GRAVÉ DE LA RIVE, HENRI-FRANÇOIS, prêtre catholique, supérieur du séminaire de Québec et vicaire général, né le 25 avril 1730 à Vannes, France, fils de Charles-Yves Gravé de La Rive, ancien juge-consul, et de Louise-Jeanne-Marguerite Mercier ; décédé le 4 février 1802 à Québec.
Henri-François Gravé de La Rive fit ses humanités dans sa ville natale avant d’aller terminer ses études à l’académie de Paris puis à la Sorbonne, où il obtint le grade de maître ès arts en 1753 et celui de bachelier en théologie l’année suivante. Il reçut le sous-diaconat le 16 juin 1753, puis le diaconat le 31 mars 1754. Enfin, le 15 mars 1755, il fut ordonné prêtre à Rouen, où il se préparait à passer au Canada en compagnie d’Urbain Boiret*. Les deux religieux arrivèrent à Québec le 26 juillet suivant et s’installèrent au séminaire.
Le 16 février 1759, Gravé était nommé l’un des directeurs de l’institution. À l’été, au début du siège de la ville par l’armée britannique, le séminaire fut évacué. En même temps que Mgr Henri-Marie Dubreil* de Pontbriand, le supérieur Colomban-Sébastien Pressart* et Gravé se rendirent à Montréal avec quelques étudiants des classes avancées, et se réfugièrent chez les sulpiciens. Gravé y enseigna la philosophie tout en remplissant la fonction d’aumônier des Sœurs de la charité de l’Hôpital Général de Montréal.
Gravé revint à Québec en septembre 1761, les travaux de restauration du séminaire étant suffisamment avancés pour permettre aux prêtres d’y habiter. L’année suivante, à la fin du mandat de Pressart, le séminaire des Missions étrangères de Paris, qui désignait le supérieur du séminaire de Québec avant la Conquête, nomma à ce poste Pierre Maillard*, missionnaire en Acadie, ou, à défaut, Gravé. Le gouverneur Murray* s’opposa à ces nominations, n’admettant pas l’ingérence de Paris dans les affaires du Canada. Dorénavant, les prêtres du séminaire de Québec devaient élire eux-mêmes leur supérieur, et Murray resta opposé à l’élection des deux candidats désignés. C’est Boiret qui fut élu, en juillet 1762, et Gravé remplit la fonction d’assistant du supérieur. Le petit séminaire ouvrit de nouveau ses portes en 1765 et dut prendre la relève du collège des jésuites qui était définitivement fermé. En plus d’avoir à donner les humanités, jusque-là dispensées uniquement chez les jésuites, l’institution dut accepter désormais des externes ainsi que les étudiants qui se destinaient aux professions libérales. Comme les prêtres ne suffisaient pas pour ce surcroît de travail, on improvisa régents ou professeurs les étudiants en théologie.
Le 13 avril 1768, après la mort de Jean-Félix Récher*, curé de Notre-Dame de Québec, le séminaire décida d’abandonner son union avec cette cure et, conséquemment, la présentation du curé. Gravé s’opposa à cet abandon, soutenant que l’union était un acte juridique, obligatoire et inaliénable. Il fit même enregistrer sa dissidence devant notaire et ne revint jamais sur sa position. Cette année-là, appuyé par son confrère Joseph-André-Mathurin Jacrau*, et tout comme le curé Récher l’avait fait auparavant, Gravé soutint les marguilliers de la paroisse Notre-Dame de Québec dans leur refus de faire de leur église reconstruite récemment la cathédrale du diocèse. Lorsque enfin, six ans plus tard, Mgr Briand* prit possession de la cathédrale, tous les opposants s’étaient soumis, sauf Gravé. Toujours en 1768, Gravé remplaça Boiret au poste de supérieur du séminaire, remplissant cette fonction jusqu’en 1774.
Gravé assuma les responsabilités de procureur du séminaire en 1777–1778 ; en cette dernière année, il fut de nouveau élu supérieur. En 1779, il fit partie du premier bureau de direction de la bibliothèque de Québec et, à partir de 1780, il fut aumônier des ursulines. À la fin de son mandat de supérieur, en 1781, il redevint procureur et occupa le poste jusqu’en 1787. L’Hôpital Général sut mettre à profit l’expérience de Gravé en administration, puisqu’il occupa le poste de directeur temporel de cet établissement de 1784 à 1789.
Bien que Gravé se montrât personnellement favorable aux démarches entreprises à Londres par Jean-Baptiste-Amable Adhémar* et Jean De Lisle pour demander une réforme constitutionnelle, il soutint, en 1784, que sur ce point le clergé devait rester neutre, sans pour autant désapprouver les partisans de cette réforme. Cette année-là, en décembre, le nouvel évêque de Québec, Mgr Louis-Philippe Mariauchau* d’Esgly, lui renouvela ses lettres de vicaire général que Mgr Briand lui avait accordées une première fois en 1781. Mais, en 1788, l’évêque lui retira ses pouvoirs, reprochant à Gravé son insubordination. Le coadjuteur, Mgr Hubert*, soutint Gravé et lorsqu’il remplaça d’Esgly, en juin 1788, il s’empressa de le réinstaller dans ses fonctions de vicaire général. L’année précédente, Gravé avait encore une fois été élu supérieur du séminaire ; il occupa ce poste jusqu’en 1793.
Le clergé n’apprécia guère l’instauration du régime parlementaire en 1791. Gravé écrivait : « Ceux qui Selon moi pensent un peu sont tres faches de ce changeur[en]t car il y a plusieurs de nos farrault canadiens et beaucoup danglois admirateurs de l’assemblée nationale qui parlent déjà detablir les droits de l’ho[mm]e comme principes des loix. » En mars de cette année-là, en tant que supérieur du séminaire, propriétaire de plusieurs seigneuries, Gravé signa avec 59 autres seigneurs canadiens une pétition contre le projet d’abolition du régime seigneurial et son remplacement par le mode de concession en franc et commun socage, projet mis de l’avant dès 1788 par les Loyalistes et soutenu par Charles-Louis Tarieu de Lanaudière [V. Thomas-Laurent Bédard*].
En 1793, Gravé devint directeur du grand séminaire et occupa ce poste jusqu’en 1795, année au cours de laquelle il prit la direction du petit séminaire pour les trois années suivantes. Mgr Denaut lui renouvela ses lettres de vicaire général en 1797. L’année suivante, il fut élu supérieur pour un dernier mandat de quatre ans. Outre toutes ces fonctions, Gravé enseigna la théologie et s’intéressa à la philosophie. Il rédigea un petit catéchisme contenant 72 leçons, à l’intention des élèves du petit séminaire.
En 1800, Mgr Denaut demanda à Gravé son opinion sur l’introduction, par le gouvernement britannique, d’une pratique obligeant les catholiques à prêter serment sur la bible protestante dans les cours de justice. Gravé encouragea l’évêque à s’y opposer, alors que le coadjuteur désigné, Mgr Plessis*, et le vicaire général Philippe-Jean-Louis Desjardins* n’y voyaient pas d’inconvénients. Denaut favorisa l’opinion de Gravé.
Malgré des vues réactionnaires et un entêtement de Breton, Henri-François Gravé de La Rive avait certainement des aptitudes et des qualités humaines supérieures, comme en témoignent les fonctions importantes qui lui furent confiées tant et plus par les évêques de Québec et par ses confrères du séminaire. Même après sa contestation dans l’affaire de la cure de Québec, en avril 1768, on ne lui en voulut pas longtemps, puisque le 20 août suivant on l’élisait supérieur. François Sorbier* de Villars, supérieur des Missions étrangères de Paris, l’avait en très haute estime. Les communautés religieuses de Québec l’adoraient. Après sa mort, la Gazette de Québec publia des éloges à son égard, les 11 et 18 février 1802. On y disait entre autres : « Enfin et c’est un de ses traits les plus marqués, nul ne fut pour son souverain un sujet plus fidèle, plus dévoué, plus ardent. » S’il n’y a pas de flagornerie dans cette affirmation, elle témoigne d’une belle loyauté chez ce partisan du Régime francais.
AAQ, 1 CB, VI : 124.— AD, Morbihan (Vannes), État civil, Vannes, 25 avril 1730.— ASQ, Fonds Viger-Verreau, Carton 17, no 46A ; Lettres, P, 124 ;
Honorius Provost, « GRAVÉ DE LA RIVE, HENRI-FRANÇOIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/grave_de_la_rive_henri_francois_5F.html.
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Auteur de l'article: | Honorius Provost |
Titre de l'article: | GRAVÉ DE LA RIVE, HENRI-FRANÇOIS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 1983 |
Date de consultation: | 20 déc. 2024 |