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SIROIS, JOSEPH (baptisé Louis-Philippe-Marie-Joseph), notaire et professeur, né le 2 octobre 1881 à Québec, fils de Louis-Philippe Sirois, notaire, et d’Atala Blais ; le 1er juin 1910, il épousa à Québec Blanche Lavery, et ils eurent une fille et deux fils ; décédé le 17 janvier 1941 à Québec et inhumé le 21 au cimetière Notre-Dame de Belmont, à Sainte-Foy (Québec).
Joseph Sirois passe son enfance à Québec, où son père est un notaire bien en vue. Après des études classiques au séminaire de Québec, de 1892 à 1900, au terme desquelles il remporte quelques prix, Sirois s’inscrit à l’université Laval, dans la même ville ; il y obtient une licence en droit en 1903 avec grande distinction. La qualité exceptionnelle de son dossier scolaire lui vaut des prix, dont la médaille d’or donnée par le gouverneur général du Canada. Dès sa sortie de l’université, il est admis à la pratique du notariat. Comme son père avant lui, il entreprend la rédaction d’une thèse de doctorat, qu’il soumet à l’université Laval en 1907 ; intitulée De la forme des testaments, elle est publiée à Montréal la même année. Le choix du sujet s’accorde avec l’orientation professionnelle du candidat. La thèse, peu novatrice, présente l’aspect d’un traité. Ainsi qu’il est habituel à l’époque, Sirois propose une longue présentation historique sur le testament. La perspective comparatiste l’amène à s’intéresser notamment au droit français et au droit anglais. Par ailleurs, s’il donne une grande importance aux dispositions du Code civil et à la doctrine juridique, il ne néglige pas pour autant la jurisprudence. L’attrait de Sirois pour les activités intellectuelles se manifeste tôt, comme en témoignera un de ses confrères de classe, qui le décrira comme ayant l’obsession de la lecture. Ce goût pour la lecture et les livres, il le conservera pendant toute sa vie. Le climat familial favorise sans doute cette attirance vers les études puisque sa sœur aînée, Marie Sirois*, poursuit elle aussi des études universitaires et devient la première femme diplômée de l’université Laval à Québec et la première francophone à obtenir un diplôme universitaire dans sa province.
Le grade de docteur en droit permet à Sirois d’accéder, dès 1910, au professorat à la faculté de droit de l’université Laval. Au cours de sa carrière, il donnera les cours de droit administratif, de droit constitutionnel, de droit municipal, de droit paroissial et de pratique du notariat. Il est plutôt singulier pour un notaire d’enseigner le droit public. Avant lui, son père s’était vu confier sensiblement les mêmes cours. À partir de 1929, sous le décanat du juge Ferdinand Roy, Joseph Sirois assume la fonction de secrétaire de la faculté. La direction de la nouvelle École des sciences sociales, politiques et économiques, fondée en 1938, le charge d’un cours de droit constitutionnel et administratif. Il donne ce cours à partir de 1939, tout comme celui de droit constitutionnel dont le charge la faculté de droit canonique. Ses liens étroits avec l’université, de même que ses compétences professionnelles, expliquent qu’il soit appelé à siéger au conseil universitaire en 1935 et à assumer plusieurs responsabilités au sein du syndicat financier de l’université Laval dès 1921. Il occupera ces multiples fonctions jusqu’à sa mort.
Tout de suite après l’obtention de son diplôme, Sirois a pratiqué le notariat avec son père, Louis-Philippe, dans un cabinet situé à l’angle des rues Couillard et Christie, dans ce qui deviendra le Vieux-Québec. Il s’inscrit dès lors dans une dynastie, puisque son père a lui-même succédé à son oncle Alexandre-Benjamin Duplessis, dit Sirois, dont le début des activités professionnelles remonte à 1828. Par la suite, il a comme associés Laurent Lesage, à partir de 1929, et son fils Lavery, dès son accession au notariat en 1937. Tous deux font encore partie du cabinet au décès de Joseph. Ses contemporains, qui le décrivent à la fois comme un érudit, un homme probe et un praticien hors pair, soulignent ses qualités de rédacteur d’actes juridiques : « Les actes du notaire Sirois démontrent non seulement sa sûreté de doctrine mais aussi le soin qu’il avait mis à examiner chaque affaire à fond et son aptitude à régler tous les détails. C’est à bon escient qu’on lui décernait chez nous le titre de “prince des notaires” », écrira Georges-Michel Giroux. Au décès de Sirois, son greffe comprend 11 809 actes, ce qui est révélateur de son importante activité à titre de notaire. Outre de nombreux particuliers, dont des membres de l’élite (notamment sir Louis-Amable Jetté*, sir François Langelier* et Jules-Ernest Livernois*), Sirois compte parmi ses clients des congrégations religieuses (ursulines, Frères des écoles chrétiennes, Sœurs de la charité de Québec et autres), des maisons d’enseignement (séminaire de Québec, université Laval, école technique de Québec), des hôpitaux (Hôpital Général de Québec, Hôtel-Dieu de Lévis, hôpital de l’Enfant-Jésus et autres), plusieurs institutions financières (Banque de Québec, Banque d’Hochelaga, Crédit foncier franco-canadien et autres) et diverses entreprises (Holt, Renfrew and Company, Dominion Corset Company, Canada Steamship Lines et autres). Ses relations étroites avec le monde de la finance expliquent sa nomination à titre d’administrateur de certaines institutions financières. Il siège ainsi au conseil d’administration de la Banque provinciale du Canada.
Au cours de sa carrière, Sirois prend une part très active à la vie de la Chambre des notaires de la province de Québec, ainsi que l’atteste sa présence dans les différentes instances de la corporation professionnelle. En plus de sa nomination comme membre de la commission de législation dès 1913, il est appelé, sans doute à cause de ses années de professorat, à se joindre à la commission des examens en 1921 ; les mandats sont de trois ans. La renommée de Sirois le conduit à assumer la présidence de la chambre de 1927 à 1930. S’exprimant sur la nécessité d’exiger que les candidats au notariat aient au préalable fait des études classiques, il défend une vision élitiste de la profession notariale. De telles études permettent, à son avis, d’accroître le prestige des professions libérales. La participation soutenue de Sirois à la formation des futurs notaires et son apport constant à la chambre expliquent qu’il soit reconnu, à l’instar de son père, pour avoir contribué de manière importante à améliorer la qualité de la pratique notariale au Québec.
Au décès du notaire Joseph-Edmond Roy*, survenu en 1913, Sirois lui succède comme directeur de la Revue du notariat. En plus de la coordination de la publication et du travail de nature éditoriale, Sirois signe plusieurs articles dans ce périodique mensuel de Lévis. Son expertise l’amène à répondre à ses confrères qui lui soumettent fréquemment des problèmes auxquels ils se heurtent dans leur pratique quotidienne. Sirois développe ainsi la rubrique « Questions et Réponses » qui jouit d’une bonne popularité et qui contribue certainement à sa notoriété auprès de ses confrères, dont plusieurs sont ses anciens étudiants. Malgré ses nombreuses responsabilités, il assume la direction de la revue jusqu’à son décès. Quoiqu’il enseigne le droit public, Sirois ne se manifeste pas comme auteur de droit constitutionnel ou de droit administratif. Sa production reste, en effet, confinée au droit civil et, même plus, en lien étroit avec la pratique notariale.
Avec l’arrivée du xxe siècle, à l’instar de plusieurs juristes, Sirois est gagné aux idées du sociologue et économiste français Frédéric Le Play. Aussi, en 1905, il compte au nombre des fondateurs de la Société d’économie sociale et politique de Québec. Il se voit alors confier la fonction de secrétaire de l’organisme. Son expérience dans un groupement de cette nature le pousse peut-être à inciter les jeunes notaires à ne pas se limiter à une pratique « égoïste et solitaire » de leur profession, comme il l’écrira dans un ouvrage publié à Montréal en 1933, les Carrières, pour guider le choix des jeunes gens après leurs études classiques ; il leur conseille plutôt de s’intéresser aux mouvements sociaux et de s’occuper de la vie politique. Son intérêt personnel pour la chose publique ne le conduit toutefois pas à la politique active, quoiqu’il soit reconnu comme libéral.
Au cours des années 1920, des pressions sont exercées, notamment par la Fédération nationale Saint-Jean-Baptiste, présidée par Marie Gérin-Lajoie [Lacoste], afin que des modifications soient apportées aux droits civils des femmes de la province de Québec. Après des hésitations, le gouvernement de Louis-Alexandre Taschereau* constitue en 1929 une commission à qui il donne la tâche d’étudier la question. La présidence de la commission est confiée au juge Charles-Édouard Dorion, tandis que la fonction de rapporteur échoit au juge Ferdinand Roy. Le gouvernement nomme également deux commissaires : Sirois et Victor Morin, notaire de Montréal. La présence de ces deux derniers est justifiée par la nécessité, pour la commission, de se pencher sur une matière familière aux notaires, soit les régimes matrimoniaux, et, plus précisément, celui de la communauté de biens. La commission produit un rapport qui est suivi de timides modifications au Code civil du Bas-Canada. En somme, les commissaires rejettent toute modification qui, d’après eux, pourrait porter atteinte à l’ordre familial traditionnel. Ils acceptent toutefois de reconnaître à l’épouse le pouvoir d’administrer le produit de son travail personnel en intégrant au Code civil la catégorie des biens réservés de la femme mariée. Le gouvernement provincial fait encore appel à Sirois, en 1935, afin qu’il participe, à titre de membre, au Bureau des commissaires pour le rachat des rentes seigneuriales.
En août 1937, le gouvernement canadien met sur pied l’une des commissions les plus importantes de l’histoire canadienne : la commission royale des relations entre le dominion et les provinces. Depuis la Confédération, le Canada a connu des transformations déterminantes. Sa population, majoritairement rurale en 1867, est désormais urbaine. Son économie, longtemps dominée par l’agriculture, s’est industrialisée. Cette mutation a entraîné un accroissement des besoins sociaux et une transformation du rôle des gouvernements. La crise économique qui a frappé le monde occidental à partir de 1929 a accentué la pression en faveur d’une adaptation du pays à de nouvelles réalités sociales et économiques. La commission a entre autres pour mandat « d’examiner de nouveau les bases sur lesquelles repose le pacte confédératif du point de vue financier et économique, ainsi que l’attribution des pouvoirs législatifs à la lumière des développements économiques et sociaux des derniers soixante-dix ans ». Par ses propositions, elle devrait assurer une stabilité financière aux gouvernements provinciaux et permettre d’offrir à l’ensemble des Canadiens des services et des programmes gouvernementaux comparables. Le gouvernement part du constat qu’il existe un profond déséquilibre entre les responsabilités qui, conformément à la constitution, reviennent aux provinces et les revenus qui leur sont attribués. Newton Wesley Rowell, juge en chef de l’Ontario, assume la présidence de la commission.
Le gouvernement souhaite que la commission soit représentative de l’ensemble du pays. Le président est donc assisté de commissaires qui proviennent de chacune des régions : Robert Alexander MacKay*, professeur de sciences politiques à la Dalhousie University, pour les Maritimes ; Thibaudeau Rinfret* pour la province de Québec ; John Wesley Dafoe, journaliste réputé de Winnipeg, pour les Prairies ; Henry Forbes Angus*, professeur d’économie politique à la University of British Columbia, pour la Colombie-Britannique. Rinfret, juge de la Cour suprême du Canada, demeure peu de temps en fonction puisqu’il remet sa démission pour des raisons de santé. Le gouvernement canadien désigne alors Sirois pour le remplacer. Ce choix n’est pas le fruit du hasard. Constitutionnaliste et professionnel respecté ayant évolué à l’écart de la vie politique active, Sirois, contrairement à plusieurs de ses contemporains, n’est pas d’emblée perçu comme asservi à des orientations dictées par le monde politique. Il demeure que ce choix est d’abord justifié par la volonté de veiller à faire accepter les conclusions de la commission par la population de la province de Québec. Dans une lettre adressée au commissaire Dafoe le 23 novembre 1937, Rowell, qui se fonde sur le témoignage de deux personnes qui connaissent Sirois, laisse sous-entendre un tel dessein : « un rapport signé par le Dr Sirois aurait concrètement plus de poids auprès de la population de la province de Québec qu’un [rapport] signé même par [quelqu’un] d’aussi distingué que M. le juge Rinfret ». L’initiative de cette nomination revient sans doute à l’influent ministre fédéral de la Justice Ernest Lapointe. Même si, au moment de sa désignation, Sirois est inconnu des autres membres de la commission, il fait bonne impression. Rowell, qui a de graves problèmes de santé, démissionne en novembre 1938 et Sirois le remplace à la présidence. La commission sera désormais connue sous le nom de ses deux présidents successifs, soit Rowell-Sirois.
Le travail de la commission constitue un vaste chantier. Un programme de recherche à trois volets est élaboré. Il a pour but d’éclairer la commission en confiant à des experts la tâche de rédiger une série d’études qui portent sur le régime économique canadien, les questions constitutionnelles et les comptes publics du gouvernement canadien et des provinces. Certaines études sont préparées pour les seuls commissaires ; d’autres connaissent une large diffusion. Par ailleurs, de novembre 1937 à décembre 1938, la commission parcourt le pays pour rencontrer les hommes politiques provinciaux et tenir des audiences publiques où sont entendus des fonctionnaires et des représentants de divers organismes. Quatre-vingt-cinq jours d’audience ont lieu dans les capitales provinciales et à Ottawa, au cours desquels 397 témoins se présentent ; la transcription de leur témoignage couvre 10 702 pages. De plus, 427 documents sont déposés auprès de la commission. L’enthousiasme à l’égard de l’initiative fédérale ne fait pas l’unanimité. Craignant l’invasion du gouvernement fédéral dans les champs qui relèvent de la compétence des provinces, la province de Québec, l’Ontario et l’Alberta refusent de participer activement aux travaux. À plusieurs reprises, Sirois rend compte de l’évolution des travaux de la commission aux autorités politiques fédérales. L’ampleur de la tâche engendre des retards à produire le rapport de la commission. Sirois s’en justifie dans une lettre adressée le 12 juillet 1939 au premier ministre William Lyon Mackenzie King : « Dans un projet de cette envergure et de cette complexité surviennent de nombreux facteurs impossibles à prévoir et échappant à tout contrôle, de sorte qu’il devint impossible de s’en tenir à la première date, et qu’il paraît même difficile à l’heure qu’il est de fixer une limite de temps rigide et absolue. »
Malgré les embûches, la commission soumet finalement son imposant rapport au gouvernement en mai 1940. Le rapport est publié en trois volumes. Le premier expose l’évolution et l’état du régime fédéral canadien sur les plans financier et économique. Le deuxième, qui constitue la partie substantielle du rapport, présente les recommandations adressées par la commission au gouvernement. Le troisième rassemble diverses données statistiques utiles à la compréhension du rapport. Parmi les principales recommandations figurent la mise sur pied d’un système d’assurance-chômage, la prise en charge des dettes provinciales par le gouvernement canadien et le versement de subventions annuelles aux provinces qui ont besoin d’une telle aide. La commission prend, en somme, le contre-pied de décisions des tribunaux qui ont désavoué des lois à portée sociale – notamment celle instituant un programme d’assurance-chômage – votées sous le gouvernement du premier ministre Richard Bedford Bennett. La Cour suprême du Canada et le comité judiciaire du Conseil privé à Londres ont en effet déclaré inconstitutionnelle une loi, votée par le Parlement canadien en 1935, qui constituait une commission de placement et d’assurances sociales et établissait un service national de placement, une assurance contre le chômage, des secours aux chômeurs et d’autres formes d’assurance et de sécurité sociales. La décision des tribunaux est fondée sur le motif que l’assurance-chômage relève de la compétence des provinces. L’accroissement des responsabilités financières qui découlent de ce réaménagement amène une proposition de centralisation du régime fiscal canadien. En effet, la commission royale propose que le gouvernement fédéral se voie octroyer l’impôt sur les particuliers et sur les « corporations », de même que sur les droits successoraux.
L’apport respectif de chacun des commissaires à la rédaction du rapport demeure difficile à établir. Loin d’avoir évolué en retrait, les trois commissaires exercent une influence déterminante sur les travaux, particulièrement Dafoe. Par ailleurs, l’économiste Douglas Alexander Skelton, secrétaire de la commission, qui coordonne de plus les recherches, contribue grandement à façonner le rapport. Le travail de Sirois à la présidence est sans doute accaparant, puisque son greffe révèle une chute prononcée de son activité de notaire à partir de 1938. Il est indéniable que Sirois se perçoit comme le défenseur des valeurs et des droits de sa province. Son intervention se devine ici et là dans le rapport. Une mise en garde est ainsi formulée à l’endroit du rédacteur d’une éventuelle loi fédérale sur l’assurance-chômage, afin qu’il évite les empiètements « sur les droits définis au Code civil de Québec ». Il en va de même de la recommandation suivant laquelle le gouvernement canadien devrait prendre en charge une partie des intérêts de la dette des municipalités québécoises qui assument des responsabilités qui, ailleurs au pays, reviennent aux provinces. Par ailleurs, Sirois insiste, malgré le retard qui marque les travaux, pour une parution simultanée du rapport en anglais et en français. À son avis, une telle démarche faciliterait la réception du rapport : « agir autrement serait exposer le rapport, dans la province de Québec, à des critiques qui en rendraient l’utilité plutôt illusoire », écrit-il le 28 juin 1939 à Adjutor Savard, secrétaire français de la commission. La sensibilité de Sirois à l’endroit des préoccupations québécoises ne l’empêche toutefois pas de demeurer solidaire de ses collègues.
L’accueil fait au rapport est loin d’être unanime. Si certains le reçoivent avec bienveillance, d’autres se montrent dubitatifs, sinon opposés, à une centralisation des pouvoirs entre les mains du gouvernement fédéral. Entre le début des travaux de la commission et le dépôt du rapport, la conjoncture politique a considérablement changé au pays. À la faveur de la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement fédéral s’est vu octroyer des pouvoirs accrus pour la durée des hostilités. La centralisation des pouvoirs entre les mains du gouvernement fédéral est devenue une réalité. Dans ce contexte, à la suite du dépôt du rapport, le gouvernement canadien parvient, en 1940, à faire accepter une modification à la constitution canadienne afin d’attribuer au Parlement fédéral la responsabilité de l’assurance-chômage. En septembre de la même année, le gouvernement fédéral confie à Sirois la présidence de la nouvelle Commission d’assurance-chômage. La nomination est bien reçue, et ce, même dans les cercles généralement hostiles à de telles initiatives du gouvernement canadien. Son décès prématuré l’empêchera d’assumer ces nouvelles responsabilités.
Une conférence constitutionnelle tenue à Ottawa en janvier 1941 ne permet pas d’établir un consensus autour du rapport. Le clan des opposants rassemble l’Ontario, la Colombie-Britannique et l’Alberta. Les autres provinces sont plutôt favorables, et ce, d’autant plus que le réaménagement les avantage. La province de Québec, avec à sa tête le premier ministre Adélard Godbout*, se montre conciliante. Les nationalistes québécois reprocheront par la suite à Godbout cette attitude à l’égard des conclusions du rapport. Malgré les critiques formulées à l’égard du rapport, Sirois sort indemne de l’exercice. Dans le Devoir de Montréal du 20 janvier 1941, soit quelques jours après son décès, il est même présenté comme une victime du processus : « Son nom était une garantie d’honnêteté. Des politiciens ont voulu se servir de lui et lui faire porter la responsabilité de leurs manœuvres. »
Les travaux de la commission serviront de fondement au développement, par le gouvernement fédéral, de programmes sociaux d’inspiration keynésienne – dont un régime universel de pensions de vieillesse en 1951 – et à l’instauration d’un programme de péréquation, en 1957, qui permettra au gouvernement fédéral d’allouer des fonds à certaines provinces pour atténuer les inégalités régionales. Dans la foulée de la commission fédérale, le gouvernement de la province de Québec, alors dirigé par Maurice Le Noblet Duplessis*, décidera en 1953, en faisant voter une loi à cet effet, d’instituer une commission royale d’enquête, présidée par le juge Thomas Tremblay, qui se penchera à son tour sur les problèmes constitutionnels et particulièrement sur les aspects économiques du fédéralisme canadien. Cette commission, qui soumet un volumineux rapport en 1956, prend le contre-pied de l’orientation centralisatrice défendue par la commission fédérale et développe une perspective nationaliste du fédéralisme canadien.
À sa sortie de l’université, Joseph Sirois était promis à une carrière florissante dans le cabinet de son père. Non seulement a-t-il, comme lui, fait profession de notaire, mais il est aussi devenu professeur de droit. Il passait, dans la province, pour l’incarnation du parfait notaire. Son intégrité et sa compétence lui conféraient une respectabilité qui s’étendait au delà du cercle étroit de la communauté juridique. Il a gagné en notoriété lorsqu’il a accepté de participer à la commission royale des relations entre le dominion et les provinces. Sa personnalité et sa probité expliquent l’attachement qu’on lui manifestait. Les éloges exprimés à son décès sont à la hauteur de l’estime dont il a bénéficié tout au long de sa carrière.
Joseph Sirois a écrit entre autres : « Société d’économie sociale et politique de Québec », la Libre Parole (Québec), 13 oct. 1906 : 3 ; « Monsieur Joseph Edmond Roy », la Rev. du notariat (Lévis, Québec), 15 (1912–1913) : 289-290 ; « Études classiques et admission à l’étude du notariat », la Rev. du notariat (Québec), 33 (1930–1931) : 145-147.
Bibliothèque et Arch. Canada (Ottawa), R1102-0-4 ; R4278-0-4 ; R8207-0-X ; R10383-0-6.— Bibliothèque et Arch. nationales du Québec, Centre d’arch. de Québec, CE301-S1, 4 oct. 1881.— Instit. généal. Drouin, « Fonds Drouin numérisé », Notre-Dame de Québec, 1er juin 1910 : www.imagesdrouinpepin.com (consulté le 9 janv. 2008).— Palais de justice, Québec, Cour supérieure, Greffes, Joseph Sirois.— Le Devoir (Montréal), 16 mai, 2 oct. 1940 ; 16, 20, 21 janv. 1941.— La Patrie (Montréal), 20 janv. 1941.— Le Soleil (Québec), 16 mai 1940 ; 17, 18 janv. 1941.- L.-R. Betcherman, Ernest Lapointe : Mackenzie King’s great Quebec lieutenant (Toronto, 2002).— Biographies canadiennes-françaises, Raphaël Ouimet, édit. (Montréal), 1931–1932 : 368.— Bureau international du travail, le Rapport Rowell-Sirois : une affirmation nouvelle de la foi démocratique du Canada dans le progrès social (Montréal, 1941).— Canada, Commission royale des relations entre le dominion et les provinces, Rapport (3 vol., Ottawa, 1940).— Barry Ferguson et Robert Wardhaugh, « “Impossible conditions of inequality” : John W. Dafoe, the Rowell-Sirois royal commission, and the interpretation of Canadian federalism », Canadian Hist. Rev. (Toronto), 84 (2003) : 551-583.- G.-M. Giroux, « le Notaire Joseph Sirois », la Rev. du Barreau de la prov. de Québec (Montréal), 1 (1941) : 51-54.— P.-A. Linteau et al., Histoire du Québec contemporain (2 vol., Montréal, 1979–1986), 2.— Sylvio Normand, le Droit comme discipline universitaire : une histoire de la faculté de droit de l’université Laval (Québec, 2005).— Québec, Commission des droits civils de la femme, Rapport (3 vol., Québec, 1930–1931) ; Commission royale d’enquête sur les problèmes constitutionnels, Rapport [...] (4 tomes en 5 vol., Québec, 1956).— La Rev. du notariat (Lévis), 43 (1940–1941), numéro consacré à Joseph Sirois.— J.-E. Roy, Histoire du notariat au Canada depuis la fondation de la colonie jusqu’à nos jours (4 vol., Lévis, 1899–1902).— Univ. Laval, Annuaire, 1903–1940.— W. A. M., « Douglas Alexander Skelton (1906–1950) », Canadian Journal of Economics and Political Science (Toronto), 17 (1951) : 89-91.
SYLVIO NORMAND, « SIROIS, JOSEPH (baptisé Louis-Philippe-Marie-Joseph) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 17, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/sirois_joseph_17F.html.
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Auteur de l'article: | SYLVIO NORMAND |
Titre de l'article: | SIROIS, JOSEPH (baptisé Louis-Philippe-Marie-Joseph) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 17 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2009 |
Année de la révision: | 2013 |
Date de consultation: | 21 déc. 2024 |