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Titre original :  MAJ William Lawson “Choppy” Grant

Provenance : Lien

Grant, William Lawson, éducateur, historien, auteur et officier dans la milice et dans l’armée, né le 2 novembre 1872 à Halifax, fils de George Monro Grant* et de Jessie Lawson, petit-fils de William Lawson* ; le 1er juin 1911, il épousa à Goring, Angleterre, Maude Erskine Parkin (14 septembre 1880–1er février 1963), et ils eurent trois filles et un fils ; décédé le 3 février 1935 à Toronto et inhumé à Kingston, Ontario.

William Lawson Grant naquit dans une famille influente étroitement liée à l’élite intellectuelle britannique canadienne et fit carrière dans ce milieu. Son père était un ministre presbytérien bien connu et sa mère venait d’une famille de marchands prospères de la Nouvelle-Écosse. Né à Halifax, William Lawson n’eut qu’un frère, George, qui mourut à l’âge de 12 ans. Le fils survivant de la famille Grant se révéla curieux dès son plus jeune âge et prenait plaisir à la lecture. Comme sa mère, il était timide, sensible et pensif. Il aimait et admirait son père, mais le trouvait quelque peu autoritaire. Malgré tous les succès personnels de William Lawson, ses réalisations restèrent parfois dans l’ombre de celles de son père. En dépit de son caractère dominateur, George Monro Grant exerça sur lui une grande influence : de toute évidence, il sut transmettre à son fils son appui ferme à l’Empire et ses vues progressistes sur une foule de sujets. Plus encore, son exceptionnelle carrière d’éducateur convainquit William Lawson d’essayer de suivre ses traces.

En 1877, George Monro Grant fut nommé directeur du Queen’s College (qui obtint peu après le statut d’université), et la famille s’installa à Kingston. Il devint l’un des administrateurs les plus renommés de l’établissement ; il en agrandit les infrastructures et élargit l’offre de matières enseignées. Après ses études primaires et secondaires dans les écoles locales, William Lawson entra à l’université de son père et obtint une maîtrise ès arts en 1894. Il se révéla un étudiant solide et remporta des médailles en grec et en latin. Après avoir reçu son diplôme, il se rendit en Angleterre pour s’inscrire au Balliol College de la University of Oxford, où, en 1898, on lui décerna une licence ès arts en humanités avec mention très bien.

Grant revint au Canada prêt à devenir lui-même éducateur. Chose certaine, les relations de sa famille dans l’Église presbytérienne au Canada et le milieu de l’éducation de l’Ontario ne lui nuisirent pas pour se trouver un emploi. De 1898 à 1904, il travailla dans deux écoles privées pour garçons à Toronto : l’Upper Canada College (UCC), où il enseigna les lettres classiques, puis l’histoire et la géographie sous la direction de son futur beau-père, George Robert Parkin* (ami proche de son père), et le St Andrew’s College, école presbytérienne dont il devint directeur adjoint en 1902. Le séjour de Grant dans ces établissements lui permit d’apprécier l’importance d’une administration avisée et d’une éducation complète et diversifiée pour les étudiants.

La grande perte occasionnée par la mort de ses parents marqua les années que Grant passa à Toronto. Peu après, il entreprit de rédiger la biographie de son père, en collaboration avec le journaliste Charles Frederick Hamilton. La guerre des Boers (1899–1902) défrayait alors la chronique au pays. Grant se rappela peut-être l’opinion ferme de son défunt père, selon laquelle les partisans de l’Empire britannique doivent aussi accepter de le défendre. Il commença ainsi à s’intéresser aux questions militaires et s’enrôla en 1902 dans le 48th Highlanders, unité de milice locale, où il accéda au rang de lieutenant. Il ne participa pas au service actif, mais sa carrière militaire à temps partiel ne se termina pas avec la guerre. En 1906, il s’engagerait dans le corps de réserve et, plus tard, installé à Kingston, il se joindrait au 14th Regiment (Princess of Wales’s Own Rifles).

Les premières expériences de Grant en éducation le convainquirent des lacunes majeures de l’enseignement de l’histoire en Ontario. En 1904, il décida de mieux se préparer pour promouvoir cette matière et s’inscrivit à un cours intensif de deux ans à l’université de Paris. Son séjour dans cette ville fit de lui, selon son petit-fils Michael Ignatieff, « un fervent francophile pour le reste de sa vie ». Il améliora son français et fit des recherches sur le passé français du Canada.

Tout en lui faisant découvrir la culture et l’histoire françaises, le second séjour de Grant à l’étranger l’aida à s’intégrer dans la grande communauté intellectuelle de l’Empire britannique. Il fit pour un temps partie du personnel de l’Encyclopædia Britannica en Angleterre et devint membre du Royal Colonial Institute en 1905. En 1906, il retourna à Oxford, où il fut pendant quatre ans maître de conférences Beit en histoire coloniale. Durant ce séjour, il fit aussi paraître une édition des Voyages de Samuel de Champlain*, commença à publier sa propre traduction de l’Histoire de la Nouvelle-France de Marc Lescarbot* et coédita deux séries de documents officiels relatifs aux colonies. Il fréquenta également quelques-uns des plus importants impérialistes du jour, dont lord Milner, Lionel George Curtis et son ancien directeur, Parkin. Grant soutenait fermement l’Empire, sans pour autant entretenir un impérialisme aveugle. Il avait des doutes, par exemple, quant au degré d’engagement du Canada pour soutenir l’effort de guerre britannique dans des entreprises plus lointaines. Au sujet de Parkin, il fit un jour remarquer : « Je ne crois pas qu’il considérait Dieu, Oxford et l’Empire britannique comme étant tout à fait séparés. »

À cette époque, la renommée de Grant commençait à s’étendre au Canada. En 1910, on le nomma directeur de la chaire Douglas d’histoire coloniale et canadienne à Queen’s. Ce nouveau poste témoignait à la fois de l’intérêt national grandissant envers le passé du pays et de la professionnalisation du domaine de l’histoire. Grant s’était taillé une réputation de professeur compétent et très aimé. Il apportait à sa tâche, disait l’un de ses contemporains, « non seulement une érudition mûre et profonde, mais un intérêt passionné et bienveillant pour le travail de ses étudiants ». Son poste à Queen’s lui permit de raffermir ses liens avec l’élite professionnelle et intellectuelle canadienne. Membre actif de la Champlain Society, qui promouvait l’histoire canadienne et avait publié ses traductions de Lescarbot, il siégea à son conseil pendant plusieurs années. Il écrivit un certain nombre d’articles qui parurent dans l’Encyclopædia Britannica en 1910–1911 et contribua à la collection Canada and its provinces, publiée de 1913 à 1917 par Robert Pollock Glasgow*, sous la direction conjointe d’Adam Shortt, l’un des professeurs de Grant à Queen’s, et de l’archiviste du dominion Arthur George Doughty. Une année après son retour à Kingston, Grant avait été élu membre de la Société royale du Canada.

L’un des plus importants événements de la vie de Grant – son mariage avec Maude Erskine Parkin – se produisit au cours des années qu’il passa à Queen’s. Il avait fait la connaissance de la jeune femme par l’intermédiaire de son père, quand il vivait en Angleterre. Il lui fallut du temps pour trouver le courage de lui manifester ses sentiments. « J’en suis arrivé à vous aimer très profondément », finit-il par lui écrire en août 1910. « Voilà, c’est dit maintenant, et rien d’autre ne changera les choses. » Il avait la conviction que, ensemble, ils pourraient « en faire dix fois plus pour le Canada ». Ils se marièrent le 1er juin 1911.

Maude Erskine avait reçu une licence ès arts de la McGill University à Montréal en 1903 et avait été directrice adjointe de l’Ashburne House (Ashburne Hall), résidence pour femmes de la Victoria University of Manchester, de 1905 à 1911 (après la mort de son mari, elle dirigerait le Royal Victoria College à McGill de 1937 à 1940). Tout en soutenant chaleureusement les efforts de Grant pour relever les normes d’enseignement, elle suscitait, autant que lui, l’admiration de ses collègues et de ses élèves. Les Grant eurent quatre enfants : Margaret Monro (1912), qui épouserait Geoffrey Clement Andrew, maître d’anglais à l’UCC, puis professeur d’université ; Charity Lawson (1913) ; Jessie Alison (1916), future épouse du diplomate George Ignatieff* ; et George Parkin* (1918). À mesure que les enfants grandissaient, passer l’été dans un cottage près de la baie Georgienne devint l’une des activités familiales favorites.

Ce fut à l’époque de son mariage que Grant documenta et rédigea l’ouvrage avec lequel il remporterait le plus de succès : Ontario high school history of Canada, publié à Toronto en 1914. Ce livre servit beaucoup dans les écoles secondaires de l’ensemble de la province et du Canada, et on le réédita abondamment dans les années 1920 et 1930. Outre qu’il décrivait l’héritage français et britannique du Canada et l’expérience des débuts du peuplement nord-américain, il mettait en relief, au fil des éditions, le rôle de personnages « héroïques » qui pouvaient inspirer les étudiants : de Champlain jusqu’aux soldats canadiens qui s’emparèrent de la crête de Vimy en France durant la Première Guerre mondiale [V. Julian Hedworth George Byng ; Ellis Wellwood Sifton*]. Il suscita la critique dans certains milieux, notamment l’influent organe de l’ordre d’Orange, le Sentinel and Orange and Protestant Advocate, publié à Toronto, qui lui reprochait sa trop grande générosité à l’égard des Canadiens français et des catholiques ; on retira la deuxième édition des écoles secondaires de la Colombie-Britannique.

Grant n’occupa son poste de professeur à Queen’s que pendant cinq ans. Comme beaucoup d’hommes canadiens britanniques en âge de faire leur service militaire, il se laissa entraîner dans la rhétorique guerrière de 1914. Impatient d’apporter sa contribution de toutes les manières possibles, il se mit à rédiger des ouvrages qui attribuaient à l’Allemagne une histoire de militarisme et d’agression, proclamaient le bien-fondé et l’altruisme de la cause britannique, affirmaient la nécessité de la solidarité impériale et les prouesses de la race anglo-saxonne, et imploraient les jeunes hommes de s’enrôler. Durant l’automne de 1914, il contribua à organiser et à préparer l’unité du Canadian Officers’ Training Corps établie à Queen’s. L’année suivante, à 42 ans, il s’engagea lui-même. Capitaine dans le 59e bataillon d’infanterie du Corps expéditionnaire canadien, il accéda au grade de major en décembre 1915 et s’embarqua en avril 1916. Après quelques mois d’entraînement en Angleterre, il partit pour le front ; à un certain moment, on le muta au 20e bataillon d’infanterie.

Le bref service de Grant en France suffit à lui révéler les horreurs psychologiques et physiques de la guerre. En juillet 1916, il subit une grave blessure quand sa monture fut abattue. L’animal roula sur lui, écrasa le haut de son corps et endommagea ses poumons, le rendant vulnérable à la pneumonie. Après sa convalescence en Angleterre, on le rattacha, en février 1917, au 17e bataillon de réserve au camp d’East Sandling, dans le Kent, puis, en avril, il prit en charge l’Otterpool Segregation Camp situé tout près, où il aida au dépistage des maladies chez les soldats nouvellement arrivés. Il commanda ce camp jusqu’en juillet 1917. Ce mois-là, on lui offrit la direction de l’UCC, qu’il accepta. En novembre, avec la permission de ses supérieurs, il quitta l’armée et rentra au Canada, où le débat sur la conscription faisait rage. Grant appuyait la conscription, tout en reconnaissant avec réalisme qu’on ne pouvait s’attendre à ce que les Canadiens français éprouvent le même attachement à l’Angleterre et à l’Empire que lui et d’autres personnes.

Grant laisserait son legs le plus important à l’UCC. Hanté par la mort de tant de jeunes hommes durant la guerre, notamment bon nombre de ses anciens élèves, il avait décidé d’établir une école digne de leurs sacrifices. Il se mit immédiatement au travail pour améliorer la qualité de l’enseignement. Selon le Daily Mail and Empire de Toronto, Grant « croyait à un programme d’éducation qui était aussi large et complet que possible ». Il soutenait, par exemple, que « l’esprit sportif [...] avait permis à l’Empire de traverser la guerre ». Peut-être désirait-il surtout que ses élèves deviennent des individus équilibrés, capables à la fois de contribuer à la société et de jouir pleinement de la vie. Le futur essayiste et romancier William Robertson Davies* rapporterait qu’un jour, il dit à ses étudiants : « Vivez en grand ! Osez amplement, et si vous devez pécher – péchez avec noblesse ! » « Mais plus que tout encore, ajouta-t-il, ayez la foi et réjouissez-vous dans le Christ. » Grant engagea de nouveaux enseignants, comme le musicien Ernest Alexander Campbell MacMillan*, et élargit le programme d’études pour inclure non seulement la musique et les sports, mais aussi les arts, le théâtre, l’histoire contemporaine, les affaires publiques, des cours améliorés de français et la biologie. Il insistait aussi pour que les élèves connaissent une version plus engageante de l’histoire canadienne. En général, l’approche de l’éducation de Grant reflétait sa vive curiosité. L’un de ses anciens étudiants, Lionel Morris Gelber*, écrivit : « Des tendances [en matière de] relations internationales jusqu’aux lointaines difficultés de l’historiographie canadienne, du cricket de troisième cycle à l’état de la littérature anglaise, la dernière pièce de théâtre, le dernier livre, les hommes d’autrefois, les manières d’aujourd’hui, la gamme des intérêts et des commentaires du directeur Grant est généreuse, variée, complète et stimulante. »

Outre qu’il élargit le programme d’enseignement, Grant agrandit les infrastructures de l’école privée. L’UCC dut trouver le moyen d’accommoder une population étudiante qui doubla pendant son mandat. On vit donc la construction d’installations sportives, de résidences supplémentaires, d’un théâtre, d’un nouvel édifice pour l’école préparatoire, d’une résidence pour le directeur et d’un édifice central du campus réaménagé. En 1920, avec l’aide de William George Gooderham, président du conseil d’administration de l’UCC, Grant lança une campagne en vue de recueillir 1 500 000 $ pour financer ces projets, et aussi pour augmenter les salaires des enseignants et créer des bourses d’admission (pour contrer les critiques qui affirmaient que l’école n’accueillait que des riches, il s’efforçait d’élargir sa clientèle). Parmi les dons reçus de personnes et de fondations au cours des années, il s’en trouva deux particulièrement remarquables, en 1932, au plus fort de la dépression : une impressionnante somme de 400 000 $ de la Massey Foundation de Toronto, dont le président, Charles Vincent Massey*, était le beau-frère de la femme de Grant, et 150 000 $ de la Carnegie Corporation of New York. Grâce à la réussite de ses projets de construction, Grant parvint à faire échouer un plan du conseil d’administration pour reconstruire le campus sur des terres moins chères à l’extérieur de la ville. Si les briques, le mortier et la fréquentation illustrent la performance, le mandat de Grant à la direction de l’UCC fut couronné de succès.

En reconnaissance de ses réalisations, Queen’s décerna à Grant un doctorat en droit en 1923, ainsi que la University of Toronto en 1929, pendant les célébrations du centenaire de l’UCC. On considérait alors le collège comme l’un des meilleurs établissements d’enseignement au pays et comme une école qui formerait la prochaine génération de l’élite politique, commerciale et intellectuelle. Les autorités de l’Ontario et d’ailleurs au Canada consultaient fréquemment Grant pour améliorer l’enseignement dans leurs propres écoles. Kenneth George Benson Ketchum, directeur du St Andrew’s College, le décrirait en 1935 comme « une importante figure de l’éducation au Canada ». Fier de ses réalisations à l’UCC, Grant chercha cependant toujours à en faire davantage. « Il n’y a pas de meilleur enseignement au Canada aujourd’hui que celui donné à l’UCC, déclarait-il en 1924, […] et c’est atroce ! »

Au dire de tous, le directeur Grant était populaire auprès de ses élèves, qui le surnommèrent affectueusement Choppy. Il exigeait de leur part des normes et des idéaux élevés. À son entrée en fonction, en décembre 1917, il avait utilisé les mots de John Milton pour expliquer ce qu’il considérait comme sa principale tâche : former les chefs d’une « nation de prophètes, de sages et de gens de valeur ». Il précisa que, pour Milton, « gens de valeur » signifiait « guerriers ». Grant demeurait soucieux des problèmes plus vastes que devait affronter la communauté internationale durant les années 1920 et 1930, et encourageait ses étudiants à s’y attaquer eux-mêmes.

Grant continua à écrire et à publier, même si sa charge de directeur limitait ses possibilités de poursuivre des recherches historiques. Par exemple, il fut rédacteur en chef de l’édition anniversaire de 1926 de la collection Makers of Canada, fondée par George Nathaniel Morang et, en 1929, il termina la biographie de son beau-père à laquelle sir John Stephen Willison* travaillait au moment de sa mort. Il poursuivit également ses prises de position sur une foule de sujets. À titre d’administrateur, il préconisait le développement d’un fonctionnariat bien formé, professionnel et indépendant tant au niveau fédéral que provincial. Il exprimait ses critiques à l’égard du système d’éducation du Canada, particulièrement en Ontario, et proposait des changements pour le rendre moins bureaucratique et plus libéral.

Parmi les principales préoccupations de Grant figurait un meilleur accès à une éducation de qualité pour les membres méritants de la classe ouvrière et les minorités ethnoculturelles. Selon deux historiens de la Workers’ Educational Association of Toronto and District, il fut le « chef de file » de la création, en 1918, de l’organisation qui collaborait avec le mouvement ouvrier afin d’offrir des cours pour les hommes et les femmes de la classe ouvrière. Il donna lui-même l’un des premiers cours, contribua à créer des sections dans toute la province et, après la formation de la section ontarienne en 1923, il en devint le président provincial. Membre fondateur de la World Association for Adult Education en 1918, il joua un rôle essentiel dans les discussions qui conduisirent à la formation de la Canadian Association for Adult Education en 1935. Il soutint aussi assidûment le collège Frontière [V. Alfred Fitzpatrick]. En 1932, il devint premier président du congrès du lac Couchiching de l’Institut canadien des affaires internationales (peu après renommé Institut canadien des affaires publiques), qui poursuivait une mission d’éducation publique par le moyen de l’étude coopérative.

Dans ces entreprises et bien d’autres, Grant acquit la réputation d’avoir ce que le Daily Mail and Empire décrivit comme « des aptitudes pour la tolérance, l’humanité et la noblesse ». Le journal se déclara particulièrement impressionné par sa participation au premier séminaire canadien sur les relations entre Juifs et Gentils, organisé par Claris Edwin Silcox*, en avril 1934. (Maude Erskine entretenait une amitié avec le leader sioniste Chaim Azriel Weizmann quand elle vivait à Londres.) Grant demeurait néanmoins un homme de son temps, car il s’en remettait, par exemple, à de vieux stéréotypes comme celui du « bon Juif » pour défendre la cause de la tolérance raciale.

À l’instar de nombreux intellectuels anglophones au Canada après la guerre, Grant avait du mal à concilier son engagement envers l’Empire et sa fierté de l’autonomie de son pays. La plupart des gens de la génération de son père avaient défendu une fédération impériale ; pour sa part, il appartenait à une cohorte qui s’identifiait plus étroitement au Canada qu’à la mère-patrie. Dès son allocution inaugurale à l’UCC, en 1917, il avait clairement exprimé ce nouveau point de vue à ses étudiants : « Nous sommes, et nous devons être, une école canadienne et, pour y arriver, s’il faut de quelque manière ou de plusieurs manières nous éloigner de la tradition d’Eton, alors la rupture doit avoir lieu. »

Le multilatéralisme, la diplomatie internationale, la paix et l’accommodement interculturel supplantèrent graduellement les vieilles priorités de suprématie anglo-saxonne, de solidarité impériale inconditionnelle et de préparation militaire. Tandis que son père avait dirigé l’Imperial Federation League à Kingston, William Lawson Grant présida le chapitre de Toronto de la League of Nations Society in Canada, poste qu’il occupa jusqu’en 1933. Dans ses réflexions après la guerre, William Lawson condamna le chauvinisme qui avait donné le ton au conflit en 1914, remettant en question sa propre attitude à l’époque. Il rejeta catégoriquement le nationalisme ethnocentrique qui avait inévitablement conduit à un conflit interracial. « Sous le regard de Dieu, le seul espoir pour l’humanité semble pour moi résider dans la création d’une citoyenneté internationale, reposant sur un esprit international », déclara-t-il en 1924. « Nous devons apprendre à penser internationalement et à étouffer ce nationalisme étroit, prédateur, qui se déguise en patriotisme. »

À la fin de janvier 1935, William Lawson Grant fut hospitalisé au Toronto General Hospital à la suite d’une pneumonie subite et sévère. Il succomba à sa maladie le 3 février, à trois heures du matin. Ses funérailles, tenues deux jours plus tard dans la chapelle de l’UCC et présidées par des ministres de l’Église unie du Canada, attirèrent des centaines de personnes. Ces dernières comptaient sur la prochaine génération des Grant pour poursuivre le legs de la famille, nourrissant, nota le Daily Mail and Empire, « le grand espoir que le Canada produirait une troisième récolte de serviteurs fidèles et efficaces ». Elles ne seraient pas déçues.

Robert James Talbot

William Lawson Grant a écrit une biographie de son père, en collaboration avec [C.] F. Hamilton : Principal Grant (Toronto, 1904). Il est l’éditeur de Voyages of Samuel de Champlain, 1604–1618 (New York, 1907) et a traduit en anglais l’ouvrage de Marc Lescarbot, The history of New France (3 vol., Toronto, 1907–1914). Grant a également publié Ontario high school history of Canada (Toronto, 1914), ainsi que son édition, en 12 volumes, de Makers of Canada (Londres et Toronto, 1926). Parmi ses autres productions importantes figurent : Canadian constitutional development shown by selected speeches and despatches, with introductions and explanatory notes (Londres, 1907), co-écrit avec H. E. Egerton ; Acts of the Privy Council of England : colonial series (6 vol., Londres, 1908–1912), édité avec James Munro ; Our just cause : facts about the war for ready reference (éd. rév., Londres, [1914 ?]), écrit avec M. et Mme A. [R.] Colquhoun et Colquhoun [E. M. Cookson] ; The tribune of Nova Scotia : a chronicle of Joseph Howe (Toronto, 1915) ; et « A nation of prophets, of sages, and of worthies » : a speech delivered on 18th December, 1917, on his installation as head-master of Upper Canada College ([Toronto, 1917 ?]).

BAC, R11505-0-3.— Queen’s Univ. Arch. (Kingston, Ontario), William Lawson Grant fonds.— « Dr. W. L. Grant, U.C.C. principal, dies in hospital », Daily Mail and Empire (Toronto), 4 févr. 1935 : 1–2.— D. P. Armstrong, « William Lawson Grant », dans The W. L. Grant Fellowship in Adult Education (Toronto, 1969), 9–21.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1912).— [W.] R. Davies, « Some reminiscences of W. L. Grant », dans The W. L. Grant Fellowship in Adult Education, 5–8.— W. H. F[yfe], « William Lawson Grant », Queen’s Rev. (Kingston), 9 (1935) : 38–39.— L. M. Gelber, « Dr. W. L. Grant, a personal appreciation », Queen’s Rev., 4 (1930) : 41–43.— R. B. Howard, Upper Canada College, 1829–1979 : Colborne’s legacy (Toronto, 1979).— C. W. Humphries, « The banning of a book in British Columbia », BC Studies (Vancouver), no 1 (hiver 1968–1969) : 1–12.— Michael Ignatieff, True patriot love : four generations in search of Canada (Toronto, 2009).— The roll of pupils of Upper Canada College, Toronto, January, 1830, to June, 1916, A. H. Young, édit. (Kingston, 1917).— The war book of Upper Canada College, Toronto, A. H. Young, édit. (Toronto, 1923).— « William Lawson Grant », SRC, Mémoires, 3e sér., 29 (1935), proc. : vi–viii.— Donald Wright, The professionalization of history in English Canada (Toronto, 2005).

Bibliographie générale

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Robert James Talbot, « GRANT, WILLIAM LAWSON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 18 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/grant_william_lawson_16F.html.

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Auteur de l'article:    Robert James Talbot
Titre de l'article:    GRANT, WILLIAM LAWSON
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2021
Année de la révision:    2021
Date de consultation:    18 mars 2024