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Titre original :  Eugene Lafleur. Men of Canada by John A. Cooper, The Canadian Historical Company, 1902.

Provenance : Lien

LAFLEUR, EUGENE, avocat et professeur d’université, né le 12 avril 1856 à Longueuil, Bas-Canada, fils aîné du révérend Theodore Lafleur et d’Adele Voruz ; le 16 mars 1896, il épousa à Genève, Suisse, sa cousine germaine Marie-Alice Voruz, et ils eurent deux fils et deux filles ; décédé le 29 avril 1930 à Ottawa.

Eugene Lafleur était d’ascendance helvétique du côté maternel. Ses ancêtres paternels, originaires de la France ou de la Suisse, s’étaient établis en Nouvelle-France avant 1700. Élevé dans la religion baptiste, il se convertit à l’anglicanisme au cours de sa vie d’adulte. Son père, membre influent de la mission de Grande-Ligne [V. Henriette Odin*], exerça son ministère à Longueuil et dans les Cantons-de-l’Est, puis installa sa famille à Montréal quand Eugene avait 14 ans. Bien qu’il ait grandi dans une maisonnée anglophone, Lafleur s’exprimait en français avec beaucoup d’aisance. Il commença ses études classiques en 1870 à la High School of Montreal, où il se révéla un élève remarquable. Après avoir obtenu son diplôme, il entra au McGill College, reçut sa licence ès arts en 1877 à l’âge de 21 ans et obtint sa licence de droit en 1880 avec une médaille d’or pour les meilleurs résultats en philosophie intellectuelle et morale. Son admission au Barreau de la province de Québec eut lieu l’année suivante. Ainsi commença une prestigieuse carrière qui durerait près d’un demi-siècle. Membre du conseil du barreau de la province de 1894 à 1897, Lafleur reçut le titre de conseiller de la reine en 1899, puis devint bâtonnier du barreau de Montréal et de la province en 1905-1906. Durant les 20 dernières années de sa vie, il fut le maître incontesté de la profession juridique au Canada.

En 1890, Lafleur avait accepté le poste de professeur de droit civil à McGill. Il se prit d’intérêt pour le droit international privé (litiges entre particuliers) et devint au Canada un pionnier dans ce domaine. La parution d’un texte élégant sur le sujet en 1898, le premier par un auteur canadien, rehaussa sa réputation. Devenu professeur de droit international la même année, il enseigna jusqu’en 1909. Il revint à l’enseignement en 1912 et donna des cours de droit international public (litiges entre nations) jusqu’en 1921, année de sa retraite. Récipiendaire d’un doctorat honorifique en droit de McGill en octobre 1921, il conserva jusqu’en 1929 le titre de professeur émérite de droit. En 1911, les États-Unis et le Mexique lui avaient confié la présidence d’un tribunal d’arbitrage dont le mandat était de régler une vieille querelle : la propriété du Chamizal, portion de terre située à un endroit stratégique, soit à El Paso, au Texas, et à Juárez, au Mexique, à l’intérieur d’un coude du Rio Grande. Lafleur et son collègue mexicain tranchèrent en faveur du Mexique ; le commissaire américain émit un avis minoritaire.

Cependant, Lafleur fut d’abord et avant tout un avocat plaidant. En 1885, il avait pris un associé et fondé un cabinet qui existe toujours à Montréal et fait partie de la firme McCarthy Tétrault. Une autre lumière du barreau, Aimé Geoffrion*, figura parmi ses stagiaires. Dans ses premières années, Lafleur plaida surtout devant des tribunaux de première instance, mais, avec l’âge et l’expérience, il en vint à préférer les tribunaux supérieurs, où l’on pouvait analyser sans passion des questions de droit. Selon lui, le rôle des avocats n’était pas moindre que celui des juges ; tous ensemble, ils devaient chercher, dans une atmosphère de respect, à résoudre des problèmes juridiques. Comme sa renommée grandissait, il commença à se consacrer uniquement à des appels devant la Cour suprême du Canada et le comité judiciaire du Conseil privé. À ce jour, sans doute, aucun autre avocat canadien ne s’est présenté aussi souvent que lui devant la Cour suprême. D’après les recueils, il y plaida un peu moins de 300 causes, mais, aux étapes préliminaires des appels, les représentations non consignées étaient nombreuses. Devant le Conseil privé à Londres, il plaida au moins 30 affaires consignées dans des recueils ; à celles-ci s’ajoutent une quantité indéterminée d’apparitions non enregistrées.

Même si les causes plaidées par Lafleur couvraient tout l’éventail du droit, il acquit une réputation nationale en premier lieu à titre de spécialiste du droit constitutionnel et en deuxième lieu à titre d’avocat engagé dans des litiges sur le fret. À son époque, un spécialiste du droit constitutionnel s’occupait de la répartition des pouvoirs législatifs entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux telle que la définissait l’Acte de l’Amérique du Nord britannique. Dans ses grandes lignes, l’interprétation de la constitution tendait à favoriser les droits provinciaux en cas de différend avec Ottawa. Toutefois, il restait à délimiter de vastes champs de compétence, car l’industrialisation du Canada, associée à l’intervention croissante des gouvernements dans le commerce, donnait lieu à des conflits entre les provinces et Ottawa. Ces litiges portaient sur le pouvoir de réglementer, par exemple, les entreprises et les sociétés commerciales ou la mise en valeur des ressources hydrauliques à des fins commerciales (compétence provinciale) par opposition à leur utilisation pour la navigation (compétence fédérale). L’exploitation des ressources hydrauliques comptait particulièrement pour la province de Québec, dont Lafleur conseilla le gouvernement durant de nombreuses années. En son temps, le plus gros contentieux commercial au pays porta sur la réglementation, par le Conseil des commissaires des chemins de fer, des tarifs fixés par les sociétés ferroviaires de transport de marchandises d’une province à l’autre ainsi que sur l’application de l’entente de la passe du Nid-du-Corbeau aux expéditions de céréales. Pendant les 20 dernières années de sa vie, Lafleur fut mêlé à la quasi-totalité des grands litiges sur le droit constitutionnel ou le fret.

Deux premiers ministres offrirent à Lafleur un poste dans la magistrature. En 1907, sir Wilfrid Laurier* le pressa d’accepter un siège à la Cour du banc du roi, dans la province de Québec. Il refusa. En 1924, après la mort de sir Louis Henry Davies, juge en chef de la Cour suprême du Canada, William Lyon Mackenzie King* fit tout son possible pour le convaincre de prendre la succession. Ce fut en vain. Lafleur invoqua son âge, mais, en fait, il préférait la vie d’avocat ; comme il le dit à un collègue, il aimait l’« odeur de la poudre ».

D’autres facteurs motivaient sa décision. Son revenu était beaucoup plus élevé que celui qu’il aurait gagné en tant que juge en chef et il ne voulait pas quitter Montréal pour Ottawa. Il vivait confortablement dans une grande maison, rue Peel, où il avait un cheval et une écurie. Lorsque le temps le permettait, il se promenait sur les pentes du mont Royal avant le petit déjeuner. Il aimait fréquenter le University Club de Montréal, dont il fut président en 1922-1923, et s’adonnait, avec des amis, à des passe-temps littéraires et théâtraux.

À la fin d’avril 1930, Lafleur se rendit à Ottawa pour mettre la dernière main à une plaidoirie qu’il devait prononcer devant la Cour suprême. Peu après son arrivée, il attrapa un mauvais rhume qui dégénéra en pneumonie. Sa mort, le 29 avril, prit tout le monde par surprise. Ses funérailles eurent lieu le 2 mai à la cathédrale Christ Church de Montréal, après quoi on inhuma sa dépouille au cimetière du Mont-Royal.

Lafleur possédait tous les attributs d’un avocat hautement compétent : bonne mémoire, capacité de concentration, solide connaissance de nombreux domaines du droit, aptitude à deviner la pensée des juges afin de les faire pencher en faveur de ses clients. À ces qualités évidentes s’en ajoutaient d’autres, plus difficiles à définir, qui le rangeaient au-dessus des avocats de calibre supérieur et faisaient de lui un grand avocat. Il parlait spontanément le français ou l’anglais avec d’élégantes tournures de phrase. Il se présentait au tribunal avec des notes très brèves, mais qui révélaient une excellente préparation. Il se montrait toujours courtois envers ses adversaires à la cour et envers la magistrature. D’un tempérament égal, patient et réfléchi, il ne recourait pas aux effets de manches ni aux discours embrasés. Pour couronner le tout, il était d’une intégrité absolue. Le Conseil privé signala ce point en lui rendant hommage à sa réunion du 1er mai.

À l’époque d’Eugene Lafleur, catholiques et protestants étaient séparés par un fossé beaucoup plus large qu’aujourd’hui. Lafleur était une anomalie : protestant d’ascendance étrangère, il appartenait aux establishments canadien-français et canadien-anglais. En fait, il incarnait le bilinguisme, le biculturalisme et la coexistence de deux régimes de droit, mais il avait une seule nationalité, celle de Canadien.

David Ricardo Williams

Eugene Lafleur est l’auteur de : The conflict of laws in the province of Quebec (Montréal, 1898) ; International law and the present war ([Toronto, 1915 ?]).

Arch. privées, R. E. Parsons (Montréal), High School of Montreal, reports of the attendance, progress and conduct of Eugene Lafleur, 31 janv., 15 avril 1871, 31 janv. 1872 ; Lettres de l’État civil de la ville de Genève à Marie-Alice Voruz, 2 mars 1896, et à Eugene Lafleur, 7 mars 1896.— BAC, MG 26, J1, 102 : 86522 (mfm) ; J13, 4–5, 11 mai, 12 sept. 1924.— BCA, GR-1323, nos 244/10, 2599/10, 4263/10, 4264/10 (mfm).— McCarthy Tétrault (Montréal), « Clarkson Tétrault Avocats, barristers, and solicitors » (texte dactylographié, 1985) ; Daybook, 1919–1929 (honoraires et rentrées) ; W. J. Henderson, « Recollections » (texte dactylographié, 1948) ; A. K. Hugessen, « Reminiscences » (texte dactylographié, 1963) ; Indenture of clerkship, 16 janv. 1878 ; Judicial Committee of the Privy Council, proc., 1er mai 1930 ; Lettres de W. L. M. King à Eugene Lafleur, 8–9 sept. 1924 (mfm aux AN) ; Opinion books, 1 (1885)–19 (1934) ; Thomas Shaughnessy, « Clarkson Tétrault » (texte dactylographié, 1981) ; Testimonial, 8 janv. 1881.— Gazette (Montréal), 30 avril 1930.— Montreal Daily Star, 30 avril, 1er–3 mai 1930.— Times (Londres), 30 avril, 1er–2 mai 1930.— Canada Supreme Court Reports (Ottawa), 1890–1930.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1912).— Canadian Railway Cases (Toronto), 17 (1913–1915) : 123–231.— Eugène Lafleur : l’Homme et l’Avocat (Montréal, [1934]).— E. A. Forsey, A life on the fringe : the memoirs of Eugene Forsey (Toronto, 1990).— Law Reports, Appeal Cases (Londres), 1900–1930.— J. E. Mueller, Restless river : international law and the behavior of the Rio Grande (El Paso, Texas, 1975).— D. R. Williams, Just lawyers : seven portraits (Toronto, 1995).

Bibliographie générale

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David Ricardo Williams, « LAFLEUR, EUGENE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 19 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/lafleur_eugene_15F.html.

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Auteur de l'article:    David Ricardo Williams
Titre de l'article:    LAFLEUR, EUGENE
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
Année de la révision:    2005
Date de consultation:    19 mars 2024