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MOSS, THOMAS, avocat, homme politique et juge, né le 20 août 1836 à Cobourg, Haut-Canada, aîné des quatre enfants de John Moss et d’Ann Quigley ; le 28 juillet 1863, il épousa Amy (décédée en 1880), fille aînée de Robert Baldwin Sullivan*, et ils eurent deux filles et six fils (dont deux moururent en bas âge) ; décédé le 4 janvier 1881 à Nice, France.
Peu après sa naissance, la famille de Thomas Moss déménagea à Toronto où son père fit l’acquisition d’une brasserie qu’il exploita. Moss étudia au Gale’s Institute, puis, de 1850 à 1854, à l’Upper Canada College où il fut nommé préfet de discipline au début de sa dernière année et mérita le prix du gouverneur général. Poursuivant ses études à l’University of Toronto, il reçut les premières bourses en mathématiques et en humanités créées par cette institution et acquit un rang éminent au sein de la Literary and Debating Society ; il termina sa scolarité en 1858 avec un baccalauréat ès arts et trois médailles d’or. En 1859, il obtint une maîtrise ès arts et rédigea une thèse qui mérita le prix cette année-là. Moss maintint ses liens avec l’université en occupant les emplois de secrétaire-archiviste de 1861 à 1873, de membre du « sénat », et de recteur de 1874 jusqu’à sa mort. Pendant ces deux décennies où l’université connut des difficultés, il se révéla l’un de ses défenseurs les plus dévoués. Après sa mort, l’institution donna le nom de Moss à un immeuble et créa deux bourses d’humanités en son honneur.
Moss commença de faire son droit en 1858 dans l’étude d’Adam Crooks et d’Hector Cameron, à Toronto, et il fut admis au barreau en 1861. Il pratiqua le droit d’abord avec Cameron, puis avec James Patton et Featherston Osler ; en 1871, il s’associa avec son frère, Charles Moss*, futur juge en chef de l’Ontario, avec William Alexander Foster, un des leaders du mouvement Canada First, et avec Osler. Ce cabinet d’avocats connut le succès. L’année suivante, Robert Alexander Harrison* se joignit à eux. En 1871, Moss fut nommé conférencier en equity de la Law Society of Upper Canada et élu membre de son conseil. Il occupait la présidence du comité de formation juridique de cette société au moment où le comité prépara un rapport qui amena la fondation, en 1873, d’une école de droit. En 1872, il fut nommé membre de la Commission de la réforme du droit et conseiller de la reine. Cette même année, le gouvernement de sir John Alexander Macdonald* lui offrit le poste de vice-chancelier à la Cour de la chancellerie, mais il refusa, car le salaire n’aurait pu répondre aux besoins d’une grosse famille et au style de vie de Moss. Encore dans la trentaine, ce dernier était alors bien établi dans sa profession et faisait partie du Toronto Club, du National Club et du Rideau Club. Bien qu’il ait été catholique, il était devenu, à l’époque de son mariage, membre de l’Église d’Angleterre et appuyait la faction Low Church.
En 1873, Moss s’engagea quelque temps dans une nouvelle carrière. En décembre, il accepta qu’on le propose comme candidat libéral lors d’une élection partielle fédérale dans Toronto West. Avec l’appui de membres de la Toronto Trades Assembly et du mouvement Canada First et à cause du scandale du Pacifique, il remporta l’élection dans une circonscription habituellement conservatrice. Cette victoire donna au nouveau gouvernement d’Alexander Mackenzie* une forte impulsion et une grande confiance qu’il conserva jusqu’aux élections fédérales de janvier 1874. Réélu, Moss fut choisi, en qualité d’un des jeunes libéraux d’avenir, pour présenter l’adresse en réponse au discours du trône. Il ne fut pas cependant particulièrement actif au parlement et ne déposa que deux projets de loi de moindre importance. Il prêta son concours au gouvernement dans la rédaction de la nouvelle loi de 1874 relative à la faillite et se déclara à deux reprises favorable au projet de loi de 1875 sur la Cour suprême.
En qualité d’avocat, Moss avait eu des rapports professionnels avec Edward Blake* et avait conçu de l’admiration pour lui ; les deux hommes furent des amis intimes et occupèrent des sièges voisins à la chambre des Communes. Ils partageaient tous deux quelques-unes des idées du mouvement Canada First, bien que ni l’un ni l’autre n’en fît partie, et consentirent à s’en servir pour atteindre leurs visées politiques personnelles. Moss fut donc identifié à l’aile de Blake au sein du parti libéral et, comme lui, il fit opposition à la domination de George Brown* sur le parti libéral de l’Ontario. En janvier 1875, Moss participa à la fondation du Liberal de Toronto, conçu comme un organe libéral « plus progressiste » que le Globe de Brown.
Moss conserva néanmoins le respect et la confiance aussi bien de Mackenzie que de Brown et put ainsi jouer un rôle important au printemps de 1875 lorsque, en qualité de représentant de Blake, il prit part aux négociations qui menèrent au retour de celui-ci comme ministre de la Justice au sein du cabinet fédéral. En 1875, Moss participa activement à la campagne en vue des élections provinciales. À l’automne cependant, on lui offrit un poste de juge à la Cour d’appel et de pourvoi pour erreur de l’Ontario. Il éprouvait alors des difficultés financières dues à la perte de ses gros investissements dans le Liberal qui venait de faire faillite en juillet ; cette charge de juge lui procurerait un revenu stable et considérable. Après que son ami Blake l’eut assuré que son départ ne causerait pas de tort à sa propre position dans la lutte pour le pouvoir qui se déroulait au sein du parti libéral, Moss accepta et fut investi le 8 octobre 1875. Nommé juge en chef de la Cour d’appel le 30 novembre 1877, il devint un an plus tard, à 41 ans, juge en chef de l’Ontario.
En tant que juge, Moss était reconnu pour sa façon aisée et aimable d’entendre les causes et pour les efforts inlassables qu’il déployait et la réflexion qu’il s’imposait avant de rendre ses jugements. Il rédigeait rarement des jugements dissidents mais il semble avoir pris plaisir à écrire à part des jugements concordants, souvent longs. Il rendit un certain nombre de décisions importantes dont plusieurs sont remarquables parce qu’elles veillent à la sauvegarde des droits des individus contre l’exercice arbitraire du pouvoir par les gouvernements ou les grandes compagnies. Dans le procès opposant un dénommé Yeomans et la corporation du comté de Wellington (1879), Moss, observant que « les droits de l’individu à la propriété ne seront pas sacrifiés au bien commun et qu’on ne saura exiger d’un citoyen qu’il cède sa propriété privée à l’État sans recevoir un équivalent raisonnable », jugea qu’un propriétaire particulier avait droit à une compensation parce qu’une route de comté avait été construite de telle façon que sa propriété était endommagée. Dans le procès opposant un dénommé Fitzgerald et quelques autres au Grand Tronc (1880), il nia qu’une grande compagnie puisse se dégager de toute responsabilité de négligence par l’introduction dans les contrats d’une clause indiquant qu’elle rejetait toute responsabilité. Cette décision particulièrement importante fut maintenue par la Cour suprême du Canada et on s’y rapporta dans des causes ultérieures.
En 1880, Moss fut forcé d’arrêter de siéger au tribunal à cause de sa mauvaise santé et on lui prescrivit d’aller vivre sous des cieux plus cléments. Il partit avec quelques membres de sa famille à destination du Midi de la France mais, au cours de la traversée, il contracta un mauvais rhume dont il ne put guérir.
AO, MU 159–162.— Reports of cases decided in the Court of Appeal [of Ontario] [...], J. S. Tupper et al., compil. (27 vol., Toronto, 1878–1901), I–V.— Globe, 1863, 1873–1874, 6 janv. 1881.— Leader, 1873.— Toronto Daily Mail, 6–7 janv. 1881.— Dent, Canadian portrait gallery, I : 353–355.— Read, Lives of judges, 387–403.— N. F. Davin, The Irishman in Canada (Londres et Toronto, 1877), 608s.— D. W. Swainson, « Personnel of politics », 255–259.— D. P. Gagan, « The relevance of « Canada First », Rev. d’études canadiennes, 5 (1970), no 4 : 36–44.— « The late Chief Justice Moss », Canada Law Journal, nouv. sér., 17 (1881) : 55–60.— J. [G.] Snell, « The West Toronto by-election of 1873 and Thomas Moss », OH, 58 (1966) : 236–256.
J. G. Snell, « MOSS, THOMAS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/moss_thomas_11F.html.
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Auteur de l'article: | J. G. Snell |
Titre de l'article: | MOSS, THOMAS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
Année de la révision: | 1982 |
Date de consultation: | 21 déc. 2024 |