Titre original :  Waterloo Region Generations: William Francis Tye

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TYE, WILLIAM FRANCIS, ingénieur civil, né le 5 mars 1861 à Haysville, Haut-Canada, fils de Francis Edward Tye et d’Anna Shelly ; le 13 octobre 1898, il épousa à London, Ontario, Mabel Annie Scholastic Maloney (décédée en 1938), et ils adoptèrent peut-être un enfant ; décédé le 8 janvier 1932 à Neuilly-sur-Seine, France.

William Francis Tye étudia au collège d’Ottawa et à la School of Practical Science à Toronto, où il passa ses examens de génie civil en 1881. Il travailla durant une saison pour les Services d’arpentage des terres fédérales, dans les Territoires du Nord-Ouest. Il entra ensuite au service de la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique (CP) ; entre 1882 et 1885, il y occupa successivement les postes de jalonneur, niveleur, opérateur de théodolite et ingénieur adjoint de la construction. Cette période à l’emploi du CP – la première de deux – constitua pour Tye le début d’une association étroite avec le monde des chemins de fer nord-américains, alors à un moment critique de leur développement ; cette relation durerait un quart de siècle. Peu après l’achèvement de la ligne principale du CP, en novembre 1885, Tye se joignit à la rivale américaine de l’entreprise, la St Paul, Minneapolis and Manitoba Railroad Company, dirigée par James Jerome Hill*. Il travailla pendant près de deux ans en qualité d’opérateur de théodolite et d’ingénieur adjoint de la construction au Minnesota et au Montana, puis devint ingénieur des voies et des ponts pour la branche de Tampico du chemin de fer central mexicain.

Tye passa environ une année au Mexique, puis repartit vers le nord, où la Great Falls and Canada Railway Company l’embaucha à titre d’ingénieur de division et de responsable du repérage. La firme appartenait à l’empire de sir Alexander Tilloch Galt* et de son fils Elliott Torrance Galt*, et s’étendait du Montana au sud de l’actuelle province de l’Alberta. Tye retourna ensuite au service de Hill, cette fois comme ingénieur de division responsable du repérage pour l’extension de la Great Northern Railroad Company jusqu’à la côte du Pacifique. Tye fit passer la ligne à l’ouest de la chaîne des Cascades, dans l’État de Washington, et supervisa la construction au col Stevens du tunnel Cascade, d’une longueur de deux milles et demi. La rivière Tye, non loin de là, et la collectivité de Tye, auparavant Wellington, porteraient son nom en mémoire de sa contribution.

En 1893, Tye revint au Canada, chargé d’un projet d’uniformisation du gabarit des voies de l’Alberta Railway and Coal Company, propriété de Galt, près de Lethbridge (Alberta). Le CP avait exigé cette opération avant de louer et, éventuellement, d’acheter la ligne. En 1895–1896, Tye devint ingénieur en chef, d’abord pour la Kaslo and Slocan Railway Company, filiale de la Great Northern Railroad Company, puis pour le Columbia and Western Railway, que le CP absorberait en 1898. Il servit ainsi dans les deux camps pendant que la Great Northern Railroad Company et le CP se battaient pour prendre le contrôle du trafic ferroviaire du riche district minier de Kootenay, en Colombie-Britannique. Après l’intégration du Columbia and Western Railway au réseau du CP, Tye fut promu administrateur tout en restant ingénieur en chef de la ligne. À ce double titre, il présida à l’achèvement du tronçon de Robson à Midway. À l’instar de son supérieur, sir William Cornelius Van Horne*, directeur général du CP, il croyait que cette section de 105 milles de la voie, avec ses nombreux tunnels et lacets, constituerait le projet de construction de chemin de fer le plus difficile de l’histoire du Canada. En 1900, la compagnie récompensa Tye pour son travail ardu en le nommant ingénieur en chef de la construction pour l’ensemble du réseau du CP. Il gravit rapidement les échelons pour devenir ingénieur principal adjoint, puis ingénieur en chef adjoint en 1902 et ingénieur en chef deux ans plus tard.

Tye cessa ce travail et entama une pratique privée en 1906 ; il s’installa d’abord à Toronto, puis à Montréal. Favorable à la rationalisation, mais méfiant à l’égard de l’intervention gouvernementale, il exerça une influence déterminante sur la politique ferroviaire canadienne. En 1912, on le recruta pour collaborer à une commission d’enquête sur le chemin de fer National Transcontinental, qui connaissait de graves difficultés. La ligne, construite et détenue par le fédéral, allait de Moncton à Winnipeg et se rattachait à la Grand Trunk Pacific Railway Company (filiale de la Compagnie du chemin de fer du Grand Tronc) pour former une ligne transcontinentale. Tye conclut que les dépassements de coûts du National Transcontinental résultaient en partie du fait que ses ingénieurs devaient se conformer à des spécifications techniques inutilement rigides et onéreuses. Dans un rapport de 1917, Tye et Noulan Cauchon, lui aussi ingénieur, recommandèrent la consolidation du trafic ferroviaire qui passait par Hamilton, en Ontario, le long de la voie du Grand Tronc. Cette année-là, Tye siégea avec Louis-Anthyme Herdt* et sir John Kennedy* à une commission présidée par Reuben Wells Leonard*, qui conseilla l’abandon d’un projet de chemin de fer électrique entre Port Credit et St Catharines, en invoquant la duplication des voies et la compétition croissante de l’automobile.

Toujours en 1917, dans un texte largement diffusé intitulé Canada’s railway problem and its solution, Tye affirma l’impossibilité, pour le pays, de soutenir trois lignes transcontinentales (le CP allait bien, mais la ligne de la Grand Trunk Pacific Railway Company et du National Transcontinental ainsi que celle de la Canadian Northern Railway Company de sir William Mackenzie* et sir Donald Mann éprouvaient des difficultés financières). Tye recommandait vivement la consolidation, sous propriété privée, de la Grand Trunk Pacific Railway Company, du chemin de fer National Transcontinental, de la Canadian Northern Railway Company et de la Compagnie du chemin de fer du Grand Tronc, elle aussi chancelante. L’article lui valut la prestigieuse médaille Gzowski, créée en l’honneur de sir Casimir Stanislaus Gzowski* et attribuée par la Société canadienne des ingénieurs civils. La vision audacieuse de Tye se réaliserait en partie : les quatre compagnies (de même que le chemin de fer Intercolonial) fusionnèrent finalement pour former la Canadian National Railway Company [V. David Blythe Hanna ; sir Henry Worth Thornton] ; on plaça cependant la compagnie sous propriété publique (et non privée).

En 1920, devant une commission provinciale sur les chemins de fer hydroélectriques présidée par Robert Franklin Sutherland*, Tye critiqua sévèrement la proposition de sir Adam Beck* de bâtir un réseau de chemins de fer radial interurbain de propriété publique dans le sud-ouest de l’Ontario. Pour dénoncer le projet, il livra un témoignage accablant, qui soulignait le coût de construction élevé et la duplication des lignes. Impressionnés, les commissaires émirent des recommandations qui conduisirent le gouvernement des Fermiers unis de l’Ontario, mené par Ernest Charles Drury*, à rejeter la suggestion de Beck. Les contributions de Tye aux politiques publiques outrepassèrent son intérêt pour les chemins de fer. Nommé à la Commission de la conservation [V. James White*] en janvier 1918, il s’appuya sur ses expériences dans l’ouest du Canada pour commenter des questions environnementales ; par exemple, l’année suivante, durant une conférence, il soutint que les colons blancs, et non les Autochtones, portaient la responsabilité du déclin de la faune dans la région. Il trouvait aussi le temps de se divertir, selon le numéro de février 1921 du University of Toronto Monthly : « [S]on principal plaisir dans la vie v[enait] du voyage et de la lecture, et ces derniers temps il essayait de développer une habileté plus qu’ordinaire au golf. » Tye mourut en France, au début de janvier 1932, à l’âge de 70 ans. Le recensement de 1871 indique qu’il avait grandi dans le giron de l’Église d’Angleterre. Il adopta par la suite la foi de sa mère ; on l’inhuma dans le cimetière catholique Notre-Dame-des-Neiges, à Montréal, le 11 mai.

William Francis Tye participa activement à la vie collégiale de la profession d’ingénieur. Membre de la Société canadienne des ingénieurs civils dès 1896, il siégea à son conseil de 1905 à 1907, en fut vice-président de 1908 à 1910 et président en 1912. Éternel partisan du pragmatisme, il préconisa dans son discours présidentiel l’application de l’expertise technique comme moyen de réduire les coûts de construction des voies de chemin de fer. Après tout, soutenait-il, l’ingénieur a le devoir de viser la meilleure efficacité en matière de localisation et de construction, et de maximiser ainsi les profits des actionnaires du chemin de fer. Même si Tye viendrait à incarner la vision conservatrice qui caractérisa l’industrie du chemin de fer après le grand boum du début du xxe siècle, ses réalisations techniques demeurent impressionnantes.

Forrest D. Pass

L’allocution présidentielle que William Francis Tye a prononcée à la Soc. canadienne des ingénieurs civils a paru dans Report of annual meeting (Montréal), 1913 : 68–75. Il a écrit Canada’s railway problem and its solution ([Montréal], 1917) ; en collaboration avec Noulan Cauchon, il a rédigé The railway situation in Hamilton, Ontario, 1917 (Montréal, 1917) ; et il a contribué au rapport de R. W. Leonard et al., Report on the proposed hydro-electric radial railway : from Port Credit to St. Catharines, Ont. (Toronto, 1917).

Selon certaines sources publiées, Tye serait mort le 9 janvier 1932 ; cependant, le 8 janvier 1932 est la date de décès qui figure sur son acte d’inhumation (Ancestry.com, « Registres d’état civil et registres paroissiaux (Collection Drouin), Québec, Canada, 1621 à 1968 », Notre-Dame (Montréal), 8 janv. 1932 : www.ancestry.ca/search/collections/1091/?locale=FR (consulté le 26 sept. 2023)).

AO, RG 80-5-0-259, no 009687.— BAC, Déclarations de recensement du Canada de 1911, Ontario, dist. Toronto Nord (126), sous-dist. quartier no 4 (53) : 4 ; R233-34-0, Ontario, dist. Oxford Nord (14), sous-dist. Blandford (f) : 33.— Globe, 30 nov. 1920.— Canada, Commission d’enquête sur la construction du chemin de fer transcontinental national, Rapport (Ottawa, 1914) ; Commission de la conservation, Conférence nationale sur la conservation du gibier, des animaux à fourrure et autres animaux sauvages (Ottawa, 1919).— A. A. den Otter, Civilizing the west : the Galts and the development of western Canada (Edmonton, 1982).— J. L. Morris, « Early days of the S. P. S. », Univ. of Toronto Monthly, 22 (1921–1922) : 355–356.— Jeremy Mouat, « Nationalist narratives and regional realities : the political economy of railway development in southeastern British Columbia, 1895–1905 », dans Parallel destinies : Canadian–American relations west of the Rockies, J. M. Findlay et K. S. Coates, édit. (Seattle, Wash., et Montréal, 2002), 123–151.— H. V. Nelles, The politics of development : forests, mines & hydro-electric power in Ontario, 1849–1941 (2e éd., Montréal et Kingston, Ontario, 2005).— Ontario, Commission appointed to inquire into hydro-electric railways, Reports […] (Toronto, 1921 ; paru aussi dans Ontario, Legislature, Sessional papers, 1922, no 24).— Railway and Shipping World (Toronto), juillet 1898 : 124, août 1898 : 148, novembre 1898 : 237, décembre 1898 : 267–268, juin 1899 : 174, février 1900 : 46, mai 1901 : 143, août 1902 : 273, septembre 1902 : 314–315, juin 1904 : 197.— « William Francis Tye », Univ. of Toronto Monthly, 21 (1920–1921) : 216–217.— « William Francis Tye, m.e.i.c. », Rev. de l’ingénierie (Montréal), 15 (1932) : 178.

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Forrest D. Pass, « TYE, WILLIAM FRANCIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 26 avr. 2025, https://www.biographi.ca/fr/bio/tye_william_francis_16F.html.

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Auteur de l'article:    Forrest D. Pass
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
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Date de consultation:    26 avr. 2025