ROUSSEAU DE VILLEJOUIN (Villejoin, Villejoint), GABRIEL, officier dans les troupes de la Marine, né le 24 avril 1709 à Plaisance (Placentia, Terre-Neuve), fils de Gabriel Rousseau de Villejouin, capitaine de vaisseau, et de Marie-Josephte Bertrand, décédé le 6 novembre 1781 à Saint-Jean-d’Angély (dép. de la Charente-Maritime, France).

Les renseignements sont rares relativement aux deux premières décennies de la carrière de Gabriel Rousseau de Villejouin. Il entra dans l’armée comme enseigne en second à l’île Royale (île du Cap-Breton) le 9 mai 1723, fut promu enseigne en mars 1730 et fait lieutenant deux mois plus tard. Il paraît assuré qu’il servit à Louisbourg jusqu’en 1737, alors qu’il reçut le commandement de Port-Toulouse (St Peters, Nouvelle-Écosse). En 1739, il retourna à Louisbourg pour succéder à son beau-frère, Robert Tarride* Duhaget, comme aide-major des troupes, avec commission de capitaine le 1er avril. Deux ans après, Villejouin reçut officiellement le commandement d’une compagnie. Il était à la tête de celle-ci lors de la défense du bastion du Roi, en 1745, quand les troupes de la Nouvelle-Angleterre sous la conduite de William Pepperrell* assiégèrent avec succès la forteresse.

Si elles restent maigres, les données sur ces 20 premières années permettent néanmoins de constater que Villejouin possédait une certaine compétence. Il n’avait pas encore 30 ans quand il fut nommé aide-major et, après avoir quitté cette fonction, il continua, semble-t-il, à consacrer une partie de son temps à l’administration militaire. Selon son propre témoignage, il se gagna l’estime de ses collègues officiers et des habitants de la ville en réussissant à pacifier les soldats qui se mutinèrent à Louisbourg en 1744 ; Louis Du Pont Duchambon, le commandant de l’île Royale, loua sa conduite valeureuse pendant le siège.

En 1747, Villejouin était du convoi commandé par La Jonquière [Taffanel*] que les Britanniques attaquèrent et défirent au large du cap Ortegal, en Espagne. Peut-être fut-il amené prisonnier en Angleterre ; de toute façon, il était à Rochefort le 28 février 1748, alors qu’il reçut la croix de Saint-Louis.

Le traité d’Aix-la-Chapelle, en 1748, remit l’île Royale à la France, mais l’attitude tant de la France que de l’Angleterre resta belliqueuse. La politique française requérait une forteresse nouvelle et plus forte à Louisbourg, et, par conséquent, des troupes plus nombreuses pour sa construction et sa défense ; Villejouin eut la responsabilité du recrutement de ces troupes à Rochefort. Il revint ensuite à l’île Royale. Quand Duhaget, le commandant de Port-Toulouse, fut blessé dans une mutinerie en juin 1750, Villejouin fut désigné pour le remplacer. Après la mort de Michel de Gannes* de Falaise en 1752, Duhaget devint major de Louisbourg, et, du 10 juillet 1753 au 1 el avril 1754, Villejouin fut major des troupes, remplaçant Michel Le Courtois de Surlaville. Jusqu’en 1751 ces deux fonctions n’en faisaient qu’une ; en 1754 le ministre de la Marine les réunit à nouveau et en chargea Duhaget. Sur ce, Villejouin fut promu major et commandant de l’île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard), le 1er avril 1754, en remplacement de Claude-Élisabeth Denys* de Bonnaventure.

Il y avait un an seulement que Villejouin commandait à l’île Saint-Jean quand, à la fin de l’été de 1755, la déportation des Acadiens de la Nouvelle-Écosse [V. Charles Lawrence*] ena une affluence de réfugiés quasi désastreuse. Destinée antérieurement, dans les plans français, à approvisionner l’île Royale en produits agricoles, l’île ne se suffisait même pas encore à elle-même. Villejouin fit face activement et énergiquement aux problèmes soulevés par l’arrivée des réfugiés et par la guerre. Il envoya à Québec les personnes malades ou inaptes, appuya du mieux qu’il put les activités de guérilla de Charles Deschamps de Boishébert et, au moment où il était à établir 1 500 nouveaux colons, donna une nouvelle vigueur à l’agriculture de l’île. Il écrivit de Port-la-Joie (Fort Amherst) en septembre 1758 : « Je me voyais cet automne en scituation avec peu de secours de faire subsister toutte l’Isle. » La chute de Louisbourg, deux mois plus tôt, avait cependant scellé le sort de l’île Saint-Jean. Andrew Rollo* prit possession de l’île en août et les colons, à l’exception de 200 d’entre eux, isolés sur la côte ouest, furent plus tard déportés.

Rapatrié en France en 1759, Villejouin devint major des troupes à Rochefort. Le 23 mai 1760, il succéda à Denys de Bonnaventure comme inspecteur de toutes les troupes coloniales. Mais la perte par la France de toutes ses possessions d’Amérique du Nord rendit ce poste inutile. La nécessité de consolider ce qui restait de l’Empire français explique la nomination de Villejouin comme lieutenant-colonel et gouverneur de Désirade (dans les îles du Vent) le 1er janvier 1763. Dans cette petite île accidentée étaient envoyés plusieurs « fils de famille ». Afin d’améliorer la société de l’île, Villejouin obtint des commissions en faveur de trois de ses fils et de plusieurs membres de l’ancienne garnison de l’île Royale. Quand Désirade passa sous le gouvernement de la Guadeloupe en 1768, il retourna en France et fut fait brigadier des armées du roi le 12 novembre. Cette nomination marqua la fin de sa carrière militaire, car il semble avoir eu peu de tâches à accomplir, s’il en eut. Il se retira à Saint-Jean-d’Angély où il mourut le 6 novembre 1781.

Le 11 janvier 1733, Villejouin avait épousé à Louisbourg Anne, fille de Louis de Gannes* de Falaise et de Marguerite Leneuf de La Vallière et de Beaubassin. Le mariage fut conclu par nécessité : leur premier enfant naquit en février. Quatre de leurs six enfants vécurent jusqu’à l’âge adulte, dont Michel, qui participa à des combats d’arrière-garde en Acadie pendant la guerre de Sept Ans et qui tenta de secourir Louisbourg pendant le siège de 1758. Anne étant morte en 1751, Villejouin épousa le 30 décembre 1753, à Louisbourg, Barbe, fille de Michel Leneuf* de La Vallière et de Beaubassin et de Renée Bertrand. Deux seulement de leurs quatre enfants atteignirent l’âge mûr.

Andrew Rodger

AMA, SHA, Y4d.— AN, Col., A, 1, p.5 ; B, 72, p.420 ; 72/2, p.440 ; 88/2, pp.280, 353 ; 99, p.222 ; 107, p.274 ; C11B, 10, ff.170–171v. ; 11, ff.61–68, 170v. ; 14, ff.188v., 190v. ; 15, f.40v. ; 20, f.95 ; 21, ff.63–64, 271 ; 28, ff.63–63v. ; 29, ff.66–71v. ; 32, f.242v. ; 33, ff.22–22v. ; 34, f.36v. ; 35, p.158 ; 36, pp.51, 181 ; 37, p.165 ; 38, ff.245v., 265v., p.269 ; C11C, 16, pièce 26 (2e sér.) ; D2C, 47 ; 48, ff.105, 108, 143, 168, 173, 184, 218, 240v., 369, 378, 404 ; 49, f.216 ; 60, ff.3, 11v., 12 ; 222 ; Marine, C7, 287 ; Section Outre-mer, G1, 406/2, p.301 ; 406/3, pp.366, 409, 489 ; 407, pp.133, 290 ; 408 ; 410 ; 411 ; G2, 201, dossier 243, pièces 1, 4 ; 202, dossier 295, pièce 1 ; 207, dossier 474, f.22v. (la pagination renvoie aux copies aux APC).— APC, MG 18, H13, no 100.— Les derniers jours de l’Acadie (Du Boscq de Beaumont).— Æ. Fauteux, Les chevaliers de Saint-Louis. Harvey, French régime in P.E.I.

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Andrew Rodger, « ROUSSEAU DE VILLEJOUIN (Villejoin, Villejoint), GABRIEL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/rousseau_de_villejouin_gabriel_4F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
Année de la révision:    1980
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