Préoccupé par le développement matériel du pays et par sa réélection, sir Wilfrid Laurier présente aux Canadiens, en 1903, un imposant projet de chemin de fer transcontinental :
Laurier poursuivit, avec son indispensable coordonnateur Sifton, le grand chantier du développement de l’Ouest sur le point de devenir l’élément le plus dynamique de la croissance économique du pays [...] Laurier façonn[a] un autre projet grandiose : la construction d’un deuxième chemin de fer transcontinental au pays. Cette extravagante aventure le hisserait, dans l’immédiat, au rang des Pères de la Confédération.
Le projet que soumet Charles Melville Hays, de la compagnie du Grand Tronc, attire l’attention du premier ministre :
À compter de 1896, la prospérité du Canada reposa sur le peuplement des Prairies. Hays était convaincu que, pour concurrencer sérieusement le chemin de fer canadien du Pacifique, le Grand Tronc devait traverser cette région […] Comme le Grand Tronc et la Canadian Northern Railway Company […] n’arrivaient pas à s’entendre pour réaliser ce projet ensemble, Ottawa accorda son appui au Grand Tronc.
Malheureusement, la réalité rattrape Laurier, dont le gouvernement subit des pressions, notamment pour le tracé et le financement de la ligne. Des entrepreneurs, tel John Duncan McArthur, voient là une occasion de s’enrichir aux dépens de l’État :
En 1905, McArthur signa un contrat dans lequel il s’engageait à construire la section de Winnipeg à Superior Junction, dans le nord de l’Ontario. Cette section était d’une importance vitale, et ce contrat serait le plus lucratif et le plus controversé de tous ceux conclus par McArthur. Selon George Roy Stevens, historien du CP, la soumission de McArthur était « d’une irrégularité criante » : 48 des 101 rubriques du formulaire étaient restées en blanc. Le montant de cette soumission était de 33 073 $ le mille, ce qui était inférieur de 3 % aux estimations gouvernementales. Au bout du compte, McArthur fut payé 78 745 $ le mille, même s’il n’avait pas respecté les échéances. Il attribua cette hausse au fait que la présence de tourbières et de roc avait compliqué les travaux. Son retard coûta très cher à la Grand Trunk Pacific Railway Company parce que la totalité de la ligne ne put être ouverte au trafic transitaire aussi tôt que prévu. Dans l’histoire du Canada, peu de chemins de fer ont été à l’origine d’autant d’incompétence gouvernementale et d’allégations de corruption politique et de favoritisme que le chemin de fer National Transcontinental. Le contrat de McArthur, terminé en août 1910, est souvent cité comme exemple à éviter.
Les années de Laurier au pouvoir sont également marquées par des défis dans l’industrie du transport maritime, qui est parfois tributaire des subsides fédéraux, comme le souligne l’extrait suivant de la biographie de l’ingénieur et manufacturier Franklin Bates Polson :
La fabrication des machines et des chaudières permit à la société [de John Bellamy Miller et de Polson] de se maintenir à flot durant ces années difficiles, mais à la fin des années 1890, elle avait repris la construction navale et lançait au moins deux ou trois bateaux par année. Polson et d’autres faisaient pression auprès du gouvernement fédéral presque tous les ans pour qu’il accorde une prime de tonnage aux navires de construction canadienne afin de contrer l’effet des prix inférieurs demandés aux constructeurs navals britanniques pour le fer, le charbon, la main-d’œuvre et le capital, mais le premier ministre, sir Wilfrid Laurier*, refusa d’agir. En 1903, en compagnie de John Joseph Long, de la Collingwood Shipbuilding Company, et d’autres manufacturiers, Polson se rendit à Ottawa afin de demander plutôt un soutien financier pour la construction de cales sèches. Une loi visant à accorder de telles subventions fut adoptée en 1910.
Pour en savoir davantage sur le développement des infrastructures de transport à l’époque de Laurier, nous vous invitons à consulter les listes de biographies suivantes.