DICKSON, WILLIAM, homme d’affaires, avocat, juge de paix, fonctionnaire, homme politique et agent de développement foncier, né le 13 juillet 1769 à Dumfries, Écosse, deuxième des six fils de John Dickson, marchand, et de Helen Wight, fille d’un ministre presbytérien ; le 12 avril 1794, il épousa à Newark (Niagara-on-the-Lake, Ontario) Charlotte Adlam, et ils eurent trois fils ; décédé le 19 février 1846 à Niagara (Niagara-on-the-Lake).

Après que l’entreprise de son père eut subi des revers, William Dickson vint rejoindre son cousin Robert Hamilton* dans l’ouest de la province de Québec en 1785. Sous la supervision de Richard Cartwright*, l’associé de Hamilton, il fut d’abord agent transitaire à l’île Carleton (New York), après quoi il géra les moulins et le magasin de son cousin au ruisseau Twelve Mile, dans la presqu’île du Niagara. Vers 1790, il s’installa à Niagara, en face du fort, où, notait plus tard un autre de ses cousins, Thomas Clark*, il « vend [ait] des marchandises aux militaires et négoci[ait] avec les colons du grain, entre autres, acheté en grande quantité pour approvisionner la garnison ». Même s’« il n’[était] à son compte que depuis peu, poursuivait Clark, il s’[était] tout de même fort bien débrouillé jusque-là ». Ses affaires étaient en effet si bonnes qu’en 1790, à l’âge de 21 ans, il fit construire la première maison de brique de la presqu’île.

À l’aide des profits de son négoce, Dickson faisait d’ambitieuses opérations de spéculation foncière, souvent avec ses cousins Clark et Hamilton. En 1792, il demanda au lieutenant-gouverneur John Graves Simcoe* de lui octroyer 48 000 acres de la « terre des Mississagués » [V. Kineubenae*]. On rejeta sa requête, et il ne put faire venir d’Écosse, comme il l’avait prévu, des gens « honnêtes et loyaux » qui auraient constitué, à cet endroit, une « classe de francs-tenanciers ». En 1793, Dickson et Samuel Street* « découvrirent » que les Indiens des Six-Nations désiraient vendre une partie de leurs terres de la rivière Grand et demandèrent à Simcoe d’autoriser la transaction. Le lieutenant-gouverneur refusa, car il estimait que les 570 000 acres concédées aux Indiens le long de ce cours d’eau étaient réservées à leur seul usage, mais le porte-parole des Six-Nations, Joseph Brant [Thayendanegea*], s’opposa vivement à cette façon de voir. Finalement, en 1797, l’administrateur Peter Russell* admit que les Indiens pouvaient disposer de leurs terres. Dès 1798, quelque 350 000 acres étaient divisées en six blocs et mises en vente. L’histoire des transactions qui concernent les terres de la rivière Grand demeure obscure, mais on sait un certain nombre de choses sur la participation de Dickson, qui fut considérable. En 1795, il avait servi de représentant à un groupe d’Américains pressés d’acheter des terres aux Six-Nations. À compter de 1798, il fut à maintes reprises l’agent foncier de ces Indiens et, par la suite, il leur servit d’avocat dans nombre de transactions qui concernaient les blocs (en 1803, le Parlement adopta une loi qui permettait au lieutenant-gouverneur de lui accorder l’autorisation de pratiquer le droit). Il s’occupa de l’achat de certaines terres du bloc 2 par des mennonites de Pennsylvanie en 1803 [V. Samuel D. Betzner*] ainsi que des affaires de Richard Beasley, qui les leur avait vendues. Le 13 mars 1809, en dédommagement de ses services professionnels, les Six-Nations lui cédèrent 4 000 acres à l’embouchure de la Grand, juste à côté du bloc 5.

Dickson spécula aussi pour lui-même sur les terres de la rivière Grand. Dès 1807, il détenait une option sur le bloc 5, qui tirait sa valeur de ce qu’il faisait face au lac Érié, puis en dépit d’une entente selon laquelle son frère Thomas* et Hamilton rachèteraient ce bloc en tout ou en partie, il vendit ses droits au comte de Selkirk [Douglas*]. Il portait aussi un intérêt particulier au bloc 1. Il hypothéqua en 1802 plus de 15 000 acres à Isaac Todd* dans le but exprès d’acheter des terres, peut-être pour financer sa participation à une ou à plusieurs vaines tentatives d’achat du bloc 1. En 1808, il conçut avec Augustus Jones un plan en vertu duquel le beau-père de celui-ci, Henry Tekarihogen*, chef en titre des Six-Nations, les aurait aidés à acheter le bloc, mais le plan échoua. Finalement, en 1811, Dickson l’acheta avec son cousin Thomas Clark ; à ce moment toutefois, on camoufla sa participation à part égale à la transaction. Cinq ans plus tard, on lui transféra toutes les terres.

Dickson ne négligeait pas de prendre part à la vie régionale. Il était membre de la Niagara Agricultural Society et de la Niagara Library, ainsi que commissaire de la grammar school du district. Juge de paix, il fut juge assesseur en 1801 au procès de Mary London [Osborn*]. En 1803, on l’élut gardien de fourrière du canton de Niagara. Figure importante de l’élite commerciale qui gravitait autour de Robert Hamilton et dominait la presqu’île, il en fut le candidat aux élections de 1800 avec Street. Cependant, tous deux perdirent au profit d’Isaac Swayze* et de Ralfe Clench*, et ce même si Dickson avait fait, de l’avis de Robert Nichol*, « l’un des meilleurs discours (peut-être) jamais prononcés dans le Haut-Canada ».

Aux assises de 1806 à Niagara, l’avocat William Weekes*, membre éminent de l’opposition politique provinciale, fit des remarques déplacées sur le défunt lieutenant-gouverneur Peter Hunter*. Le président du tribunal, Robert Thorpe, l’écouta sans broncher, mais Dickson, avocat au même procès, protesta. Les deux hommes refusèrent de se réconcilier. Weekes exigea des excuses ou une réparation. Un duel eut lieu le 10 octobre en sol américain, dans le voisinage du fort Niagara (près de Youngstown, New York). Blessé, Weekes mourut le lendemain. On ne poursuivit pas en justice Dickson, qui s’en était tiré indemne.

En 1812, Dickson se fit construire une deuxième maison de brique. Il possédait une magnifique bibliothèque qui contenait au delà d’un millier d’ouvrages importés d’Angleterre et dont il estimait la valeur à plus de £600. Contrairement à ses frères Thomas et Robert*, il ne joua pas un rôle important pendant la guerre de 1812. Fait prisonnier avec plusieurs autres civils le 19 juin 1813, au moment où les Américains occupaient Niagara, il fut détenu à Albany, dans l’État de New York, jusqu’en janvier 1814. En décembre précédent, l’armée américaine en retraite avait incendié sa maison, qui valait £1 000. Le fait de ne pas avoir participé directement à l’effort de guerre ne nuisit toutefois pas à la réputation de Dickson et ne mit pas un frein à son ascension dans la société haut-canadienne. En novembre 1815, il entra au Conseil législatif avec Clark, Thomas Fraser* et Neil McLean*.

Après les hostilités, Dickson se mit à élaborer des plans détaillés pour mettre en valeur le bloc 4. Il fit en 1816 la tournée des terres avec son agent, Absalom Shade*, et autorisa un levé d’arpentage. Les premiers colons s’installèrent à Shade’s Mills, sur le futur emplacement de Galt. Cependant, le règlement gouvernemental qui interdisait, dans les faits, de concéder des terres aux immigrants américains empêchait Dickson de promouvoir la colonisation autant qu’il l’aurait voulu. Peut-être appuya-t-il Robert Nichol lorsqu’en 1817 celui-ci tenta, en vain, de faire abroger ce règlement par l’Assemblée. La même année, après l’échec de cette tentative, il se mit à encourager Robert Gourlay*, mari de sa cousine, dont il avait fait la connaissance en 1809 à l’occasion d’une visite en Écosse. La perception que Gourlay avait de la situation haut-canadienne s’inspirait énormément de ses conversations avec Dickson et d’autres spéculateurs fonciers de la presqu’île et, lorsqu’il résolut de produire et de publier un compte rendu statistique sur la province, Dickson l’appuya, dans l’espoir que cette manœuvre stimulerait l’immigration britannique. Vint cependant un moment où les autorités d’York (Toronto) s’opposèrent fortement à Gourlay, et quiconque continuait d’entretenir des liens avec lui risquait de devenir suspect. Dickson, opportuniste, se retourna donc contre lui. Il joua un rôle important dans l’arrestation de Bartemas Ferguson*, rédacteur en chef du Niagara Spectator, qui avait publié des écrits de Gourlay, et dans celle de Gourlay lui-même, en 1819, en vertu du Sedition Act de 1804. Plus encore, il fut l’un des magistrats qui interrogèrent Gourlay et lui ordonnèrent de quitter la province.

Après cet épisode, William Dickson se consacra à la mise en valeur de ses terres du canton de Dumfries. Pendant son voyage en Écosse, en 1809, il avait pris le pouls de l’opinion sur l’émigration vers le Haut-Canada et avait fait quelques démarches préliminaires pour trouver des agents. Une fois le premier village établi, il expédia à ses agents écossais des imprimés qui décrivaient son canton, publia des articles dans la presse écossaise et communiqua avec d’éminents Écossais, surtout à Dumfries et dans les comtés de Roxburgh et de Selkirk. Dans l’ensemble, il se comportait comme un père avec ses colons. Ils étaient conduits sans délai sur leur terre et recevaient du bétail, des instruments aratoires et des provisions. Dickson avait la réputation de consentir de solides avances monétaires et de ne pas exiger de gros acomptes. En 1825, comme son village – désormais appelé Galt – florissait, il y installa toute sa famille. En 1837, il se retira à Niagara et confia la gestion de ses terres à ses fils.

Bruce Wilson

AO, MU 875–877.— APC, MG 19, A3, 15 : 5161–5163 ; E1, sér. 1 : 14404–14405 ; McDonell papers, vol. 10, Baldoon settlement letter-book, McDonell à Selkirk, 28 nov. 1808 ; MG 23, HI, 1, sér. 3, 2 : 356 ; sér. 4, vol. 6, packet A17 : 5–6, 34–35 (transcriptions) ; MG 24, B130, Thomas Clark à Samuel Clark, 12 oct. 1792 (copie) ; RG 8, I (C sér.), 690 : 120–124 ; 1225 : 8–10 ; RG 19, E5(a), 3740, claim 5.— DPL, Burton Hist. Coll., John Askin papers.— QUA, 2199c, letter-books, Cartwright à Todd, 18 avril 1801 (transcriptions aux AO).— John Askin papers (Quaife).— « Journals of Legislative Assembly of U.C. », AO Report, 1909.— Niagara Argus (Niagara [Niagara-on-the-Lake, Ontario]), 4 mars 1846.— Armstrong, Handbook of Upper Canadian chronology (1967).— Darroch Milani, Robert Gourlay, gadfly. James Young, Réminiscences of the early history of Galt and the settlement of Dumfries, in the province of Ontario (Toronto, 1880).— J. E. Kerr, « Sketch of the life of Hon. William Dickson », Niagara Hist. Soc., [Pub.], nº 30 (1917) : 19–29.

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Bruce Wilson, « DICKSON, WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/dickson_william_7F.html.

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Auteur de l'article:    Bruce Wilson
Titre de l'article:    DICKSON, WILLIAM
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1988
Année de la révision:    1988
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