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MERCHANT, FRANCIS WALTER, éducateur, auteur et fonctionnaire, né probablement le 25 novembre 1855 à Oil Springs, Haut-Canada, fils de Moses Merchant, agriculteur, et de Mary Miller ; le 23 décembre 1881, il épousa à Ingersoll, Ontario, Jean (Jennie) McKay (décédée le 4 juillet 1922), et ils eurent deux filles ; décédé le 29 janvier 1937 à Toronto et inhumé dans cette ville, au cimetière Mount Pleasant.
Francis Walter Merchant fit ses études primaires dans des écoles publiques avant de fréquenter l’Albert College, ancien séminaire méthodiste habilité à délivrer des diplômes universitaires, à Belleville, où il étudia à la grammar school, et reçut une licence ès arts en 1878 et une maîtrise en 1883. Spécialiste des mathématiques et des sciences, il gravit rapidement les échelons du système scolaire de l’Ontario. En 1876, avant l’obtention de son premier diplôme, il avait commencé à enseigner au secondaire à Port Dover. Après un bref passage à l’Ingersoll Collegiate Institute, il retourna à Port Dover à titre de directeur de l’école, qu’il quitta une autre fois pour l’Ingersoll Collegiate Institute, afin de diriger l’établissement. Il y fit probablement la connaissance de sa femme, Jean McKay. Poursuivant son ascension, Merchant assuma la direction d’écoles secondaires à Owen Sound (1885–1889), Stratford (1889–1891) et London (1891–1900), puis accepta sa nomination de premier directeur de la London Normal School. Les écoles normales préparèrent le terrain aux teachers’ colleges comme centres de formation pédagogique des diplômés du secondaire, et la London Normal School fut le troisième établissement de ce type à ouvrir ses portes dans la province. Pendant qu’il y travaillait, Merchant obtint en 1903 son doctorat en pédagogie de la University of Toronto.
Grâce à son expérience d’administrateur scolaire et à ses titres universitaires, Merchant se vit nommé en 1908 inspecteur en chef des écoles publiques et séparées, et inspecteur des écoles normales de l’Ontario. Dans l’un de ses premiers rapports, terminé l’année suivante, il évaluait la condition des écoles anglo-francophones dans la vallée de l’Outaouais et faisait observer que « l’atmosphère des écoles [était] indubitablement française ». On ne publicisa pas les conclusions de Merchant, mais son enquête attira l’attention des Franco-Ontariens, dont beaucoup redoutèrent d’être bientôt soumis aux mêmes restrictions en matière d’éducation que les minorités francophones du Manitoba [V. Thomas Greenway*] et d’autres provinces. « S’il n’y a presque aucune opposition à l’anglais, nota Merchant, il y a un très fort sentiment, intimement lié à la race, à la religion et au sentiment national, que la langue française doit être préservée. L’hésitation à appuyer l’étude de l’anglais est souvent le résultat de la crainte qu’elle mènera ultimement à l’élimination du français. »
Merchant joua un rôle important dans le débat sur ce qu’on appellerait la question des écoles de l’Ontario. L’évêque catholique irlandais Michael Francis Fallon, de London, souleva l’indignation canadienne-française lorsqu’il condamna les écoles bilingues, déclarant dans le Globe du 17 octobre 1910 que ce système « n’enseign[ait] ni l’anglais ni le français, encourage[ait] l’incompétence, récompens[ait] l’hypocrisie et engendr[ait] l’ignorance ». Le premier ministre conservateur sir James Pliny Whitney* s’entretint sans tarder avec le ministre de l’Éducation, Robert Allan Pyne, le sous-ministre Arthur Hugh Urquhart Colquhoun et le surintendant de l’Éducation, John Seath*, pour discuter de l’affaire. Pyne ordonna ensuite à Merchant d’examiner les allégations de Fallon et de préparer un rapport, repoussant ainsi la question des écoles bilingues après les élections du 11 décembre 1911, quand Whitney forma un troisième gouvernement majoritaire consécutif.
Dans son rapport de février 1912, Merchant mentionna que, « dans l’ensemble, les écoles anglo-francophones manqu[aient] d’efficacité ». Il souligna que la fréquentation irrégulière et la formation inadéquate des enseignants constituaient des facteurs aggravants, mais insista sur le fait que « la situation bilingue présentait elle-même un problème particulièrement difficile », surtout dans les écoles où l’éducation se donnait en français à tous les niveaux et où « l’anglais [n’était considéré] que comme une matière parmi d’autres ». Sur la question cruciale de déterminer si les élèves francophones devaient recevoir leur éducation en anglais ou en français, il affichait une position modérée. À l’instar du surintendant de l’Éducation de la Nouvelle-Écosse, Alexander Howard MacKay* – dont le point de vue se trouvait mentionné dans le rapport –, Merchant préconisait l’anglais comme seule langue d’enseignement pour les élèves francophones, mais seulement aux niveaux supérieurs, car « on obten[ait] les meilleurs résultats quand le premier véhicule d’instruction [était] la langue maternelle ». Reconnaissant que le moment le plus approprié pour passer à l’anglais « dépend[ait] des aptitudes de l’élève et des conditions linguistiques du lieu où l’école [était] située », il concluait qu’en général, la méthode la plus satisfaisante « requér[ait] que l’élève reste trois ans en Form I et deux ans en Form II et qu’au cours de cette période, l’anglais remplace progressivement le français comme langue d’enseignement ».
Quatre mois après la parution de cette analyse, Pyne émit le Règlement 17 : par rapport aux recommandations de Merchant, celui-ci limitait encore plus l’utilisation du français comme langue d’enseignement en Ontario. L’anglais devint la seule langue d’enseignement après la Form I (soit les deux premières années d’études), indépendamment des circonstances locales, et l’enseignement du français comme matière fut strictement interdit. Pour assurer l’observance des nouveaux règlements, on établit un système d’inspection plus rigide, qui favorisait les enseignants anglophones.
Merchant évita d’être personnellement impliqué dans la controverse subséquente à la mise en œuvre du Règlement 17 [V. Napoléon-Antoine Belcourt ; Joseph Octave Reaume], en partie parce que, depuis sa nomination comme directeur de l’enseignement industriel et technique, le 30 mai 1911, il n’exerçait plus les fonctions d’inspecteur en chef des écoles publiques et séparées (il restait cependant inspecteur des écoles normales). En tant que directeur, il devait évaluer le succès de l’Industrial Education Act de 1911, loi défendue par Seath. Merchant se rendit en Europe pour y examiner des écoles techniques et, par la suite, il ajouta des écoles et des cours partout en Ontario. En 1915, il informa Pyne que les anciens combattants de la Première Guerre mondiale nécessitaient des cours additionnels pour répondre à leurs besoins et des programmes accélérés afin de gagner un salaire dès que possible. Peu après la fin de la guerre, on libéra Merchant de ses fonctions d’inspecteur des écoles normales pour lui permettre de se concentrer pleinement sur l’enseignement industriel et technique. La Loi d’enseignement technique, fédérale, et l’Adolescent School Attendance Act, loi provinciale, sanctionnées en 1919, accrurent grandement la portée et le niveau de l’enseignement technique en Ontario. Merchant consacra une bonne partie de son temps à en évaluer les succès et à déterminer les domaines où des réformes s’imposaient.
En 1921, Merchant reçut un doctorat honorifique en droit de la University of Toronto. Deux ans plus tard, il accéda à la fonction de directeur général de l’Éducation. (On rétablissait ainsi, sous un titre différent, le poste de surintendant, laissé vacant au décès de Seath en 1919.) En octobre 1925, le premier ministre conservateur et ministre de l’Éducation, George Howard Ferguson*, nomma Merchant à la tête d’un comité (dont les autres membres étaient le juge James Henderson Scott et l’avocat Louis Côté) chargé d’évaluer l’efficacité des écoles anglo-francophones, et de suggérer des moyens d’améliorer la formation et le recrutement des enseignants. Le rapport du comité déposé au mois d’août 1927 soulignait que le Règlement 17 avait entraîné de profondes conséquences sur l’enseignement en français et préconisait notamment que « l’appellation particulière anglo-francophone, sous-entendant un type spécial d’école [soumis à des] restrictions ou [bénéficiant] de privilèges spéciaux, soit abandonnée, et que toutes les écoles primaires […] soient placées dans l’une des deux catégories – école publique ou école catholique séparée ». Peu après, Ferguson suivit ces recommandations et cessa l’application du Règlement 17.
Francis Walter Merchant eut 75 ans en novembre 1930. Il quitta son poste de directeur général la même année, mais resta conseiller pédagogique principal du ministre jusqu’en 1934. Il reçut un doctorat honorifique en droit de l’université d’Ottawa en 1933. Outre son travail d’éducateur et de fonctionnaire, Merchant publia plusieurs manuels destinés aux écoles de l’Ontario et siégea au conseil d’administration de la University of Toronto. Il mourut à Toronto le 29 janvier 1937 des suites d’une thrombose coronaire. À ses funérailles, Ferguson décrivit Merchant ainsi : « le père du système de formation professionnelle » et « le plus grand éducateur qu’on ait eu en Ontario depuis [Egerton Ryerson*] ». Le président de la University of Toronto et ancien ministre de l’Éducation (1918–1919), Henry John Cody*, jugea quant à lui que « personne n’avait eu une connaissance plus étendue et approfondie de l’ensemble du système d’éducation en Ontario ». On se souvient surtout de Merchant pour ses rapports sur les écoles bilingues. Toutefois, durant sa longue carrière, il contribua aussi remarquablement à de nombreux secteurs du système éducatif de la province, en particulier les écoles professionnelles et les écoles normales.
Francis Walter Merchant est l’auteur de « The Ontario examination system » (thèse de d.paed., Univ. of Toronto, 1903), de Report on English-French schools [in the Ottawa Valley] ([Toronto], 1909) et de Report on the condition of English-French schools in the province of Ontario (Toronto, 1912). Il a collaboré au rapport du Committee appointed to enquire into the condition of the schools attended by French-speaking pupils, publié à Toronto en 1927. Merchant a aussi signé ou cosigné High school physical science (2 part., Toronto, 1895–1896), Supplement to high school physical science (Toronto, 1899) et Mechanics for the upper school (Toronto, 1919).
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Geoff Keelan, « MERCHANT, FRANCIS WALTER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/merchant_francis_walter_16F.html.
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Auteur de l'article: | Geoff Keelan |
Titre de l'article: | MERCHANT, FRANCIS WALTER |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2024 |
Année de la révision: | 2024 |
Date de consultation: | 20 déc. 2024 |