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WORKMAN, WILLIAM, homme d’affaires et maire de Montréal, né en mai 1807 à Ballymacash, près de Lisburn, dans le comté d’Antrim en Irlande, cinquième des neuf enfants de Joseph Workman et de Catherine Goudie, décédé le 23 février 1878 à Montréal.
William Workman naquit dans une famille qui avait été assez prospère mais dont la fortune avait, semble-t-il, considérablement diminué. On ne sait rien des études qu’il fit, mais il les poussa suffisamment pour occuper un poste dans l’Ordnance Survey d’Irlande de 1827 à 1829.
Ses frères aînés, Benjamin, Alexander, Samuel, Thomas* et Matthew, s’étaient embarqués pour le Canada avant le reste de la famille qui y vint en 1829. Peu après son arrivée à Montréal, William trouva un emploi au Canadian Courant and Montreal Advertiser, journal dont son frère Benjamin et Nahum Mower étaient les propriétaires. En 1830, William travailla avec son frère Thomas pour la quincaillerie en gros de John Frothingham. Les deux frères firent rapidement leur chemin dans cette affaire et, en 1836, William et Thomas étaient devenus associés à part entière, ce qui indique qu’ils y avaient peut-être investi du capital. Jusqu’à ce qu’il la quittât en 1859, cette entreprise constitua l’essentiel des activités commerciales de Workman. En plus des articles qu’elle importait, la maison Frothingham and Workman fabriquait de la quincaillerie dans ses usines montréalaises qui employaient des centaines d’ouvriers.
Mais Workman ne s’en tint pas à la quincaillerie. Comme tous les hommes d’affaires montréalais de l’époque, il s’intéressait aux entreprises qui découlaient du progrès et de l’évolution technique. L’importance des spéculations de Workman dans les chemins de fer, les terres et les banques permet d’affirmer que, dès les années 40, il était devenu riche. Parmi les affaires dont il s’occupait, il y avait la Banque de la Cité, dont le siège social était à Montréal et dont il fut le président de 1849 à 1874. Il plaça de l’argent dans les chemins de fer et en particulier dans le premier chemin de fer du Canada, le chemin à lisses de Champlain et du Saint-Laurent, dont la construction fut terminée en 1836 et qui reliait Laprairie, située sur le fleuve Saint-Laurent, en face de Montréal, à Saint-Jean sur le Richelieu. Ce chemin de fer de 14 milles devait faciliter les échanges commerciaux entre les régions du Saint-Laurent et les états voisins ; Workman fut l’un des administrateurs de cette compagnie. Il s’intéressa également au chemin à lisses du Saint-Laurent et de l’Atlantique (St Lawrence and Atlantic Railroad) [V. John Young], et il était l’un des plus gros actionnaires de cette compagnie au moment où elle fut absorbée par le Grand Tronc en 1854. Il participa également à l’entreprise moins réussie de la ligne de Montréal à Bytown [V. Delisle].
Workman plaça également de fortes sommes dans des propriétés de Montréal. Au début. des années 40, il acheta un grand nombre de lots dans une banlieue élégante de l’ouest de la ville ; il y fit construire sa propre demeure, l’imposant Mount Prospect, en 1842. Il possédait aussi des terrains dans d’autres quartiers de Montréal. Avec Alexandre-Maurice Delisle, il acheta un vaste lotissement situé aux limites ouest de la ville. Workman s’intéressait aussi à la navigation et, en 1854, avec des hommes d’affaires de Montréal, David Torrance, Andrew Shaw, Ira Gould et John Kershaw, il fonda la Compagnie canadienne de navigation océanique à la vapeur. Un an plus tard, il achetait deux gros vapeurs destinés à la navigation commerciale sur le Saint-Laurent.
Workman se consacra avant tout aux affaires, et cela pendant de longues années. Mais lorsqu’il quitta la maison Frothingham and Workman en 1859, il s’occupa activement de politique. Comme banquier, il s’opposa aux mesures que le gouvernement se proposait de prendre, tard dans les années 60, pour augmenter ses pouvoirs dans le domaine de la fiscalité. En 1866, Alexander Tilloch Galt* préconisa une réduction des droits de douane. Workman attaqua ces recommandations, « cette charge meurtrière et inutile – rappelant Balaklava – contre la législation fiscale » qui aurait pour résultat « de réduire à la mendicité ou de forcer à l’émigration » un grand nombre de Canadiens. Comme industriel, Workman s’était montré en faveur d’un tarif protecteur élevé dès la fin des années 40, alors qu’il était à la tête de l’Association for the Promotion of Canadian Industry. Il ne tenta jamais, semble-t-il, de s’immiscer dans la politique provinciale mais, après la Confédération, il s’intéressa à la politique fédérale. Au cours des années 70, stimulé peut-être par l’allégeance de son frère Thomas au parti libéral où il flairait « une pointe de communisme », William écrivit de temps à autre à John A. Macdonald*, lui rappelant sa loyauté et ses contributions « en espèces sonnantes » au parti. Ces lettres étaient tout bonnement des demandes importunes d’un siège au Sénat.
Workman était surtout connu à Montréal pour sa participation aux affaires municipales et pour sa philanthropie. En février 1868, il fut candidat à la mairie contre Jean-Louis Beaudry*, qui avait déjà été maire de Montréal. Workman remporta facilement la victoire, mais il dut d’abord éviter la disqualification en réfutant les graves accusations d’infraction à la loi que son adversaire avait portées contre lui. Sa popularité comme maire de Montréal fut telle qu’il fut réélu sans opposition en 1869 et en 1870.
Workman était un Montréalais réputé même avant de devenir maire. Bien des années plus tôt, il avait été président de la Société Saint-Patrice avant que cette organisation ne devînt exclusivement catholique en 1856. Il avait alors reporté son profond intérêt pour les déshérités sur la Société de bienfaisance protestante irlandaise de Montréal (Irish Protestant Benevolent Society), dont il servit la cause pendant des années en payant de sa personne et de son avoir. Il avait participé à la fondation de la Maison protestante d’industrie et de refuge de Montréal (Montreal Protestant House of Industry and Refuge) en 1864 ; il en fut le président de 1874 à 1877 et il lui légua la somme de $20 000. Afin d’encourager l’habitude de l’épargne chez les travailleurs montréalais, il avait contribué à la fondation de la Banque d’Épargne de la Cité et du District de Montréal en 1846 [V. Marc-Damase Masson]. Il en avait été le premier président, de 1846 à 1852, et un membre du conseil d’administration de 1861 à 1872.
La vie privée de Workman fut marquée de nombreux chagrins. Cinq de ses enfants moururent avant lui, et la perte de son seul fils, à l’âge de 24 ans, lui fut particulièrement cruelle. Pendant la plus grande partie de sa vie d’adulte, Workman fut membre de l’Église unitarienne. Il confia un jour à l’un de ses amis que, comme unitarien, il « avait l’habitude d’être vilipendé par les protestants qui appartenaient à d’autres Églises, ce qui ne lui arrivait jamais avec les catholiques ». Selon une source consultée, il trouva plus tard une consolation dans le catholicisme. Il se sentit de plus en plus attiré par le culte privé et il se fit construire une chapelle attenante à sa vaste résidence.
APC, FM 24, B40 (Papiers Brown), 4, p.778 ; FM 24, D16 (Papiers Buchanan), 63, Workman ; FM 26, A (Papiers Macdonald), 345, pp.158 327–158 330 ; FM 26, A (Papiers Macdonald), 346, pp.158 526–158 530 ; FO 12, AI, 176, pp.137s.— [Bruce et Grey], Collection Elgin-Grey (Doughty), IV : 1 492.— Journals of the Legislative Assembly of the Province of Canada, 1851, app. UU, Proceedings of the standing committee on rail-roads and telegraph lines ; together with the minutes of evidence ordered by the committee to be printed ; 1857, app. no 6, Report of the special committee appointed to inquire and report as to the condition, management, and prospects of the Grand Trunk Railway Company.— Report of the committee appointed to inquire into the transactions of the Montreal and Bytown Railway Company, prepared by Mr. Loranger, by order of the committee, and unanimously adopted (Toronto, 1856), 51.— Statutes of the Province of Canada, 1854, c.45.— Gazette (Montréal), 25 févr. 1878.— Montreal directory (Mackay), 1845–1846, 286 ; 1852, 353.— Montreal Herald, 2 déc. 1867, 10 janv., 18 janv., 21 janv. – 23 janv., 25 janv., 18 févr., 21 févr., 25 févr., 26 févr., 28 févr., 2 mars 1868, 13 févr. 1869, 13 févr., 14 févr. 1870.— Borthwick, Montreal, 123.— Campbell, Hist. of Scotch Presbyterian Church, 436, 439.— T. T. Smyth, The first hundred years ; history of the Montreal City and District Savings Bank, 1846–1946 (s.l., s.d.), 22.— F. J. Workman, The Workman family history (manuscrit en possession de l’auteur).— Brian Cahill, 90-year-old papers found in cornerstone, Gazette (Montréal), 5 juill. 1955.— Allan Cook, Ancient chapel built here for spite still stands as reminder of bygone feuds, Montreal Daily Star, 12 août 1937.
G. Tulchinsky, « WORKMAN, WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/workman_william_10F.html.
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Auteur de l'article: | G. Tulchinsky |
Titre de l'article: | WORKMAN, WILLIAM |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1972 |
Année de la révision: | 1972 |
Date de consultation: | 21 déc. 2024 |