DAVIS, ADELINE (Chisholm ; Foster, lady Foster), militante de la tempérance et auteure, née le 14 avril 1844 à Hamilton, Haut-Canada, fille aînée de Milton Davis, propriétaire de diligences, et de Hannah Cook ; le 17 août 1864, elle épousa à Hamilton Daniel Black Chisholm, et ils eurent un fils et un enfant qui mourut bébé, puis le 2 juillet 1889, à Chicago, George Eulas Foster*, avec qui elle n’eut pas d’enfants ; décédée le 17 septembre 1919 à Ottawa.

La jeune Adeline Davis étudia au Genesee Wesleyan Seminary de Lima, dans l’État de New York, où, dit-on, elle se distingua par son « application, [ses] aptitudes et [son] rendement ». Après avoir reçu son diplôme, elle enseigna à une classe de petits enfants à l’une des écoles méthodistes du dimanche de Hamilton, peut-être celle de l’église méthodiste Centenary. En 1864, elle épousa le surintendant de cette école, Daniel Black Chisholm, éminent barrister. Bien qu’ils aient eu beaucoup d’intérêts communs, dont la tempérance et la vie publique – Chisholm fut conseiller et maire de Hamilton, puis député aux Communes –, leur mariage fut un échec. En septembre 1883, selon Adeline, Daniel Black Chisholm quitta Hamilton en la laissant seule avec leur jeune fils ; il semble qu’il avait détourné des fonds de ses clients.

En 1885, Adeline Chisholm résidait à Ottawa, au 127 de la rue Bank ; apparemment, elle louait des chambres. Elle comptait parmi ses pensionnaires George Eulas Foster, partisan de la tempérance et député conservateur aux Communes. Ils ne tardèrent pas à se lier.

Tout au long des années 1880, Adeline Chisholm défendit publiquement la cause de la tempérance, à laquelle elle avait adhéré pour de bon à Hamilton. Elle fut la deuxième présidente de l’Ontario Woman’s Christian Temperance Union, de 1882 à 1888, ainsi que l’éditrice et la rédactrice en chef du périodique de cette association, le Woman’s Journal d’Ottawa, en 1885. En outre, elle rédigea des tracts et des opuscules pour les administratrices de l’association ontarienne et les dirigeantes des groupes de jeunes. Mme Chisholm était une personne volontaire et un bourreau de travail. Elle présentait souvent des propositions aux comités organisateurs des congrès provinciaux, participait à la formation d’unions locales et était réputée comme oratrice. En 1888, elle représenta l’association canadienne à l’assemblée de la National Woman’s Christian Temperance Union des États-Unis. En Ontario, elle soutenait l’instauration du suffrage féminin, étape essentielle, selon elle, vers la légalisation de la prohibition : « Dieu ne promet jamais de faire pour nous ce que nous pouvons faire pour nous-mêmes, et nous sommes parvenues à la conclusion que, pour que la prohibition advienne dans notre pays, il faut rouler hors du chemin cette pierre, l’incapacité [électorale] de la femme. »

À l’instar de Letitia Youmans [Creighton*], la première présidente de l’Ontario Woman’s Christian Temperance Union, Adeline Chisholm était une fervente évangélique. Elle ne doutait pas que les efforts de l’association seraient couronnés de succès si les membres adhéraient à la proposition suivante : « nous pouvons vaincre le manque d’assurance avec lequel nous proclamons les grandes vérités qui nous tiennent tant à cœur [en nous en remettant] à la force de Celui qui nous donnera la victoire ». Il semble qu’elle considérait Letitia Youmans, dont la présence fortifiait les membres « moins douées et plus craintives », comme son mentor. Suivant l’exemple de celle-ci, elle préconisait d’instruire les jeunes sur la tempérance en les enrôlant dans des organisations appelées « bands of hope » et dans les « loyal temperance legions ». Il s’agissait de groupes d’enfants d’environ 7 à 12 ans qui se réunissaient après l’école et le samedi. Adeline Chisholm, qui élevait son fils seule, soutenait infailliblement la Young Woman’s Christian Temperance Union, sous-groupe de la Woman’s Christian Temperance Union réunissant des femmes seules d’environ 16 ans et plus. Toutefois, beaucoup de membres de l’Ontario Woman’s Christian Temperance Union craignaient que ce sous-groupe de jeunes ne détourne des membres de l’association mère, ce qui lui enlèverait du poids. De plus, bon nombre des initiatives de la Young Woman’s Christian Temperance Union – foyers pour mères célibataires et abandonnées, résidences pour femmes au travail, missions de tempérance et de prédication auprès des pauvres, programmes d’alphabétisation pour filles et garçons de la classe ouvrière – suscitaient de la jalousie.

Sous la direction d’Adeline Chisholm, l’Ontario Woman’s Christian Temperance Union continua de faire campagne pour que l’« instruction scientifique sur la tempérance » devienne obligatoire dans les écoles publiques. Cette formation mettait l’accent sur les effets physiques terrifiants et sournois de l’alcool et du tabac. Comme Letitia Youmans avant elle, Adeline Chisholm soutenait que le cours devait être confié à des instituteurs dûment formés, se donner au moyen d’un manuel approuvé par la Woman’s Christian Temperance Union et être sanctionné par des examens finals. En partie grâce à l’insistance de Mme Chisholm et d’autres dirigeantes de l’association, dont Emma Frances Jane Pratt [Vail], le cours fut inscrit au programme des écoles ontariennes en 1885, sur une base facultative, dans le cadre d’une campagne de développement moral mise de l’avant par le ministre de l’Éducation George William Ross. (Le cours deviendrait obligatoire huit ans plus tard.)

En janvier 1888, sans doute pour obtenir aisément un divorce, Adeline Chisholm quitta Ottawa pour Chicago, où elle avait un frère. La même année, elle se fiança à George Eulas Foster, mais pour divorcer en Ontario, il fallait s’adresser au Sénat, démarche coûteuse qui risquait également de nuire à la carrière politique de Foster, devenu ministre des Finances en mai 1888. Elle intenta donc des poursuites devant le tribunal itinérant du comté de Cook en janvier 1889. Dans le courant de l’année, elle démissionna de l’Ontario Woman’s Christian Temperance Union.

À l’occasion de son discours d’adieu au congrès annuel, les membres lui rendirent un vibrant hommage. Les témoignages prononcés à cette occasion et en d’autres donnent des indices supplémentaires sur ses qualités personnelles. Ils évoquent souvent sa chaleur, sa « douceur et [sa] gentillesse toutes chrétiennes ». Sans doute Mme Chisholm savait-elle aussi en imposer, car il semble que, à l’Ontario Woman’s Christian Temperance Union, ses vues l’emportaient généralement. Dans son discours aux déléguées, elle nota : « même quand mes projets allaient à l’encontre des vôtres, vous avez toujours été disposées à renoncer aux uns et à embrasser les autres ». Indubitablement, elle avait une forte personnalité. Diriger une organisation vouée à la préservation de la famille devait demander à un parent seul énormément de cran, mais divorcer au Canada au xixe siècle en exigeait encore davantage.

Adeline Chisholm obtint son divorce en juin 1889, et Foster s’empressa de la rejoindre à Chicago, où ils se marièrent. Les répercussions se firent sentir dès leur retour à Ottawa. Nombreux étaient ceux qui contestaient la légalité du divorce au Canada, et les cercles officiels boudèrent les Foster. La femme du premier ministre, l’austère lady Macdonald [Bernard], et le gouverneur général lord Stanley* refusaient tous deux de recevoir Adeline Foster. Sir John Alexander Macdonald* craignait que son collègue du cabinet ne soit victime d’attaques personnelles aux Communes ; au cours de la campagne électorale de 1891, pendant qu’il était sur les tribunes, des chahuteurs lui crièrent le nom d’Adeline Chisholm. Cependant, les Foster étaient acceptés par sir John Sparrow David Thompson*, ministre de la Justice et futur premier ministre, qui jugeait apparemment le divorce de Mme Chisholm légitime, et par lady Thompson [Affleck]. Le gouverneur général lord Aberdeen [Hamilton-Gordon*] et lady Aberdeen [Marjoribanks*] mirent fin à l’ostracisme en 1893 en invitant les Foster à un concert.

Après son mariage et son retour à Ottawa, Adeline Foster finit par se consacrer à des activités culturelles et humanitaires mieux vues de la bonne société que la cause de la tempérance. À compter de 1900, elle œuvra à la Women’s Canadian Historical Society, à l’Ottawa Humane Society, au Women’s Morning Music Club, au Women’s Canadian Club et à la section d’Ottawa du Victorian Order of Nurses. En plus, elle passait naturellement une bonne partie de son temps à s’acquitter de devoirs mondains pour favoriser la carrière de son mari, qui fut créé chevalier en 1914.

Lady Foster mourut en 1919 après avoir combattu deux ans ce qu’une nécrologie appela discrètement une « longue maladie mortelle », un cancer du sein. Très éprouvé par son décès, son mari nota dans son journal intime : « Gris au-dehors, et noir au-dedans. »

Sharon Anne Cook

Addie [Davis] Chisholm est l’auteure de Why and how : a handbook for the use of the W.C.T. unions in Canada (Montréal, 1884).

AN, MG 27, II, D7, vol. 11, 109 ; RG 31, C1, 1871, Hamilton, Ontario, St Andrew’s Ward, div. 1 : 19 (mfm aux AO).— AO, F 885, MU 8404, 8407–8409 ; RG 80-8-0-14, no 10898.— Circuit Court of Cook County Arch. (Chicago), divorce file no 71298.— Hamilton Spectator, 18 août 1864.— Ottawa Evening Journal, 4 juill. 1889, 17, 20 sept. 1919.— Annuaire, Ottawa, 1882–1919.— Canadian biog. dict.— Canadian men and women of the Time (Morgan ; 1898 et 1912).— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 2.— [I. M. Marjoribanks Hamilton-Gordon, marquise d’] Aberdeen [et Temair], The Canadian journal of Lady Aberdeen, 1893–1898, J. T. Saywell, édit. (Toronto, 1960).— Waite, Man from Halifax.— W. S. Wallace, The memoirs of the Rt. Hon. Sir George Foster, p.c., g.c.m.g. (Toronto, 1933).

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Sharon Anne Cook, « DAVIS, ADELINE (Chisholm ; Foster, lady Foster) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/davis_adeline_14F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
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