Le « lieutenant » de Macdonald : Cartier et la direction politique de la province de Québec
Après plusieurs années de débats constitutionnels [V. Cartier et l’Union : forces et limites d’un régime (1848–1867)], le dominion du Canada naît le 1er juillet 1867 et la province de Québec en fait partie. Sir John Alexander Macdonald, dont voici un extrait de la biographie, George Brown et Alexander Tilloch Galt ont tenu des rôles cruciaux dans la conception de la nouvelle administration. Il en va de même pour George-Étienne Cartier :
[L]es dispositions [de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867] qui assuraient à la langue française un statut officiel au Parlement et dans les tribunaux fédéraux ainsi que dans les tribunaux et à la législature de la province de Québec, de même que les mesures sur le maintien du Code civil dans cette province, venaient de Cartier.
Cartier en devient même un pilier :
Le 1er juillet 1867, […] Cartier était à Ottawa. Il entra dans le cabinet que forma John A. Macdonald, à la demande du gouverneur général, lord Monck, à titre de ministre de la Milice et de la Défense. Le gouverneur ayant annoncé que Macdonald avait été créé par la reine Victoria chevalier de l’ordre du Bain et que quelques autres hommes politiques, dont Cartier, devenaient compagnons du même ordre, ce qui était une dignité inférieure à la première, le chef canadien-français refusa cette distinction. Au printemps de 1868, Cartier fut créé baronnet, ce qui lui conférait le titre de « sir » et lui donnait un rang égal à celui du premier ministre […]
“De 1867 à sa mort, Cartier fut le principal lieutenant de Macdonald et il le remplaça souvent comme premier ministre et comme chef du gouvernement à la chambre des Communes. Il fut une sorte de co-premier ministre, pratiquement l’égal de Macdonald.
Toutefois, la mise en place des futures institutions fédératives ne se fait pas sans heurts, comme le montre l’extrait suivant de la biographie d’Hector-Louis Langevin, l’un des Pères de la Confédération :
Langevin partage avec Cartier la direction politique de la province de Québec et l’organisation du nouveau Canada. La tâche est lourde pour les deux chefs. Ne pouvant répondre à toutes les ambitions, ils se heurtent souvent aux frustrations des amis, aux revendications du clergé, à la rivalité des nationalismes, aux prétentions des ethnies, au jeu de l’opposition qui se définit progressivement. La Confédération est fragile et le parti qui la soutient manque de cohésion et de force interne.
Cartier et Langevin s’occupent donc d’une variété d’enjeux qui suscitent des relations tendues entre le gouvernement fédéral qu’ils représentent et leur province natale. Dans le but de maintenir leurs appuis au Québec, ils croient pouvoir compter sur sir Narcisse-Fortunat Belleau. La réalité est cependant différente :
En tant que lieutenant-gouverneur [de la province de Québec, Belleau] est l’œil du gouvernement fédéral qui surveille l’administration provinciale. Lui qui croyait en l’autonomie des provinces au sein de la Confédération, il ne tarde pas à déchanter. Les tensions qui règnent entre Cartier et Hector-Louis Langevin* d’une part, Pierre-Joseph-Olivier Chauveau* et les ministres provinciaux d’autre part, dans la conduite des affaires publiques comme de celles du parti conservateur, l’amènent à intervenir en coulisses. En avril 1869, dans une longue lettre à Langevin, il fait le procès des ministres fédéraux tatillons, autocrates, jaloux de leur pouvoir, qui ne cessent d’interpréter dans un sens centralisateur le partage des pouvoirs prévu par la constitution. Il prie Langevin de donner « le bénéfice du doute aux juridictions provinciales » et de ne pas, « par déduction, par conséquence & conclusion », attribuer d’autres pouvoirs au gouvernement fédéral.
Pour en savoir davantage sur Cartier et la province de Québec dans la Confédération, nous vous invitons à consulter les listes de biographies suivantes.