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THOM, ADAM, professeur, journaliste, avocat et fonctionnaire, né le 30 août 1802 à Brechin (région de Tayside, Écosse), fils d’Andrew Thom, marchand, et d’Elizabeth Bisset ; il épousa une demoiselle Bisset, puis Anne Blachford, et de ce mariage naquirent un fils et une fille ; décédé à Londres le 21 février 1890.
Adam Thom étudia au King’s College (University of Aberdeen) de 1819 à 1823 et obtint une maîtrise ès arts le 31 août 1824 ; en 1840, ce collège lui décernera un doctorat en droit. Au terme de ses études, il enseigna quelque temps à l’Udny Academy, dans l’Aberdeenshire, puis alla s’établir à Woolwich (maintenant partie de Londres), où il exerça la même profession. À cette époque, il rédigea une grammaire latine, The complete gradus [...].
À la fin de 1832, Thom immigra à Montréal où il fit l’apprentissage du droit dans le cabinet de James Charles Grant. Le 1er janvier 1833, il devint rédacteur en chef du Settler, or British, Irish and Canadian Gazette (Montréal). Fondé en vue d’informer les immigrants des difficultés auxquelles ils feraient face en Amérique du Nord britannique, ce journal se fit l’organe des opinions anti-canadiennes-françaises de Thom. Son intention déclarée était de faire du Bas-Canada une province britannique de fait aussi bien que de nom, objectif, estimait-il, que contrecarraient les tendances anticommerciales et prodémocratiques des Canadiens français. Comme il fallait s’y attendre, la presse canadienne-française répliqua aux propos du Settler et de son rédacteur en chef, et le Vindicator and Canadian Advertiser (Montréal) [V. Edmund Bailey O’Callaghan*] qualifia l’un et l’autre respectivement de « Slop-Pail » (seau de toilette) et de « Dr. Slop ».
Le Settler cessa de paraître le 31 décembre 1833. Thom se mit alors à enseigner les humanités, les mathématiques et les sciences à la Montreal Academical Institution, tout en écrivant une brochure intitulée Letter to the Right Hon. E. G. Stanley, his majesty’s principal secretary of state for the colonies, publiée en 1834 sous le pseudonyme An emigrant. Le 1er janvier 1835, il devint rédacteur en chef du Montreal Herald ; il continua de s’en prendre aux Canadiens français et intensifia ses attaques contre la politique de « conciliation » du gouvernement britannique.
Thom étaya son point de vue d’éditorialiste dans trois séries de lettres qu’il publia dans le Herald sous différents pseudonymes. C’est ainsi que parurent, à compter du 20 avril 1835, les « Remarks on the petition of the convention, and on the petition of the constitutionalists by Anti-Bureaucrat », qui démontraient à tous les loyaux sujets britanniques le manque de fondement des griefs exprimés par les Canadiens français dans les Quatre-vingt-douze Résolutions. Une deuxième série de lettres, qui débuta le 30 juillet 1835 sous le titre de « On the Canada Committee of 1828 », dénonça les conclusions du comité spécial de la chambre des Communes sur le gouvernement civil du Canada, que présidait Thomas Frankland Lewis. Les membres de ce comité avaient « fortement affirmé que les Canadiens d’origine française ne devaient aucunement être inquiétés dans la jouissance paisible de leur religion, de leurs lois et de leurs privilèges ». Thom voyait dans cette affirmation le fondement de la politique de conciliation du gouvernement impérial envers les Canadiens français, politique qu’il jugeait insensée et qui lui semblait être la cause de l’aggravation des difficultés politiques et économiques des Britanniques de la province. Thom rédigea une troisième série, intitulée « Anti-Gallic letters », adressée au gouverneur général lord Gosford [Acheson*] et publiée à compter du 1er octobre 1835 sous le pseudonyme de Camillus, autant parce qu’il se méfiait des sentiments pro-canadiens-français de Gosford que parce qu’il désirait informer encore une fois les citoyens britanniques de l’état lamentable des affaires au Bas-Canada.
En 1836, les lettres signées Anti-Bureaucrat et Camillus parurent sous le titre de Canadian politics. Dans la préface, Thom en revendiquait publiquement la paternité et déclarait que George Moffatt*, Peter McGill [McCutcheon*] et James Charles Grant, trois membres influents de la communauté anglaise de Montréal, partageaient ses vues. Peu après son arrivée au Bas-Canada, il s’était joint à l’élite des commerçants anglais de cette ville et, dès le mois de novembre 1833, il avait été nommé secrétaire du Beef-Steak Club, association qui regroupait une trentaine des plus gros marchands montréalais.
La rébellion de 1837–1838 renforça Thom dans ses préjugés défavorables à l’égard des Canadiens français, car cette poussée de violence constituait, à ses yeux, la preuve indiscutable de leur déloyauté. Cependant, il se réjouit du rappel de lord Gosford et de la nomination de lord Durham [Lambton*] et, bien qu’il ne s’enthousiasmât pas vraiment du fait que Durham passait pour un libéral, il crut que le nouveau gouverneur général prendrait le temps nécessaire afin d’évaluer correctement la situation qui régnait au Bas-Canada. Comme il avait été admis au barreau en 1837, il ne tarda pas à offrir son aide à Durham, et, le 25 août 1838, il obtint un poste de commissaire adjoint au sein de la commission dirigée par Charles Buller* et chargée d’étudier l’administration municipale. Les journaux canadiens-français réagirent avec une hostilité bien compréhensible à la nomination de « cet ennemi irréconciliable des Canadiens [...] ce fanatique haineux », mais Buller reçut de Stewart Derbishire*, un autre membre du personnel de Durham, l’assurance que Thom ne s’était pas rendu compte du caractère offensant de sa manière de s’exprimer. Buller estimait, quant à lui, que « c’était important de montrer aux factions du Canada que leurs dénonciations ne réussiraient plus désormais à exclure des gens compétents de la fonction publique ».
De concert avec William Kennedy, également commissaire adjoint, Thom rédigea un texte qu’on incorpora dans le rapport de lord Durham ; ce texte exprimait, dans un langage plus circonspect, l’inquiétude de Thom au sujet de l’absence de progrès au Bas-Canada et préconisait la domination des gouvernements municipaux de la province par les gens « instruits » et les « possédants ». Thom devint l’un des porte-parole de Durham et, en décembre 1838, il retourna en Angleterre pour aider à rédiger la version définitive du rapport. Certaines personnes émirent l’opinion qu’il avait écrit ce document, mais c’est probablement la campagne menée par lord Brougham en vue de discréditer Durham qui suscita une telle rumeur.
Entre-temps, dans une lettre datée du 5 janvier 1838, le gouverneur de la Hudson’s Bay Company, George Simpson*, avait offert à Thom, d’une manière non officielle, le poste nouvellement créé de recorder de Rupert’s Land. Prévenus de la francophobie de Thom, le gouverneur et le comité de la compagnie n’en confirmèrent pas moins l’offre à Thom par la suite et celui-ci accepta le poste qui comportait un salaire de £500, cours d’Angleterre, ainsi qu’une allocation de subsistance de £200 par année. En 1839, Thom se rendit à la colonie de la Rivière-Rouge (Manitoba) et entreprit alors la seconde étape de sa carrière en Amérique du Nord britannique.
Avant l’arrivée de Thom dans la colonie, on administrait la justice en dehors des règles et en se fondant, au dire du shérif Alexander Ross*, sur le principe de la « simple honnêteté ». Mais la Hudson’s Bay Company, qui entendait réorganiser toute la gestion du territoire, décida d’« établir aussitôt que possible une administration de la justice plus régulière et plus efficace ». C’est au recorder, en sa qualité de codificateur des lois, d’avocat-conseil, de magistrat et de conseiller juridique, que fut confiée la tâche de codifier et d’uniformiser le système juridique.
Thom vint à bout de cette tâche le 4 juillet 1839, et les résultats de son travail plurent beaucoup au gouverneur et au comité de la compagnie. En 1841, il prépara aussi, à l’usage du Conseil d’Assiniboia, un code de lois qui s’avéra durable, car il servit de base à la rédaction d’un code plus complet en 1862. Mais, en dépit de ces efforts, les habitants de la Rivière-Rouge ne faisaient pas confiance à leur nouveau juge. Ils connaissaient bien la réputation que Thom s’était faite au Bas-Canada et redoutaient non seulement son attitude discriminatoire à l’égard des races, mais aussi la possibilité qu’il ne fût pas un juge impartial en tant qu’employé rétribué par la Hudson’s Bay Company. Thom ne fit rien pour apaiser ces craintes. En plus de se montrer pédant et de refuser de parler français (la connaissance de cette langue constituait une condition préalable pour l’exercice de ses fonctions), il s’aliéna par sa conduite dans le tribunal la population métisse de la colonie. En 1842, il engagea une polémique avec John Smithurst* concernant la juridiction de l’évêque anglican de Montréal dans Rupert’s Land. « Redécouvrant » la charte de 1670, il soutint devant le grand jury d’Assiniboia, le 20 février 1845, que les privilèges concédés à la Hudson’s Bay Company avaient une valeur égale aux lois du territoire, ce qui marqua le début d’une lutte menée par la compagnie contre les trafiquants indépendants dans la colonie. Thom croyait qu’Alexander Ross était mêlé à cette activité. La même année, il outrepassa les limites de sa juridiction. Ne tenant pas compte du fait que tout procès capital devait être instruit au Haut-Canada, il condamna à mort un Sauteux, Capineseweet, et indisposa encore davantage les habitants de la colonie en tentant d’augmenter les droits d’entrée sur les produits américains.
Se fondant sur sa propre interprétation de la charte de la compagnie, Thom incita le gouverneur d’Assiniboia Alexander Christie* à combattre la traite illicite des fourrures qui avait cours dans la colonie. La lutte débuta par la proclamation d’une série de mesures répressives, formulées par Thom, lesquelles comprenaient, entre autres, l’inspection du courrier et obligeaient tous les importateurs à déclarer qu’ils n’entretenaient pas de rapports avec les trafiquants indépendants [V. Andrew McDermot]. Elle se poursuivit jusqu’au procès de Pierre-Guillaume Sayer* qui eut lieu le 17 mai 1849 et au cours duquel Thom et le successeur de Christie, le major William Bletterman Caldwell, voulurent faire un exemple d’un Métis qui avait en sa possession quelques fourrures obtenues de façon « illicite ». L’audition de cette cause se compliqua en raison de la présence de Métis hostiles qui, entourant le tribunal, menaçaient de faire un mauvais parti à Thom. On rendit un verdict de culpabilité, mais la compagnie ne prit pas de sanctions contre Sayer ; celui-ci fut remis en liberté sans condition et reçut même l’autorisation de conserver les fourrures. Ceux qui avaient assisté au procès, avec à leur tête Louis Riel* père, tinrent comme établi que le commerce des fourrures était désormais libre. Même s’il avait gagné sur le plan juridique, Thom se trouvait donc à perdre dans les faits. C’est alors qu’il devint le point de mire du mécontentement des Métis.
Quand Simpson arriva dans la colonie, peu après le procès de Sayer, les Métis lui remirent une pétition dans laquelle ils exposaient leurs griefs contre Thom et réclamaient sa démission. Au cours d’une réunion spéciale du Conseil d’Assiniboia, qui eut lieu le 31 mai 1849, on en arriva à un compromis, Thom acceptant d’utiliser le français dans l’exercice de ses fonctions officielles. Simpson persuada Thom de s’abstenir volontairement d’agir à titre de recorder, mais ce dernier refusa de se laisser intimider par les menaces des Métis et, en 1850, il insista pour prendre part à deux procès qui causèrent encore plus de tort à sa réputation. En février, il agit à titre de défendeur dans la cause opposant Hugh Matheson à Thom, un procès civil de peu d’importance pour lequel il exigea un jury entièrement composé d’anglophones. Sa demande fut rejetée, mais avant de quitter la salle, en colère, il insulta le président du tribunal, Cuthbert Grant*. Plus tard, Thom joua un rôle important dans le procès en diffamation opposant Christopher Vaughan Foss à Augustus Edward Pelly, lequel avait accusé le capitaine Foss d’adultère avec Sarah McLeod*, épouse de l’agent principal John Ballenden*. Avant le procès, Thom donna des conseils à Foss, témoin principal contre Pelly, et à Mme Ballenden. Quand on l’appela à la cour pour aider le gouverneur Caldwell, qui présidait, il fit tout en son pouvoir pour obtenir la condamnation de Pelly, allant jusqu’à témoigner au nom de Foss. Pelly fut condamné à verser £300 en dommages-intérêts à Foss, mais bientôt celui-ci et Mme Ballenden décidèrent de vivre sous le même toit, faisant ainsi paraître ridicule le rôle que Thom, leur défenseur, avait joué devant le tribunal.
À cette époque, Thom avait perdu une grande partie des appuis dont il bénéficiait au sein de la compagnie de même que dans la population de la Rivière-Rouge. Simpson nota son « état d’esprit regrettable » et son « air arrogant » ; de son côté, le nouveau gouverneur de Rupert’s Land, Eden Colvile*, écrivit que « les gens aim[aient] l’honnêteté et le bon sens tout autant que les longues dissertations de Thom sur les principes généraux ». Après que Louis Riel, se faisant de nouveau le porte-parole des Métis, eut déclaré, à l’automne de 1850, que les siens n’entendaient plus tolérer la présence de Thom au tribunal, le gouverneur et le comité décidèrent de le relever de ses fonctions de recorder. Thom fut avisé de cette décision le 10 avril 1851, mais la compagnie le garda à son service en qualité de greffier de la Cour d’Assiniboia, au même salaire qu’il avait touché jusque-là, soit £700.
Pendant ses heures de loisir à la Rivière-Rouge, Thom avait écrit The claims to the Oregon Territory considered (1844), un texte où il réfutait d’une manière détaillée les prétentions des Américains à la mainmise sur la côte ouest, et Chronology of prophecy [...] (1848), un traité sur la Bible dans lequel il donnait libre cours à ses talents pour la littérature et la critique. De plus, à titre de greffier de la cour, il collabora avec John Bunn* et Louis-François Laflèche* à la rédaction d’un rapport qui réclamait la mise à jour du système juridique de la colonie.
Quittant la Rivière-Rouge en 1854, Thom retourna à Édimbourg où il vécut jusqu’en 1865. Il alla s’installer ensuite à Londres et, en 1885, il fit paraître un autre ouvrage religieux, Emmanuel : both the germ and the outcome of the Scriptural alphabets, [...] a pentaglot miniature. Il mourut en 1890, léguant des biens d’une valeur de £5 310 au seul fils qui lui survivait, Adam Bisset Thom.
Adam Thom représenta un trait d’union unique entre le Bas-Canada et Rupert’s Land en ce sens que, par son attitude obstinément raciste, il s’attira à la fois l’inimitié des Canadiens français et des Métis. En se montrant antipathique à l’endroit de ceux-ci et en prônant l’assimilation de ceux-là, il raffermit les Métis dans leur volonté de conserver leur culture. Cette volonté, qui s’était d’abord exprimée contre Thom en 1849 durant le procès de Sayer, trouva son aboutissement dans la violente réaction que les Métis opposèrent en 1869–1870 à l’impérialisme du Canada central.
Adam Thom a d’abord fait paraître à Montréal en 1834, sous le pseudonyme An Emigrant, Letter to the Right Hon. E. G. Stanley, his majesty’s principal secretary of state for the colonies. Les lettres qu’il signa Anti-Bureaucrat et Camillus, publiées d’abord dans le Montreal Herald en 1835, ont paru en brochures séparées sous les titres de : Remarks on the petition of the convention, and on the petition of the constitutionalists (Montréal, 1835) ; Anti-Gallic letters ; addressed to His Excellency, the Earl of Gosford, governor-in-chief of the Canadas (Montréal, 1836), avant d’être réunies, en 1836, dans Canadian politics (Montréal). Sous le pseudonyme d’Ararat, il publia Cubbeer burr, or the tree of many trunks (Montréal, 1841), sous celui de Septuagenarian Tory, Queen alone, in every heart [...] (Londres, 1876).
Thom est également l’auteur de plusieurs ouvrages qu’il a signés de son nom : The complete gradus ; comprising the rules of prosody, succinctly expressed and rationally explained, on a new plan ; and a comprehensive view of middle syllables (Londres, 1832) ; Review of the report made in 1828 by the Canada Committee of the House of Commons (Montréal, 1835) ; The claims to the Oregon Territory considered (Londres, 1844) ; A charge delivered to the grand jury of Assiniboia, 20th February, 1845 (Londres, 1848) ; Chronology of prophecy : tracing the various courses of Divine Providence from the flood to the end of time ; in the light as well of national annals as of Scriptural predictions (Londres, 1848) ; A few remarks on a pamphlet, entitled « A few words on the Hudson’s Bay Company » ; in a letter to Alexander Christie [...] (Londres, 1848) ; Barrow in furnace ; no. I ; a letter to the subscribers to the Common Law Fund in Overend, Gurney & Co., Limited (no. II : a letter to the hero of the story) (Londres, 1869) ; Overend and Gurney prosecution ; in its relation to the public as distinguished from the defendants (Londres, 1869) ; The prosecutor’s protest against judicial despotism and forensic monopoly : addressed to the lord chief justice of England (Londres, 1869) ; Bane and antidote together [...], a letter from an octogenarian advocate of inspiration (Londres, 1884) ; Emmanuel alone, for his own sake through time and space alike (Londres, 1885) ; Emmanuel : both the germ and the outcome of the Scriptural alphabets, and the metallic image ; with an appendix of individual analogues : a pentaglot miniature (Londres, 1885). Ce dernier ouvrage a été traduit en plusieurs langues. [k. m. b.]
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Kathryn M. Bindon, « THOM, ADAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/thom_adam_11F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/thom_adam_11F.html |
Auteur de l'article: | Kathryn M. Bindon |
Titre de l'article: | THOM, ADAM |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
Année de la révision: | 1982 |
Date de consultation: | 21 déc. 2024 |