LEGARDEUR DE CROISILLE (Croizille) ET DE MONTESSON, JOSEPH-MICHEL, officier dans les troupes de la Marine et seigneur, baptisé le 30 décembre 1716 à Bécancour (Québec), fils de Charles Legardeur* de Croisille et de Marie-Anne-Geneviève Robinau de Bécancour, décédé vers 1776 en Pennsylvanie.

Joseph-Michel Legardeur de Croisille et de Montesson grandit dans la seigneurie de Bécancour où, côte à côte, vivaient en nombre égal Canadiens et Abénaquis chrétiens. Ce milieu explique probablement comment il acquit des connaissances linguistiques et de l’entregent qui lui permirent de servir de liaison entre les Canadiens et les Indiens pendant sa carrière militaire. En 1739, en qualité de cadet, Montesson fit partie d’une troupe de Canadiens et d’Indiens qui se rendirent dans la vallée du cours inférieur du Mississippi secourir la Louisiane dans ses guerres contre les Chicachas [V. Jean-Baptiste Le Moyne* de Bienville]. Promu enseigne en second en 1742, il participa, quatre ans plus tard, à l’expédition de Jean-Baptiste-Nicolas-Roch de Ramezay contre les Britanniques en Acadie. Il mena un raid contre un détachement britannique de ravitaillement à Port-La-Joie (Fort Amherst, Île-du-Prince-Édouard) en juillet. Les assaillants, surtout des Micmacs, tuèrent ou capturèrent près de 40 ennemis, sans grandes pertes, et on loua Montesson pour s’être distingué lors de son premier commandement autonome. En août, alors qu’il convoyait un chargement de vivres dans sa traversée de la baie Française (baie de Fundy), un navire britannique le prit en chasse et son petit bâtiment échoua et fit naufrage.

Par son mariage, le 25 octobre 1745 à Québec, avec Claire-Françoise Boucher de Boucherville, veuve de Jean-Baptiste Pommereau*, Montesson se trouva engagé dans la pêche des phoques à Gros Mécatina. En effet, Pommereau avait pratiqué cette activité en association avec Guillaume Estèbe et Daniel-Hyacinthe-Marie Liénard* de Beaujeu. Leur concession expira en 1747 mais fut renouvelée pour six ans à partir de 1748, Montesson agissant au nom de sa femme.

Nommé enseigne en pied le 15 février 1748, Montesson fut l’un des interprètes lors d’une négociation importante entre les Iroquois et les Canadiens à Montréal cet automne-là [V. Kakȣenthiony*]. Quand le gouverneur Duquesne décida d’envoyer une expédition chargée de la construction d’un fort pour appuyer les revendications canadiennes sur la vallée de l’Ohio, Montesson fit partie de l’avant-garde aux ordres de Charles Deschamps de Boishébert qui partit de Montréal en février 1753. Outré des rapports faisant état de querelles entre Montesson et Boishébert, le gouverneur songea à rappeler Montesson. Ignorant les sentiments de Duquesne envers Montesson, le ministre de la Marine promut ce dernier au grade de lieutenant le let avril 1753. Il demeura au sein de l’expédition et, au cours des mois d’août et de septembre, il dirigea plus particulièrement une escouade chargée de construire des pirogues creusées dans des troncs d’arbres. En 1754, il coordonna l’aide d’un groupe d’Abénaquis à l’expédition et il alla au moins une fois sur l’emplacement du fort Duquesne (Pittsburgh, Pennsylvanie) pour l’approvisionner. La même année, il acquit une île qui, à l’origine, faisait partie de la seigneurie de Bécancour et, en 1755, acheta de sa mère la seigneurie elle-même.

Pendant la guerre de Sept Ans, Montesson accomplit des tâches variées : il assura la liaison avec les alliés abénaquis en 1755, fit des reconnaissances de nuit autour du fort Carillon (Ticonderoga, New York) et garda le poste de signalisation de Kamouraska en 1758, retira les canons de l’île d’Orléans et dirigea des escouades que l’on déplaçait aux alentours de Québec en 1759, et recruta des habitants de la rive sud en vue du dernier grand effort en 1760.

Le 1er mai 1757, Montesson avait été promu capitaine. En 1761, il se rendit en France où il reçut la croix de Saint-Louis. Il se peut qu’il ait envisagé de s’y établir mais, dès le jour de l’An de 1764, il était de retour au Canada et échangeait des vœux avec le gouverneur Murray de Québec. L’une de ses belles-filles épousa John Bruyères, secrétaire du gouverneur de Trois-Rivières, au cours d’une cérémonie protestante ; l’autre se maria avec un officier britannique. Néanmoins, le nouveau régime n’eut recours à ses services qu’en 1775, année pendant laquelle il se rallia, de concert avec d’autres seigneurs, au gouvernement pour le défendre contre l’invasion américaine ; la milice de Bécancour, quant à elle, refusa d’être appelée sous les armes. Montesson était volontaire civil à Saint-Jean lors de la prise du fort le 3 novembre 1775. On envoya les captifs en Pennsylvanie ; Montesson mourut avant l’entente de 1777 qui permit aux prisonniers de retourner chez eux.

Dans un écrit de 1753, le gouverneur Duquesne blâmait « Son esprit d’insubordination qui provient de son aisance » et le qualifiait de « tracassier, menteur avec impudence et très difficile à vivre ». Montesson ne fut peut-être pas un personnage très sympathique, mais, bien qu’il ait toléré des membres de la troupe d’occupation britannique au sein même du cercle familial, il se montra prêt à défendre le Canada contre tous les envahisseurs, aussi bien dans les années 1770 que dans les années 1750.

Malcolm Macleod

AN, Col., C11A, 85 ; F3, 14 ; 15. ANQ-Q, NF 6, 4, pp.300–305, 321–326 (copies aux APC).— APC, RG 4, D1, 7. Library of Congress (Washington), George Washington papers, 9 ; 19–22 ; 34 ; 42. [G.-J. Chaussegros de Léry], Journal de Joseph-Gaspard Chaussegros de Léry, lieutenant des troupes, 1754–1755, ANQ Rapport, 1927–1928, 365, 375.— Coll. des manuscrits de Lévis (Casgrain), VII ; VIII.— Inv. de pièces du Labrador (P.-G. Roy), I : 88s.— [D.-H.-M. Liénard de] Beaujeu, Journal de la campagne du détachement de Canada à l’Acadie et aux Mines, en 1746–47, Coll. doc. inédits Canada et Amérique, II : 16–75. Mémoire du Canada, ANQ Rapport, 1924–1925, 154.— NYCD (O’Callaghan et Fernow), X : 186–188.— Papiers Contrecœur (Grenier).— Recensement du gouvernement de Trois-Rivières, 1760, 52s.— Une expédition canadienne à la Louisiane en 1739–1740, ANQ Rapport, 1922–1923, 181s.— Æ. Fauteux, Les chevaliers de Saint-Louis.— P.-G. Roy, Inv. concessions, I : 251–257. P. E. LeRoy, Sir Guy Carleton as a military leader during the American invasion and repulse in Canada, 1775–1776 (thèse de ph.d., 2 vol., Ohio State University, Columbus, 1960). Marcel Trudel, Les mariages mixtes sous le Régime militaire, RHAF, VII (1953–1954) : 7–31.

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Malcolm Macleod, « LEGARDEUR DE CROISILLE (Croizille) ET DE MONTESSON, JOSEPH-MICHEL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/legardeur_de_croisille_et_de_montesson_joseph_michel_4F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
Année de la révision:    1980
Date de consultation:    20 nov. 2024