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STOCKTON, ALFRED AUGUSTUS, avocat, homme politique, professeur et auteur, né le 2 novembre 1842 dans la paroisse de Studholm, Nouveau-Brunswick, fils de William Augustus Wiggins Stockton et de Sarah Oldfield ; le 5 septembre 1871, il épousa à Halifax Amelia Elizabeth Pickard, fille du révérend Humphrey Pickard*, et ils eurent dix enfants ; décédé le 15 mars 1907 à Ottawa.
Les ancêtres d’Alfred Augustus Stockton étaient des loyalistes qui avaient quitté le New Jersey pour s’établir dans l’une des régions les plus fertiles du Nouveau-Brunswick. C’était une tradition dans sa famille que d’avoir une commission dans la milice ou d’exercer une fonction paroissiale, signes évidents d’appartenance à la gentry rurale. Stockton fit d’abord ses études à la Mount Allison Wesleyan Academy et au Mount Allison Wesleyan College de Sackville. Il obtint une maîtrise ès arts à Mount Allison en 1867, puis un baccalauréat et un doctorat en droit à la Victoria University de Cobourg, en Ontario en 1869 et 1877. Cet homme infatigable décrocha aussi, en 1883, un doctorat en philosophie sur examen et dissertation à l’Illinois Wesleyan University de Bloomington, dans l’Illinois. Stagiaire chez son oncle Charles Wesley Stockton, qui était avocat à Saint-Jean, il avait été reçu attorney en 1867 et admis au barreau du Nouveau-Brunswick l’année suivante.
Stockton était l’un des plus éminents avocats de Saint-Jean. Sa plus célèbre cause, débattue en appel en 1892 et qu’il perdit, déboucha sur la reconnaissance judiciaire de l’un des principes fondamentaux du droit constitutionnel du Canada, à savoir l’« indépendance et [l’]autonomie » des gouvernements provinciaux, et le mena devant le comité judiciaire du Conseil privé. Nommé greffier adjoint de la Cour de vice-amirauté à Saint-Jean en 1879, il avait acquis une connaissance du droit maritime qui dépassait probablement celle de tout autre juriste au pays. En témoignent les nombreux commentaires qu’il consigna dans un ouvrage paru à Saint-Jean en 1894, Reports of cases decided in the Vice-Admiralty Court of New Brunswick from 1879 to 1891 [...] and a full digest of all Canadian vice-admiralty cases. Auparavant, il avait annoté abondamment l’édition de 1882 des New Brunswick Reports de George Frederick Street Berton*.
Les conférences que Stockton et d’autres prononcèrent à Mount Allison en 1891 furent probablement les premières leçons de droit qui se donnèrent dans un établissement d’enseignement supérieur de la province. Les causeries qu’il tint en 1882 et en 1890 devant la Saint John Law Students’ Association, puis dans le cadre des cours du soir organisés à Saint-Jean sous les auspices de la University of New Brunswick en 1892, comptent parmi les activités qui préparèrent l’ouverture, en octobre 1892, de la Saint John Law School, qui allait devenir la Faculté de droit de la University of New Brunswick. Invité par Isaac Allen Jack à faire partie du corps professoral de la nouvelle école de droit, il enseigna le droit constitutionnel et le droit maritime durant 14 ans. Il laissa aux étudiants le souvenir d’un homme affable, trapu mais beau, à la « mélodieuse voix de baryton ».
Tout en donnant de la formation en droit, Stockton menait une carrière politique. Adversaire de la Confédération pendant les campagnes électorales des années 1860, il resta très critique à propos du sort que le dominion réservait au Nouveau-Brunswick et prôna l’union des Maritimes. En 1868, avec John Valentine Ellis* et d’autres anticonfédérateurs, il réagit contre la politique tarifaire du gouvernement fédéral en formant une organisation pour l’abrogation de la Confédération, la New Brunswick League. En 1883, il remporta une élection partielle dans Saint-Jean ; il siégerait à l’Assemblée jusqu’à ce qu’il soit battu de justesse en 1899. Au début, il soutint la coalition majoritairement libérale d’Andrew George Blair, mais il démissionna lorsque celui-ci, en 1889, décida de démettre de ses fonctions le très estimé Benjamin Lester Peters pour confier au solliciteur général Robert John Ritchie le poste de magistrat de police de Saint-Jean. Sa démission fut l’un des facteurs qui provoquèrent les élections générales de 1890. Il dirigea la campagne qui donna à l’opposition les six sièges de Saint-Jean et qui faillit déloger Blair.
Par la suite, Stockton fut reconnu comme chef de l’opposition et considéré comme conservateur sur la scène provinciale. En 1891, il rompit même avec les libéraux fédéraux parce que le projet de traité de réciprocité proposé par eux cette année-là lui paraissait de tendance annexionniste, et il se joignit aux libéraux-conservateurs, comme bon nombre de ceux qui, à Saint-Jean, s’étaient opposés à la Politique nationale. Après avoir subi la défaite aux élections provinciales, il se présenta dans la circonscription fédérale de Saint-Jean sous la bannière conservatrice. La première fois, en 1900, il perdit, mais en 1904, il remporta la victoire. Au moment de sa mort, il était encore député aux Communes.
Façonnées en milieu libéral, les idées politiques de Stockton étaient bien celles d’un démocrate. Il soutenait le principe du suffrage universel et voulait que les lieutenants-gouverneurs et les sénateurs soient élus. Dès 1886, il pressa l’Assemblée du Nouveau-Brunswick d’accorder le droit de vote à toutes les femmes adultes ; il présenta des résolutions dans ce sens au moins en 1889, 1894, 1895 et 1897. Ses arguments étaient à la fois progressistes – l’histoire, disait-il, est l’élévation graduelle des femmes vers l’égalité – et utilitaristes. « Les femmes, soulignait-il, s’intéressent particulièrement aux questions de tempérance et d’éducation, et [...] ce serait la province qui serait gagnante sur ces plans si elle donnait aux femmes le droit de voter aux élections législatives. » Bien que les résolutions de Stockton n’aient été ni les premières, ni les plus radicales à être présentées au Nouveau-Brunswick, et bien qu’elles aient été battues (de justesse pourtant), ses interventions en faveur du suffrage féminin eurent plus de poids que celles de tout autre député de l’Assemblée, dans les années 1890, du fait qu’il était chef de l’opposition.
Les doctorats que Stockton obtint et les recueils de décisions judiciaires qu’il annota avec zèle suggèrent que Robert Laird Borden* avait raison de dire que « le monde des lettres et de l’érudition avait probablement plus d’attraits pour lui que la vie politique ». Son « imposante et admirable » bibliothèque fut détruite dans le grand incendie de 1877, mais il put tout de même laisser à la Free Public Library of the City of Saint John 16 volumes reliés d’opuscules où l’on trouvait des éditions uniques de James Glenie* et d’Edward Winslow*. Dès 1871, George Wheelock Burbidge et lui avaient projeté de se porter acquéreurs du prestigieux périodique de George Stewart et d’en faire un « trimestriel néo-brunswickois ». Leur ambition ne se réalisa pas, mais Stockton fit partie du premier comité de rédaction du Maritime Monthly, mensuel lancé à Saint-Jean en 1873, et fut correspondant de la Revue critique de législation et de jurisprudence du Canada, de Montréal. Vers la fin de sa vie, il aida financièrement David Russell Jack* à publier l’Acadiensis à Saint-Jean. C’est dans cette série que l’on trouve ce qui est peut-être son apport le plus durable.
À sa mort en 1892, Joseph Wilson Lawrence* avait confié à Alfred Augustus Stockton ses volumineuses notes de recherche sur la magistrature néo-brunswickoise d’avant la Confédération. En 1904, à l’instigation de Jack, Stockton s’attela enfin à la tâche de mettre en forme ce corpus indigeste en vue d’une publication par tranches dans un supplément de l’Acadiensis qui allait s’intituler « The judges of New Brunswick and their times ». Les notes qu’il ajouta au texte de Lawrence sont parfois plus longues que les passages qu’elles avaient pour but de préciser. Pourtant, même si Stockton était juriste plutôt qu’historien, elles constituent un atout précieux de l’ouvrage. Stockton mourut avant d’avoir composé les tout derniers chapitres ; William Odber Raymond* paracheva son travail.
La thèse de ph.d. qu’Alfred Augustus Stockton a soutenue en 1883 à la Ill. Wesleyan Univ., Bloomington, s’intitule « Ancient Mexico and the fall of the Aztec dynasty ». Outre les ouvrages mentionnés dans le texte, ses publications comprennent The rules and regulations of the courts of vice-admiralty in the British dependencies [...] ([Saint-Jean, N.-B. ?], 1876) et une collection d’essais qui ont été publiés de temps à autre sous le titre The Monroe doctrine and other addresses (Saint-Jean, 1898). The judges of New Brunswick and their times a paru à titre posthume sous forme de monographie ([Saint-Jean, 1907]), et a été réimprimé avec une introduction de David Graham Bell (Fredericton, 1983 [publié en fait en 1985]).
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D. G. Bell, « STOCKTON, ALFRED AUGUSTUS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/stockton_alfred_augustus_13F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/stockton_alfred_augustus_13F.html |
Auteur de l'article: | D. G. Bell |
Titre de l'article: | STOCKTON, ALFRED AUGUSTUS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1994 |
Année de la révision: | 1994 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |