MARCHAND, JEAN-BAPTISTE, prêtre catholique et sulpicien, né le 25 février 1760 à Verchères (Québec), fils de Louis Marchand, négociant, et de Marie-Marguerite Boucher de Niverville ; décédé le 14 avril 1825 à Sandwich (Windsor, Ontario).
Jean-Baptiste Marchand appartenait à une famille honorable ; il comptait parmi ses oncles paternels Joseph, seigneur de Saint-Charles-sur-Richelieu, Nicolas, officier d’artillerie tué lors du siège de Québec en 1759, et deux prêtres séculiers dont l’un, Étienne*, fut vicaire général. Jean-Baptiste étudia au petit séminaire de Québec de 1774 à 1784 et fit sa théologie au séminaire de 1784 à 1786, tout en remplissant le rôle de surveillant au petit séminaire. Il fut ordonné prêtre le 11 mars 1786 par Mgr Louis-Philippe Mariauchau* d’Esgly, évêque de Québec.
Attiré par le séminaire de Saint-Sulpice, Marchand commença son ministère à l’église Notre-Dame de Montréal dès le mois d’août 1786 et fut agrégé le 21 octobre 1788. En septembre 1789, Jean-Baptiste Curatteau* quittait le collège Saint-Raphaël, dont il était directeur, laissant à son successeur l’usufruit de tous ses biens investis au Canada. À la suggestion de Gabriel-Jean Brassier*, vicaire général de l’évêque de Québec, les marguilliers de la fabrique de Notre-Dame, qui étaient propriétaires du collège, choisirent Marchand pour succéder à Curatteau. Il se mit à l’œuvre avec enthousiasme malgré les difficultés et faiblesses de l’institution : les élèves étaient peu nombreux (de 120 à 130), la compétence variait d’un professeur à l’autre et les ressources financières étaient limitées. L’établissement regroupait des pensionnaires (le cinquième de l’ensemble de la clientèle) et des externes, offrait les cours primaire et secondaire, et dispensait l’enseignement en français et en anglais pour les élèves du primaire. La majorité des professeurs, appelés régents, étaient des clercs prêtés par l’évêque de Québec, dont la formation morale et théologique relevait de Marchand. Celui-ci devait assurer la permanence et voyait souvent l’évêque lui retirer des régents. Malgré cela, il inaugura en 1790 une classe de philosophie, épargnant ainsi aux élèves d’avoir à se rendre à Québec. Il jouissait de la confiance de l’évêque et des autorités du séminaire. En 1794, la venue au Canada de sulpiciens français chassés par la Révolution amena trois nouveaux professeurs au collège. Ils jugèrent sévèrement la qualité des élèves et les exigences de l’établissement. Après des tensions qui s’apaisèrent en octobre 1795, Marchand écrivit à Mgr Jean-François Hubert*, évêque de Québec : « nous avons cédé de part et autre sur la manière d’agir ». Cette unité ne dura pas, et Marchand démissionna en août 1796. De 1792 à 1794, il avait également occupé la charge d’aumônier des religieuses de la Congrégation de Notre-Dame.
Après la mort de François-Xavier Dufaux, missionnaire sulpicien à L’Assomption-du-Détroit, connu plus tard sous le nom de Sandwich, Mgr Hubert offrit, le 17 octobre 1796, la cure de Notre-Dame-de-l’Assomption au séminaire de Saint-Sulpice ; le supérieur, Gabriel-Jean Brassier, désigna Marchand pour l’occuper. Il arriva dans sa paroisse le soir de Noël 1796. Le territoire qu’il avait à desservir longeait la rivière de Detroit, du lac Saint-Clair jusqu’au lac Érié, et s’enfonçait à environ six milles à l’intérieur des terres. Le presbytère avait été construit par Hubert, qui avait été curé de 1781 à 1785, et la modeste église avait été achevée en 1787. Le nombre de fidèles s’accrut rapidement et, en 1816, la paroisse en comptait près de 3 000. Dès le début, Marchand gagna la confiance de ses ouailles et se distingua par son zèle. Pourtant, bien des dissensions divisaient les paroissiens. En 1795, François Baby*, lieutenant adjoint du comté d’Essex, s’était vu octroyer un banc spécial dans l’église. Après de violentes disputes avec ses coparoissiens qui tentaient de l’empêcher d’occuper son banc, Baby décida finalement, en 1797, de renoncer à ses prétentions pour ramener le calme dans la paroisse. Une autre affaire, mettant en cause les titres de propriété de la fabrique, allait entraîner des conséquences beaucoup plus graves. Un paroissien, François Pratt (Pratte), réclamait la presque totalité du terrain de la fabrique, qui servait de cimetière et où plusieurs bâtiments avaient été construits. En 1801, il entoura ce terrain d’une clôture et intenta une poursuite en dommages-intérêts, qu’il abandonna par la suite. La question des titres de propriété ne fut tranchée qu’en 1806, au moment où les droits de Pratt furent confirmés. Il restait à Marchand son église et son presbytère.
Toutes les six ou huit semaines, Marchand était amené à visiter les dessertes qu’il avait établies peu après son arrivée dans la paroisse Notre-Dame-de-l’Assomption, soit celles de Saint-Jean-Baptiste, à Amherstburg, et de Saint-Pierre-sur-la-Tranche (Prairie Siding), sur la rivière Thames. Il ne cessa d’encourager la fondation d’écoles et il fit venir des maîtres à cet effet, mais la faible densité de la population ne favorisait guère l’instruction. Il avait des relations étroites avec Michel Levadoux et Gabriel Richard, deux sulpiciens de Detroit, et il remplaça même ce dernier lorsqu’il s’absenta de sa paroisse en 1808–1809. Il fut aussi appelé à l’héberger. En effet, à la suite de la prise de Detroit par les forces armées britanniques durant la guerre de 1812, le général de brigade Henry Procter ordonna le 21 mai 1813 à Richard, qui avait apparemment professé de forts sentiments antibritanniques, d’aller demeurer chez Marchand jusqu’à son expulsion. Il devait subir le même sort qu’une trentaine d’habitants de Detroit qui avaient déjà été envoyés à Québec, mais, le 6 juin, il promit de ne plus faire de commentaires et put ainsi retourner à Detroit.
Marchand reçut deux fois la visite de l’évêque de Québec. Mgr Pierre Denaut* séjourna un mois à Sandwich, en juin et juillet 1801, et y confirma 500 personnes. Il était accompagné de l’abbé Félix Gatien*, qui devait demeurer cinq ans à Sandwich. En juin 1816, Mgr Joseph-Octave Plessis fit une tournée pastorale, au cours de laquelle il put constater la lourdeur de la tâche du curé ; en septembre, il lui adjoignit un vicaire, Joseph Crevier, dit Bellerive, qui allait lui succéder à sa mort.
Dès juillet 1797, Jean-Baptiste Marchand avait écrit à son évêque : « Je me trouve ici fort heureux tant pour le temporel que pour le spirituel. » Puis, en 1799, il remerciait Jean-Henry-Auguste Roux, supérieur du séminaire de Saint-Sulpice, de n’avoir pas proposé sa candidature à la cure de L’Assomption, près de Montréal. Après plus de 26 ans de ministère à Sandwich, sa santé commença toutefois à se détériorer au printemps de 1823. Il mourut le 14 avril 1825. Selon Mgr Hubert, Marchand était « un homme de caractère, doux, affable, sachant plier sans lâcheté, sans faiblesse ».
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Bruno Harel, « MARCHAND, JEAN-BAPTISTE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/marchand_jean_baptiste_6F.html.
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Auteur de l'article: | Bruno Harel |
Titre de l'article: | MARCHAND, JEAN-BAPTISTE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
Année de la révision: | 1987 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |