HOWLAND, sir WILLIAM PEARCE, homme d’affaires, homme politique et fonctionnaire, né le 29 mai 1811 à Pawling, New York, fils de Jonathan Howland et de Lydia Pearce ; le 12 juillet 1843, il épousa à Lambton Mills (Etobicoke, Ontario), Marianne (Mary Anne) Blyth (Blythe) (décédée en 1860), veuve de David Webb, et ils eurent une fille et deux fils, dont William Holmes*, puis le 21 novembre 1865, Susanna Julia Shrewsbury (décédée en 1886), veuve de Philip Hunt, et enfin, le 15 août 1895 à Toronto, Elizabeth Mary Rattray, veuve de James Béthune ; décédé le 1er janvier 1907 à Toronto.

William Pearce Howland était un descendant de Henry Howland, quaker arrivé en Nouvelle-Angleterre en 1621. Il fit ses études à la Kinderhook Academy, à Kinderhook, dans l’État de New York. Par après, il résida à l’île Carleton, sur le Saint-Laurent, où son père avait des intérêts commerciaux. En 1830, il immigra dans le Haut-Canada. Son frère Peleg travaillait déjà à Cooksville (Mississauga), au magasin général d’un dénommé Lewis. Il y fut engagé comme commis et trieur de courrier. Finalement, les deux frères achetèrent le magasin.

De 1840 à 1857, en louant et en achetant des propriétés sur la rivière Humber, Howland mit sur pied un complexe formé d’une scierie et d’une meunerie qui, vers 1844, reçut le nom de Lambton Mills. Dès 1851, il avait en plus un entrepôt à Toronto, le Lambton Mills Depository, où il vendait en gros des produits agricoles et de la farine. En 1855, il prit Peleg comme associé. Après que leur frère Frederick Aiken se fut joint à eux, ils eurent aussi, dans les cantons de Toronto et de Chinguacousy, plusieurs magasins et exploitations reliés à des industries de base : bois d’œuvre, flottage et fabrication de potasse, par exemple. Un autre frère Howland, Henry Stark, avait pris en charge un magasin et une meunerie au village de Kleinburg. Dès la fin des années 1850, William Pearce Howland était l’un des plus riches minotiers du Haut-Canada.

Peut-être en raison de ses antécédents américains et quakers, Howland avait sympathisé avec la rébellion de 1837–1838, mais, n’étant pas encore citoyen britannique, il avait décidé de se tenir à l’écart. Peu après l’union du Haut et du Bas-Canada, en 1841, il obtint sa citoyenneté et s’engagea en politique. Aux élections de décembre 1847, il soutint James Hervey Price*, député réformiste sortant de la circonscription de 1st York. Dès 1849, il était si bien vu chez les réformistes que ceux-ci le chargèrent de présenter à Montréal, avec George Brown* et Connell James Baldwin*, une adresse de soutien au gouverneur, lord Elgin [Bruce*], au lendemain des émeutes provoquées par l’adoption du projet de loi pour l’indemnisation des pertes subies pendant la rébellion. En 1856, à titre de réformiste partisan de Brown, il se déclara favorable, comme celui-ci le prônait, à ce que le Canada repousse sa frontière nord-ouest en s’étendant sur le territoire de la Hudson’s Bay Company. Le 8 janvier 1857, il participa au congrès que Brown tint à Toronto dans l’espoir de rallier les diverses tendances réformistes : ses partisans torontois (les brownites), les clear grits de la partie ouest du Haut-Canada et les tenants de John Sandfield Macdonald* dans la partie est. Les congressistes créèrent la Reform Alliance afin de structurer le parti. La direction en fut confiée à Howland et à quelques autres membres des professions libérales ou des milieux d’affaires torontois – principalement des partisans de Brown.

Aux élections de 1857–1858, Howland gagna dans York West et les réformistes remportèrent la majorité des sièges du Haut-Canada. En août 1858, sous la direction de Brown, ils s’allièrent à la minorité bas-canadienne des « Rouges » d’Antoine-Aimé Dorion* pour former un gouvernement que John Alexander Macdonald* et George-Étienne Cartier* firent tomber deux jours plus tard au moyen d’une manœuvre que l’on a appelée double shuffle. Cette défaite convainquit Brown et Howland que seule une restructuration radicale de l’union législative pourrait faire échec à l’ingérence politique du gouverneur général (les réformistes tenaient le gouverneur général d’alors, sir Edmund Walker Head*, pour un partisan des tories) et à la prédominance qu’exerçait à l’Assemblée le Bas-Canada, dont le bloc des « Bleus » s’associait habituellement aux conservateurs haut-canadiens pour conserver le pouvoir. Par ailleurs, certains réformistes, dont Howland, subirent des pertes matérielles à cause de la chute du gouvernement. En 1858, la Compagnie de transport, de navigation et de chemin de fer du Nord-Ouest, dans laquelle Howland, Allan Macdonell* et d’autres partisans de Brown avaient des intérêts majoritaires, s’était vu confier le transport du courrier entre le Canada et la Rivière-Rouge (Manitoba) mais, en juillet 1859, le gouvernement Cartier-Macdonald révoqua le contrat et le donna à un député conservateur provincial.

Au congrès réformiste de novembre 1859, qui se tint au St Lawrence Hall de Toronto, il y avait surtout des presbytériens et des méthodistes, et seulement huit quakers, dont Howland. Il faisait cependant partie des nombreux marchands qui, avec les fermiers de la région torontoise et du Sud-Ouest, formaient la majorité des congressistes. Il ne prononça pas de discours, préférant exercer en coulisse son énorme influence. En tant que député du comté de York, il était sans doute. favorable à une quelconque dissolution de l’union législative, formule qui comptait ses plus nombreux adeptes dans ce comté. La plupart des délégués en avaient assez de l’hégémonie commerciale de Montréal et de la modalité de l’Union selon laquelle des fonds publics provenant du Haut-Canada servaient à financer des travaux au Bas-Canada. Howland accéda au comité des finances formé au congrès et, avec Brown, William McDougall, Oliver Mowat, Donald McDonald* et d’autres, la plupart de Toronto, il fut nommé à la Constitutional Reform Association, qui tint sa première réunion le dernier jour du congrès. Le but de l’association était de diffuser les résolutions du congrès et de presser le Parlement du Canada d’apporter des changements structuraux à l’Union afin de donner aux Assemblées locales (provinciales) – dont les réformistes espéraient l’instauration – le pouvoir en toutes matières, sauf celles qui « intéressaient tout le Canada ».

Dans les années 1860, Howland concentra de plus en plus ses activités d’homme d’affaires à Toronto, où il fut président du Bureau de commerce de 1859 à 1862. Il établit dans cette ville une nouvelle minoterie et un commerce de produits agricoles en gros, la William P. Howland and Company. En 1867, la société qu’il détenait avec ses frères à Lambton Mills fut dissoute, mais ils poursuivirent leurs activités à cet endroit. Howland se mit aussi à exercer de hautes fonctions dans des banques et compagnies d’assurance locales.

Réélu dans York West en 1861, Howland n’avait pas tardé à plonger dans le travail ministériel. Il entra au Conseil exécutif après que les réformistes eurent repris le pouvoir, l’année suivante, sous la direction de John Sandfield Macdonald et de Louis-Victor Sicotte*. Ministre des Finances du 24 mai 1862 au 14 mai 1863, il fut ensuite receveur général jusqu’au 21 mars 1864, jour de la démission du gouvernement de John Sandfield Macdonald et de Dorion. À l’automne de 1862, Howland et Sicotte étaient allés rejoindre à Londres des représentants de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick afin de discuter, avec le ministère des Colonies, de la construction d’un chemin de fer intercolonial [V. sir Samuel Leonard Tilley*]. Le ministère des Colonies accepta de garantir un emprunt à condition que les provinces créent un fonds d’amortissement. Or, les réformistes s’étaient engagés à réduire les dépenses. Reconnaissant qu’il aurait été politiquement suicidaire de renier cet engagement, Howland et Sicotte rejetèrent cette condition, ce qui mit fin soudainement aux négociations.

En juin 1864, Brown s’allia à John Alexander Macdonald pour former un cabinet de coalition, de façon à donner plus de poids aux représentations en faveur d’une fédération des provinces de l’Amérique du Nord britannique. Howland ne faisait pas partie de ce cabinet, mais en novembre, comme il fallait un réformiste pour y remplacer Oliver Mowat, Brown nomma Howland. Le 24, il devint maître général des Postes ; il exercerait cette fonction jusqu’au 30 août 1866, date où il succéderait à Alexander Tilloch Galt* à titre de ministre des Finances. En juillet 1865, Howland et Galt furent envoyés à Washington pour discuter du renouvellement du traité de réciprocité de 1854, mais le gouvernement du président Andrew Johnson se montra mal disposé à cet égard. En compagnie de William Alexander Henry*, de la Nouvelle-Écosse, et d’Albert James Smith*, du Nouveau-Brunswick, ils retournèrent à Washington en janvier 1866 pour tenter une dernière fois, en vain, de renouveler le traité.

À titre de membre du gouvernement de coalition, Howland fut l’un des trois délégués du Haut-Canada à participer en 1866–1867 à la conférence de Londres qui établit le cadre du futur Acte de l’Amérique du Nord britannique. Il est donc l’un des Pères de la Confédération – le seul qui ait été d’origine américaine. À la conférence, il s’inquiéta du pouvoir que l’on s’apprêtait à donner au Sénat, dont les membres seraient nommés à vie par le gouverneur général. Pour réduire ce pouvoir sur la Chambre basse, il proposa que chacune des provinces que l’on constituerait soit autorisée à nommer des sénateurs pour des mandats fixes. Cependant, ce fut la proposition de William Alexander Henry qui fut intégrée à l’Acte de l’Amérique du Nord britannique : afin d’empêcher que le Sénat, constitué de membres nommés, ne tienne en otage les représentants du peuple, le gouvernement élu serait habilité à désigner un nombre déterminé de sénateurs supplémentaires.

Lorsque Brown s’était retiré de la coalition, en décembre 1865, Howland et McDougall avaient refusé de le suivre. Brown leur fit payer ce refus en les expulsant du congrès réformiste qu’il tint en juin 1867. Cet événement semble confirmer l’opinion d’Hector-Louis Langevin, selon qui Howland était timoré et prudent à l’excès. Cependant, l’expulsion peut tout aussi bien être un signe de sa force de caractère ; bien que d’un naturel tranquille et conciliant, il était capable, quand les circonstances l’exigeaient, d’affronter des hommes réputés pour leur franc-parler, tels Brown ou Cartier. En 1862, selon Donald Grant Creighton*, Howland, accompagné de Sicotte, sortit de la réunion avec les représentants du ministère des Colonies en tempêtant, ce qui ne saurait être le fait d’un homme facile à intimider. Howland montra aussi sa trempe en soutenant la vision que Macdonald avait de la Confédération, même s’il savait, semble-t-il, que cet appui affaiblirait ses liens avec les réformistes, et surtout avec les partisans de Brown.

En retour de son appui à Macdonald, Howland gagna une influence politique considérable au sein de la coalition. Avec McDougall, il obtint en 1867 que trois des cinq sièges ontariens du cabinet fédéral soient confiés à des réformistes. Élu député de York West aux Communes, il fut ministre du Revenu intérieur dans le premier cabinet. Les autres ministres réformistes de l’Ontario étaient McDougall et Adam Johnston Fergusson* Blair. En outre, le Parlement britannique récompensa Howland et McDougall pour leur appui à la Confédération en les nommant au Conseil privé et en les faisant compagnons de l’ordre du Bain le 1er juillet. Howland quitta cependant le gouvernement le 14 juillet 1868 : la première session du Parlement était terminée, sa santé déclinait et son efficacité de réformiste avait diminué, étant donné qu’il n’était plus dans le parti.

Dès le lendemain, 15 juillet 1868, Howland était nommé lieutenant-gouverneur de l’Ontario. Tout en jouant son rôle de représentant des autorités fédérales et de conseiller du premier ministre de la province, John Sandfield Macdonald, il présida l’inauguration de bon nombre des nouveaux organismes de la province, dont le Royal College of Dental Surgeons of Ontario en 1868 et l’Ontario Institution for the Education and Instruction of the Deaf and Dumb à Belleville en 1870. De plus, il facilita la fondation de l’Ontario Institution for the Education and Instruction of the Blind, établie en 1872 à Brantford. En 1870, il participa à la levée d’une milice de volontaires pour contenir Louis Riel* et ses partisans à la Rivière-Rouge. Au début des années 1870, il présida aussi les cérémonies d’inauguration de chemins de fer, par exemple, en novembre 1873, celles du Toronto and Nipissing Railway, qui partait de Toronto et allait vers le nord-est jusqu’à Coboconk, en passant par un territoire agricole et forestier. Comme bon nombre de ses propres entreprises, ce chemin de fer contribua à faire encore plus de Toronto le cœur de la vie ontarienne. Le 11 novembre 1873, peu après l’inauguration du Toronto and Nipissing Railway, Howland démissionna de son poste de lieutenant-gouverneur.

Howland ne quitta pas pour autant la scène publique. En 1875, le gouvernement libéral fédéral d’Alexander Mackenzie* le nomma à la commission qui devait étudier le tracé du projet du canal de Baie-Verte, dans l’isthme Chignecto. Cette nomination laisse supposer que, malgré sa rupture avec Brown et son expulsion du congrès de 1867, il demeurait populaire auprès de certains réformistes. En reconnaissance de son apport à la vie canadienne, on le créa, en mai 1879, chevalier commandeur de l’ordre de Saint-Michel et Saint-Georges.

Howland demeura actif aussi dans les milieux d’affaires. De 1873 à 1902, il fut président de l’Association d’assurance sur la vie, dite la Confédération, l’une des principales institutions financières du pays. En 1878, il accéda à la présidence de la Banque d’Ontario ; en outre, il fut président de la London and Canadian Loan and Agency Company. En décembre 1880, Howland et d’autres gens d’affaires, Ontariens pour la plupart, formèrent un consortium qui proposa de construire le chemin de fer du Pacifique à un moindre coût que le groupe montréalais de George Stephen*. Leur proposition fut rejetée au cours des étapes qui menèrent à l’adoption du projet de loi sur le chemin de fer canadien du Pacifique aux Communes, en janvier.

Dans les années 1890, Howland commença à se retirer des affaires. Marié pour la troisième fois en 1895, il se sépara de sa femme peu après. En 1906, sir Wilfrid Laurier*, alors premier ministre du Canada, lui suggéra d’écrire le récit de sa vie. Même s’il avait 95 ans et si sa santé était fragile, l’autobiographie qu’il dicta était d’un style alerte. En septembre 1906, moins de quatre mois avant sa mort, il posa la première pierre du nouvel édifice du National Club à Toronto. Il était membre de ce cercle depuis sa fondation en 1874 par des membres du mouvement Canada First [V. William Alexander Foster*]. À sa mort, le 1er janvier 1907, il laissait dans le deuil sa fille unique et lady Howland.

Arrivé dans le Haut-Canada en 1830, sir William Pearce Howland s’éteignait plus de trois quarts de siècle plus tard dans un pays qui s’étendait désormais d’un océan à l’autre. Ce pays, il avait grandement contribué à le créer et à le développer, aussi bien en tant qu’homme d’affaires qu’en tant qu’homme politique.

Rae B. Fleming

L’auteur remercie l’honorable William Howland, de Toronto, petit-fils de sir William Pearce Howland, de lui avoir donné accès à l’arbre généalogique de la famille Howland en sa possession.  [r. b. f.]

En 1906, sir Howland dicta sa biographie. William Ford Howland, son cousin, dactylographia son compte rendu en 1933 et apporta, semble-t-il, certains changements aux faits décrits. Les AO conservent une photocopie de ce texte (F 101, MU 4757, no 9).

AN, MG 29, D61 : 4143–4185.— AO, F 773, MU 133 ; F 982, MU 2006, envelope 1 (mariages contractés par John Jennings), 12 juill. 1843 ; RG 22, ser. 305, nos 5964, 19441 ; RG 80-5, no 1895-014769.— World (Toronto), 2 janv. 1907.— F.-J. Audet, Dictionnaire biographique des gouverneurs, lieutenants-gouverneurs et administrateurs du Canada et de ses provinces, 1604–1921 (2 vol., s.l., s.d.).— Canadian biog. dict.Canadian directory of parl. (Johnson).— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898).— Careless, Brown.— The causes of Canadian confederation, Ged Martin, édit. (Fredericton, 1990).— Commemorative biog. record, county York.— D. [G.] Creighton, John A. Macdonald, the young politician (Toronto, 1952 ; réimpr., 1965).— Dent, Canadian portrait gallery, 3.— DNB.— S. T. Fisher, The merchant-millers of the Humber valley : a study of the early economy of Canada (Toronto, 1985).— E. H. Jones, « The Great Reform Convention of 1859 » (thèse de ph.d., Queen’s Univ., Kingston, Ontario, 1971).— Ged Martin, « What we know and what we think we know : the coalition of 1864 in the Province of Canada » (document présenté à la conférence annuelle de la British Assoc. for Canadian Studies, Nottingham, Angleterre, 1991).— W. L. Morton, The critical years ; the union of British North America, 1857–1873 (Toronto, 1964).Ontarian Genealogist and Family Historian (Toronto), 1 (18981901) : 148–153.— H. F. Pierce, Sir William Pierce Howland, c.b., k.c.m.g., 1811–1907 : a bi-centennial tribute to a distinguished American-born Canadian statesman (Plymouth, Mass., 1976).— Types of Canadian women (Morgan).— P. B. Waite, Canada, 1874–1896 : arduous destiny (Toronto et Montréal, 1971).

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Rae B. Fleming, « HOWLAND, sir WILLIAM PEARCE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/howland_william_pearce_13F.html.

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Auteur de l'article:    Rae B. Fleming
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
Année de la révision:    1994
Date de consultation:    20 nov. 2024