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STANLEY, FREDERICK ARTHUR, 1er baron STANLEY et 16e comte de DERBY, gouverneur général, né le 15 janvier 1841 à Londres, deuxième fils d’Edward George Geoffrey Stanley, 14e comte de Derby, et d’Emma Caroline Wilbraham ; le 31 mai 1864, il épousa au même endroit lady Constance Villiers, et ils eurent huit fils et deux filles ; décédé le 14 juin 1908 à Holwood, près de Hayes, Kent, Angleterre.
En 1858, après des études à l’Eton College, Frederick Arthur Stanley s’enrôla dans les Grenadier Guards, qu’il quitta avec le grade de capitaine en 1865. La même année, il fut élu député conservateur à la Chambre des communes ; sa circonscription, Preston, avoisinait les domaines que sa famille possédait dans le Lancashire. Il obtint son premier poste de fonctionnaire, lord civil au ministère de la Marine, après que son illustre père eut démissionné du poste de premier ministre, en février 1868, et que Benjamin Disraeli lui eut succédé à la tête du parti. En novembre, il remporta la victoire dans un bastion libéral, North Lancashire, qu’il représenta jusqu’en 1885, année où il dut passer au siège de Blackpool à cause de la redéfinition de la carte électorale. Il fut élevé à la pairie en 1886 avec le titre de baron Stanley of Preston.
Contrairement à son père, Stanley manquait d’éloquence et ne se sentait pas à l’aise aux Communes. Il possédait cependant le sens des affaires et de bons talents administratifs, qualités que Disraeli sut mettre à profit en le nommant secrétaire financier au ministère de la Guerre. En avril 1878, Stanley devint secrétaire d’État à la Guerre, fonction dans laquelle il poursuivit la réforme militaire amorcée par Edward Cardwell. L’armée et son commandant en chef, le duc de Cambridge, accueillirent favorablement sa nomination. À la défaite des conservateurs, en 1880, il démissionna. En 1885–1886, il fut secrétaire d’État aux Colonies dans le gouvernement de lord Salisbury.
Le 1er février 1888, Salisbury lui offrit le poste de gouverneur général du Canada, qu’il accepta presque tout de suite. Sa nomination fut annoncée le 1er mai et il débarqua à Québec un mois plus tard. Sa femme et lui furent ravis des perspectives que leur offraient leurs résidences officielles d’Ottawa et de Québec. « Jusqu’à maintenant, écrivit lady Stanley à sa sœur, nous sommes très satisfaits de nos nouvelles demeures, et tout le monde, à Ottawa comme à Québec, a été bien cordial et charmant avec nous. F.[rederick] a fait très grande et bonne impression avec son français. » Moins d’un an ou deux après leur arrivée, les Stanley s’étaient pris d’intérêt aussi bien pour l’Est que pour l’Ouest. Pendant l’été de 1888, Stanley acheta un « cottage », ou plutôt une maison de campagne, près de New Richmond, au Québec, sur la baie des Chaleurs. Elle allait porter le nom de Stanley House. Le premier ministre de la province, Honoré Mercier*, y séjourna en août et remercia le gouverneur général de l’avoir mise à sa disposition. En septembre et octobre 1889, les Stanley firent, à bord du train de la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique, un voyage dans l’Ouest qui les enthousiasma. À 16 milles de Regina, lady Stanley nota : « Nous sommes pleins d’émerveillement et d’admiration pour les esprits qui ont conçu ce merveilleux chemin de fer et pour l’énergie et le courage de ceux qui l’ont construit ». Au cours de ce voyage, lord Stanley inaugura à Vancouver le parc Stanley, baptisé en son honneur l’année précédente et aménagé sur une portion de réserve militaire cédée à la municipalité par le gouvernement du Canada.
Pourtant, tout n’était pas rose pour le gouverneur général : la milice et la défense du Canada le préoccupaient. Versé en matière militaire, il s’employa à convaincre le premier ministre, sir John Alexander Macdonald*, qu’il fallait avoir une milice petite mais efficace, plus petite même que celle dont le dominion disposait alors. Vous savez, écrivit-il à Macdonald en 1890, que « l’on dit ouvertement que l’affectation des sommes votées pour la milice diffère parfois de celle pour laquelle elles ont été votées, et qu’elle n’est pas influencée seulement par le bien des troupes. » Le premier ministre reconnut tout de suite sa compétence : « vous ne pouvez, lui répondit-il, être trop direct avec moi ». L’état de la milice, expliqua Macdonald, était en partie la faute du ministre qui en avait la charge, sir Adolphe-Philippe Caron, mais aussi celle des membres de l’état-major qui étaient grits et tout à fait inaptes pour diverses raisons. Caron les gardait de crainte d’être accusé de céder à l’inimitié partisane.
Devant les caprices et tracasseries de la politique canadienne, Stanley était tatillon, circonspect, pour ne pas dire timoré. Lorsque Macdonald voulut dissoudre le Parlement en raison du pamphlet annexionniste d’Edward Farrer*, en janvier 1891, Stanley lui écrivit que, selon lui, les propos du document n’étaient guère ceux d’un traître. Puis, à la manière de Ponce Pilate, il s’en lava les mains : « Mais naturellement, vous avez raison. Je ne me risque pas à exprimer quelque opinion sur l’à-propos d’utiliser cet inédit comme arme de guerre politique. »
L’indécision que Stanley manifesta tandis que Macdonald agonisait, à la fin de mai 1891, ne fit qu’aggraver la crise politique. Certain que le premier ministre avait désigné son successeur, soit dans son testament ou ailleurs, il refusait d’en nommer un avant que les funérailles de Macdonald n’aient eu lieu. Le ministre de la Justice, sir John Sparrow David Thompson*, montrait des signes d’impatience, non pour lui-même, mais à cause de l’incertitude qui régnait à Ottawa dans les jours qui entourèrent la mort de Macdonald, le 6 juin. On ne trouva aucun document qui nommait un successeur. Stanley penchait en faveur de Thompson, mais celui-ci savait que l’Ontario protestant accepterait difficilement un premier ministre catholique. Stanley n’était même pas certain que le gouvernement survivrait à la crise ; le 4 juin, il avait émis l’hypothèse d’un éclatement.
Une fois que les choses se furent tassées et que John Joseph Caldwell Abbott* se fut résigné à exercer la fonction de premier ministre (à partir du Sénat), il devint évident que lui et Thompson (leader à la Chambre des communes) prendraient en main les destinées du Parti conservateur. Ils avaient la bénédiction de Stanley. La situation n’était pas facile. Abbott répugnait à s’interposer entre ses collègues du cabinet, qui continuaient de tirer à hue et à dia. Et puis, une querelle diplomatique avait éclaté entre le Canada et les États-Unis à cause de l’arrestation de chasseurs de phoque canadiens dans la mer de Béring. De ce côté, il y avait deux questions à régler le principe de l’accès à la mer et les dommages. Les Canadiens insistaient pour qu’elles soient résolues en même temps ; les Britanniques voulaient les résoudre une à la fois. Chacun des deux pays interprétait à sa manière les intentions des Américains. Le Canada, disait Stanley, était à l’âge ingrat : il ne pouvait se débrouiller seul mais se hérissait contre l’autorité. En février 1892, il expliqua au secrétaire d’État aux Colonies, lord Knutsford, que dans ses dépêches, il devait, au nom de ses ministres canadiens, poser des questions et faire des représentations qui semblaient stupides. Opposer une fin de non-recevoir à ses ministres lui déplaisait, même s’il se doutait bien que le gouvernement britannique jugerait impossible de se rendre à leurs demandes.
Le gouvernement impérial voulait également que Terre-Neuve rallie la Confédération, si la chose était possible sans indisposer les Terre-Neuviens et pourvu que le Canada offre des conditions raisonnables. En novembre 1892, dans une lettre au secrétaire d’État aux Colonies, lord Ripon, Stanley souligna qu’une réunion sur la question se tenait à Halifax. Il soupçonnait le premier ministre de Terre-Neuve, sir William Vallance Whiteway, de vouloir faire semblant de négocier afin de tirer un avantage politique d’un refus du Canada. Mais si Whiteway était sérieux, disait-il, alors sir John Sparrow David Thompson négocierait judicieusement avec lui.
À ce moment-là, Abbott dut renoncer au poste de premier ministre pour des raisons de santé. Seul Thompson était apte à prendre la succession. Le 23 novembre, au cours d’un entretien avec Stanley, il accepta de remplacer Abbott le mois suivant. Les ministres n’avaient plus à être tenus en bride ; ils marchaient droit, même si Thompson, qui ne plaisantait pas sur la discipline, resta à Paris de mars à juin 1893 pour l’arbitrage du différend de la mer de Béring.
C’est à cette époque que Stanley dut quitter son poste, quoique son mandat ne fût échu qu’en septembre. D’importantes raisons familiales l’obligeaient à rentrer en Angleterre : son frère aîné étant mort le 21 avril sans enfant, Stanley devenait le 16e comte de Derby. En quittant le Canada, au début de juillet, il abandonnait la politique pour de bon. Il était reconnaissant à Thompson de l’avoir tant aidé « dans les moments tumultueux que, durant les cinq dernières années, [ils avaient] réussi à traverser ensemble ». Lord Ripon le félicita pour la façon dont il avait gouverné le Canada en cette période difficile.
Stanley avait offert au pays, en mars 1892, un cadeau durable : la grande coupe d’argent destinée à la meilleure équipe canadienne de hockey amateur sur glace. Certains de ses fils, surtout Arthur, s’étaient pris de passion pour ce sport. Une équipe junior (elle portait le nom peu vraisemblable de Rideau Hall Rebels) avait été formée en 1889 sous l’impulsion du Néo-Écossais James George Aylwin Creighton*, greffier en loi du Sénat. En 1890, Arthur Stanley contribua à la fondation de l’Ontario Hockey Association. Ce fut sans doute en partie à cause de ses fils que le gouverneur général, lui-même amateur de sports (il avait donné un trophée et une médaille de curling) eut l’idée de faire don de cette coupe de hockey. Le Dominion Challenge Trophy fut décerné pour la première fois en 1893 à l’Association des gymnastes amateurs de Montréal, qui l’année suivante, remporta contre Ottawa la première épreuve où ce trophée était en jeu. Finalement connu sous le nom de coupe Stanley, le trophée passa en 1909 à une équipe professionnelle, les Senators d’Ottawa. Il s’agit du trophée d’athlétisme professionnel le plus ancien disputé en Amérique du Nord.
En 1895–1896, après son retour en Grande-Bretagne, le comte de Derby fut premier lord-maire de Liverpool ; on peut voir une statue de lui au St George’s Hall. Par la suite, il fut lord-lieutenant du Lancashire. Comme il convenait au titulaire de cette fonction, il retourna avec plaisir à sa vieille passion : les courses de chevaux. Il possédait à huit milles de Liverpool un immense domaine, Knowsley Park, où Édouard VII se rendait régulièrement. Derby fut élu président de la British Empire League en 1904. Il mourut quatre ans plus tard à Holwood, sa maison du Kent, et fut inhumé à Knowsley Park.
Frederick Arthur Stanley était l’un de ces gouverneurs pondérés qui font honneur à leur classe. L’ancien premier ministre Arthur James Balfour écrivit à lady Derby que son défunt mari avait été l’un de ses plus vieux et plus chers amis, « un homme qui avait le don d’inspirer de l’affection à ceux qui le connaissaient ». Il s’intéressait à une foule de choses ; il était aimable, réservé, honnête et sincère jusqu’à la transparence. Les batailles politiques ne lui convenaient guère. Comme il manquait de panache, l’impression qu’il a laissée est trompeuse. Ses connaissances et son expérience étaient vastes, mais il en usait avec modestie et une certaine hésitation. Pour les Canadiens, son nom évoque surtout Stanley House, le parc Stanley et la coupe Stanley. Ces souvenirs sont bien partiels, mais il ne s’en serait pas formalisé.
La principale collection des papiers de lord Stanley se trouve dans les papiers Hobbs (Derby-Gathorne-Hardy), à la bibliothèque du Corpus Christi College, Univ. of Cambridge, Angl. Un inventaire de la collection est disponible au Hist. mss Commission and National Reg. of Arch. (Londres), no 11916. Les AN en ont microfilmé presque toutes les lettres importantes qui ont trait au séjour de Stanley au Canada en qualité de gouverneur général (MG 27, I, B7). La collection du Liverpool Record Office (correspondance du 16e comte de Derby) traite principalement de ses années en Angleterre, mais comprend deux boîtes concernant le Canada. Elles renferment surtout des documents imprimés, dont des rapports annuels et des publications gouvernementales. On trouve aussi des renseignements sur Stanley dans les papiers Thompson (AN, MG 26, D).
Gazette (Montréal), 1892–1894.— Ottawa Free Press, 1893–1894.— Times (Londres), 1er juin 1864 : 12.— World (Toronto), 28 nov. 1890.— Burke’s genealogical and heraldic history of the peerage, baronetage and knightage, Peter Townend, édit. (105e éd., Londres, 1970).— CPG, 1891.— Debrett’s peerage, baronetage, knightage, and companionage [...] (Londres, 1907).— Dan Diamond et Joseph Romain, The Hockey Hall of Fame ; the official history of the game and its greatest stars (Toronto, 1988).— DNB.— H. H. Roxborough, The Stanley Cup story (Toronto, [1964]).— Types of Canadian women (Morgan) : 85.— Waite, Man from Halifax.— S. F. Wise et Douglas Fisher, Canada’s sporting heroes (Don Mills [Toronto], 1974).
P. B. Waite, « STANLEY, FREDERICK ARTHUR, 1er baron STANLEY et 16e comte de DERBY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/stanley_frederick_arthur_13F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/stanley_frederick_arthur_13F.html |
Auteur de l'article: | P. B. Waite |
Titre de l'article: | STANLEY, FREDERICK ARTHUR, 1er baron STANLEY et 16e comte de DERBY |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1994 |
Année de la révision: | 1994 |
Date de consultation: | 21 nov. 2024 |