Provenance : Bibliothèque et Archives Canada/MIKAN 2939070
BRUNEAU, PIERRE, marchand, homme politique et officier de milice, né le 22 juillet 1761 à Québec, fils de Pierre-Guillaume Bruneau, marchand pelletier, et de Marie-Élizabeth Morin, dit Chêneverd ; le 30 août 1785, il épousa au même endroit Marie-Anne Robitaille, et ils eurent sept enfants ; décédé le 13 avril 1820 dans sa ville natale.
Pierre Bruneau passe son enfance à Québec et, très jeune, il est mêlé au commerce d’articles de fourrure grâce à son père qui tient boutique dans la basse ville, depuis au moins 1758. Voulant suivre les traces de ce dernier dans le domaine des affaires, il fait d’abord ses études au petit séminaire de Québec, de 1771 à 1780. On suppose qu’il s’initie par la suite à la comptabilité en travaillant au magasin de son père, puisqu’en 1786 il se voit confier la gestion du « commerce de pelteries » de ce dernier. En effet, cette année-là, Pierre-Guillaume Bruneau décide de retourner dans sa ville natale de Poitiers, en France, qu’il avait quittée en 1754 pour la Nouvelle-France. En peu de temps, Pierre Bruneau élargit le champ d’action de la maison en se lançant notamment dans le commerce de céréales, d’étoffes et de liqueurs. Ses affaires semblent connaître une certaine prospérité, au point qu’en 1791 il achète, au coût de 9 000#, une grande maison en pierre située sur la place du Marché (place Notre-Dame), près du port de Québec, pour y établir sa résidence et son propre magasin.
En 1794, Bruneau figure parmi les signataires du manifeste loyaliste, une sorte d’acte de foi aux autorités britanniques devant la présumée menace d’agitation populaire menée par la France révolutionnaire dans la colonie. Deux ans auparavant, Bruneau avait joint les rangs de la milice de Québec à titre d’enseigne. C’est probablement en raison de sa fidélité à la couronne britannique que le gouvernement lui octroie en 1804 une terre de 400 acres dans le canton de Nelson. À la même époque, il en profite pour ouvrir un second magasin, à Chambly, et augmenter ses achats de grains.
À la recherche de nouvelles possibilités d’investissement, Bruneau fait l’acquisition, vers 1802, de deux maisons, rue Sainte-Famille, et d’une autre, rue Saint-François, qu’il louera par la suite pour un prix variant de £40 à £50. En 1806, une des maisons de la rue Sainte-Famille sera convertie, par son locataire, en hôpital pour les troupes britanniques. Afin de financer son entreprise commerciale, Bruneau doit recourir assez régulièrement à des emprunts auprès d’armateurs et de riches négociants britanniques. Ayant surévalué sa capacité de remboursement, il se retrouve, en 1807, avec une dette de £6 351 envers James Tod, marchand de Québec. Pour sortir de cette impasse, il s’engage à vendre les trois propriétés des rues Sainte-Famille et Saint-François au profit de son créancier, et à lui verser un montant de £250 par année jusqu’en 1812, à défaut de quoi tous ses biens seront saisis. Cette situation précaire oblige Bruneau à envisager de nouvelles solutions pour rentabiliser davantage son entreprise. Ainsi, en avril 1807, il engage un dénommé Charles Labbé, « compagnon manchonnier », qui travaillera à la fabrication d’articles de fourrure sous la direction de Mme Bruneau. Mais, sept mois plus tard, Labbé est mis sous les verrous pour avoir forfait à ses engagements ; libéré sous caution, il reprendra néanmoins son emploi pour le compte de Bruneau. Quoi qu’il en soit, les 148 casques de fourrure que Bruneau expédie à Rivière-Ouelle en août 1812 semblent indiquer que son entreprise connaît un nouvel élan ; le fait qu’il réussisse à liquider en 1814 sa dette à l’endroit de James Tod est plus révélateur encore. Toutefois, il lui restera à rembourser une somme de £1 246 à la firme Brehaut and Sheppard [V. Pierre Brehaut] qui lui a fourni des liqueurs et d’autres marchandises.
De 1810 à 1816, Bruneau est député de la Basse-Ville de Québec à la chambre d’Assemblée du Bas-Canada. À ce titre, il se range du côté du parti canadien notamment lorsqu’il s’agit de défendre les prérogatives de la chambre d’Assemblée. Pendant la guerre de 1812, il participe à la défense de la colonie comme major du 2e bataillon de milice de la ville de Québec. Ce détachement assure la garde de Québec et effectue des tournées de reconnaissance dans les régions avoisinantes. Au début de l’année 1816, peu de temps après la fin des hostilités avec les États-Unis, Bruneau adresse à ses électeurs un manifeste dans lequel il rejette le principe de l’éligibilité des juges à siéger au sein du Conseil législatif. Cette question, qui soulève également l’ire des députés du parti canadien, entraîne la dissolution de l’Assemblée par sir George Gordon Drummond*. Lors des élections qui s’ensuivent, Bruneau est battu dans sa circonscription par François Languedoc*. Il tente, en vain, de contester l’élection de son adversaire pour des raisons de fraude et d’intimidation. En avril 1816, il réussit néanmoins à se faire élire sans opposition dans la circonscription de Kent qu’il représentera jusqu’à sa mort.
Absorbé par la vie politique, Bruneau délègue de plus en plus la gestion de son entreprise commerciale à des personnes compétentes dans ce domaine. Ainsi, le 23 mai 1815, il embauche William Morin en qualité de commis et s’engage à lui verser un salaire de £60 par année ; en retour, ce dernier devra veiller au bon fonctionnement des magasins de Québec et de Chambly en s’occupant principalement de l’achat et de l’expédition des céréales. Trois ans plus tard, Bruneau confie à son épouse les pleins pouvoirs dans l’administration de ses affaires. Le 9 avril 1820, quatre jours avant sa mort, il lui lègue l’usufruit de la totalité de ses biens. Déjà, en 1810, il avait cédé à son fils René-Olivier la somme de 3 000#, sous forme de rente annuelle, afin de l’aider à embrasser les ordres. Parmi ses autres enfants, Julie épouse Louis-Joseph Papineau* en 1818 et Théophile deviendra avocat et patriote.
Pierre Bruneau participe activement à la vie sociale comme membre de la Société du feu de Québec, de 1790 à 1820, et comme marguillier de la paroisse Notre-Dame de Québec, de 1807 à 1814. À sa mort, la Gazette de Québec trace de lui un portrait élogieux : « Cet excellent homme portait dans le commerce [et] la vie privée une honnêteté de manière et une douceur de caractère, telles qu’il ne mérita jamais d’avoir un ennemi, et qu’à juste titre il eut beaucoup d’amis. »
ANQ-Q, CE1-1, 30 janv. 1758, 22 juill. 1761, 30 août 1785, 15 avril 1820 ; CN1-224, 15 juill. 1786 ; CN1-230, 3 mars 1791, 1er avril 1816, 9 avril 1820 ; CN1-262, 12 mai 1806, 6 févr., 23 avril 1807, 23 août 1810, 2 août 1812, 19 oct. 1814, 23 avril 1815, 7 juill. 1818.— ASQ, Fichier des anciens.— « Cahier des témoignages de liberté au mariage commancé le 15 avril 1757 », ANQ Rapport, 1951–1953 : 39.— Doc. relatifs à l’hist. constitutionnelle, 1791–1818 (Doughty et McArthur ; 1915), 492n.— La Gazette de Québec, 10 juill. 1794, 30 déc. 1813, 14 mars, 4 avril 1816, 17 avril 1820.— Almanach de Québec, 1792–1820.— Ægidius Fauteux, Patriotes de 1837–1838 (Montréal, 1950), 148.— Langelier, Liste de terrains concédés, 600, 1199.— Officers of British forces in Canada (Irving), 143.— P.-G. Roy, Fils de Québec (4 sér., Lévis, Québec, 1933), 2 : 127.— Chapais, Cours d’hist. du Canada, 3 : 23s.— Henri Têtu, « L’abbé André Doucet, curé de Québec, 1807–1814 », BRH, 13 (1907) : 18.
En collaboration, « BRUNEAU, PIERRE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/bruneau_pierre_5F.html.
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Titre de l'article: | BRUNEAU, PIERRE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 1983 |
Date de consultation: | 2 déc. 2024 |