Le premier ministre Wilfrid Laurier et son équipe envisageaient un grand projet de développement qui pourrait devenir le symbole de leur optimisme et participer au renouveau économique qui pointait à l’horizon du monde occidental. Clifford Sifton, le talentueux et efficace ministre de l’Intérieur, misa sur le développement poussé de l’Ouest agricole, ce qui parachèverait le grand programme économique de la Confédération fondé sur le marché Est-Ouest. Laurier acquiesça et Sifton agit de façon spectaculaire : il réorganisa son département, centralisa les décisions à Ottawa, simplifia la réglementation, et rendit les terres plus accessibles. Surtout, il ébaucha une campagne de recrutement pareille à nulle autre depuis la Confédération. Sauf les Noirs et quelques autres, dont les gens des villes, tous furent invités à venir construire l’Ouest (en 1901, 55 747 personnes immigreraient au Canada). Certaines minorités persécutées dans leurs pays, tels les doukhobors et les mennonites, s’installèrent aussi au Canada. Progressivement, une région différente surgit, plus individualiste, plus compétitive, plus cosmopolite que les autres. Certes, des Canadiens s’inquiétèrent du peu d’entrée de francophones ou encore de la canadianisation difficile de ces arrivants, voire des méthodes plutôt expéditives de Sifton. Toutefois, le gouvernement Laurier accompagna cette politique de quelques autres centrées sur le développement des communications et de l’aide à la production, dont certaines, telle l’entente de la passe du Nid-du-Corbeau en 1897, furent très importantes pour les fermiers. Il donna ainsi l’impression d’être l’instigateur d’un réveil canadien jugé des plus prometteurs.