FRÉCHETTE, LOUIS (à sa confirmation, il ajouta le prénom d’Honoré qu’il cessa d’utiliser en 1880), journaliste, écrivain, avocat, homme politique et fonctionnaire, né le 16 novembre 1839 à Pointe-Lévy (Lévis, Québec), fils de Louis Fréchette et de Marguerite Martineau ; le 10 juillet 1876, il épousa à Montréal Emma Beaudry, et ils eurent cinq enfants ; décédé le 31 mai 1908 à Montréal.

Issu d’une famille d’explorateurs, d’agriculteurs et de charpentiers de navires, Louis Fréchette parut, sa vie durant, vouloir concilier les états contraires de sédentarité et de nomadisme, et répondre aux appels opposés de l’ordre et de l’aventure. Difficile quête d’équilibre qui fit, de cet acteur important de l’histoire des lettres et des idées au Québec, un nœud de contradictions, bien au delà des apparences ; le personnage y gagne en humanité et en complexité douloureuse.

L’esprit de rébellion de Fréchette contre l’autorité se manifeste dès le temps des études collégiales : plus âgé de deux ou trois ans que ses condisciples, il a du mal à se plier aux règlements disciplinaires des institutions d’enseignement qu’il fréquente, ce qui lui vaut de passer du petit séminaire de Québec au collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière, et de là au séminaire de Nicolet, où il parvient à terminer sa rhétorique. En septembre 1860, ainsi muni d’un baccalauréat tronqué (il lui manque les deux années de philosophie), il est admis à l’un des cabinets d’avocats les plus en vue de Québec, celui de François-Xavier Lemieux* et d’Édouard Rémillard.

Suivent quatre années d’une formation qui ne se limite pas à l’étude du droit. Le jeune basochien (Fréchette suit, à l’occasion, des cours de droit à l’université Laval) s’adonne avec fougue à la vie de bohème : de sa mansarde de la rue du Palais (côte du Palais), les échos des fêtes retentissent dans tout le quartier latin. En quête d’ascension sociale, il met à profit d’exceptionnels talents de communicateur. D’où des initiations quasi simultanées à plusieurs domaines : au journalisme, à titre de reporter au Journal de Québec ; à la vie politique, notamment par une participation à des campagnes électorales, d’abord pour le Parti conservateur, puis pour le Parti libéral ; et à la création littéraire, par la fabrication d’une pièce de théâtre, Félix Poutré [...] (représentée en novembre 1862), [V. Félix Poutré*] et par la rédaction de poèmes, dont les uns paraissent dans des périodiques, d’autres dans des albums de jeunes filles de la bonne société, d’autres encore dans un recueil, Mes loisirs ; poésies, paru à Québec en mars 1863. Sa vie publique s’ébauche donc, sous ses divers aspects, en ces années décisives.

Dès son admission au Barreau du Bas-Canada en septembre 1864, Fréchette ouvre un cabinet à Lévis. Mais la clientèle est rare. Aussi participe-t-il à la fondation, en tant que rédacteur, du journal le Drapeau de Lévis, qui disparaît après quatre numéros. Une autre feuille, le Journal de Lévis, dont il devient en avril 1865 le directeur-fondateur et l’un des rédacteurs, connaîtra plus de succès ; il doit toutefois la quitter, huit mois plus tard, pour des raisons mal définies. Sa situation financière étant alors des plus critiques, il prend le parti de s’expatrier. Il prétendra, longtemps après, que les autorités religieuses de sa paroisse avaient compromis ses carrières d’avocat et de journaliste libéral ; il est aussi possible que, adversaire déclaré du projet de Confédération, il se soit rendu suspect auprès des autorités politiques du pays en faisant connaître le système de défense local à un espion fénien.

Fréchette arrive à Chicago en novembre 1866. Très vite, il y fréquente les milieux canadiens-français et français. On fait appel à lui pour fonder une succursale de la Société Saint-Jean-Baptiste où il répand ses idées d’annexion aux États-Unis. Quant à sa hargne contre le gouvernement conservateur de la province du Canada, principal architecte de la Confédération, il en fait la matière de son premier ouvrage polémique, la Voix d’un exilé [...], diatribe en vers aux accents hugoliens qu’il adresse, en trois épisodes (1867, 1868, 1869), aux principaux journaux libéraux français de sa patrie et publie aussi à Chicago. Côté journalisme, durant les premiers mois de 1867, il collabore à l’Observateur de Chicago, puis, à l’été de 1868, toujours comme rédacteur, il participe à la fondation de l’Amérique, organe du parti républicain auprès des groupes français de la ville. Entre-temps, il est devenu secrétaire d’administration au département des terres de l’Illinois Central Railroad.

Tout va bien jusqu’au retour de Fréchette, vers le début de septembre 1870, d’une brève campagne en faveur de l’annexion menée, tambour battant, sur la rive sud du Saint-Laurent durant les mois de juillet et d’août, soit au début de la guerre franco-allemande. Pendant son absence, par suite de l’appui du Parti républicain à la Prusse, le rédacteur par intérim de l’Amérique, un Suisse allemand, a publié des articles contre la France, ce qui a entraîné le désabonnement, par centaines, des lecteurs d’origine française. Pour Fréchette, cela signifie une nouvelle perte d’emploi. Le rêve américain aurait-il un goût amer ? Qu’importe : il en faut plus pour décontenancer Fréchette, jamais à bout de ressources. Après quelque trois mois d’errance en Louisiane, peut-être comme correspondant d’un ou de deux journaux américains, l’exilé volontaire rentre au Québec fin février 1871.

Des élections générales sont en vue, et Fréchette, promu candidat du Parti libéral, met tout en œuvre pour devenir le député de la circonscription de Lévis à l’Assemblée législative. Il échoue une première fois le 20 juin 1871. Pour se consoler, il publie en brochure, à Québec en 1872, Lettres à Basile [...], textes polémiques prenant pour cible un jeune avocat ultramontain promis à un bel avenir, Adolphe-Basile Routhier*, et se prépare activement, cette fois sous la bannière du Parti national (front du Parti libéral, dont le nom même hérissait l’électorat catholique), aux élections fédérales de 1872, mais connaît un nouvel échec. Toutefois, le 29 janvier 1874, à la faveur d’un revirement de l’opinion canadienne qui porte au pouvoir les troupes d’Alexander Mackenzie*, le voilà enfin député libéral de Lévis aux Communes. Il y siégera jusqu’aux élections de 1878, où il perd, comme il perdra à celles de 1882.

Ces insuccès en politique active ont néanmoins l’heureux avantage de laisser plus de temps à Fréchette pour poursuivre sa carrière littéraire, ce à quoi il s’applique dès après son mariage avec Emma Beaudry, fille d’un riche marchand, propriétaire foncier et banquier de Montréal, Jean-Baptiste Beaudry, et nièce du célèbre maire de la ville, Jean-Louis Beaudry*. Ainsi, vers la fin de son mandat de député, il publie un troisième recueil de poésies, Pêle-mêle : fantaisies et souvenirs poétiques, paru à Montréal en juin 1877, dont il adresse des exemplaires à des dizaines de personnalités du monde littéraire et politique français. Une réception sympathique de la mère patrie l’encourage alors à oser davantage, si bien que, sans trop d’hésitation, il soumet aux concours annuels de l’Académie française deux courts recueils publiés à cette fin au début de 1879 : Poésies choisies et les Oiseaux de neige : sonnets. En juin 1880, alors que débutent, à Montréal où le jeune ménage vient de s’installer, les représentations alternées de ses deux pièces de théâtre Papineau [...] et le Retour de l’exilé [...], un télégramme lui apprend que l’Académie française lui décerne l’un de ses prix Montyon les plus importants – premier honneur de cette sorte jamais accordé par un pays européen à un citoyen canadien.

La nouvelle fait sensation. Mais quelle gloire est sans ombre ? À son retour de France, où il est allé recevoir son prix, où Victor Hugo, son idole, lui a accordé une brève entrevue, le lauréat (titre, à saveur d’ironie, qui le hantera désormais) reçoit, de ses concitoyens, un accueil conflictuel : ses amis organisent en son honneur des banquets fastueux, tandis que ses ennemis l’accablent d’insidieuses critiques (on lui tisse, véritable tunique de Nessus, une réputation de plagiaire), prélude d’une campagne de dénigrement dont l’âpreté croîtra sans cesse au fil des ans. C’est que, pour les conservateurs en général et pour les ultramontains en particulier, le prestige nouveau qui pare le poète en fait un adversaire plus redoutable encore, d’autant qu’il met ses talents d’écrivain au service du libéralisme radical en collaborant, depuis la fondation de ce journal en mai 1879, à la Patrie, propriété d’Honoré Beaugrand, franc-maçon notoire. En fait, dans les coulisses du conservatisme, on croit, non sans raison, que l’attribution exceptionnelle d’un prix de l’Académie française à un écrivain qui n’est pas de nationalité française s’explique moins par la valeur esthétique de ses écrits que par son adhésion à l’idéologie de la IIIe République. Suspicion que Fréchette alimente lui-même, comme à plaisir, en truffant ses chroniques journalistiques de partis pris républicains. Il atteint bientôt l’un des sommets de sa partisannerie « rouge » par la publication, en 1883, sous le pseudonyme de Cyprien, d’un virulent pamphlet, Petite Histoire des rois de France, où, avec l’arsenal de la dialectique maçonnique, il s’ingénie à stupéfier le lecteur.

Le 12 mai 1884, Fréchette accède au poste de rédacteur en chef de la Patrie. Il n’occupera toutefois cette fonction qu’une quinzaine de mois. En effet, il quitte le journal de Beaugrand en juillet 1885 pour protester contre l’opposition du propriétaire à certains chefs libéraux, dont Honoré Mercier*. S’installant à Nicolet, il se retire de la vie publique, mais pour peu de temps, car, dès les premiers mois de 1887, il répond à l’appel de ses chefs et collabore à la campagne électorale fédérale du Parti libéral, ce qui l’amène à parcourir le Canada. Si, au jour du scrutin, les conservateurs se maintiennent au pouvoir à Ottawa, par contre, en octobre 1886, Mercier a renforcé les assises du parti qu’il avait fondé à la suite de l’affaire Riel [V. Louis Riel*], le Parti national, et il est devenu le premier ministre de la province de Québec en janvier 1887. Sans plus attendre, Fréchette estime le moment venu, pour lui, de recevoir la juste récompense de loyaux services rendus, plus de 15 ans durant, à la cause libérale ; aussi fait-il dire à qui de droit qu’il convoite le poste de chargé d’affaires du Québec à Paris. Devant l’insuccès de sa démarche, il répand le bruit que l’ingratitude de ses amis libéraux le réduit à tenter de nouveau fortune sous d’autres cieux. Et le voilà parti, le 9 mai 1887, pour la France, dans l’intention immédiate d’y mener à bien des projets de publication, et dans l’intention lointaine d’y vivre à demeure, avec sa femme et ses trois enfants, Louis-Joseph (né en 1877), Jeanne (née en 1879) et Louise (née en 1881) – un quatrième, Charles-Auguste, était mort en 1883, âgé de quatre mois à peine, et la dernière de ses filles, Pauline, verra le jour en 1889.

Tout va d’abord pour le mieux. L’amitié d’une écrivaine renommée de Bretagne, Adine Riom, vaut à Fréchette, exilé volontaire pour la seconde fois, de pouvoir terminer en toute tranquillité, dans une maison de campagne du Pellerin, petit village pittoresque au sud-ouest de Nantes, sur la Loire, le manuscrit d’un ambitieux recueil qu’il appelait « les Épopées nationales » et qui paraîtra, en novembre 1887 à Paris, sous le titre la Légende d’un peuple, sans aucun doute son œuvre poétique la plus célèbre, sinon la plus achevée. En outre, grâce à d’utiles relations, il donne des conférences, le plus souvent sur le Canada, à Nantes d’abord, puis à Paris, où il fait la rencontre d’écrivains bien en place comme Émile Augier, François Coppée, Leconte de Lisle, Xavier Marmier, Théodore de Banville et Jules Claretie. Mais un malaise le surprend à Rouen et le contraint de suspendre son projet de carrière en France. Le 10 décembre 1887, il s’embarque à destination de New York. Rentré à Nicolet, il tombe dans le marasme, conscient de traverser, selon ses dires, « une des plus sérieuses crises de son existence », d’où d’insistantes pressions auprès des chefs du Parti libéral en vue d’obtenir une sinécure. Cette fois, mais au terme de plus d’un an d’attente impatiente et inquiète, ses efforts sont couronnés de succès quand Mercier, cédant peut-être aux instances de Wilfrid Laurier*, lui attribue, le 5 avril 1889, le poste de greffier du Conseil législatif de la province de Québec. Il habite alors Montréal, une réconciliation avec Beaugrand lui ayant permis de rejoindre, en octobre 1888, l’équipe de la Patrie.

S’ouvre alors la période la plus orageuse de la carrière de journaliste de Fréchette. On aurait pu croire que l’honorable greffier, membre fondateur, en mai 1891, de la section française de la Société royale du Canada, chevalier de la Légion d’honneur, auteur d’un récent recueil lyrique passablement tranquille et rétrospectif (Feuilles volantes, novembre 1890), et souffrant périodiquement de graves problèmes de santé (attaques de rhumatisme articulaire), se serait tenu à l’écart des luttes idéologiques : c’est tout le contraire qui se produit. Membre de l’équipe de rédaction du Canada artistique (Montréal), puis de Canada-Revue (Montréal), la revue radicale d’Aristide Filiatreault*, Fréchette joint, à des textes de création littéraire dûment signés de son nom (comme le feuilleton des Originaux et Détraqués [...], publié du 23 juillet 1892 au 4 mars 1893 et mis en librairie en juin 1893), des chroniques de polémique anticléricale sous divers pseudonymes. Cette production militante s’intensifie à partir de mars 1893 quand paraissent, dans la Patrie, les premières de ses lettres sur l’éducation qu’il réunit, au mois d’août de la même année, dans une brochure intitulée À propos d’éducation [...]. Ces lettres ouvertes à un prêtre, professeur au collège Joliette, l’abbé Frédéric-Alexandre Baillargé, se soldent par l’attribution, à ce dernier, par l’archevêque de Montréal, d’une cure. De même, l’année suivante, une autre série de lettres ouvertes, que le polémiste adresse cette fois au père Pierre-Zacharie Lacasse*, oblat bien connu, animateur de retraites paroissiales dans de nombreuses localités rurales du Québec et auteur de plusieurs brochures d’éducation populaire à grand tirage, donne lieu à une réorientation de la carrière apostolique du religieux, que Mgr Édouard-Charles Fabre* éloigne de son diocèse. En ces années cruciales, par ces écrits et par quelques dizaines d’autres, Fréchette contribue à la campagne de déstabilisation du pouvoir clérical que les libéraux et leurs alliés mènent dans la province de Québec en vue des élections fédérales en 1896, et provinciales en 1897, qu’ils remporteront coup sur coup.

La dernière décennie de l’existence de Fréchette est pour le moins complexe. Sur le plan personnel, de cruelles épreuves (la mort tragique de son fils, Louis-Joseph ; de graves crises de neurasthénie) alternent avec de grandes joies (le mariage de ses filles les plus âgées : Jeanne, avec Honoré Mercier*, fils de l’ex-premier ministre, et Louise, avec Henri-Alphonse Béïque, fils du sénateur et président de banque Frédéric-Ligori Béïque*). Sur le plan officiel de la renommée socio-culturelle, les témoignages se multiplient : présidence d’honneur de l’École littéraire de Montréal (mai 1898), tribut de reconnaissance des écrivains de la jeune génération à l’endroit de cet aîné qui leur était d’emblée favorable, présidence générale (en 1900) de la Société royale du Canada ; et présidence du comité d’érection du monument dédié à Octave Crémazie* (1905–1906), hommage public que Fréchette, depuis longtemps déjà, tenait à rendre au premier grand poète canadien-français. Quant à l’œuvre littéraire, elle s’enrichit notamment par la publication partielle en 1900, et la représentation, en 1903, d’un mélodrame pseudo-romantique en cinq actes et en vers, Veronica, au succès mitigé, par la publication d’un recueil de contes, Christmas in French Canada (1899, l’édition anglaise devançant d’un an l’édition française, la Noël au Canada), et par la publication, en feuilleton dans le Monde illustré (Montréal), de souvenirs d’enfance (1900–1901) qui paraîtront en volume, 60 ans plus tard, sous le titre Mémoires intimes, sans conteste l’une de ses œuvres les plus attachantes. Vers 1903, conscient de l’ampleur et de la diversité de sa production littéraire, Fréchette prépare avec grand soin la publication, en 16 tomes, de ses œuvres complètes. Mais la recherche d’un éditeur s’avère décevante ; de fait, par un contrat du 14 janvier 1908, seule la maison Beauchemin [V. Charles-Odilon Beauchemin*] s’engage dans l’aventure, et uniquement pour les trois tomes des Poésies choisies (I : la Légende d’un peuple ; II : Feuilles volantes et Oiseaux de neige ; III : Épaves poétiques et Veronica). Mais Fréchette ne les verra pas paraître. Le soir du 30 mai 1908, sur le seuil de l’Institution des sourdes-muettes, où il loge depuis un an avec sa femme, il tombe victime d’une attaque d’apoplexie. Après une agonie de 24 heures, il meurt sans avoir repris connaissance.

Au lendemain de la mort de Fréchette, son ami de toujours, Laurent-Olivier David*, écrivit qu’avec lui disparaissait « l’une des figures les plus brillantes de cette féconde génération de 1860–1868, qui a jeté tant d’étoiles au ciel de la patrie, un homme dont l’esprit et le cœur lui ont valu l’admiration et l’amitié de ses contemporains ». Et comme tint alors à le rappeler Gonzalve Desaulniers*, l’un des jeunes écrivains qu’il avait si généreusement stimulés de ses encouragements : « ce fut Fréchette qui révéla le Canada français intellectuel à nos compatriotes de langue anglaise et à nos frères de là-bas. Son œuvre releva notre race méconnue aux yeux des premiers ; aux autres elle apprit que les roses de France pouvaient s’épanouir encore, après tant d’années, dans le jardin boréal si dédaigneusement abandonné. »

La vive subjectivité de ces témoignages n’en altère pas le bien-fondé : admises certaines maladresses, l’œuvre et la carrière de cet écrivain qui sut, avec tant d’énergie, se maintenir au premier plan de l’actualité idéologique, littéraire et culturelle, sont de celles qui marquent. Par ses travaux de pionnier dans les genres de la poésie et du théâtre, par ses réussites dans les domaines du pamphlet et du conte, par ses collaborations à de nombreux périodiques comme à nombre de sociétés culturelles ou littéraires – du Québec, de la France et des États-Unis, par son obstination à vouloir vivre de sa plume et par ses efforts en vue de promouvoir le statut social de l’écrivain (il s’intéressa de près à la question des droits d’auteur et, dans le répertoire des adresses de Montréal, il afficha, quelques années de suite, fièrement, à côté de son nom, la profession de « poète »), Louis Fréchette fit pleinement fonction, en son temps, d’agent principal de constitution de la littérature canadienne-française, sans pour autant cesser d’être un rouage important de la discrète, mais puissante, machine libérale.

Mais par-dessus tout, peut-être, quoique adepte de la bonne entente, Louis Fréchette œuvra au progrès de la langue et de la pensée françaises parmi ses compatriotes. À ce propos, rappelons le témoignage de l’essayiste Marcel Dugas : « Dans le Canada bouleversé par les tempêtes, les fureurs aveugles de la politique, son grand mérite fut d’être une sorte de héraut, cramponné au rocher de Québec, criant à sa jeune race que la condition pour elle de vivre était de se nourrir de l’esprit français, et que si jamais elle s’en abstenait, elle deviendrait une nation sans visage et sans âme. Cette attitude de Fréchette lui fait beaucoup d’honneur. Elle lui assure dans l’histoire des esprits au Canada une place de choix. »

Jacques Blais

AC, Montréal, État civil, Catholiques, Cimetière Notre-Dame-des-Neiges (Montréal), 3 juin 1908.— AN, MG 29, D40.— ANQ-M, CE1-33, 10 juill. 1876 ; P-133.— ANQ-Q, CE1-19, 17 nov. 1839 ; P-86.— Henri d’Arles [Henri Beaudé], Louis Fréchette (Toronto, [1924]), 1–23.— Alexandre Belisle, Histoire de la presse franco-américaine [...] (Worcester, Mass., 1911), 54–60.— L.-M. Darveau, Nos hommes de lettres (Montréal, 1873), 178–210.— L.-O. David, Souvenirs et Biographies, 1870–1910 (Montréal, 1911), 153–178.— DOLQ, 1.— G.-A. Drolet, Zouaviana ; étape de trente ans, 1868–1898 [...] (2e éd., Montréal, 1898), 245–255.— Marcel Dugas, Un romantique canadien : Louis Fréchette, 1839–1908 (Paris, 1934).— Louis Fréchette, Fréchette, Michel Dassonville, édit. (Montréal et Paris, [1959]).— Charles ab der Halden, Études de littérature canadienne française, introd. de Louis Herbette (Paris, 1904).— G.-A. Klinck, Louis Fréchette, prosateur : une réestimation de son œuvre (Lévis, Québec, 1955).— Séraphin Marion, les Lettres canadiennes d’autrefois (9 vol., Hull, Québec, et Ottawa, 1939–1958), 9.— Guy Monette, « la Polémique autour de la Voix d’un exilé ou le Chant du cygne de l’immanentisme au – Québec », Voix et Images (Montréal), 2 (1976–1977) : 334–355.— Lucien Serre, Louis Fréchette : notes pour servir à la biographie du poète (Montréal, [1928]).— Paul Wyczynski, « Louis Fréchette et le théâtre », le Théâtre canadien-français (Montréal, [1976]), 137–165.

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Jacques Blais, « FRÉCHETTE, LOUIS (Louis-Honoré) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 18 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/frechette_louis_13F.html.

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Auteur de l'article:    Jacques Blais
Titre de l'article:    FRÉCHETTE, LOUIS (Louis-Honoré)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
Année de la révision:    1994
Date de consultation:    18 nov. 2024