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MALLORY, BENAJAH, colonisateur, homme d’affaires, officier de milice, homme politique, juge de paix et officier, né vers 1764 dans une des colonies américaines ; il épousa Abia Dayton, et ils eurent cinq enfants, puis Sally Bush, et le couple n’eut pas d’enfants ; décédé le 9 août 1853 à Lockport, New York.

Benajah Mallory était peut-être le fils d’Ogden Mallory, un des premiers colons de Wells, au Vermont. Du moins y vivait-il quand éclata la Révolution américaine. Plus tard, il s’enrôla comme simple soldat dans la milice de la région et participa à plusieurs batailles. Selon l’historien américain Orasmus Turner, Mallory fut le « premier marchand » de la région de Genesee, dans l’ouest de l’état de New York. Il s’installa dans le village que les adeptes de Jemima Wilkinson y fondèrent à la fin des années 1780. Sans doute y avait-il été attiré par la « perspective » d’un mariage avec la fille d’un des membres importants de la secte, même si jamais, apparemment, il ne partagea les convictions religieuses du groupe. En 1792, on le retrouve comme enseigne dans la milice du comté d’Ontario. Son beau-père, Abraham Dayton, souhaitait obtenir en concession un canton situé dans le Haut-Canada, près des terres que les Six-Nations possédaient à la rivière Grand. En 1795, avec ses associés, dont Mallory, Dayton s’établit dans le canton de Burford. En un an, Mallory construisit une maison et ouvrit une tannerie « à grands frais, [en plus de faire] d’autres travaux ». Confiné au lit dès le début, Dayton mourut en 1797. Mallory prit alors la tête de la petite communauté de 21 colons et engagea « de grandes dépenses pour ouvrir et peupler » le canton. Il s’empressa de signaler son intention de porter le nombre des colons au delà des 40 qu’exigeait le contrat de cession. Mais ce fut en vain. Le lieutenant-gouverneur John Graves Simcoe* avait été déçu de l’expérience qu’il avait tentée en concédant des cantons, et son successeur, l’administrateur civil Peter Russell*, était déterminé à résilier les contrats. Le canton de Burford fut rendu à la couronne, mais chacun des colons fut confirmé dans la possession de ses terres : Mallory obtint 1 200 acres et on recommanda que sa femme en reçoive 200.

Dans la population hétéroclite de la région, composée d’Américains à demi illettrés et non loyalistes, Mallory n’avait donc pas tardé à se distinguer. En 1798, il n’avait défriché que 15 acres, mais c’était un meneur d’hommes aussi ambitieux que doué. Pendant la réorganisation de la milice régionale, cette année-là, l’arpenteur général David William Smith* le recommanda avec succès au poste de capitaine d’une compagnie. Mais Mallory s’intéressait avant tout à la spéculation foncière, surtout dans le canton de Burford. Ainsi, il réclama le droit de louer des terres appartenant aux Six-Nations, ce qui poussa Joseph Brant [Thayendanegea*] à porter plainte auprès de Smith au début de 1798. Dès la fin de 1801, Mallory avait acquis des alambics, qu’il louait apparemment depuis quelque temps car il n’avait pas de permis. Le 2 avril 1802, il s’engagea à maintenir l’ordre dans « sa maison de divertissements publics ». Peu après, il acheta 560 acres de terre dans le canton de Burford, transaction qu’il finança en obtenant de Richard Cartwright*, marchand de Kingston, une hypothèque sur ces terres. Lord Selkirk [Douglas*], qui rendit visite à Mallory en 1803, rapporta qu’il possédait une « bonne maison à charpente de bois » et « un grand troupeau de bétail – 50 têtes ou plus ». À l’époque, Mallory affirmait avoir signé avec l’armée un contrat pour approvisionner les garnisons en viande fraîche de bœuf et avoir envoyé « l’année précédente ou auparavant 20 000 livres venant de son propre troupeau ».

Déjà important, Mallory était devenu prospère. Avec l’établissement du district de London, en 1800, il fallut y nommer des fonctionnaires. Dans l’ensemble, les postes allèrent à des officiers loyalistes comme Samuel Ryerse* et Thomas Welch* plutôt qu’aux Américains non loyalistes et pour une grande part de confession méthodiste qui composaient la majorité de la population du nouveau district. En mai 1802, Smith avait recommandé Mallory à Ryerse comme candidat possible à la magistrature. Ryerse, « ne le connaissant pas bien [lui]-même », eut bientôt vent de deux incidents qui ne faisaient guère « honneur à sa réputation ». Dans un cas, Mallory avait apparemment exigé d’être payé pour divulguer des renseignements sur un vol ; dans l’autre, apparemment encore une fois, il avait organisé un vol chez l’un de ses créanciers, qui était impatient de se faire acquitter une facture. Pour sa part, Mallory avait fini par être déçu des fonctionnaires des tribunaux de la région. En décembre 1802, il se plaignit à Welch, greffier de la Cour du district de London, des honoraires que celui-ci lui demandait pour les poursuites qu’il avait entreprises ; en même temps, il critiqua les honoraires prélevés par le juge, Ryerse. Les critiques de ce genre étaient justifiables et communes, surtout de la part des petits marchands et fermiers. Mais Welch avait de toute évidence décelé un élément inquiétant dans les accusations de Mallory et il lui répondit qu’il espérait que celui-ci « n’av[ait] pas l’intention [...] de faire mousser [sa] popularité en mettant en doute la conduite du juge du district et [celle de] son greffier ». Pareil dessein, suggérait-il, ne s’ajusterait pas à la conduite du « capitaine Mallory, [si] religieux et [si] humain ».

Dans la région, personne n’avait plus d’influence que l’arpenteur général Smith. En décidant de ne pas tenter de se faire réélire à l’Assemblée, il ouvrit la voie à une contestation véritablement politique de l’élite des fonctionnaires. Mallory et Ryerse se présentèrent dans la circonscription de Norfolk, Oxford and Middlesex. En mai 1804, Selkirk remarquait : « Ici, la campagne électorale ne semble pas se dérouler sans une grande âpreté – [les] adversaires [de Mallory] ont lancé certaines allégations auxquelles il a opposé un démenti formel – et il allègue qu’ils l’ont poursuivi dans le dessein de l’assassiner ». La victoire de Mallory, remportée par 166 voix contre 77, ne fit qu’exacerber l’hostilité entre les factions, qui éclata bientôt à la Cour des sessions trimestrielles. Après que des coups de feu eurent été tirés chez lui, de l’extérieur, en janvier 1805, Mallory prétendit que la tentative d’assassinat avait été le fait de Ryerse ou du juge de paix John Backhouse ; Ryerse, de son côté, laissa entendre que Mallory avait organisé lui-même la fusillade. L’affaire donna lieu à une série inextricable de poursuites et de contre-poursuites qui passèrent de la Cour des sessions trimestrielles à la Cour du banc du roi, où elle avorta finalement.

Le désordre qui régnait dans la région s’appuyait sur des critiques concrètes de l’administration des tribunaux de district. Dans une petite société, ces questions ne tardaient pas à prendre une dimension personnelle. Quand les luttes de faction passèrent dans l’arène politique, les facteurs de division s’élargirent. Ainsi, Thomas Welch dénonça le groupe de Mallory en le décrivant comme un rassemblement de méthodistes séditieux qui voulaient subvertir le « bon ordre ». Un de ses membres, nota-t-il, avait annoncé que le Haut-Canada deviendrait « une très bonne contrée lorsque tous les vieux tories et officiers à la demi-solde en aur[aie]nt été chassés et qu’il aura[it] une nouvelle constitution comme celle des États-Unis ».

Au début, Mallory n’exerça qu’une influence négligeable à l’Assemblée ; au mieux, il n’y était qu’un personnage secondaire. En appuyant la motion dans laquelle, le 1er mars 1805, William Weekes* demandait d’examiner « le malaise qui préva[lait...] en raison de l’administration des charges publiques », il manifesta son attirance pour l’opposition fragmentaire de l’Assemblée. À la session de 1806, il présenta une pétition en faveur des méthodistes, qui voulaient bénéficier entièrement de leurs droits civils et religieux. Il fut plus directement touché lorsque Samuel Ryerse l’accusa d’avoir été « illégalement et indûment élu » puisqu’il « prêch[ait] et enseign[ait la doctrine] de la société religieuse ou secte dite des méthodistes ». En 1807, l’Assemblée rejeta l’accusation faute de preuves : Ryerse avait simplement été incapable de rassembler ses témoins à York (Toronto). Certains cependant, comme Richard Cartwright, alors conseiller législatif, affirmaient que l’accusation était fondée.

Mallory était enfin devenu juge de paix en décembre 1806 ; en outre, il était capitaine du 1er bataillon de milice d’Oxford. Mais on l’identifiait à l’opposition politique et il incarnait les convictions fréquemment associées aux colons américains qui, selon le lieutenant-gouverneur Francis Gore, conservaient « ces idées d’égalité et d’insubordination qui nuis[ai]ent tant au gouvernement ». D’après Welch, dans le comté d’Oxford, neuf colons sur dix étaient américains. L’incident du Chesapeake, en 1807 [V. sir George Cranfield Berkeley*], l’amena à croire que, advenant une guerre contre les États-Unis, ces gens deviendraient des « ennemis internes » et qu’ils étaient donc « beaucoup à craindre ». Quand, en 1808, la direction de l’opposition à l’Assemblée passa aux mains de Joseph Willcocks*, Mallory prit une part beaucoup plus grande aux activités quotidiennes de la chambre et appuya de plus en plus les initiatives de Willcocks. Toutefois, il divergeait d’opinion avec lui sur des questions comme le projet de loi prévoyant le versement d’un salaire aux juges de la Cour des plaids communs car, même si pareilles mesures étaient privilégiées par l’opposition, elles étaient impopulaires dans le district de London. De plus, Mallory fut le seul à s’opposer à une modification du District School Act parce que les « habitants étaient très insatisfaits de la loi telle qu’elle était [alors] ».

En 1808, Mallory fut réélu dans la circonscription d’Oxford and Middlesex. Pendant toute la cinquième législature (1809–1812), l’opposition gagna en cohésion. En 1811, Mallory était devenu, avec John Willson, un des principaux partisans de Willcocks. Ils travaillèrent ensemble à une série de mesures populaires auprès de l’opposition : ils tentèrent par exemple, sans succès, de faire adopter un projet de loi qui empêcherait les shérifs de noyauter les jurys et un autre qui interdirait aux fonctionnaires de devenir députés. Ils collaborèrent aussi entre eux pour adopter des positions potentiellement populaires sur d’autres mesures : ainsi, ils s’opposèrent au projet de loi sur l’aide aux créanciers aux prises avec des débiteurs défaillants, votèrent en faveur du réexamen du statut des concessions aux loyalistes et aux militaires et rejetèrent la modification du Militia Act de 1793. D’une part, il semble probable que sa carrière de député poussa Mallory à se consacrer entièrement aux débats politiques. D’autre part, il se sentait harcelé par les membres d’une administration provinciale vindicative. Le 15 janvier 1807, Richard Cartwright avait remporté sur lui une victoire écrasante dans un procès pour dettes – £1 887 17 shillings, plus les frais. Ce jugement eut sans doute un effet sur Mallory car, l’année suivante, il tenta de louer aux Six-Nations une terre où il avait découvert du minerai de fer et où il entendait construire une forge. Finalement, il loua environ 1 460 acres, mais aucune installation ne fut construite. En 1810 et 1811, il perdit trois procès pour dettes, dont l’un pour la somme renversante de £1 000 plus les frais, et deux parcelles de ses terres furent saisies et vendues pour acquitter ses dettes envers Cartwright. Dans un cas, on l’identifiait ainsi : « récemment [du canton] de Burford, maintenant marchand et fermier ». En 1810, il fut acquitté d’une accusation de voies de fait sur la personne d’un shérif. Plus tard, il affirma que sa défense, à elle seule, lui avait coûté « près de » 2 000 $ ; financièrement, il était ruiné.

C’est au début de 1812, quand l’administrateur civil Isaac Brock* tenta de mettre la province sur un pied de guerre, que l’opposition remporta sa plus grande victoire à l’Assemblée. On attribua à Willcocks et à Mallory la résistance aux modifications du Militia Act (et surtout le refus de l’opposition de voir un serment d’abjuration inscrit dans la loi). Robert Nichol* signala en mars 1812 que leurs efforts « en vue de soulever des appréhensions à propos de l’application future du projet de loi sur la milice » avaient causé beaucoup d’inquiétude parmi les jeunes gens qui habitaient l’extrémité du lac Ontario. Frustré, Brock dissolvait l’Assemblée en mai, espérant réunir, comme le disait Archibald McLean*, une nouvelle assemblée « composée d’hommes qui [seraient] attachés au gouvernement ».

La vieille élite s’était étiolée devant l’opposition populaire. Aux élections, Mallory eut comme adversaire un proche associé de Thomas Talbot, Mahlon Burwell*, dont le pouvoir s’enracinait dans une espèce de fief personnel. Cette coalition était déterminée à mater Mallory. Plusieurs années plus tard, Asahel Bradley Lewis* allégua que dans la circonscription d’Oxford and Middlesex, en 1812, les estrades électorales avaient été placées dans « un endroit tout à fait sauvage. De sorte que Mallory et ses amis [avaient dû] parcourir près de 60 milles dans les bois pour se rendre au bureau de scrutin – où ils [avaient trouvé] le père de la colonie [Thomas Talbot] obtenant des votes pour son favori [...] en donnant à tous ceux qui étaient prêts à appuyer le jeune candidat et qui n’avaient pas déjà qualité d’électeurs – des billets de location. » Mallory railla cette tactique en la mettant au rang des « desseins les plus noirs et les plus inconstitutionnels » et pressa les électeurs de « rejeter l’oppression alliée à la tyrannie ». Toutefois, ses efforts furent vains et Burwell fut élu.

Lorsqu’il est question de la guerre de 1812 et de ses effets dans le Haut-Canada, peu de thèmes acquièrent autant d’importance que la désaffection et la trahison. La population était alors composée en très grande majorité d’Américains non loyalistes ; la plupart d’entre eux étaient probablement indifférents à l’issue des hostilités. Certains, comme Michael Smith*, retournèrent aux États-Unis, tandis que d’autres – Ebenezer Allan* et Andrew Westbrook* par exemple – se lancèrent immédiatement dans des activités séditieuses ; quelques-uns, comme Elijah Bentley*, attendirent le moment propice pour déclarer à qui allait réellement leur loyauté. Mais les cas les plus sensationnels – Willcocks, Mallory et Abraham Markle* – n’appartiennent à aucune de ces catégories. Chacun avait appartenu à l’opposition politique, mais aucun ne manifesta concrètement de déloyauté avant l’été de 1813. Il faut donc interpréter leur trahison à la lumière des changements qui survenaient à l’époque dans la province et non y voir la conséquence logique de leur opposition persistante. Brock avait employé Willcocks et Mallory comme émissaires auprès des Six-Nations ; de plus, Willcocks avait participé à la bataille de Queenston Heights en 1812. En 1829, Francis Collins* revint dans le Canadian Freeman sur un discours dans lequel Robert Nichol avait affirmé devant l’Assemblée que Willcocks avait été « forcé [de renoncer à] son allégeance par une vile conspiration contre sa vie ». D’après Collins, cette « assertion renvoyait selon de nombreuses personnes » aux actes du juge William Dummer Powell*. Comme Willcocks et Markle, Mallory aurait pu arguer que lui aussi avait été persécuté, mais par nul autre que Nichol. À un moment donné, au début de 1812, Mallory protesta auprès de Brock en ces termes : « un M. Robert Nicol et certains de ses coagitateurs vous ont présenté nombre de rapports calomnieux qui répandent des rumeurs sur ma vie privée et publique ». Selon ces rapports, il avait été déloyal, avait assisté à des « assemblées publiques dans de mauvais buts » et avait été poursuivi en justice. Mallory dénonça l’accusation de déloyauté mais admit avoir subi des procès. D’après lui cependant, ces poursuites, tant au civil qu’au criminel, prouvaient de manière tangible que la persécution avait commencé dès après son élection, en 1804. Son dossier public de juge de paix et d’officier de milice ne pouvait pas l’incriminer. Il avait, disait-il, encouragé la milice à soutenir la couronne et lui avait offert de la mener « pour empêcher les ravages ou l’intrusion d’un ennemi envahisseur ». Mais on ne lui avait jamais donné l’occasion de le faire. Comme, après l’occupation d’York par les Américains, au printemps de 1813, l’élite civile craignait trop le désordre pour se soucier encore d’assurer le règne du droit, les trois leaders de l’opposition, un à un, franchirent la frontière.

Willcocks passa aux Américains en juillet 1813 et offrit de lever un corps de volontaires canadiens expatriés « pour aider à transformer le gouvernement de la province en république ». Quant à Mallory, il avait peut-être déjà, auparavant, pris parti pour le républicanisme. Il est certain de toute manière que ce qui avait commencé dix ans plus tôt comme une réaction à la mauvaise administration du gouvernement par l’exécutif le poussa à recourir à la seule rhétorique d’opposition qu’il connaissait, le républicanisme, lorsque, à l’été de 1813, il estima que le despotisme militaire s’installait. Or, tenir un langage républicain, c’était s’attaquer de front à la forme de gouvernement du Haut-Canada.

Mallory fut inscrit officiellement comme capitaine de la Company of Canadian Volunteers le 14 novembre ; on raconte que le même jour le major William D. Bowen le vit avec un groupe en train de recruter des hommes à la rivière Grand. Après l’incendie de Niagara (Niagara-on-the-Lake) par les Américains et leur retraite au fort Niagara (près de Youngstown, New York), Mallory se vit confier le commandement du fort Schlosser (Niagara Falls, New York). À la fin de décembre, son détachement mena un intrépide combat d’arrière-garde contre les troupes britanniques qui descendaient vers le sud après avoir pris le fort Niagara. Les hommes de Mallory se distinguèrent de nouveau à Black Rock (maintenant partie de Buffalo) tandis que les Britanniques poursuivaient leur avance vers Buffalo.

Mallory était furieux que l’armée américaine fasse obstruction aux généraux de la région et résiste à la transformation des troupes de Willcocks en corps permanent. Malgré l’opposition de ses supérieurs, il continuait de recruter des hommes et les payait à même ses propres ressources. Finalement, par suite des pressions exercées par Willcocks à Washington, la Company of Canadian Volunteers fut transformée en un corps permanent et, le 19 avril 1814, Mallory fut promu major. Pendant l’été suivant, l’unité participa aux batailles de Chippawa et de Lundy’s Lane. À la mi-juillet, Mallory évita de justesse d’être capturé près de Beaver Dams (Thorold). En dépit de son efficacité, la Company of Canadian Volunteers se désintégrait ; le 24 août, Mallory demanda une mutation à cause d’un manque de recrues et d’un surplus d’officiers. Il espérait demeurer sur la frontière du Niagara où, expliqua-t-il à John Armstrong, secrétaire d’État américain à la Guerre, il était certain d’être plus utile « à cause de la connaissance qu[‘il] poss[édait] du pays ». Mallory plaidait en faveur d’une stratégie plus offensive et pour la levée de 10 000 à 15 000 miliciens qui seraient commandés par « quelques patriotes ». Il était convaincu que les Américains comprenaient alors la « nécessité d’exterminer la tyrannie britannique et sauvage [qui régnait sur le] domaine du Canada » ; « je crois, poursuivait-il, que notre effort marquera la fin de la lutte des Britanniques au Canada ». Aucune mutation, cependant, n’était en vue pour lui. Willcocks mourut en septembre ‘et le commandement échut à Mallory. Il demanda en vain plus d’armes et de vivres. La désertion et les querelles d’officiers affaiblissaient la Company of Canadian Volunteers. Le 15 novembre, Markle et William Biggar, enseigne dans cette compagnie et peut-être gendre de Markle, accusèrent Mallory de détournement de fonds et de conduite criminelle. Il fut suspendu et Markle prit le commandement. Mallory attribua ces accusations à de la « malveillance et à de noirs desseins provenant d’un cœur noir ». La compagnie fut démantelée le 3 mars 1815, mais Mallory continua de servir dans l’armée à quelque titre jusqu’au 31 juillet.

Dans le Haut-Canada, à Ancaster, Benajah Mallory avait été trouvé coupable de trahison en 1814 [V. Jacob Overholser*] et, plus tard, ses terres furent remises à la couronne. Il avait sacrifié, disait-il, « [sa] famille et [ses] biens ». Selon Joel Stone*, deuxième mari de sa belle-mère, Mallory s’était joint aux Américains « sans que sa femme, qu’il laissa au Canada avec une famille de cinq enfants, ne le sache et ne l’approuve ». Elle demeura « fidèle à ses vœux conjugaux » et, plus tard, « le rejoignit lorsqu’il l’envoya chercher ». Finalement, Mallory s’établit à Lockport. Le 1er janvier 1829, dans le Canadian Freeman d’York, un entrefilet signalait à propos de Mallory qu’il « a[vait] depuis figuré dans les journaux de son pays comme un expert dans l’art d’employer les biens d’autrui à son propre usage, ce pour quoi on lui a[vait] accordé des appartements dans une prison d’État ». Une lettre parue le 28 mars 1832 dans le Western Mercury de Hamilton rapportait que Mallory, « un des représentants les plus vils de la race humaine », « se traîn[ait] alors hors de sa lamentable existence de prisonnier ». Sa femme demeura avec lui pendant toutes ces années, tentant péniblement d’assurer la subsistance de sa famille, jusqu’à ce que, d’après Stone, « elle découvre que son dit mari [...] était si possible plus criminellement traître envers elle qu’il n’avait été [...] capable de l’être envers les deux gouvernements ». Elle le désavoua et rentra dans le Haut-Canada avec ses deux filles cadettes pour vivre à Gananoque avec sa mère et Stone. Au début de janvier 1838, Mallory offrit ses services à William Lyon Mackenzie* et aux « braves patriotes » qui se trouvaient dans l’île Navy. Il établit un parallèle entre les traîtres de 1813 et les rebelles de 1837 : « j’ai déjà souffert, disait-il, d’avoir pris au Parlement britannique [l’Assemblée du Haut-Canada] la même position contre des tyrans despotiques ». Mallory se remaria plus tard et fut baptisé à Lockport en juillet 1853. Il y mourut un mois après.

Robert Lochiel Fraser

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Robert Lochiel Fraser, « MALLORY, BENAJAH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 19 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mallory_benajah_8F.html.

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Auteur de l'article:    Robert Lochiel Fraser
Titre de l'article:    MALLORY, BENAJAH
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
Année de la révision:    1985
Date de consultation:    19 mars 2024