BOOKER, ALFRED, marchand, encanteur et officier de milice, né en 1824 à Nottingham, Angleterre, fils du révérend Alfred Booker, ministre de l’Église baptiste (Regular), décédé le 27 septembre 1871 à Montréal, Qué.
La famille Booker était à Hamilton, Canada-Ouest, depuis huit ans lorsque, en 1850, le jeune Alfred Booker fonda un négoce qu’il dirigea jusqu’en 1867. Sa maison de commerce comportait des salles où il vendait à l’encan des propriétés foncières, des chevaux, des tissus et de la mercerie, et le stock des marchands qui liquidaient leurs affaires. Il s’enrichit et devint un membre éminent de la franc-maçonnerie. En 1852, il fut l’un des fondateurs de la loge St John, affiliée à la loge irlandaise. Il appartenait à la St George’s Society et à l’Église baptiste (Regular).
Le 16 mai 1851, Booker reçut un brevet de sous-lieutenant dans la 1re milice de Wentworth. En 1853, il obtint le grade de capitaine en second, dans la compagnie First Hamilton Independent Artillery et il prétendait avoir contribué à l’équipement de cette unité. En 1855, il fut nommé capitaine de la Volunteer Militia Battery of Artillery of Hamilton qu’il mit lui-même sur pied. Il fut promu major en 1857, pour commander les volontaires (ou l’armée active) de l’artillerie et de l’infanterie de la milice de Hamilton ; en 1858, il reçut le grade de lieutenant-colonel et commanda l’ensemble des troupes volontaires à Hamilton. Le 15 juin 1861, peu après le début de la guerre de Sécession, Booker fut nommé officier d’état-major avec mission de fournir aux troupes anglaises des renseignements sur les conditions locales.
Le 13e bataillon, qui devint plus tard le Royal Hamilton Light Infantry, fut créé en 1862 et le commandement en fut donné à Isaac Buchanan*. Ce fut Booker qui lui succéda, en 1865, de préférence à un autre officier nommé James Atchison Skinner, tout en continuant d’assumer le commandement de toutes les troupes de l’armée active à Hamilton. À la suite de l’incursion d’un groupe de Sudistes à St Alban au mois d’octobre, il eut l’occasion de commander plusieurs compagnies de volontaires sur la frontière, dans la région du Niagara.
En 1864, il passa un examen devant une commission militaire composée de trois officiers anglais et reçut un certificat d’aptitude militaire de première classe. C’était la première fois que les services de la milice remettaient un document de ce genre. Son activité dans les services de volontaires lui valut certaines récompenses : il avait coutume de rappeler qu’il avait « reçu une approbation spéciale et les éloges personnels » du prince de Galles en 1860, et qu’il avait été présenté à la reine Victoria en 1864.
Le nom de Booker est surtout attaché à la bataille de Ridgeway, qui opposa le 2 juin 1866 les volontaires canadiens qu’il commandait et l’armée républicaine irlandaise dirigée par John O’Neill. Le 1er juin, lorsque les autorités militaires britanniques apprirent l’invasion des Féniens, Booker reçut l’ordre de faire appel au 13e bataillon et de le conduire à Port Colborne. En route, il prit avec lui deux autres compagnies de volontaires, la York et la Caledonia. Il trouva le 2e bataillon de Toronto déjà sur place, lorsqu’il arriva à destination en fin de journée. Comme il avait plus d’ancienneté que le commandant à titre temporaire du 2e bataillon, John Stoughton Dennis*, Booker prit le commandement de toute la troupe.
Les volontaires, sous les ordres de Booker, devaient agir conjointement avec les troupes anglaises commandées par le lieutenant-colonel George J. Peacocke, et tous deux étaient sous les ordres du major général George Napier. Peacocke devait rejoindre Booker à Port Colborne mais, par la suite, Stevensville fut choisi comme lieu de rencontre. Booker, qui connaissait mieux que Peacocke les mouvements des Féniens, proposa de conduire sa colonne à Fort Erie et d’attaquer les Féniens à Frenchman Creek, mais Peacocke s’opposa à ce projet.
Booker considérait « qu’il était de son devoir de se rendre à Stevensville » et il partageait l’avis de Napier qui ne prévoyait pas l’attaque des Féniens avant que les deux colonnes n’aient atteint Stevensville. La troupe de Booker se rendit à Ridgeway par le train et, de là, partit à pied pour Stevensville. Les hommes de Booker étaient jeunes, inexpérimentés et mal entraînés ; il y en avait 480 dans le 2e bataillon commandé par Charles Todd Gilmor, 265 dans le 13e bataillon, à la tête duquel se trouvait James Atchison Skinner, qui le dirigeait à titre temporaire puisque Booker avait pris le commandement de toute la colonne. À cela, il faut ajouter environ 50 hommes de la compagnie York et autant pour la Caledonia. Bientôt l’avant-garde de Gilmor entra en contact avec les Féniens commandés par O’Neill, à peu près à mi-chemin entre Stevensville et Ridgeway, et un dur combat s’engagea. Booker apprit alors que Peacocke avait été retardé à Chippawa et, dès lors, on ne pouvait espérer que les troupes impériales entendent la fusillade et puissent venir à l’aide de Booker. Selon Gilmor, « les volontaires se trouvaient de ce fait dans une situation des plus critiques, car il semblait improbable [qu’ils] puissent tenir [leur] position pendant les deux heures précédant l’arrivée des renforts ». Ni l’un ni l’autre des adversaires en présence n’avait de l’artillerie ou de la cavalerie.
Booker repoussa les Féniens mais, lorsqu’il ordonna à quelques sections du 13e bataillon de Skinner de relever des compagnies de la colonne de Gilmor qui étaient à court de munitions, O’Neill contre-attaqua. « Le désordre s’ensuivit » et les troupes de Booker furent mises en déroute. Il ne put parvenir à les regrouper à Ridgeway et fit retraite vers Port Colborne, tandis qu’O’Neill, qui voulait retourner aux États-Unis et était incapable d’exploiter son succès, partit pour Fort Erie. Au cours de cet engagement, neuf des hommes de Booker furent tués. La colonne de Peacocke, qui possédait des pièces d’artillerie, ne prit jamais part au combat. Par la suite, on parla de faire passer Peacocke en cour martiale mais sir John Michel*, commandant des troupes, émit l’opinion que les armes des volontaires étaient telles « qu’actuellement les malheureux Canadiens devaient combattre dans une situation d’infériorité » et que, si le gouvernement canadien avait voulu équiper une douzaine de cavaliers, le détachement de Peacocke, prévenu à temps, aurait pu écraser les Féniens.
Les autorités militaires britanniques attribuèrent la responsabilité de cet échec au gouvernement canadien mais Booker demanda la nomination d’une commission d’enquête. Cette dernière, présidée par George Taylor Denison II ne put déterminer à qui incombait la responsabilité et loua le courage dont Booker avait fait preuve. Cependant les officiers du 13e bataillon n’avaient nullement l’intention d’en rester là. Skinner et quelques autres soudoyèrent un ancien protégé d’Isaac Buchanan, Alexander Somerville*, pour qu’il écrive un récit malveillant sur le combat qui avait eu lieu. Somerville admit plus tard que les officiers étaient « hostiles au colonel Booker et avaient perdu le sens de la droiture » et que le livre « faisait le jeu des ennemis personnels du colonel Booker ».
Booker abandonna le commandement du 13e bataillon le 30 juillet 1866 et, en 1867, fut autorisé à se retirer de la milice. On le maintint dans son grade et ce geste du gouvernement canadien était en fait une approbation tacite de la conduite qu’il avait eue au feu. Cependant les causes de la défaite touchaient de trop près aux différences profondes d’opinions qui existaient entre les autorités anglaises et les autorités canadiennes au sujet de la défense pour que l’on permît à Booker de réintégrer les troupes de volontaires. Il quitta Hamilton en 1867 et rouvrit sa boutique à Montréal. C’est là qu’il mourut, quatre ans plus tard, laissant un fils.
APC, FM 27, I, D4 (Papiers Cartier), 4, p. 1 792 ; FO 7, G10, 2 ; FO 8, I, A1, 185 ; FO 8, D5 ; 1 672, FO 9, I, C1, 265–267, 270 ; FO 9, I, C8, 6, 8 ; FO 9, II, A1, 2, f.145 ; FO 9, II, A1, 6, f.501 ; FO 9, II, A1, 36, f.3 923.— Canada Gazette (Ottawa), 23 juin 1866.— Evening Times (Hamilton), 1864–1866.— Gazette (Montréal), 28 sept. 1871.— Montreal Herald, 5 nov., 7 nov. 1870.— G. T. Denison III, History of the Fenian raid on Fort Erie ; with an account of the battle of Ridgeway (Toronto, 1866).— Alexander Somerville, Narrative of the Fenian invasion of Canada (Hamilton, C.-O., 1866).— Hutchinson’s Hamilton directory for 1862–63 [...] (Hamilton, C.-O., 1862).
E. A. Cruikshank, The origin and official history of the Thirteenth Battalion of infantry, and a description of the work of the early militia of the Niagara peninsula in the War of 1812 and the rebellion of 1837 (Hamilton, Ont., 1899).— J. A. Macdonald, Troublous times in Canada ; a history of the Fenian raids of 1866 and 1870 (Toronto, 1910).— J. R. Robertson, The history of Freemasonry in Canada from its introduction in 1749 [...] (2 vol., Toronto, 1899), II.— E. A. Cruikshank, The Fenian raid of 1866, Papers and records of the Welland County Hist. Soc. (Welland, Ont.), II (1926) : 9–49.— F. M. Quealey, The Fenian invasion of Canada West, June 1st and 2nd, 1866, Ont. Hist., LIII (1961) : 37–66.
Geo. Mainer, « BOOKER, ALFRED (1824-1871) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/booker_alfred_1824_1871_10F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/booker_alfred_1824_1871_10F.html |
Auteur de l'article: | Geo. Mainer |
Titre de l'article: | BOOKER, ALFRED (1824-1871) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1972 |
Année de la révision: | 1972 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |