RYAN, JOHN, marchand, capitaine et agent de bateaux à vapeur, et patriote, né probablement le 2 septembre 1792 à St Johns (Saint-Jean-sur-Richelieu, Québec), fils de Thomas Ryan et de Catherine Dwyer ; le 11 janvier 1813, il épousa à Montréal Elizabeth Towner, et ils eurent cinq enfants, dont quatre moururent en bas âge, puis le 13 janvier 1824, à St Andrews (Saint-André-d’Argenteuil, Québec), Deborah Towner, sœur de sa première femme, et le couple eut huit enfants, dont cinq atteignirent l’âge adulte ; décédé le 12 février 1863 à Québec et inhumé deux jours plus tard au cimetière Mount Hermon, à Saint-Colomb-de-Sillery (Québec).
Le 17 avril 1821, John Ryan, alors marchand de Laprairie (La Prairie), voit sa femme Elizabeth, âgée seulement de 27 ans, rendre l’âme. Son père, Thomas, vétéran de la marine provinciale, meurt le 15 juillet suivant. John, qui a accumulé des dettes considérables en raison de ses activités commerciales, doit vendre ses biens pour rembourser ses créanciers sur ordre de la Cour du banc du roi du district de Montréal.
Ryan devient, en 1822, capitaine du vapeur la Prairie, lancé au printemps par la La Prairie Steam-Boat Company pour concurrencer la St Lawrence Steamboat Company des Molson [V. William Molson*]. Grâce au nombre croissant d’immigrants qui arrivent au port de Québec et souhaitent se rendre à Montréal, la navigation à vapeur sur le fleuve Saint-Laurent prend à cette époque de plus en plus d’importance. Deux ans plus tard, la St Lawrence Steamboat Company offre à Ryan de diriger le vapeur Chambly, dont il sera le capitaine durant trois ans. Ryan reçoit, en 1827, le commandement de la barge Hylas de la Montreal Tow Boat Company des Torrance [V. David Torrance*], puis s’établit à Québec.
En juillet 1831, Ryan, à titre d’agent de cette compagnie, témoigne à la Cour des sessions générales de la paix à Québec contre un homme accusé de vol. Au moment de son assermentation par l’avocat de la défense, il affirme ne pas croire en Dieu. Le juge de paix ne peut admettre sa déclaration − tout témoin devant reconnaître l’existence de Dieu ou d’un Dieu, ainsi qu’un état futur de récompenses et de punitions − et doit donc libérer l’accusé. Incapable de défendre les intérêts de son employeur en cour à cause de son athéisme, Ryan est remercié en mars 1833. Pendant près de 30 ans, il réclamera aux parlementaires du Bas-Canada, puis du Canada-Uni, la possibilité, pour une personne, de témoigner en cour de justice peu importe ses croyances. Pour le bien de son entreprise, Ryan accepte toutefois de mettre son athéisme de côté, notamment pour témoigner contre quatre employés en 1843 et pour faire baptiser trois de ses enfants l’année suivante.
Ryan, qui a déjà subi des ennuis en raison de son incroyance, a aussi été victime de ses opinions politiques. Réformiste et démocrate, il préconise des mesures qui donneraient au peuple plus de pouvoir et de liberté (de presse, de commerce et de religion, par exemple). En janvier 1838, une fouille à son domicile révèle sa correspondance avec les principaux patriotes émigrés aux États-Unis, dont Louis Perrault et Edmund Bailey O’Callaghan*. Ryan s’exile aux États-Unis afin d’échapper à un mandat d’arrestation pour haute trahison. Le 28 juin, une proclamation de lord Durham [Lambton*] interdit à 16 patriotes, accusés de haute trahison et réfugiés aux États-Unis, de rentrer au pays sous peine de mort. Ryan et son fils Jeremy Bentham font partie des proscrits, tout comme Édouard-Étienne Rodier*, Cyrille-Hector-Octave Côté*, Louis-Joseph Papineau* et George-Étienne Cartier* [V. Sir George-Étienne Cartier]. Même si le gouvernement britannique désavoue l’ordonnance de lord Durham le 20 août, ils demeurent un certain temps aux États-Unis pour y poursuivre la lutte, notamment par la publication de journaux.
À la fin de l’été de 1841, de retour à Québec depuis seulement quelques mois, Ryan se voit offrir le poste de capitaine de vapeur du Charlevoix. Trois ans plus tard, il demande l’aide de la population pour faire construire le vapeur Quebec, qui permettra la création d’une ligne indépendante entre Québec et Montréal, en concurrence avec les lignes coalisées de ses anciens employeurs, les Molson et les Torrance. Le 27 mars 1845, Ryan, son beau-frère Michael White, ainsi que les hommes d’affaires John Wilson, Michael Connolly et William Paterson, forment la Ligne du peuple [V. John Munn*], qui commence ses activités en juin avec le Quebec et le Rowland Hill ; Ryan agit à titre de premier gérant. Dès l’année suivante, devenus actionnaires minoritaires en raison du désir de Wilson de prendre le contrôle de la compagnie, Ryan et White se voient forcés de vendre leurs parts.
Appauvri par ses différentes entreprises, Ryan passe les dernières années de sa vie chez White, où il meurt le 12 février 1863. Le journal le Défricheur, publié à L’Avenir, écrit à son sujet le 19 février : « Ses opinions politiques et religieuses étaient extrèmes et furent probablement la cause de son peu de succès dans les affaires. Il était souverainement indifférent à toute question d’argent et ne s’occupait ordinairement que de projets publics dans le but de se rendre utile. Il prit une part active dans tous les mouvements du parti progressiste en ce pays. » Les métiers de Ryan et la langue parlée de ses amis laissent croire qu’il savait s’exprimer en français et en anglais.
Près de trois ans avant sa mort, John Ryan a présenté une pétition à la Chambre d’assemblée de la province du Canada pour réclamer que jamais une « personne ne soit empêchée de rendre témoignage dans les cours de justice [...] à cause de sa croyance religieuse ou parce qu’[elle] n’aurait aucune croyance religieuse ». Le Code de procédure civile promulgué en 1965 au Québec permettra à un témoin qui refuse de prêter serment de faire une affirmation solennelle. La Loi sur l’application de la réforme du Code civil, sanctionnée en 1992, ne retiendra que l’affirmation solennelle.
Cette biographie repose sur notre ouvrage John Ryan : capitaine, athée et patriote (L’Assomption, Québec, 2017), qui contient la liste exhaustive des nombreuses sources primaires et secondaires que nous avons consultées.
Malgré de rigoureuses recherches, nous n’avons pu trouver ou authentifier l’acte de naissance ou de baptême de John Ryan. L’information fournie sur sa date et son lieu de naissance reprend celle inscrite sur son monument funéraire, au cimetière Mount Hermon, à Québec.
Nous avons établi les noms de ses parents conformément à la bible familiale conservée au Dunham Bible Museum de la Houston Baptist University, au Texas (BS 185 1791 .W73 c. 2 1791). On y trouve en outre des renseignements sur les enfants nés de ses deux unions.
Prov. du Canada, Assemblée législative, Journaux, 27 avril 1860.
José Doré, « RYAN, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/ryan_john_b_9F.html.
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Auteur de l'article: | José Doré |
Titre de l'article: | RYAN, JOHN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1977 |
Année de la révision: | 2023 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |