HERTEL DE SAINT-FRANÇOIS, JOSEPH-HIPPOLYTE (appelé aussi le chevalier Hertel), officier et interprète, né à Saint-François-du-Lac (Québec) le 23 juillet 1738 et baptisé à Sorel le surlendemain, fils de Joseph Hertel de Saint-François et de Suzanne Blondeau, décédé à Montréal le 10 août 1781.

À l’instar de ses cinq frères, Joseph-Hippolyte Hertel de Saint-François embrassa la carrière des armes. Il servit d’abord comme cadet dans la région de l’Ohio et prit part en 1755 à la bataille de la Monongahéla [V. Daniel-Hyacinthe-Marie Liénard* de Beaujeu]. L’année suivante, il était fait enseigne en second. Grâce à sa tante, Catherine Jarret de Verchères, épouse de Pierre-Joseph Hertel de Beaubassin, il bénéficia de la faveur de Montcalm*. Ce dernier écrivait à Bourlamaque* le 20 juin 1757 : « Je vous recommande tout ce qui est Hertel : ce sont les neveux d’une dame que vous aimez, et qui vous est fort attachée. » Le 30 juin suivant, un détachement d’Indiens fut envoyé en expédition par Bourlamaque sous la conduite de trois officiers, dont deux frères Hertel. Il n’est pas impossible que Joseph-Hippolyte ait été l’un d’eux. En 1759, il était promu enseigne en pied. Au cours de cette année, Hertel, qui servait au fort Carillon (Ticonderoga, New York) depuis deux ans, fut envoyé en expédition, à la tête de partis d’Indiens.

Après la Conquête, Hertel de Saint-François passa en France. Il arriva au Havre le 1er janvier 1762 sur le Molinieux. Son séjour en France fut cependant de courte durée puisqu’en 1763 il revenait au Canada et s’établissait à Montréal. À l’exemple de quelques autres Canadiens de cette époque, Hertel se joignit à la nouvelle communauté anglo-protestante et s’affilia à une loge maçonnique de Montréal. De plus, dès 1764, son nom figure sur une liste des chefs de famille protestants de Montréal signée par le gouverneur Murray. Trois ans plus tard, le 3 août 1767, il épousait, à la Christ Church de Montréal, Marie-Anne, fille de Jean-Baptiste Le Comte* Dupré et de Marie-Anne Hervieux. Cette dernière s’opposant à ce mariage devant un ministre protestant, une cérémonie eut également lieu le 24 août suivant à l’église Notre-Dame de Montréal.

L’expérience qu’Hertel avait acquise avec les Indiens au cours de la guerre de Sept Ans fut mise à profit lors de la révolte de Pondiac*. En 1764, il fut placé à la tête d’un contingent d’Iroquois de Sault-Saint-Louis (Caughnawaga) qui fut envoyé dans la région de Détroit pour aider Bradstreet à réprimer la révolte. Par la suite, Hertel fut chargé par le colonel Henry Bouquet de quelques missions qui permirent d’accélérer les négociations de paix avec les Loups (Delawares), les Chaouanons et les Tsonnontouans. Le colonel le recommanda au surintendant des Affaires des Indiens du Nord, sir William Johnson. Hertel revint à Montréal au printemps de 1765. Comme il se trouvait dans le besoin, sa mère, qui était devenue veuve, intervint à deux reprises en sa faveur auprès de Johnson.

Le 17 juin 1769, le gouverneur Guy Carleton* le nomma interprète auprès des Abénaquis qui étaient allés se réfugier chez les Iroquois de Saint-Régis, après la destruction de leur village de Saint-François-de-Sales (Odanak) le 4 octobre 1759 [V. Robert Rogers]. Les Iroquois de Saint-Régis firent des démarches auprès des autorités pour se débarrasser de ces réfugiés qui envahissaient leurs terrains de chasse et ceux des Six-Nations, provoquant ainsi un conflit, et aussi de leur interprète qu’ils accusaient d’encourager les Abénaquis « à rester dans le but de continuer de faire la traite avec eux ». À la suite de nouvelles pressions de la part des Iroquois en 1770, Hertel décida d’abandonner la partie. Les Abénaquis quittèrent Saint-Régis à la fin de cette année-là.

Revenu à Montréal, Hertel s’engagea comme volontaire en 1775, sous les ordres de François-Marie Picoté de Belestre et de Joseph-Dominique-Emmanuel Le Moyne* de Longueuil, pour repousser les troupes américaines qui envahissaient le Canada. Fait prisonnier lors de la capitulation du fort Saint-Jean le 2 novembre 1775, il fut reconnu comme officier par le général de brigade Richard Montgomery, qui l’avait rencontré lors de la campagne contre Pondiac, et il fut envoyé par lui en exil dans les colonies américaines. Libéré à la suite d’un échange de prisonniers, il revint à Montréal en 1777 où il mourut quatre ans plus tard. Sa veuve s’adressa à deux reprises au gouverneur Haldimand pour réclamer une pension viagère. « M. Hertel, lui écrivait-elle le 29 octobre 1781, ne m’a laissé pour toute fortune qu’un fils, qui n’attend que l’âge pour offrir ses services à son Roi. » Ce fils, Louis-Hippolyte, né à Montréal en 1771, fut plus tard lieutenant dans le Royal Canadian Volunteer Régiment. Le 2 avril 1792, deux mois avant sa mort, la veuve Hertel vendit à la congrégation presbytérienne de Montréal l’emplacement sur lequel celle-ci construisit une église, rue Saint-Gabriel.

Thomas-M. Charland

AN, Col., C11A, 101, f.15 ; D2C, 3, p.127 ; 48 (copies aux APC).— ANQ-M, Greffe de Joseph Papineau, 2 avril 1792. APC, MG 11, [CO 42] Q, 2, p.335 ; 4, p.13 ; 13, p.164 ; MG 19, F1, 1, p.136. BL, Add. mss 21 651, pp.75s., 88, 115 ; 21 653, pp.463, 489s. ; 21 669, pp.72s. ; 21 687, p.29 ; 21 772, p.73 ; 21 773, p.149 ; 21 831, p.130 ; 21 879, pp.38, 48 (copies aux APC).— Coll. des manuscrits de Lévis (Casgrain), I : 170 ; V :173 ; VI : 27. [Antoine Foucher], Journal tenu pendant le siège du fort Saint-Jean, en 1775, par feu M. Foucher, ancien notaire de Montréal, BRH, XL (1934) : 144, 212s.— The French regime in Wisconsin – III, R. G. Thwaites, édit., Wis., State Hist. Soc., Coll., XVIII (1908) : 218 ; Thwaites a confondu les deux frères Hertel, Pierre-Antoine et Joseph-Hippolyte. Il a été suivi en cela par N. B. Wainwright, éditeur du « George Croghan’s journal, 17591763 [...] », Pennsylvania Magazine of History and Biography (Philadelphie), LXXI (1947) : 399  [t.-m. c.].— Invasion du Canada (Verreau), 249.— Johnson papers (Sullivan et al.). Liste des membres ; première réunion de la Grande Loge de Montréal, APC Rapport, 1944, xxxii.— A list of Protestant house keepers in Montreal (1764), BRH, XXXIX (1933) : 158. La mission de M. de Bougainville en France en 17581759, ANQ Rapport, 19231924, 38.— Papiers Contrecœur (Grenier), 104, 344, 407. [Nicolas Renaud d’Avène Des Méloizes], Journal militaire tenu par Nicolas Renaud d’Avène Des Méloizes, cher, seigneur de Neuville, au Canada, du 8 mai 1759 au 21 novembre de la même année [...], ANQ Rapport, 19281929, 32, 39, 46. [François Daniel], Nos gloires nationales ; ou, histoire des principales familles du Canada [...] (2 vol., Montréal, 1867), II : 369, 371. Francis Parkman, The conspiracy of Pontiac and the Indian war after the conquest of Canada (10e éd., 2 vol., Boston, 1886 ; réimpr., New York, 1962). C.-F. Bouthillier, La bataille du 9 juillet 1755, BRH, XIV (1908) : 222. T. [-M.] Charland, Les neveux de madame de Beaubassin, RHAF, XXIII (19691970) : 8490. J.-J. Lefebvre, Louise Réaume-Fournerie-Robertson (17421773) et son petit-fils le colonel Daniel de Hertel (17971866), RHAF, XII (19581959) : 330. La loyauté des Canadiens en 1775, BRH, XXXI (1925) : 373. É.-Z. Massicotte, À propos de mariage, BRH, XXXII (1926) : 536s.— La reddition du fort Saint-Jean en 1775, BRH, XII (1906) : 315.

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Thomas-M. Charland, « HERTEL DE SAINT-FRANÇOIS, JOSEPH-HIPPOLYTE (chevalier Hertel) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/hertel_de_saint_francois_joseph_hippolyte_4F.html.

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Auteur de l'article:    Thomas-M. Charland
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
Année de la révision:    1980
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