SNOW, JOHN ALLAN, arpenteur, né le 31 mars 1824 dans le canton de Hull, Bas-Canada, fils de John Snow, charron ; en 1851, il épousa Emma Catherine Bradley, et ils eurent au moins quatre fils et trois filles ; décédé le 13 avril 1888 à Ottawa.

Lorsqu’il eut terminé ses études à la St Lawrence Academy, à Potsdam, New York, John Allan Snow vint au Canada, où il apprit le métier d’arpenteur sous la direction de Lindsay Alexander Russell. Le 11 septembre 1847, il devint l’un des arpenteurs provinciaux adjoints. Entre 1847 et 1865, il délimita plusieurs cantons dans les comtés de Renfrew, Lanark, Carleton, Frontenac et Hastings, ainsi que dans le district de Muskoka. En outre, il dirigea la construction de chemins de colonisation, parmi lesquels, en 1866, la route Monck entre le lac Couchiching et la route Hastings. Peut-être l’expérience ainsi acquise explique-t-elle en partie le fait que, deux ans plus tard, William McDougall*, ministre fédéral des Travaux publics, le choisit pour diriger la construction d’une route allant du lac des Bois à Upper Fort Garry (Winnipeg) et empruntant le tracé qui, une décennie auparavant, avait été proposé par Simon James Dawson*. Le but immédiat de ce projet était de fournir du travail « aux malheureux habitants » de la colonie de la Rivière-Rouge et de « soulager leurs souffrances » causées par une pénurie presque totale des récoltes. À long terme, il visait à répondre aux demandes des expansionnistes canadiens qui réclamaient de meilleures communications avec l’Ouest.

Le 27 octobre 1868, Snow et Charles Mair*, trésorier du projet, arrivèrent à Upper Fort Garry en provenance de Chicago et de St Paul, Minnesota, avec 18 tonnes de provisions. Conformément à ses instructions, Snow, accompagné de Mair et du docteur John Christian Schultz*, se rendit chez le gouverneur William Mactavish*, de la Hudson’s Bay Company, qui leur donna l’assurance que rien ne s’opposait à la mise en marche des travaux de construction. Mactavish estimait que le projet allait apporter quelque secours aux colons indigents, et, de toute façon, il n’avait reçu aucune directive de Londres. Le gouverneur et le comité de la Hudson’s Bay Company, à Londres, protestèrent toutefois contre un tel ouvrage « entrepris par le gouvernement du Canada comme s’il s’agissait d’un droit, comme si le territoire qu’il [l’ouvrage] devait traverser était canadien », mais ils déclarèrent qu’ils ne feraient pas obstacle aux travaux ; en même temps, ils affirmaient qu’ils avaient déjà pris des mesures pour secourir la colonie, avant que la subvention pour la construction de la route n’eût été accordée.

Snow fut déçu de n’obtenir qu’un petit nombre de réponses à ses offres d’emploi et il constata que, même si les provisions étaient rares à la colonie de la Rivière-Rouge, les engagés préféraient toucher une partie de leur salaire en espèces ou en vêtements plutôt qu’entièrement sous forme de provisions. Cependant, il embaucha 40 hommes et les travaux débutèrent le 9 novembre 1868. Dès le 1er avril 1869, les hommes avaient défriché 28 milles de route, mais le projet fut abandonné en raison d’un manque de fonds ; le 16 mars, Snow, laissant Mair à la Rivière-Rouge, était parti pour Ottawa afin de consulter le département des Travaux publics. L’arpenteur revint le 6 juillet avec l’argent nécessaire à la reprise des travaux, mais il découvrit que les travailleurs étaient « extrêmement rares dans la colonie parce que les offres [d’emploi] dans le domaine de l’agriculture étaient plus nombreuses que d’habitude » et les hommes avaient déjà été engagés par la Hudson’s Bay Company.

En août 1869, Snow fit état du « mécontentement notable » de certains de ses travailleurs au sujet de leur salaire de $20 par mois ; à la fin de septembre, les employés insatisfaits firent la grève afin d’obtenir un salaire plus élevé ($25 par mois) : ils cessèrent tout travail pendant une journée et demie. Snow refusa de payer les employés pour le temps perdu durant la grève, et ceux-ci le traînèrent jusqu’à la Seine où ils menacèrent de le noyer. Il accéda à leurs demandes mais, le soir venu, il « se rendit au fort Garry et déposa contre cinq des responsables de ce vol qualifié ». Sur les quatre hommes accusés de voies de fait graves, deux furent trouvés coupables et condamnés à une amende de £4 chacun ; l’un des deux, Thomas Scott*, devait être mêlé au soulèvement de la Rivière-Rouge en 1869 [V. Louis Riel] et exécuté le 4 mars 1870. Dans un mémoire écrit en janvier 1874, Riel affirme que Scott avait mis un pistolet sur la tête de Snow au cours de l’incident de la Seine et que celui-ci n’avait eu la vie sauve que grâce à l’intervention de quelques Métis. Snow, quant à lui, n’avait pas fait état d’une quelconque participation des Métis à la manifestation ; en février 1870, il déclara à McDougall que leur conduite avait été « respectueuse, sauf de très rares exceptions, et [que] leur travail [avait été] accompli honnêtement ». Le mécontentement, disait-il, avait été « presque exclusivement le fait des Canadiens et des déserteurs de l’armée américaine ».

Les travaux reprirent en 1869. Snow dut embaucher un grand nombre d’hommes de la « colonie écossaise » de la Rivière-Rouge ; il les trouva « paisibles et bien disposés ». Mais, en octobre, il signala qu’une très vive agitation régnait parmi « les sang-mêlé canadiens ». Il laissa entendre que la présence d’une troupe de 200 ou 300 hommes allait être nécessaire pour maintenir l’ordre dans la colonie, et, en décembre, il réclama l’intervention de l’évêque Alexandre-Antonin Taché* et du gouverneur Mactavish « pour conclure un arrangement à l’amiable entre le Canada et les gens mécontents ». Le 7 décembre 1869, William McDougall, devenu lieutenant-gouverneur désigné des Territoires du Nord-Ouest, ordonna l’arrêt de tous les travaux sur la route, et Snow quitta la colonie le 6 janvier 1870.

Snow est un exemple typique de ces pionniers canadiens qui provoquèrent dans la colonie de la Rivière-Rouge un mouvement de résistance à l’expansion du Canada vers l’Ouest. La présence de son groupe de constructeurs routiers et des équipes d’arpentage dirigées par John Stoughton Dennis fut considérée, à cette époque et plus tard, comme l’une des causes du soulèvement de la Rivière-Rouge. Un comité spécial de la chambre des Communes, chargé d’enquêter sur les sources des problèmes, entendit en 1874 des témoignages concernant les constructeurs routiers. On y affirma que des bruits faisant état de l’inconduite du groupe de Snow circulaient un peu partout et qu’ils étaient, de façon presque générale, tenus pour véridiques parmi les Métis ; au dire du colon Thomas Bunn*, ils « tendaient à provoquer de la suspicion et de l’animosité à l’endroit des Canadiens ». Alexander Begg*, par exemple, note dans son journal en 1869 que Snow était accusé de profiter des malheureux colons en leur versant des salaires de famine. Cette accusation était toutefois exagérée car le salaire moyen de ces travailleurs égalait, et dans certains cas dépassait, celui des employés qui, sous la direction de Simon James Dawson, construisaient la route allant du lac Supérieur au lac des Bois. Des témoins appelés devant le comité spécial se plaignirent de ce que les ouvriers étaient forcés d’acheter des provisions à des prix exagérés dans un magasin qui passait pour être la propriété de Schultz. On accusa quelques-uns des travailleurs venus de l’Ontario avec Snow d’afficher du mépris à l’endroit de la Hudson’s Bay Company et des colons. Les lettres de Mair à son frère, rédigées au moment où il travaillait à la construction de la route, avaient été publiées dans les journaux ontariens et jugées insultantes pour les sang-mêlé ; Mair avait même été assailli par Annie, l’épouse du maître de poste Andrew Graham Ballenden Bannatyne. Le comité apprit aussi que Snow vendait illégalement des boissons alcooliques aux Indiens, délit pour lequel il avait effectivement été condamné à une amende de £10. Mais ce que les Métis craignaient surtout, c’était la perte de leurs terres ; il circulait des bruits persistants suivant lesquels des constructeurs de routes achetaient des terres aux Indiens – ces terres dont les Métis estimaient être les propriétaires. Ainsi, en août 1869, l’abbé Georges Dugas dénonçait à Mgr Taché les « sociétés d’avanturiers » qui répandaient le désordre et « semblaient plutot occupés a se choisir des terres qu’a travailler au chemin ». Ces propos n’étaient pas sans fondement. Témoignant devant le comité, John Stoughton Dennis affirma que Snow et Schultz avaient jalonné et acheté aux Indiens des terres situées à Oak Point (Sainte-Anne, Manitoba) ; par la suite, Dennis avait dit à Schultz que le gouvernement ne reconnaîtrait pas de tels achats.

Inquiet de ce que certains journaux canadiens le tenaient responsable du conflit de la Rivière-Rouge, Snow déclara, en décembre 1869, qu’il n’avait « pas conscience de s’être fait un ennemi parmi les dissidents » et qu’il était le seul fonctionnaire du gouvernement en liberté à la Rivière-Rouge ; cette situation était attribuable, selon lui, aux « bons sentiments de ces gens à [son] égard ».

De retour en Ontario, Snow travailla pour la Compagnie du chemin de fer de Québec, Montréal, Ottawa et Occidental. En 1875, la ville de Hull l’engagea comme ingénieur, et il traça les limites de cette localité nouvellement érigée en municipalité. Deux ans plus tard, Snow retourna dans l’Ouest pour faire les levés des subdivisions de la région située au sud de Winnipeg, et, entre 1880 et 1883, il fit l’arpentage de divers secteurs des Prairies et de la Colombie-Britannique. En 1886, il revint au travail général du génie et de l’arpentage. Il mourut d’une pneumonie à Ottawa en 1888.

Hartwell Bowsfield

APC, RG 11, B1(a), 265, docs. 4 698, 4 707, 4 792, 4 811, 5 294, 6 026 ; B1(b), 652, subject 429, docs. 3 189, 3 231, 3 233, 3 234.— Begg, Red River journal (Morton).— Canada, chambre des Communes, Journals, 1874, app.6 ; Parl., Sessional papers, 1869, V, n25 ; 1870, V, n12 ; 1895, IX, n13, part. VI.— Muskoka and Haliburton, 1615–1875 ; a collection of documents, F. B. Murray, édit. (Toronto, 1963).— Ottawa Daily Citizen, 14 avril 1888.— Ottawa Evening Journal, 14 avril 1888.— R. St G. Stubbs, Four recorders of Rupert’s Land ; a brief survey of the Hudson’s Bay Company courts of Rupert’s Land (Winnipeg, 1967).— D. W. Thomson, Men and meridians ; the history of surveying and mapping in Canada (3 vol., Ottawa, 1966–1969).— « John Allan Snow », Assoc. of Ontario Land Surveyors, Annual report (Toronto), 34 (1919) : 82s.

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Hartwell Bowsfield, « SNOW, JOHN ALLAN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/snow_john_allan_11F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1982
Année de la révision:    1982
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