Après l’échec de l’invasion de l’île de Campobello, au Nouveau-Brunswick, par les fenians de John O’Mahony [V. Introduction], le groupe de William Randall Roberts lança sa première attaque sur le Canada. À la tête des troupes (aujourd’hui estimées à environ 1 000 hommes, plutôt qu’à 600 comme mentionné dans l’extrait ci-dessous) se trouvait le colonel John O’neill :
Très tôt le 1er juin [1866], [John O’Neill] franchit la rivière avec un détachement qui comptait, selon ses dires, 600 hommes et occupa le village de Fort Erie. Le lendemain, au nord de Ridgeway, il rencontra l’avant-garde d’un détachement de volontaires canadiens commandé par le lieutenant-colonel Alfred Booker et composé en majorité de fantassins du Queen’s Own Rifles de Toronto et du 13e bataillon de Hamilton. Au cours de l’engagement qui fut bref, mais acharné, les Féniens (dont plusieurs étaient, comme O’Neill, des vétérans de la guerre de Sécession) mirent en déroute les Canadiens peu aguerris, qui battirent en retraite jusqu’à Port Colborne.
Tandis que les hommes de Booker combattaient à Ridgeway, le lieutenant-colonel John Stoughton Dennis tenta de barrer la route aux fenians qui se repliaient vers les États-Unis :
Dans l’après-midi, Dennis débarqua 70 de ses hommes à Fort Erie dans le but de découvrir où se trouvaient les Canadiens et de leur remettre ses prisonniers. Quelque 150 Féniens apparurent, mais, la victoire lui semblant assurée, Dennis, qui ignorait l’arrivée imminente d’autres Féniens, pressa ses hommes de prendre position. Après un échange de coups de feu, il ordonna de battre en retraite ; le remorqueur quitta la rive sans lui et il dut se déguiser en « manœuvre ». Il s’échappa, mais 34 de ses hommes ne purent en faire autant.
Malgré sa retraite devant les forces britanniques supérieures, O’Neill devint un héros pour beaucoup de nationalistes irlando-américains. Au Canada, il incarna l’archétype du méchant s’en prenant à un peuple pacifique et inoffensif dans l’espoir chimérique d’obtenir l’indépendance de l’Irlande.
Plus à l’est, un autre groupe de fenians se réunissait, prévoyant d’attaquer Montréal. Parmi ceux qui avaient pour mission de les arrêter se trouvait le lieutenant-colonel William Osborne Smith :
Au plus fort des troubles suscités par les Féniens, soit au cours des raids de juin 1866 [V. Alfred Booker*], Smith commandait à la frontière au sud de Montréal. Le 5 juin, en compagnie des Victoria Rifles et d’autres troupes, il effectua, sur des routes abîmées par la pluie, une marche pénible de Hemmingford à Huntingdon, ce qui empêcha probablement une attaque des Féniens rassemblés à Malone, New York. Dans son rapport sur les opérations, le major général James Alexander Lindsay*, officier des troupes régulières commandant dans le Bas-Canada, décrivit Smith comme « un officier de grande valeur, énergique et actif ».
Smith était encore commandant à la frontière de la province de Québec lorsque, quatre ans plus tard, comme le décrit la biographie d’O’Neill, ce dernier tenta une nouvelle fois d’envahir le Canada :
Au début de 1870, O’Neill entra en conflit avec son « sénat » et perdit une grande partie de ses appuis. Le 25 mai, avec la fraction de la confrérie qui était toujours décidée à le suivre, il fit une tentative de raid sur Eccles Hill situé à la frontière, près de Frelighsburg au Québec. Suffisamment prévenues à l’avance, les autorités canadiennes avaient pu prendre toutes leurs précautions. L’avant-garde fénienne se fit tirer dessus dès qu’elle eut franchi la frontière et battit en retraite. O’Neill fut lui-même arrêté par un préfet américain et, vers la fin du mois de juillet, il fut condamné à deux ans de prison, mais fut gracié au mois d’octobre, en même temps que d’autres prisonniers féniens, par le président Ulysses S. Grant des États-Unis.
Le dernier raid des fenians eut lieu en 1871, à l’instigation de William Bernard O’Donoghue, nationaliste irlandais qui, un an plus tôt, avait fait partie du gouvernement provisoire de Louis Riel au Manitoba, mais qui critiqua ensuite son ancien chef qu’il jugeait trop probritannique :
[En] janvier 1871, O’Donoghue porta au président américain, Ulysses S. Grant, une pétition secrète demandant l’intervention des États-Unis dans la Rivière-Rouge. Grant refusa d’agir et O’Donoghue se tourna alors vers la confrérie des Féniens. Il n’en obtint qu’un appui moral, mais il réussit à se gagner l’aide active de deux chefs féniens, John O’Neill et J. J. Donnelly. Puis il rédigea une constitution pour l’éventuelle république de Rupert’s Land, dont il se désigna lui-même le président, et, avec O’Neill, il traversa la frontière du Manitoba, le 5 octobre 1871, à la tête d’une petite troupe de 35 hommes, recrutés parmi les travailleurs sans emploi du Minnesota. L’influence de Riel empêcha les Métis de se joindre à O’Donoghue et la prétendue invasion du Manitoba par les Féniens avorta. Un groupe de Métis captura O’Donoghue et le ramena au Minnesota.
Pour en savoir plus sur les raids des fenians en 1866, 1870 et 1871, consultez les biographies suivantes.