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HERIOT, FREDERICK GEORGE, officier dans l’armée et dans la milice, propriétaire terrien, juge de paix, fonctionnaire et homme politique, né le 11 janvier 1786, baptisé à la maison le 14, puis présent à l’église anglicane de Saint-Hélier, île de Jersey, le 11 août, troisième fils de Roger Heriot, chirurgien de l’armée, et d’Anne Susanne Nugent ; décédé célibataire le 30 décembre 1843 à Drummondville, Bas-Canada, où il fut inhumé le 1er janvier 1844.
Par son père, Frederick George Heriot descendait d’une ancienne famille d’Écosse assez en vue, les Heriot de Trabroun. Du côté de sa mère, il se rattachait à la vieille aristocratie irlandaise par les Nugent de Westmeath. On l’a souvent confondu avec son cousin George Heriot, qui fut maître général adjoint des Postes au Bas-Canada de 1800 à 1816.
Dès l’âge de 15 ans, à l’été de 1801, Heriot entra dans l’armée à titre d’enseigne dans le 49th Foot. L’année suivante, il arriva au Canada sous les ordres du lieutenant-colonel Isaac Brock* et il connut par la suite un avancement rapide : promu capitaine en 1808, il devint major de brigade sous les ordres du baron Francis de Rottenburg* en 1811. Il vécut plusieurs années dans la ville de Québec dont la vie de garnison avait la réputation d’être assez agréable ; dans ses loisirs, il s’adonna avec succès aux courses de chevaux.
Après la déclaration de la guerre par les États-Unis le 18 juin 1812, on nomma Heriot au corps des Voltigeurs canadiens le 26 mars 1813 avec le grade de major intérimaire, sous les ordres du lieutenant-colonel Charles-Michel d’Irumberry* de Salaberry ; le 10 juin, on le désigna à titre d’officier de campagne avec le grade de major honoraire. Le 1er avril, il quitta le camp de Saint-Philippe-de-Laprairie et se dirigea vers le Haut-Canada à la tête de quatre compagnies de Voltigeurs, puis parvint à Kingston le 13 avril. Avec ses troupes, il partagea les fortunes diverses de l’armée britannique et, à la suite de l’expédition de Sackets Harbor, dans l’état de New York, les 28 et 29 mai [V. sir James Lucas Yeo*], on le cita à l’ordre du jour. Mais le danger d’invasion s’intensifiait et, dans le Bas-Canada, la bataille de Châteauguay, livrée le 26 octobre 1813 contre des unités ennemies, allait immortaliser Salaberry et ses Voltigeurs. À ce moment, Heriot et trois de ses compagnies se trouvaient alors à Prescott ; ils quittèrent cette ville vers le 6 novembre pour se mettre à la poursuite des Américains qui se dirigeaient vers Montréal. C’est le 11 novembre que se déroula le combat de Crysler’s Farm, dans le Haut-Canada [V. Joseph Wanton Morrison*], au cours duquel Heriot faillit être fait prisonnier et ne réussit à s’échapper que grâce à ses talents de cavalier ; sa conduite lui valut une nouvelle citation et une médaille d’or. Par la suite, le corps des Voltigeurs fut augmenté et regroupé dans le Bas-Canada, mais Salaberry songeait à en quitter le commandement et offrit à Heriot de l’acheter. Ce dernier, avec l’appui de sir George Prevost*, accéda à ce poste le 11 avril 1814 et conserva le grade de lieutenant-colonel de milice jusqu’à la fin des hostilités.
La guerre finie, on démobilisa les Voltigeurs le 1er mars 1815 ; quant à Heriot, on lui offrit de reprendre son ancien grade dans le 49th Foot avec la perspective de rentrer bientôt en Angleterre et de médiocres chances d’avancement en temps de paix. Toutefois, pour ce jeune officier de 29 ans, une carrière imprévue allait s’ouvrir.
Comme le gouvernement impérial adoptait une nouvelle politique de colonisation, la chambre d’Assemblée du Bas-Canada recommanda d’accorder des terres non concédées aux soldats démobilisés. C’est ainsi que vit le jour dans la vallée de la rivière Saint-François un établissement semi-militaire ; le 1er mai 1815, Heriot en devint le directeur, assisté de Pierre-Amable Boucher de Boucherville et de plusieurs officiers de divers régiments. Ce poste lui assurait £300 auxquelles s’ajoutaient £100 pour ses déplacements, sans compter sa demi-solde. Il se mit immédiatement à l’œuvre, inspecta les lieux et, le 8 juin, sollicita une concession de 1 200 acres dans les cantons de Grantham et de Wickham afin d’y fonder un village. Au cours de l’été de 1815 naquit Drummondville dont les débuts parurent encourageants selon l’administrateur sir Gordon Drummond*, qui se rendit lui-même visiter l’établissement à l’automne. Dès 1816 s’alignaient des maisons, un hôpital, une école et une caserne ; un bureau de poste y était déjà implanté. À quelque distance, sur un coteau, Heriot avait aménagé sa vaste demeure, Comfort Cottage ; il faisait défricher sa ferme et construire des moulins. Mais de sérieux revers survinrent : peu ou pas de récoltes en 1815 et 1816, désertions, réduction de l’aide militaire et menace de fermeture en 1819, épidémie en 1820 et finalement un incendie qui ravagea campagne et village en 1826 et n’épargna que la maison du fondateur et les deux chapelles. Malgré ces nombreux désastres, Heriot réussit, grâce à ses efforts inlassables, à maintenir la petite collectivité qui dépendait de lui en tout. En effet, il cumulait les fonctions de juge de paix, de commissaire et visiteur des écoles, ainsi que de commissaire chargé de la construction des routes ; attentif aux besoins de ses concitoyens, il venait en aide à tous. Par les dons de terrains qu’il fit, il assura la présence d’une mission catholique et d’une paroisse de l’Église d’Angleterre. Il aurait souhaité les dédier toutes deux à saint George mais, au risque de le vexer, l’évêque catholique, Mgr Joseph-Octave Plessis*, opta pour saint Frédéric.
Les premières concessions de terre que Heriot avait reçues ne dépassaient guère 600 acres. En regard de son dévouement et de ses états de service, il estimait mériter davantage et le fit savoir par de nombreuses pétitions. Certaines de ses demandes furent d’ailleurs agréées, et il agrandit ses domaines par de nombreux achats, de sorte que les enquêteurs qu’avait désignés lord Durham [Lambton] affirmèrent en 1838 qu’il possédait 12 000 acres et le classèrent parmi les accapareurs. Cependant, ils négligèrent de souligner qu’il était l’un des six grands propriétaires qui vivaient sur leurs terres, qu’il s’employait activement à la promotion de l’agriculture et de l’élevage, et qu’il déclarait avoir contribué au développement de 40 000 acres.
À la subdivision de la circonscription de Buckingham en 1829, Heriot fut d’emblée élu député de la nouvelle circonscription de Drummond le 7 novembre. Son seul adversaire lui avait même accordé son vote. Réélu sans opposition en 1830, il démissionna le 31 janvier 1833. C’est avec assiduité qu’il avait rempli son mandat, en s’intéressant surtout aux voies de communication. Appelé au Conseil spécial en avril 1840, il prit part à une session seulement.
Entre-temps, les états de service de Heriot lui avaient valu la croix de compagnon de l’ordre du Bain en 1822 et, en 1826, le titre d’aide de camp du gouverneur. Le 22 juillet 1830, il avait atteint le grade de colonel et il allait être promu major général le 23 novembre 1841. Pendant la rébellion de 1837, il s’était vu confier l’organisation militaire des Cantons-de-l’Est et, en décembre, il avait accompli une tournée dans la région du Saint-François pour recruter et organiser les volontaires.
Au cours d’un voyage en Angleterre et en Écosse en 1840, Heriot renoua avec sa famille ; deux de ses cousins étaient membres de l’entourage du duc de Wellington dont il fut même l’invité. Au Canada, un autre cousin, Robert Nugent Watts, élu député de Drummond le 15 mars 1841, s’était installé chez lui ; Heriot lui céda une grande partie de ses biens en 1842. Mais il était déjà gravement malade et il s’éteignit le 30 décembre 1843, peu avant d’avoir 58 ans. Toute la population, sans distinction de croyance, lui fit d’émouvantes funérailles, les cloches des deux églises s’unissant à sonner le glas, le 1er janvier 1844.
Frederick George Heriot emportait les regrets de tous ceux qui l’avaient connu ; on louait sa courtoisie, sa tolérance, son esprit de charité, son dévouement, son hospitalité généreuse. Sans prétention, il aimait à se présenter comme simple fermier mais, par l’ampleur de ses biens et son style de vie, il représentait plutôt cette grande bourgeoisie terrienne d’Angleterre qu’on aurait bien voulu implanter au Canada. Homme de cœur et de devoir, il avait réalisé la devise de sa famille : Fortem posce animum (Maintiens force et courage).
Même si Frederick George Heriot a toujours signé Heriot, on trouve son nom écrit de diverses façons. À Drummondville, Québec, on l’a même francisé en ajoutant un accent : Hériot. Il est surprenant que Joseph-Charles Saint-Amant, qui aurait eu accès à des documents originaux, ait adopté Herriot en 1896 dans l’Avenir, townships de Durham et de Wickham, notes historiques et traditionnelles [...] (Arthabaska, Québec, 1896), erreur qui fut corrigée en 1932 dans Un coin des Cantons de l’Est ; histoire de l’envahissement pacifique mais irrésistible d’une race (Drummondville, 1932). Dans presque toutes les références à Heriot on trouve des erreurs, soit qu’on le confonde avec son cousin, soit qu’on le fasse naître en 1766, ou qu’on l’envoie à Drummondville en 1816 au lieu de 1815. Même William Stewart Wallace*, Macmillan dict., et Michelle Guitard, Histoire sociale des miliciens de la bataille de la Châteauguay (Ottawa, 1983), répètent la même chose.
Le problème majeur de la recherche au sujet de Heriot est la disparition de ses papiers personnels ; dans son testament, il n’avait laissé aucune disposition à ce sujet. Il n’est donc pas facile de se faire une idée de son éducation, qui semble excellente à en juger par sa correspondance, ni de ses relations familiales ou autres, pas plus que de ses opinions politiques. Parmi les études, seul l’article de l’un de ses parents, J. C. A. Heriot, « Major General, the Hon. Frederick George Heriot, CB », Canadian Antiquarian and Numismatic Journal, 3e sér., 8 (1911) : 49–75, donne des indications sur sa famille et sur sa personne. Joseph-Anatole Saint-Germain, dit frère Côme, a effectué d’excellentes recherches dans les archives et il est le premier à avoir eu recours à des méthodes scientifiques. Son ouvrage, Regards sur les commencements de Drummondville (Drummondville), publié en 1978 à partir d’une étude dactylographiée qu’il a faite en 1965, puis revue et augmentée, demeure le meilleur travail disponible, et nous lui devons beaucoup. Nous désirons également remercier Michelle Guitard et Christian Rioux, autrefois de Parcs Canada, pour leurs précieux renseignements sur l’histoire militaire. Nous avons, de plus, utilisé les grandes séries dans les principaux dépôts d’archives. Il y aurait encore beaucoup à compulser mais, pour cerner le personnage et ses principales activités, nous avons limité la recherche, déjà assez ardue, à ces grandes lignes.
Il existe un portrait de Heriot par Samuel Hawksett, conservé au château Ramezay à Montréal. Le musée McCord, pour sa part, possède un autre portrait, œuvre d’un artiste inconnu, autrefois attribué à son cousin George Heriot et qui semble être la meilleure représentation de Heriot. On trouve également des reproductions d’un portrait non signé dans C. P. De Volpi et P. H. Scowen, The Eastern Townships, a pictorial record ; historical prints and illustrations of the Eastern Townships of the province of Quebec, Canada (Montréal, 1962), et en frontispice de l’article de J. C. A. Heriot. [m.-p. r. l b.].
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Marie-Paule R. Labrèque, « HERIOT, FREDERICK GEORGE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/heriot_frederick_george_7F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/heriot_frederick_george_7F.html |
Auteur de l'article: | Marie-Paule R. Labrèque |
Titre de l'article: | HERIOT, FREDERICK GEORGE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
Année de la révision: | 1988 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |