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STRICKLAND, CATHARINE PARR (Traill), pionnière, auteure, institutrice et naturaliste, née le 9 janvier 1802 à Rotherhithe (Londres), cinquième fille de Thomas Strickland et d’Elizabeth Homer ; décédée le 29 août 1899 à Lakefield, Ontario.

Bien qu’elle ait vécu durant presque tout le xixe siècle et qu’elle ait passé près de 70 années au Canada, Catharine Parr Strickland n’oublia jamais ses origines, et ses valeurs, ses convictions et ses intérêts demeurèrent profondément ancrés dans la campagne du Suffolk où s’était écoulée son enfance. Peu après sa naissance dans le Kent, son père, Thomas Strickland, quitta son poste d’administrateur des Greenland Docks, sur la Tamise, et s’installa à Norwich (dans le Norfolk), où il espérait être moins accaparé par ses affaires et trouver un climat à la fois plus agréable pour sa famille et bénéfique pour la goutte dont il souffrait. Homme d’une grande curiosité intellectuelle, il souhaitait également entreprendre l’éducation de ses filles – il en avait six en 1803 – et acheter une maison convenable pour sa famille qui s’agrandissait. De 1804 à 1808, tout en conservant une modeste demeure à Norwich où il s’occupait de ses nouvelles affaires, il loua dans le Suffolk, près de Bungay, une ferme, appelée Stowe House qui donnait sur la vallée champêtre de la Waveney. Cet endroit allait laisser à Catharine les souvenirs d’enfance les plus vifs – en particulier la pêche dans la Waveney avec son père, où tous deux se lisaient tour à tour des passages de The compleat angler d’Izaak Walton. Comme elle l’écrirait à l’auteur William Kirby* en 1895, « le bon vieux pêcheur » avait aidé « à former [son] amour de la nature et du Dieu de la nature », quand elle était une enfant.

À Stowe House et plus tard à Reydon Hall, gentilhommière élisabéthaine qu’il avait achetée en 1808 près de Southwold, sur la côte du Suffolk, Thomas Strickland enseigna à ses enfants et stimula leur désir d’apprendre. Il insista pour que ses filles s’astreignent à étudier la géographie, l’histoire et les mathématiques, études qu’il surveillait pendant que leur mère se chargeait d’en faire des femmes accomplies. Valorisant l’application, l’observation et l’autonomie en dehors de la classe, il encouragea aussi ses filles à fabriquer leurs propres jouets, à élever leurs petits animaux de compagnie et à cultiver chacune un jardin. À mesure qu’elles grandissaient, il prenait plaisir à discuter avec elles de questions controversées et les incitait à bien peser leurs arguments. Il avait cependant une assurance et un savoir tels que ses enfants se rangeaient habituellement à son avis.

Au moment de l’achat de Reydon Hall, Thomas Strickland avait déjà eu deux fils et il avait réalisé toutes ses ambitions sociales. Mais le climat humide de la mer du Nord s’avéra néfaste à sa santé, ce qui, ajouté au délabrement de la maison et aux pressions de ses affaires à Norwich, l’amena à s’absenter de chez lui pour de longues périodes. Les enfants furent donc laissés beaucoup à eux-mêmes, et les cinq plus jeunes souvent confiés au soin des aînées Elizabeth et Agnes – qui deviendraient plus tard de célèbres biographes de la royauté britannique – et de Sara, la seule des six filles de Strickland qui n’ait pas écrit.

Thomas Strickland mourut en mai 1818, et la vie à Reydon Hall changea radicalement. En effet, comme il avait connu des revers en affaires, il laissait à sa femme et à ses enfants peu d’argent pour entretenir la propriété et mener une vie sociale conforme à leur rang. C’est à ce moment qu’on découvrit toutes les ressources que possédait la jeune Catharine. Un ami de son père lut un manuscrit qu’elle avait écrit à 15 ans, en fit l’édition et le présenta à un éditeur de Londres. Premier d’un nombre considérable d’écrits que publieraient les sœurs Strickland, The tell tale : an original collection of moral and amusing stories parut sans nom d’auteur en 1818. Catharine Strickland dirait plus tard que son premier titre avait été The blind Highland piper and other tales, mais comme ce livre n’a pu être retrouvé et que The blind Highland piper fait partie de The tell tale, il est plus probable qu’il n’ait pas été publié. Ce qui avait été un passe-temps de jeune fille et une façon de déjouer l’ennui des hivers dans le Suffolk devint alors un moyen d’affronter la décente misère dans laquelle les Strickland étaient tombés. Plus tard, pour Eliza, Agnes et Jane Margaret, qui demeureraient en Angleterre et ne se marieraient pas, comme pour Catharine et Susanna* dans le Haut-Canada, ce passe-temps deviendrait une sorte de métier.

Pendant les années qui précédèrent son départ pour le Canada, Catharine Strickland se consacra à son travail et écrivit non seulement des livres pour adolescents, mais aussi des albums annuels et des livres-cadeaux, trois genres qui commençaient à être populaires dans le Londres d’avant l’époque victorienne. À la manière de Thomas Day, de Maria Edgeworth et de Sarah Trimmer, elle souhaitait transmettre d’importants préceptes moraux qui seraient bien mis en évidence par des récits didactiques ou des souvenirs autobiographiques. Quoique le caractère éphémère de beaucoup de ses écrits et son habitude de publier sans nom d’auteur, ou parfois en collaboration avec ses sœurs, rendent difficile l’établissement de la liste de ses premiers livres, on sait, d’après ce qu’elle en dit plus tard elle-même et d’après les textes qui restent, qu’entre 1819 et 1831 elle en publia une dizaine : par exemple, Disobedience ; or, mind what Mama says en 1819, Little Downy ; or, the history of a field mouse : a moral tale en 1822, The keepsake guineas ; or, the best use of money en 1828 et Sketch book of a young naturalist ; or, hints to the students of nature en 1831. Mais le plus intéressant est peut-être The young emigrants ; or, pictures of Canada ; calculated to amuse and instruct the minds of youth, qui parut en 1826. Pour écrire ce livre, Catharine Strickland s’était inspirée du Robinson Crusoe de Daniel Defoe, qui la fascinait, de livres de voyages sur le Canada, dont celui de John Howison*, et de lettres d’amis qui, comme son jeune frère Samuel*, avaient immigré au Canada pendant les années 1820. Les paroles qu’elle fait dire à l’un de ses jeunes immigrants – « Il me semble parfois que j’aimerais passer ma vie à explorer [...] cet étonnant pays » – témoignent de son enthousiasme devant la perspective d’expériences nouvelles, si difficiles et exigeantes soient-elles.

En 1829, un événement vint troubler la vie paisible que Catharine Strickland menait à Reydon : ses fiançailles avec Francis Harral, fils d’un important écrivain et rédacteur du Suffolk et de Londres. Pour se consoler de leur rupture deux ans plus tard, l’écrivaine entreprit, avec une tante riche, un voyage à Waltham Cross, Bath, Cheltenham et Oxford, qui l’amena à Londres à la fin de l’année. C’est vraisemblablement au début de 1832 qu’elle rencontra le lieutenant écossais Thomas Traill, veuf et, comme son ami John Wedderburn Dunbar Moodie*, officier à la demi-solde autrefois du 21st Foot. Leurs brèves fréquentations suffirent à la convaincre, comme elle l’écrivit à une amie, qu’elle était « prête à tout perdre pour l’amour d’un seul ami des plus chers, d’un mari avec lequel partager tous les changements et les risques de la vie de colon ». Malgré la forte opposition de sa famille, elle épousa Traill à l’église paroissiale de Reydon le 13 mai 1832.

Traill, qui avait alors deux fils en Écosse, n’était pas considéré comme un compagnon souhaitable pour Catharine et, pendant deux décennies, Agnes Strickland continuerait, dans ses lettres à Susanna, à regretter que leur sœur ait choisi cet homme pour mari et à le voir comme la cause des difficultés toujours plus grandes que celle-ci éprouvait au Canada. Ce qu’Agnes ne pouvait pas comprendre, c’est que Catharine était vivement déterminée à se marier et à commencer une vie nouvelle quand l’occasion s’en présenterait. Voyant l’exemple de son frère et de plusieurs amis, et sachant très bien que Susanna avait longuement mûri son projet d’émigrer, Catharine n’avait pas hésité à agir.

De son côté, Thomas Traill était content lui aussi de prendre un nouveau départ et de profiter de son droit à une concession foncière et du prix peu élevé des terres dans le Haut-Canada pour en tirer, sans se presser, de manière appropriée à sa classe, un revenu qui lui procure une certaine aisance. Il s’était endetté, et Westove, le domaine familial aux Orcades dont il était l’héritier, était si criblé de dettes qu’il offrait peu de possibilités. Traill n’avait pas non plus les moyens de donner un foyer ou de payer des études à ses fils et il les laissa aux bons soins de la famille de sa première femme, les Fotheringhame, de Kirkwall. Après le mariage, il emmena sa nouvelle femme visiter l’Écosse, en particulier Kirkwall et Westove, puis il s’embarqua avec elle à Greenock, au début de juillet 1832, à bord du brick Laurel. Il ne revit jamais ses fils.

Les trois premières années du couple dans la forêt du Haut-Canada font l’objet du livre le plus connu de Catharine Traill, The backwoods of Canada : being letters from the wife of an emigrant officer, illustrative of the domestic economy of British America, publié à Londres en 1836, toujours sous le couvert de l’anonymat. L’auteure y rassemble 18 « lettres », dépouillées des nouvelles intéressant seulement la famille et enrichies de longs récits descriptifs, dans lesquels elle raconte son immigration, son installation au pays et son adaptation joyeuse à ses nouvelles conditions de vie. Les réflexions que ces lettres contiennent montrent bien qu’elle les a disposées et réécrites en ayant à l’esprit un ordre et des objectifs particuliers. Elle, ou sa sœur Agnes, envoya ensuite le manuscrit à Charles Knight, éditeur à la Society for the Diffusion of Useful Knowledge qui, selon l’auteure même, était le troisième éditeur à le voir.

Manifestement beaucoup plus qu’un recueil de souvenirs destiné à la famille et aux amis, The backwoods est un guide pratique à l’intention des Anglaises de la classe moyenne qui, dans les années 1830, se trouvaient de plus en plus devant la redoutable perspective du déracinement et de l’émigration. En décrivant son voyage, la construction de sa maison et le défrichage de sa terre, Catharine Traill évalue constamment l’expérience canadienne selon les critères de la respectabilité, de la classe sociale et du bon goût, et en tenant compte de ce qui intéresse les femmes de son milieu socio-culturel d’origine. Beaucoup de choses l’ont choquée, comme en témoignent surtout ses premières lettres, mais en même temps elle cherche d’une manière qui lui est propre à rectifier ses attentes sans compromettre les principes de l’Angleterre bourgeoise auxquels elle attache une grande valeur. C’est pourquoi The backwoods reflète non seulement le caractère égal de son auteure, mais aussi ce que Carl Ballstadt appelle « une rhétorique de l’équilibre ». Ainsi, Catharine Traill y oppose la subjectivité et l’objectivité, les attentes de la Vieille Europe et les exigences du Nouveau Monde, le pittoresque et le réalisme, non pour déprécier son pays d’adoption, mais pour bien faire comprendre le genre de changements, d’efforts et de détermination qu’il faut pour s’adapter aux conditions rudimentaires et difficiles de la vie au Canada.

     The backwoods met d’ailleurs l’accent sur l’adaptation par sa structure même. Placées dans l’ordre chronologique, les lettres décrivent comment, après bien des difficultés et des déceptions, les Traill s’habituent à leur nouvelle vie, réconfortés d’avoir réussi à traverser ces épreuves. Construit sur le modèle de livres comme Robinson Crusoe ou The pilgrim’s progress de John Bunyan, le livre de Catharine Traill témoigne de la victoire tranquille de l’esprit anglo-protestant, qui aura permis non seulement d’aborder avec joie et curiosité les situations difficiles, mais encore de porter plus loin l’étendard du christianisme et de la civilisation. Au nombre des entreprises littéraires des pionniers du Haut-Canada, The backwoods se classe au rang de Roughing it in the bush [...], ouvrage en deux volumes de Susanna Moodie paru à Londres en 1852. Les deux récits sont apparentés et ont souvent été comparés. Our forest home [...] de Frances Stewart [Browne*], publié à Toronto en 1889, et A gentlewoman in Upper Canada [...], d’Anne Langton, paru à Toronto en 1950, sont d’autres écrits remarquables de pionnières. Étant donné qu’ils n’ont pas été préparés pour la publication, ils manquent du sens de l’identité littéraire et de l’attention à l’auditoire qui caractérisent les travaux de Catharine Traill et de Susanna Moodie.

Ironiquement, le sort des Traill allait changer quelques années seulement après la parution de The backwoods. Samuel, le frère de Catharine, avait facilité leur immigration en obtenant pour eux une concession de terrain près de chez lui, dans le canton de Douro, non loin de ce qui est aujourd’hui Lakefield, et en les logeant durant la construction de leur cabane en rondins. Mais Thomas Traill ne connaissait rien à l’agriculture, et l’isolement relatif dans les bois était peu compatible avec son tempérament sociable. Vers la fin de The backwoods d’ailleurs, Catharine Traill note, peut-être sans en comprendre alors toute la portée, que son mari éprouve « le même genre d’accablement moral qu’une fièvre nerveuse ». Dès 1835, Thomas Traill avait mis la propriété de Douro en vente et, après l’avoir finalement vendue en 1839, il emmena sa famille à Ashburnham (Peterborough) pour être plus proche d’amis qui lui ressemblaient, comme le docteur John Hutchison et Thomas Alexander Stewart*. Même s’il conclut un certain nombre de transactions, il eut cependant peu de succès dans le commerce immobilier et se trouva de plus en plus accablé de dettes, certaines résultant de ses propres erreurs de jugement, d’autres des créances légitimes dont était assailli le domaine de son père aux Orcades. Pendant les années 1840, lui et sa famille durent déménager souvent. Au printemps de 1846, ils vivaient dans un tel dénuement qu’un ami anglais, l’excentrique révérend George Bridges, grand admirateur de Catharine Traill et de ses écrits, leur laissa gratuitement sa maison, Wolf Tower – une sorte de forteresse –, au lac Rice. Puis, après avoir loué une propriété voisine, Mount Ararat, l’année suivante, ils achetèrent Oaklands, une ferme surplombant la rive sud du lac Rice, où ils vécurent de mai 1849 jusqu’à ce que le feu la détruise le 26 août 1857.

Entre 1833 et 1847, Catharine Traill avait donné naissance à neuf enfants, dont deux moururent en bas âge au début des années 1840. Au cours de cette période, ses grossesses et la maladie la forcèrent à réduire son activité. Pour alléger le fardeau financier, elle enseigna quelque temps à Peterborough et continua à écrire des contes, de courts textes sur la nature et des récits autobiographiques qu’elle cherchait désespérément à vendre en Angleterre, aux États-Unis et au Canada. Agnes fit publier certains de ces écrits dans des périodiques londoniens comme le Chambers’ Edinburgh Journal, le Home Circle et le Sharpe’s London Magazine. Catharine écrivit aussi, de temps à autre, pour la revue montréalaise de John Lovell, le Literary Garland, à laquelle sa sœur Susanna collaborait régulièrement.

La vie à Oaklands pendant les années 1850 fut une lutte de plus en plus difficile non seulement contre la mort, la maladie, la rareté du bois de feu et les récoltes manquées, mais aussi contre les accès de dépression qui rendaient Thomas incapable d’agir. Mais quel que soit le rôle que les faiblesses de son mari aient joué dans les malheurs de la famille, Catharine Traill se plaignit rarement et lui demeura loyale. Heureusement, elle continua à trouver des débouchés pour sa production littéraire, et Canadian Crusoes : a tale of the Rice Lake plains parut à Londres en 1852 chez Arthur Hall, Virtue, and Company, maison d’édition avec laquelle sa sœur Agnes avait signé le contrat. Dans ce conte pour enfants, Catharine Traill met en scène trois jeunes rejetons de pionniers qui, héroïquement, survivent par leurs propres moyens durant deux ans dans la forêt sauvage du nord du lac Ontario. La Hall and Virtue publia quatre ans plus tard un autre de ses livres pour enfants, Lady Mary and her nurse ; or, a peep into the Canadian forest, texte construit à partir de nouvelles qu’elle avait écrites en 1853 pour un périodique de Montréal, le Maple Leaf. Comme elle l’écrirait dans une lettre en 1896 : « J’ai toujours écrit pour les jeunes. J’aspire rarement à un genre [littéraire] plus noble. »

Catharine Traill avait cependant emprunté d’autres avenues utiles où elle s’était adressée aux adultes. Le succès de The backwoods, plusieurs fois réimprimé et réédité dans les années 1830 et la décennie qui suivit, l’avait amenée à s’attaquer à divers genres de suites. L’une d’elles, intitulée Forest gleanings, regroupe des nouvelles inspirées de sa vie dans les bois et au lac Rice et parut en 13 épisodes dans l’Anglo-American Magazine de Toronto en 1852–1853 ; malheureusement, en dépit de sa grande valeur et de son intérêt considérable, elle ne fut jamais publiée sous forme de livre. Tant que l’on ne connaîtra pas mieux tous les ouvrages que Catharine Traill écrivit entre 1830 et 1860, il sera impossible d’évaluer l’ensemble de son œuvre littéraire.

Tirant parti de sa réputation de conseillère auprès des immigrantes, Catharine Traill prépara un autre ouvrage qui connut le succès – un mélange hétéroclite de narrations, de citations, de recettes et de conseils pratiques –, The female emigrant’s guide, and hints on Canadian housekeeping, paru en fascicules à Toronto en 1854–1855 chez Thomas Maclear, puis en 1855 sous le titre The Canadian settler’s guide. À la même époque, elle publia pendant quelque temps ses écrits sur les fleurs et la nature dans Horticulturist, magazine d’Albany, dans l’état de New York.

Dans The backwoods, Catharine Traill avait consacré toute une lettre à décrire des fleurs du Canada et à vanter l’utilité de la botanique, regrettant de ne pas avoir étudié la peinture florale avant d’arriver au pays. Pendant toute sa vie au Canada, elle collectionna et étudia des spécimens de fleurs, d’herbes et de fougères, tint consciencieusement son carnet de recherches et, avec ses filles, créa des arrangements de fleurs pressées qu’elle vendait, présentait dans des concours ou donnait en cadeau. Sa collection et ses notes comptaient parmi les quelques objets qu’elle avait pu soustraire aux flammes en 1857. Toutes ses tentatives de trouver un éditeur ou un promoteur pour ses travaux de botanique avaient échoué. Comme elle l’écrivait à son amie Frances Stewart en 1862, elle était plutôt comme « le pauvre rat des champs » pour les questions relatives aux expositions et aux négociations.

Ce n’est cependant que plusieurs années après la mort de son mari, survenue le 21 juin 1859, une fois installée à Westove, le chalet de Lakefield que Samuel avait aménagé pour elle, que Catharine Traill eut l’occasion de collaborer avec sa nièce Agnes Dunbar FitzGibbon, qui était veuve. Fille de Susanna et, comme elle, habile dessinatrice de fleurs, Agnes apprit non seulement par elle-même la lithographie, mais elle s’occupa aussi de faire publier chez John Lovell en 1868 Canadian wild flowers, livre dont elle avait fait les illustrations et Catharine le texte ; vendu par souscription, cet ouvrage connut au moins quatre éditions. Leur collaboration reprit en 1884, quand Agnes, devenue Mme Chamberlin, prit des mesures pour faire publier à Ottawa, où elle était installée, l’étude la plus complète que sa tante ait rédigée sur la nature, Studies of plant life in Canada ; or, gleanings from forest, lake and plain, qui parut en 1885. Beaucoup plus intéressant et facile à lire que son titre scientifique ne le laisse croire, ce livre valut à son auteure l’admiration de James Fletcher*, spécialiste d’Ottawa, qui qualifia ses descriptions « d’une des plus grandes réussites dans le domaine de la botanique ». Pour Carl Clinton Berger, l’ouvrage constitue un « anachronisme splendide », non seulement à cause des retards de la publication, mais aussi de la démarche vivante qui caractérise les inventaires et les biographies florales de Catharine Traill. Elle n’avait pas l’esprit critique d’une scientifique, mais la passion qu’elle apportait à ses études lui a valu beaucoup d’admiration. Dans d’autres circonstances, son livre aurait pu être publié avant, ce qui lui aurait assuré une place plus importante dans l’évolution des études botaniques au Canada.

Catharine Traill vécut paisiblement le reste de sa longue vie à Lakefield avec sa fille Katharine et sa petite-fille Katharine Parr Traill. Cinq de ses enfants étaient morts ; une autre fille, Anne, vivait non loin de là avec sa famille, et deux de ses fils, William et Walter, s’étaient établis dans l’ouest du Canada.

Souvent malade et de plus en plus handicapée par sa surdité, Catharine Traill continua néanmoins à écrire et à rechercher des éditeurs. Elle avait plus de 90 ans quand elle publia ses deux derniers livres, chez William Briggs* à Toronto : Pearls and pebbles ; or, notes of an old naturalist [...] en 1894 et Cot and cradle stories en 1895 avec, dans chaque cas, l’aide de la fille d’Agnès Chamberlin, Mary Agnes FitzGibbon. Empruntant aux matériaux dont étaient faits ses livres précédents, elle témoigne dans ces deux recueils de sa foi constante dans l’insondable mais bienveillante sagesse divine et dans les leçons réconfortantes de la nature. Briggs devait publier un troisième ouvrage, soit la première édition canadienne de The backwoods, avec ajouts et corrections de Catharine Traill, mais ce projet n’eut pas de suite.

À la fin de sa vie, Catharine Parr Traill reçut des marques d’estime, dont la reconnaissance de sociétés historiques de Toronto et de Peterborough, une pension du Royal Literary Fund d’Angleterre ainsi qu’un don de 1 000 $ recueilli par son vieil ami sir Sandford Fleming* et qui lui fut remis en 1898 au cours d’une réception en son honneur. Après avoir été accablée de soucis financiers durant la plus grande partie de sa vie, elle fut non seulement reconnaissante de ce cadeau aussi généreux qu’inattendu, mais également heureuse de « l’assurance » que celui-ci lui donnait « d’avoir à [sa] modeste manière, servi le noble dominion du Canada de [sa] bien-aimée souveraine ».

Michael A. Peterman

La liste la plus complète des travaux de Catharine Parr Strickland est celle que l’on trouve dans l’étude de Carl P. A. Ballstadt, « Catharine Parr Traill (1802–1899) », Canadian writers and their works, Robert Lecker et al., édit., introd. de George Woodcock (9 vol. parus, Toronto, 1983-  ), fiction ser., 1 : 149–193. Un autre titre figure dans le livre de Rupert Schieder, « Catharine Parr Traill : three bibliographical questions », Soc. bibliogr. du Canada, Cahiers (Toronto), 24 (1985) : 8–25. L’édition de Schieder de Canadian Crusoes : a tale of the Rice Lake plains ([Ottawa], 1986) préparée pour le Centre for Editing Early Canadian Texts (Ottawa), renferme des renseignements utiles.

La collection de la famille Traill aux AN (MG 29, D81) s’avère la source la plus complète des journaux, lettres, carnets et souvenirs de Catharine. On trouve également de la documentation valable dans la correspondance de quelques sœurs de Catharine qui se trouve dans la Glyde coll. au Suffolk Record Office, Ipswich Branch (Ipswich, Angl.), dont une copie sur microfilm est disponible parmi les Susanna Moodie papers aux AN (MG 29, D100) ; dans les lettres de Catharine à Frances Browne Stewart parmi les Stewart papers à la MTRL ; et dans la P. H. Ewing coll. des Moodie-Strickland-Vickers-Ewing family papers, acquis récemment par la Bibliothèque nationale du Canada, (Ottawa).

L’auteur de cette biographie prépare actuellement des bibliographies des œuvres de Catharine et de Susanna de même qu’une édition des lettres des deux sœurs, en collaboration avec Carl Ballstadt et Elizabeth Hopkins. Le premier volume qui a résulté de ce travail, une collection de la correspondance de Susanna intitulée Susanna Moodie : letters of a lifetime, a été publié à Toronto en 1985. [m. a. p.] The valley of the Trent, introd. d’E. C. Guillet, édit. (Toronto, 1957).— DNB.— Morgan, Sketches of celebrated Canadians.— Oxford companion to Canadian lit. (Toye).— C. P. A. Ballstadt, « The literary history of the Strickland family [...] » (thèse de ph.d., Univ. of London, Londres, 1965) ; « Lives in parallel grooves », Kawartha heritage : proceedings of the Kawartha conference, 1981, A. O. C. Cole et Jean Murray Cole, édit. (Peterborough, Ontario, 1981), 107–118.— C. [C.] Berger, Science, God, and nature in Victorian Canada (Toronto, 1983).— Sara Eaton, Lady of the backwoods : a biography of Catharine Parr Traill (Toronto et Montréal, 1969).— Lit. hist. of Canada (Klinck et al. ; 1976), 1–2.— Marian [Little] Fowler, The embroidered tent : five gentlewomen in early Canada [...] (Toronto, 1982), 55–87.— Clara [McCandless] Thomas, « The Strickland sisters : Susanna Moodie, 1803–1885, Catharine Parr Traill, 1802–1899 », The clear spirit : twenty Canadian women and their times, Mary Quayle Innis, édit. (Toronto, 1966), 42–73.— Norma Martin et al., Gore’s Landing and the Rice Lake Plains (Gore’s Landing, Ontario, 1986).— A. Y. Morris, Gentle pioneers : five nineteenth-century Canadians (Toronto et Londres, 1968).— G. H. Needler, Otonabee pioneers : the story of the Stewarts, the Stricklands, the Traills and the Moodies (Toronto, 1953).— M. [A.] Peterman, « A tale of two worlds – from there to here », Kawartha heritage, 93–106 ; « Catharine Parr Traill », Profiles in Canadian literature, J. M. Heath, édit. (4 vol., Toronto et Charlottetown, 1980–1982), 3 : 25–32 ; « Splendid anachronism[s] » : the record of Catharine Parr Traill’s struggles as an amateur botanist in 19th-century Canada » (communication faite à l’Univ. of Ottawa symposium on Canadian women writers, 1988).— Lorne Pierce, William Kirby : the portrait of a tory loyalist (Toronto, 1929).— Suzanne Zeller, Inventing Canada : early Victorian science and the idea of a transcontinental union (Toronto, 1987).— « Collaborative sleuthing in Canadian literature », York Univ., Robarts Centre for Canadian Studies, Bull. (North York [Toronto]), 4 (1987–1988), n° 1.— W. D. Gairdner, « Traill and Moodie : the two realities », Journal of Canadian Fiction (Fredericton), 1 (1972), n° 2 : 35–42.— David Jackel, « Mrs. Moodie and Mrs. Traill, and the fabrication of a Canadian tradition », Compass (Edmonton), n° 6 (1979) : 1–22.— Ute Lischke-McNab et David McNab, « Petition from the backwoods », Beaver, outfit 308 (été 1977) : 52–57.— T. D. MacLulich, « Crusoe in the backwoods : a Canadian fable ? », Mosaic (Winnipeg), 9 (1975–1976), n° 2 : 52–57.— M. [A.] Perterman, « Agnes Strickland’s sisters », Canadian Literature (Vancouver), n° 121 (été 1989) (à paraître).

Bibliographie générale

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Michael A. Peterman, « STRICKLAND, CATHARINE PARR », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 19 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/strickland_catharine_parr_12F.html.

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Auteur de l'article:    Michael A. Peterman
Titre de l'article:    STRICKLAND, CATHARINE PARR
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1990
Année de la révision:    1990
Date de consultation:    19 mars 2024