ARSENAULT, JOSEPH-OCTAVE, instituteur, homme d’affaires, homme politique et fermier, né le 5 août 1828 à Cascumpec, Île-du-Prince-Édouard, fils de Mélème Arsenault, fermier, et de Bibienne Poirier ; le 15 avril 1861, il épousa à Miscouche, Île-du-Prince-Édouard, Gertrude Gaudet, et ils eurent cinq fils et quatre filles ; décédé le 14 décembre 1897 à Abrams Village, Île-du-Prince-Édouard.

Joseph-Octave Arsenault avait quatre ans lorsque ses parents quittèrent Cascumpec pour aller s’établir à La Roche (Egmont Bay). Il fréquenta d’abord l’école locale puis, à Miscouche, celle de Joseph-F. Gaudet, que l’inspecteur des écoles jugeait le meilleur instituteur acadien de l’époque. À l’âge de 19 ans, il commença sa carrière d’instituteur, qui allait durer 18 ans. Après avoir enseigné cinq ans, il retourna étudier un an à la Central Academy, à Charlottetown, le temps d’obtenir un brevet d’enseignement de première classe.

En 1865, Arsenault abandonna l’enseignement pour se lancer dans le commerce. Il ouvrit un magasin général à Abrams Village, où il avait enseigné pendant de nombreuses années. En 1874, une fois le chemin de fer construit dans l’île, il en ouvrit un second près de Wellington qui devint le centre de son commerce. Cet établissement offrait une grande variété de produits qu’il vendait ou qu’il troquait contre des produits agricoles.

Arsenault s’intéressa aussi à l’industrie de la pêche au cours des années 1870, et il acquit une pêcherie. Au début, il exploitait avant tout le maquereau, l’espèce commercialement la plus rentable à l’époque, mais aussitôt que l’industrie du homard eut pris son essor dans l’île, vers 1880, il s’orienta vers ce secteur et construisit une usine au cap Egmont. Il devint l’un des principaux empaqueteurs de sa région. Son produit acquit une bonne réputation et en 1891, à l’occasion d’une exposition internationale tenue en Jamaïque, Arsenault remporta la médaille d’or pour son homard en conserve.

À l’incitation de plusieurs de ses concitoyens, Arsenault décida en 1867 de suivre l’exemple d’un autre Acadien de l’île, Stanislaus Francis Perry, et de se lancer en politique sous la bannière libérale de George Coles*. Il se fit élire à la chambre d’Assemblée dans le troisième district de la circonscription de Prince, et conserva son siège sans interruption jusqu’en 1895. Au cours de sa première campagne électorale, soutenant que les insulaires savaient mieux se gouverner que les Canadiens réussiraient à le faire pour eux, il se déclara contre l’adhésion de l’île à la Confédération. Cependant, dès les élections de juillet 1870, il se montra plus favorable à cette idée, mais déclara qu’il ne l’imposerait pas aux citoyens. Contrairement à certains adversaires de la Confédération, quelque peu paranoïaques, il voyait l’union de l’île au Canada comme « une alliance avec des semblables, et non avec un pays étranger ou un gouvernement despotique ».

Arsenault milita peu longtemps dans les rangs des libéraux. En août 1870, à l’instar de presque tous les députés libéraux de religion catholique, il se joignit à l’opposition conservatrice dirigée par James Colledge Pope* afin de mettre fin au gouvernement libéral de Robert Poore Haythorne et de former un gouvernement de coalition. Les députés libéraux catholiques voulaient ainsi protester contre le refus du gouvernement d’accorder des subventions aux établissements d’enseignement catholiques, comme l’avait demandé l’évêque de Charlottetown, Mgr Peter McIntyre. Les conservateurs, de leur côté, se disaient favorables à des subsides de ce genre et, comme les libéraux continuèrent de s’opposer au financement des écoles confessionnelles, Arsenault demeura fidèle au parti conservateur jusqu’à la fin de sa vie.

Pope nomma Arsenault au Conseil exécutif et il y siégea du 25 juillet 1873 au 4 septembre 1876, puis du 11 mars 1879 au 21 avril 1891, soit sous les gouvernements de William Wilfred Sullivan* et de Neil McLeod*. Il fit partie du bureau d’Éducation de 1879 à 1891. Le 18 février 1895, il devint le premier Acadien de l’Île-du-Prince-Édouard à accéder au Sénat, où il remplaça George William Howlan*. Même si Arsenault ne se distingua pas comme homme politique, il mérita néanmoins la considération de ses pairs et de la presse tant anglaise que française. Deux de ses fils, Joseph-Félix et Aubin-Edmond*, suivirent leur père dans l’arène politique. Aubin-Edmond fut premier ministre de l’Île-du-Prince-Édouard de 1917 à 1919, le premier Acadien à occuper un tel poste dans une province canadienne.

L’avancement du peuple acadien fut une préoccupation majeure d’Arsenault. Il se tenait en contact avec les chefs de file acadiens du Nouveau-Brunswick, tels Pierre-Amand Landry*, Pascal Poirier* et l’abbé Marcel-François Richard*, et collabora aux grands projets des nationalistes acadiens. Il fut l’un des délégués de l’île qui assistèrent au congrès de la Société Saint-Jean-Baptiste à Québec en 1880. À cette occasion, on le nomma membre du comité chargé d’organiser la première convention nationale des Acadiens, tenue à Memramcook, au Nouveau-Brunswick, en 1881. Il fut également un organisateur clé de la deuxième convention qui se déroula à Miscouche, en 1884, où l’on choisit le drapeau et l’hymne acadiens. La même année, il devenait le président fondateur de la Société l’Assomption, dans sa paroisse ; cet organisme patriotique assurait avant tout la tenue de célébrations à l’occasion de l’Assomption, fête nationale des Acadiens.

Arsenault porta un intérêt particulier au développement de l’instruction chez les siens et à l’enseignement du français dans les écoles acadiennes. En 1868, il obtint de l’Assemblée que l’on verse un boni de £5 à tout instituteur jugé apte à enseigner le français. En 1880, il usa de son influence pour faire introduire plus de français dans les écoles acadiennes en incitant le bureau d’Éducation à autoriser une nouvelle série de livres de lecture française. Arsenault fut aussi un ami du St Dunstan’s College, à Charlottetown, du collège Saint-Joseph, à Memramcook, et du couvent Saint-Joseph, à Miscouche. Tous ses enfants poursuivirent des études dans l’un ou l’autre de ces établissements.

L’agriculture et la colonisation furent les thèmes privilégiés du nationalisme acadien, et Arsenault s’en fit un ardent défenseur tout au long de sa carrière. Propriétaire d’une ferme, il y mettait en pratique les méthodes agricoles les plus modernes, ce qui en faisait un agriculteur modèle. Face au problème du surpeuplement des paroisses acadiennes et de la pénurie de terres agricoles, Arsenault, avec l’aide de l’abbé Richard, encouragea les Acadiens à coloniser les terres vacantes au Nouveau-Brunswick et dans la province de Québec. À la convention nationale des Acadiens en 1881, Arsenault fut élu deuxième vice-président de la société de colonisation mise sur pied à cette occasion.

Homme d’action, Joseph-Octave Arsenault participa à presque toutes les entreprises de sa communauté et jouit toujours du respect et de l’estime de ses concitoyens. Personnalité marquante de l’époque habituellement appelée la renaissance acadienne, il possédait une éducation au-dessus de la moyenne pour un Acadien du temps. Il compta parmi ces quelques chefs acadiens instruits qui cherchèrent à tirer leurs compatriotes de leur isolement culturel et de leur infériorité socio-économique afin de les placer sur un pied d’égalité avec leurs concitoyens d’origine britannique. À sa mort, le Moniteur acadien signalait qu’il était l’un de ceux qui avaient « relevé la valeur du nom français dans la province insulaire ».

Georges Arsenault

PAPEI, RG 10, 5.— Î.-P.-É., House of Assembly, Journal, 1847–1895.— Courrier des Provinces maritimes (Bathurst, N.-B.), 23 févr. 1895.— L’Impartial (Tignish, Î.-P.-É.), 28 févr. 1895.— Islander, 25 mars 1870.— Le Moniteur acadien (Shédiac, N.-B.), 26 juin, 25 sept. 1884, 6 août 1886, 17, 21 déc. 1897.— Prince Edward Island Agriculturist (Summerside), 22 juin 1891.— Summerside Journal, 21 févr. 1867.— CPC, 1887 : 358–359, 364 ; 1897.— Georges Arsenault, les Acadiens de l’Île, 1720–1980 (Moncton, N.-B., s.d.).— J.-H. Blanchard, The Acadians of Prince Edward Island, 1720–1964 (Charlottetown, 1964) ; Acadiens de l’Île-du-Prince-Édouard ([Charlottetown], 1956).— By the old mill stream : history of Wellington, 1833–1983, Allan et Mary Graham, édit. ([Wellington, Î.-P.-É.], 1983).— Conventions nationales des Acadiens, Recueil des travaux et délibérations des six premières conventions, F.-J. Robidoux, compil. (Shédiac, 1907).— Georges Arsenault, « le Dilemme des Acadiens de l’Île-du-Prince-Édouard au 19e siècle », Acadiensis (Fredericton), 14 (1984–1985), n2 : 29–45.

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Georges Arsenault, « ARSENAULT, JOSEPH-OCTAVE (1828-1897) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/arsenault_joseph_octave_1828_1897_12F.html.

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Auteur de l'article:    Georges Arsenault
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1990
Année de la révision:    1990
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