ERMATINGER, FREDERICK WILLIAM (habituellement désigné sous le prénom de William), soldat et fonctionnaire, né en 1811, probablement à Sault-Sainte-Marie, Haut-Canada, fils du trafiquant de fourrures Charles Oakes Ermatinger* et de Charlotte Kattawabide (Cattoonalute), fille d’un chef sauteux, décédé le 22 janvier 1869 à Montréal.

Frederick William Ermatinger, descendant par son père d’un marchand suisse qui s’établit au Canada peu après la Conquête, avait de la parenté dans l’armée britannique, la classe dirigeante de Montréal et la société canadienne-française. Son oncle, Frederick William Ermatinger*, fut maître de poste et shérif de Montréal, de 1810 à 1827, et son frère, Charles Oakes Ermatinger, capitaine de la Royal Montreal Cavalry dans les années 40 ; sa femme, Caroline-Élisa, qu’il épousa à Saint-Ours le 14 juillet 1845, appartenait à la famille très en vue des Juchereau Duchesnay.

Ermatinger apprit le droit dans l’étude de Samuel Gale, de 1829 à 1834. Il fut reçu au barreau le 23 septembre 1844, mais n’exerça jamais. Il fit ses débuts dans l’armée au sein de la Royal Montreal Cavalry, et y avait déjà le grade de lieutenant en 1833. Il servit en Espagne pendant les guerres carlistes, à partir de 1835 environ, d’abord au sein de la British Legion, ensuite dans l’armée espagnole, et obtint le grade de lieutenant-colonel. De retour à Montréal en 1839, il fut, le 16 février 1842, nommé commissaire de police de la ville. En 1843, les fonctions d’inspecteur et de surintendant de police furent réunies, et le nouveau poste fut accordé à Ermatinger.

En sa qualité de surintendant de police, Ermatinger devait concourir à la répression de l’agitation sociale quand elle échappait au contrôle des magistrats locaux. En 1843, deux grèves, celles des ouvriers du canal de Lachine en mars et du canal de Beauharnois trois mois plus tard, tournèrent à l’émeute. On envoya Ermatinger à la tête de troupes pour étouffer le soulèvement à Lachine, et on le chargea de mener l’enquête sur les troubles de Beauharnois. Les travailleurs impliqués dans la grève de Beauharnois demandaient un salaire accru (3 shillings au lieu de 2 shillings et 3 pence), payable semi-annuellement plutôt qu’annuellement, et une diminution des heures de travail (ils réclamaient la journée de 12 heures). Ils se refusaient de plus à payer pour les baraques dans lesquelles ils vivaient pendant la durée de leur emploi sur les canaux et se plaignaient d’être forcés d’acheter leur nourriture des magasins de la compagnie tandis qu’ils pouvaient se la procurer à un moindre coût chez les fermiers des alentours. Ermatinger fut par la suite chargé d’organiser la police des canaux, tant à Lachine qu’à Beauharnois.

Lors des troubles qui, en avril et mai 1849, et de nouveau en août de la même année, marquèrent l’adoption du projet de loi pour l’indemnisation des pertes subies pendant la rébellion [V. James Bruce], Ermatinger joua un rôle de premier plan dans l’organisation de l’action conjointe de la police et des troupes. En 1850, il était à la tête de la police qui rétablit l’ordre pendant un soulèvement à propos de la question de l’annexion du Canada aux États-Unis. Ermatinger et son frère aîné, Charles Oakes, furent l’un et l’autre blessés à Montréal en juin 1853 dans l’exercice de leurs fonctions respectives de surintendant et de chef de police, alors qu’une bande d’émeutiers attaqua l’église Zion où l’ex-barnabite Alessandro Gavazzi était à donner une conférence [V. Charles Wilson*] et qu’ils s’efforçaient de les retenir à l’extérieur du temple. Au début des années 50, à la demande du gouvernement de la province du Canada, Ermatinger mit sur pied une police des eaux, corps d’environ 30 hommes recrutés en majorité parmi les anciens soldats et ex-membres de la Royal Irish Constabulary, aux fins de protéger les quais et le trafic sur les canaux aux abords de Montréal et, d’une façon générale, de s’occuper des soulèvements contre l’ordre public dans le Bas-Canada.

Ermatinger resta surintendant de police jusqu’en 1855. En 1856, il devint inspecteur de la milice volontaire active du Bas-Canada. C’est vers lui que George-Étienne Cartier*, procureur général du Bas-Canada, se tourna en 1864 pour lui confier de nouvelles responsabilités de magistrat d’un tribunal de police sur la frontière américaine, où la tension augmentait sous la menace de raids d’origine fénienne. Ermatinger réussit à maintenir de bonnes relations avec les autorités de la frontière américaine et, quand les Féniens y commencèrent leurs raids, il tint son gouvernement au courant des mouvements de l’ennemi. Les soucis de sa tâche, cependant, et le danger auquel il était exposé minèrent sa santé. En 1866, il fut nommé à Montréal, avec Louis-Antoine Dessaulles *, au poste moins lourd de responsabilités de greffier de la couronne et de la paix. Mais il fut de nouveau réquisitionné comme magistrat d’un tribunal de police et, la même année, il était envoyé à Sweetsburg (Cowansville), dans les Cantons de l’Est, pour prendre le commandement de la police gouvernementale alors que les prisonniers féniens étaient passés en jugement.

À la mort d’Ermatinger, en 1869, sa femme resta avec quatre garçons et une fille à sa charge, et c’est en vain qu’elle demanda une pension de veuve, même si son mari avait été, pendant près de 30 ans, l’un des plus importants fonctionnaires municipaux de Montréal.

Le colonel Ermatinger fut un fonctionnaire capable, courageux et fiable, par ailleurs grand de taille et imposant. Son expérience des troubles civils en fit un collaborateur de grande valeur pour les autorités. À une époque où les tensions politiques s’insinuaient dans les relations tant publiques que privées, il se tint éloigné des complications politiques et s’acquitta de ses devoirs de surintendant de police sous plusieurs administrations différentes pendant 15 ans. Ses succès face aux bandes d’agitateurs de tout acabit s’expliquent par sa fermeté, alliée à sa courtoisie et à sa patience envers les rebelles. En 1853, par exemple, il refusa d’identifier ceux qui l’avaient blessé pendant l’affaire Gavazzi.

Elinor Senior

APC, MG 19, A2, sér. 4 ; MG 26, A, 240, p.106 391 ; 241, p.107 046 ; 472, pp.235 157–235 159 ; RG 8, I (C series), 319, pp.82–85 ; 616, pp.238, 249, 255, 289.— Musée McCord, McCord papers, lettre de M. Aylmer à D. R. McCord, 17 juill. 1901 ; lettre d’Edward Ermatinger à D. R. McCord, 31 mai 1913 ; lettres de C. O. Ermatinger à D. R. McCord, 29 avril 1912, 9 avril 1917 ; Military papers, Misc. no 2, M5 728.— Canada, prov. du, Legislative Assembly, Journals, 1843, 2, app.T ; 1851, 1, app.B.— [Edward Ermatinger], Edward Ermatinger’s York Factory express journal, being a record of journeys made between Fort Vancouver and Hudson Bay in the years 1827–1828, C. O. Ermatinger et James White, édit., SRC Mémoires, 3e sér., VI (1912), sect. ii : 67.— Gazette (Montréal), 12 juill. 1850, 6 mars, 10 juin 1853, 23 janv. 1869.— Montreal Transcript, 4 mars 1843.— P.-G. Roy, La famille Juchereau Duchesnay (Lévis, Québec, 1903), 353–357.

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Elinor Senior, « ERMATINGER, FREDERICK WILLIAM (William) (1811-1869) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 16 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/ermatinger_frederick_william_1811_1869_9F.html.

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Auteur de l'article:    Elinor Senior
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1977
Année de la révision:    1977
Date de consultation:    16 nov. 2024