. Brasser de la bière et distiller de l’alcool n’allaient cependant pas sans risque : comme le découvrirent Robert Lester*, Young, McCallum et d’autres sans doute, le marché intérieur était petit, les marchés d’exportation s’avéraient inexistants, les producteurs étrangers de vins et de spiritueux leur faisaient une rude concurrence, et la pénurie de main-d’œuvre qualifiée allongeait beaucoup les délais de réparation de l’équipement.
Le port de Québec étant le principal atout économique de la ville, ces marchands faisaient surtout de l’import-export avec la Grande-Bretagne et les Antilles, domaine où les marchands écossais pouvaient compter sur des relations et des appuis particulièrement forts dans leur pays d’origine. Mais, malgré l’importance du port, ces marchands, à l’exception de Mure, se lancèrent avec réserve dans le commerce du bois, la construction de navires ou l’industrie manufacturière, contrairement à d’autres Québécois importants tels que John Goudie, Mathew Bell* et Henry Usborne*. Les marchands comme James McCallum firent aussi de la spéculation foncière, surtout dans les Cantons-de-l’Est, et investirent dans les seigneuries et la propriété urbaine, souvent commerciale. À compter de 1815, en partie pour éviter de tomber sous la coupe des capitalistes montréalais, ils fondèrent des établissements financiers comme la Compagnie d’assurance de Québec contre les accidents du feu et la Banque de Québec [V. George Garden ; Daniel Sutherland]. Le grand esprit d’entreprise de ces hommes d’affaires et de certains de leurs concitoyens ne donna pas toujours de brillants résultats, comme le démontre le cas de McCallum, mais il fut l’élément moteur du développement commercial et agricole que Québec et son arrière-pays connurent au début du xixe siècle.
ANQ-Q, CE1-66, 8 juin 1794, 14 juin 1795, 1er oct. 1797, 1er janv. 1799, 5 janv. 1800, 24 nov. 1805, 22 déc. 1825 ; CN1-16, 6 juin 1805, 31 déc. 1811, 8, 18 juin, 18 sept. 1813, 19 oct. 1814 ; CN1-49, 24 juin 1812, 16 nov. 1813, 3 mars, 28 avril, 3, 18 juill. 1814, 17 janv., 19 avril, 3, 15 mai, 15, 29 juin 1815, 17 juill. 1816, 5 sept. 1817, 8 mars, 8, 18 avril, 25 mai, 30 sept. 1818, 26 janv., 14 avril, 6 août, 16 nov. 1819, 13 mars 1820, 24 mai 1821, 13, 30 août 1822, 20 mai 1823, 21 févr. 1824 ; CN1-92, 10 oct. 1794, 16, 20 mars 1797 ; CN1-116, 8 mai, 10 juin 1822, 23 janv. 1824 ; CN1-147, 16 juill. 1803 ; CN1-178, 5 août 1817, 19 août 1818 ; CN1-197, 2 mai 1816, 5 janv. 1822 ; CN1-205, 28 nov. 1798 ; CN1-208, 12 avril, 4 oct. 1823, 18 juin 1825, 9 févr., 30 sept. 1827 ; CN1-230, 17 mars, 14 mai 1800, 30 juin 1803, 30 nov. 1809, 30 juin 1813, 22 avril, 1er oct. 1816, 26 avril 1817, 28 mars 1820 ; CN1-253, 6 oct. 1825 ; CN1-262, 12, 14 févr. 1798, ler févr. 1799, 21, 26, 28 janv., 13, 25 mars, 8 juin, 21 août, 26 déc. 1801, 14 juill. 1804, 24 avril 1810, 24 août 1811, 18 févr., 20 mai, 2 déc. 1815, 16 avril 1816, 2 déc. 1818, 13–30 mars, 5–29 avril, 1er, 4, 6, 12, 15–16 mai, 15, 20 juill. 1820 ; CN1-285, 22 janv., 21 févr., 8 sept. 1801, 26 oct. 1802, 7 oct. 1803, 18 sept. 1804, 11 mars 1811 ; CN3-11, 12 avril 1796.— APC, MG 24, B1, 16 : 86–95 ; RG 1, L3L : 62780, 62800–62801, 62808, 62812, 62820–62822, 62829, 62838, 62960, 63130–63145, 63150–63156.— Joseph Bouchette, Topographical map of the province of Lower Canada [...] (Londres, 1815 ; réimpr., Montréal, 1980.— « Les Dénombrements de Québec » (Plessis), ANQ Rapport, 1948–1949 : 86.— La Gazette de Québec, 13 févr. 1794, 18 juin 1795, 23 mars 1797, 5 avril 1798, 21 mars, 18 juill. 1799, 30 sept. 1802, 14 juin 1804, 5 avril, 2 août 1810, 19 sept. 1811, 28 mai 1812, 8 juill., 30 déc. 1813, 12 janv., 4 oct. 1815, 20 juin, 25 juill. 1816, 13 mars, 24 avril, 14 juill., 7 août 1817, 8, 15, 19, 29 janv., 12 mars, 25 juin, 10 sept., 19 nov. 1818, 19 avril, 19 juill., 11 oct., 8 nov., 2 déc. 1819, 3, 24 janv., 9, 13, 20 mars, 17 avril, 5, 19, 22, 26 juin, 10 juill., 21 août, 2 oct., 11, 23 déc. 1820, 19 mars, 16 avril, 16 juin, 12 juill., 27 août, 25 oct., 26 nov. 1821, 28 oct., 19 déc. 1822, 5 juin, 3 juill., 14, 21 août, 4, 11 sept., 20 oct. 1823, 1er avril 1824.— Almanach de Québec, 1821 : 50.— F.-J. Audet, « les Législateurs du B.-C. ».— Caron, « Inv. de la corr. de Mgr Plessis », ANQ Rapport, 1927–1928 : 219.— E. H. Dahl et al., la Ville de Québec, 1800–1850 : un inventaire de cartes et plans (Ottawa, 1975).— Desjardins, Guide parl., 137.— « Les Presbytériens à Québec en 1802 », BRH, 42 (1936) : 728.— P.-G. Roy, Inv. concessions, 3 : 103, 176 ; 5 : 107.— Ouellet, Bas-Canada, 310, 314.— F.-J. Audet, « David Lynd, 1745–1802 », BRH, 47 (1941) : 89.— Gérard Malchelosse, « Une seigneurie fantôme : Saint-Paul du Labrador », Cahiers des Dix, 10 (1945) : 320–321.— Victor Morin, « la Féodalité a vécu », Cahiers des Dix, 6 (1941) : 269–270.
James H. Lambert, « McCALLUM, JAMES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mccallum_james_6F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/mccallum_james_6F.html |
Auteur de l'article: | James H. Lambert |
Titre de l'article: | McCALLUM, JAMES |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
Année de la révision: | 1987 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |