Titre original :  Pierre-Zacharie Lacasse., BM1,S5,P1044-2

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LACASSE, ZACHARIE (baptisé Pierre-Zacharie Cassé), prêtre, oblat de Marie-Immaculée, missionnaire, colonisateur, prédicateur et auteur, né le 9 mars 1845 à Saint-Jacques-de-l’Achigan (Saint-Jacques, Québec), fils de Joseph Cassé, cultivateur, et de Marguerite Mirault ; décédé le 28 février 1921 à Gravelbourg, Saskatchewan, et inhumé à Lebret, Saskatchewan.

Zacharie Lacasse naît dans une famille pauvre et dévote ; enfant difficile, il a la réputation d’être un élève dissipé, taquin et peu doué. De 1857 à 1865, il fait ses études classiques au collège de L’Assomption, dans la province de Québec, que fréquente aussi Wilfrid Laurier*. Le 28 août 1869, il entre au noviciat des oblats de Marie-Immaculée à Lachine, où il prononce ses vœux perpétuels le 29 août 1871. Après avoir terminé ses études théologiques à l’université d’Ottawa, il est ordonné prêtre le 27 avril 1873 par Mgr Joseph-Bruno Guigues*. Quelques semaines plus tard, Lacasse quitte Ottawa pour exercer son ministère auprès des Montagnais et des Canadiens français de la région de Betsiamites, dans la province de Québec. De là, il voyage à l’intérieur des terres du Labrador. Il passe, par exemple, l’hiver de 1875-1876 à la baie des Esquimaux (inlet Hamilton) ; il prend alors contact avec des Naskapis et des Inuits, et s’initie à l’inuktitut, dont il aurait confectionné un dictionnaire, perdu lorsque le baleinier qui transportait ses bagages coula. En 1880, il se rend jusqu’au fort Chimo (Kuujjuaq, Québec), à la baie d’Ungava.

Cette même année, à la demande de Mgr Elzéar-Alexandre Taschereau*, archevêque de Québec, Lacasse accepte de travailler à l’œuvre de la colonisation. Il occupe cette fonction jusqu’en 1883, particulièrement sur les territoires qui allaient devenir le canton de Normandin, dans la région du Lac-Saint-Jean, et les paroisses Saint-Prosper et Saint-Zacharie (d’ailleurs nommée en son honneur), en Beauce. À cette époque, il aurait fréquenté Arthur Dansereau*, Joseph-Israël Tarte* et Jules-Paul Tardivel* ; il aurait d’ailleurs convaincu ce dernier de fonder la Vérité en 1881, journal ultramontain de Québec auquel il collabore. Car son action apostolique, en effet, ne se limite pas à la prédication inhérente à son ministère. Il prend également la plume afin de répandre les thèses clérico-nationalistes parmi un plus grand nombre de fidèles. Les écrits apostoliques qu’il commence alors à publier connaîtront des succès populaires extraordinaires. Sa première « mine », selon son expression, est publiée à Québec en 1880 sous le titre Une mine produisant l’or et l’argent, découverte et mise en réserve pour les cultivateurs seuls. L’écrit, rédigé dans une perspective moralisatrice, a pour but de contrecarrer l’émigration aux États-Unis. L’auteur y propose un système par lequel le missionnaire, à titre d’agent de colonisation, recruterait des protecteurs qui fourniraient l’aide financière nécessaire à l’établissement d’un nouveau colon. Ce dernier devrait en retour travailler pour son mécène pendant un certain nombre d’heures. Lacasse expose aussi un plan de lotissement qui favoriserait le rapprochement des habitants plutôt que leur isolement sur des lopins de terre éloignés les uns des autres ; il présente un plan de construction de routes et de voies ferrées et donne des conseils pratiques pour la culture du sol. L’ouvrage connaît sept éditions en un an et est bientôt suivi d’Une mine de pierres détachées à l’usage des cultivateurs, qui paraît à Québec en 1881. L’essai, quelque peu autobiographique, établit un lien entre la culture de la terre et le bon catholique et fait valoir l’importance, pour l’exploitation agricole, du souci d’éviter l’épuisement des sols. L’auteur y prêche entre autres contre l’intempérance, le luxe, la franc-maçonnerie et les mauvaises lectures. Il tente d’y inciter les cultivateurs à manifester leur foi en payant leur dîme et de les convaincre de la supériorité de la religion catholique sur toutes les autres : « Retenez ceci, mes bons habitants : le jour où vous ne voudrez plus être les amis du clergé, vous serez les esclaves des libertins ; à vous de choisir. »

En 1883, Lacasse reçoit une nouvelle obédience ; rattaché à la maison de Montréal, il prêche des retraites au Canada et aux États-Unis, nouveau champ d’apostolat qu’il poursuivra jusqu’en 1896. Au dire de ses contemporains, il a le don de l’éloquence, le sens de l’ironie et de l’humour du terroir, la répartie facile et truffe ses discours d’histoires amusantes et de jeux de mots appréciés du grand public ; ses écrits, rédigés comme des conversations, sont d’ailleurs fort représentatifs de sa prédication. Pendant ces années, son écriture contribue encore une fois à sa renommée. Publié à Montréal en 1892, l’ouvrage intitulé Une nouvelle mine ; le prêtre et ses détracteurs fait l’apologie du clergé catholique au Canada ; 32 000 exemplaires s’en seraient rapidement écoulés. L’année suivante, Une quatrième mine ; dans le camp ennemi paraît à Montréal ; l’essai dénonce les « ennemis de la religion » et surtout quelques « journalistes impies ». Lacasse vise en particulier les anticléricaux français, qu’il nomme des « francissons », et s’en prend entre autres à l’Alliance française. Cette publication, que Louis Fréchette* ne manque pas de vilipender, provoque l’ire des libéraux et soulève un important débat médiatique. Lacasse s’attaque à Laurent-Olivier David, président de l’Association Saint-Jean-Baptiste de Montréal, et à Charles-Horace Saint-Louis, avocat du périodique montréalais le Canada-Revue, qui a entrepris un procès contre Mgr Édouard-Charles Fabre* pour avoir frappé la publication d’interdiction. Le polémiste traite Saint-Louis de renégat, d’ennemi de l’Église, de mauvais catholique et de citoyen indigne de figurer parmi ses compatriotes. L’avocat intente une action pour diffamation contre Lacasse et réclame « 25 000 francs », affaire qui reste toutefois sans lendemain, le demandeur ayant apparemment retiré sa plainte devant l’attitude combative de l’accusé. En 1895, Lacasse récidive avec Une cinquième mine ; autour du drapeau, une apologétique de la chrétienté qu’il publie à Montréal. La quatrième mine n’avait cependant pas été sans déplaire à Mgr Fabre, qui suit de près la nouvelle publication. Il semble bien qu’à la suite des remous provoqués par les écrits de Lacasse, ses supérieurs aient choisi de l’envoyer dans l’Ouest canadien.

C’est ainsi que Lacasse quitte la province de Québec en 1896 pour se rendre à Saint-Boniface (Winnipeg). En 1897-1898, il s’occupe de la paroisse Sainte-Marie, à Winnipeg. En 1900, il reprend la route pour prêcher des retraites dans le Dakota du Nord. De novembre 1902 à mars 1903, il est curé intérimaire de la paroisse Saint-Jean-Baptiste à Duluth, dans le Minnesota. En 1905, il est rappelé à Saint-Boniface, où il collabore à la création du juniorat de la Sainte-Famille (maison de formation destinée aux jeunes gens qui désirent entrer en religion), dont il est le directeur en 1905-1906. Il y écrit aussi des articles pour l’Ami du foyer, revue publiée par les oblats de Marie-Immaculée, en particulier « les Légendes du peuple canadien à l’ombre de la croix », série d’une quarantaine d’articles parus entre 1905 et 1918. Après avoir participé, à titre de théologien, au Premier Concile plénier de Québec en 1909, il retourne à Duluth et poursuit ses tournées de prédication jusque dans le Wisconsin. Tant dans l’Ouest canadien que dans le Minnesota, Lacasse se mêle aux intrigues et aux polémiques locales. En 1918, par exemple, l’évêque du diocèse de Crookston, Mgr Timothy Corbett, l’accuse de diffamation dans une controverse au sujet de l’agrandissement d’un hôpital à Duluth.

En 1919, Zacharie Lacasse rentre au juniorat de la Sainte-Famille. En 1920, ses supérieurs le nomment directeur spirituel au collège nouvellement fondé de Gravelbourg, où il meurt le 28 février 1921 ; il était atteint d’une maladie de cœur aggravée par le diabète. L’année précédente, il avait publié, à Saint-Boniface, son autobiographie dont le titre, Une mine de souvenirs, rappelle son œuvre qui en a fait le représentant type de la vulgarisation des thèses et de l’enseignement ultramontains. Proche du terroir par sa naissance, prédicateur à la parole facile, il a inconditionnellement défendu les thèses des catholiques intransigeants. Son propos avait pour but de faire connaître et de défendre la vérité, tout comme de condamner et de déplorer les erreurs dénoncées en décembre 1864 dans le Syllabus de Pie IX.

Gilles Lesage

En plus des ouvrages déjà mentionnés, Zacharie Lacasse est l’auteur de : Trois contes sauvages (Québec, 1882) ; Difficulté scolaire de Manitoba par questions et réponses à la portée de tous (Québec, 1897) ; et, sous le pseudonyme de Jean Des Prairies, d’Une visite dans les écoles du Manitoba (Montréal, 1897).

Aux Arch. Deschâtelets, oblats de Marie-Immaculée (Ottawa), le lecteur pourra trouver un volumineux dossier sur le père Lacasse (HEC 2130.Z16C) qui contient, notamment, des lettres, un « Essai de bio-bibliographie : le révérend père Zacharie Lacasse, o.m.i. » par Huguette Renaud (Z16C26ex.1 ; texte dactylographié, 1953) et « le R. P. Zacharie Lacasse, o.m.i. » (Z16C4 ; texte dactylographié) par Normand Lafleur. L’acte de baptême du père Lacasse est aux ANQ-M, CE605-S31, 10 mars 1845. Le périodique Missions de la Congrégation des missionnaires oblats de Marie Immaculée (Marseille, et autres lieux) contient, entre autres, des lettres et des rapports de Lacasse rédigés pendant ses années de service comme missionnaire ; on peut le consulter à l’aide d’un index général.

Les Cloches de Saint-Boniface (Saint-Boniface [Winnipeg]), 18 (1919) : 19s., 274 ; 20 (1921) : 44-47.— Le Devoir, 1er mars 1921.— La Liberté (Saint-Boniface), 12 oct. 1932.— Le Monde (Montréal), 15 déc., 27 oct. 1893.— L’Oiseau-Mouche (Chicoutimi, Québec), 11 nov. 1893.— La Patrie, 18 nov. 1893, 19 févr., 21 juill. 1894.— Le Patriote de l’Ouest (Prince Albert, Saskatchewan), 2 mars 1921.— J.-B.-A. Allaire, Dictionnaire biographique du clergé canadien-français (6 vol., Montréal et Saint-Hyacinthe, Québec, 1908–1934).— Marcel Bernad, Bibliographie des missionnaires oblats de Marie Immaculée (Liège, Belgique, 1922).— Gaston Carrière, Dictionnaire biographique des oblats de Marie-Immaculée au Canada (4 vol., Ottawa, 1976–1989), 2 : 217s. ; 3 : 47s. ; Histoire documentaire de la Congrégation des missionnaires oblats de Marie-Immaculée dans l’est du Canada (12 vol., Ottawa, 1957–1975), 8.— Ernest Cyr, le Révérend Père Zacharie Lacasse, o.m.i. : conférence donnée sous les auspices de l’Union canadienne à Saint-Boniface, le 6 novembre 1924 (Lyon, France, et Saint-Boniface, 1925).— Lionel Dorge, Introduction à l’étude des Franco-Manitobains ; essai historique et bibliographique (Saint-Boniface, 1973).— Esquisses : la ville de Duluth ; l’Église catholique et la colonie franco-américaine à Duluth (Duluth, Minn., 1910).— Arthur Joyal, « Un missionnaire patriote : le R. P. Zacharie Lacasse, o.m.i. », Almanach de la langue française (Montréal), 7 (1922) : 76–80.— Le Jeune, Dictionnaire.— Josaphat Magnan, « Il faisait rire, pour faire du bien », l’Ami du foyer (Saint-Boniface), 52 (1956), no 3 : 12 ; no 4 : 13.— A.-C. Morin, Dans la maison du père ; nécrologie sacerdotale du diocèse de Rimouski, 1867–1967 (Rimouski, Québec, 1967).— J.-P. Tardivel, Mélanges ou Recueil d’études religieuses, sociales, politiques et littéraires (3 vol., Québec, 1887–1903), 2 : v-vii.

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Gilles Lesage, « LACASSE, ZACHARIE (baptisé Pierre-Zacharie Cassé) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/lacasse_zacharie_15F.html.

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Auteur de l'article:    Gilles Lesage
Titre de l'article:    LACASSE, ZACHARIE (baptisé Pierre-Zacharie Cassé)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
Année de la révision:    2005
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