GAUVREAU, PIERRE, menuisier, maçon, entrepreneur, architecte et ingénieur civil, né à Québec le 8 avril 1813, fils de Pierre Gauvreau, charretier, et d’Angèle Ouvrard, dit Laperrière ; le 8 septembre 1835, à Québec, il épousa Marie-Luce Simard ; décédé au même endroit le 16 mai 1884.

Après des études au séminaire de Québec entre 1825 et 1835, Pierre Gauvreau s’initie aux métiers de menuisier et de maçon, soit sur les chantiers, soit en atelier. Il continuait ainsi la tradition familiale puisque deux de ses ancêtres, Guillaume Déguise, dit Flamand, et Girard-Guillaume Déguise*, dit Flamand, s’étaient fait connaître comme maçons sous le Régime français et qu’un de ses cousins, Jean-Baptiste Roy-Audy*, travaillait comme menuisier et artiste. La carrière de Gauvreau se déroule en trois temps : il fait ses premières armes comme menuisier, maçon et entrepreneur de 1835 à 1844, devient ensuite architecte, puis occupe le poste d’architecte et d’ingénieur, d’abord au département des Travaux publics, de 1848 à 1867, ensuite au bureau du commissaire de l’Agriculture et des Travaux publics de la province de Québec de 1867 à 1882.

La première mention qu’on retrouve de Pierre Gauvreau à titre d’entrepreneur remonte à 1837, année où il obtient le contrat de reconstruction de l’église Notre-Dame-de-l’Annonciation à l’Ancienne-Lorette ; l’année suivante, il s’engage, avec Jean-Baptiste Paquet, à démolir les murs du château Saint-Louis à Québec, détruit par le feu. Puis, avec Joseph Vézina, Jean Patry, Toussaint Vézina et d’autres artisans de la construction il érige, dans la région de Québec, une vingtaine de maisons et édifices, dont les plus importants sont l’immeuble de pierre situé à l’angle de la rue Sainte-Famille et de la côte de la Fabrique (1838), occupé plus tard par une succursale de la Banque provinciale du Canada, l’école de Mgr Joseph Signay*, sise sur le chemin du Foulon (1841), et la maison de William Sheppard* (1843), érigée à Sillery. À quelques exceptions près, la plupart de ces constructions relèvent soit d’une conception rudimentaire (elles sont érigées sans le concours d’un architecte), soit d’une conception plus élaborée (on a alors recours à des plans d’architectes, tels les associés Frederick Hacker et Edward Taylor Fletcher, Goodlatte Richardson Browne ou Richard John Cooper).

À partir de 1844, Gauvreau agit à titre d’architecte, ce qui l’amène à dresser, pour d’autres entrepreneurs ou parfois pour lui-même, les plans et devis des édifices projetés. Son style emprunte dès lors des formes plus sobres et plus rigoureuses, adaptées à la tradition architecturale du Bas-Canada ; on peut toutefois discerner dans ses œuvres quelques détails ornementaux conformes à la mode des années 1840. En cinq ans, il dessine ainsi au-delà d’une trentaine de maisons et quelques édifices commerciaux.

Au service des Travaux publics de 1848 à 1882, Gauvreau supervise plusieurs projets gouvernementaux de construction. À ses débuts, il est principalement employé à l’amélioration des bâtiments publics déjà en place puis, durant les années 1850 et 1860, il construit de nombreux quais et quelques phares dans les petites localités jalonnant le Saint-Laurent, de Rimouski à Montréal. Pendant cette période, il dirige également la construction d’une douzaine de palais de justice, d’après les plans de l’architecte Frederick Preston Rubidge*. À compter de 1870, Gauvreau commence à dessiner les plans de certains bâtiments publics à Québec ; on lui attribue notamment le bureau de poste de la rue Buade (1870), dont la façade d’une largeur de 108 pieds est empruntée au style néo-renaissance français, de même que l’observatoire du parc des Champs de bataille (1873). Entre 1877 et 1879, Gauvreau participe en compagnie d’Eugène-Étienne Taché à l’élaboration des plans du parlement de Québec.

Gauvreau ne semble avoir effectué qu’une seule incursion en architecture religieuse. En 1846, la fabrique de Saint-Roch-des-Aulnaies fait appel à ses services, après que le plan pour une nouvelle église, soumis par Charles Baillairgé*, eut été jugé trop semblable à celui de Sainte-Anne-de-la-Pocatière (La Pocatière, Québec). C’est donc sous la direction de Gauvreau qu’est érigée, en 1849–1850, une église néo-gothique. À Saint-Roch-des-Aulnaies, tout comme à travers l’ensemble de l’œuvre de Pierre Gauvreau, on peut constater des traits communs avec les travaux de Charles Baillairgé. Tout porte à croire qu’ils ont puisé respectivement leurs connaissances dans l’héritage de Thomas Baillairgé* et qu’ils ont perfectionné, en même temps, leur métier d’architecte et d’ingénieur.

Très peu innovateur sur le plan formel, Gauvreau a été un bon constructeur, plus préoccupé, semble-t-il, par les qualités structurales d’un édifice que par ses formes. C’est dans cette perspective sans doute qu’il fit breveter, en 1854, une espèce de ciment qu’il venait d’inventer. Le « ciment Gauvreau », fabriqué avec la pierre du cap Diamant, servait surtout dans les maçonneries exposées à l’eau et à l’humidité. On l’utilisa notamment lors de la construction des trois forts de Lévis, vers 1870, et, par la suite, dans divers travaux publics à travers tout le Canada. La cimenterie Gauvreau, située rue d’Aiguillon, disparut avec l’arrivée des cimenteries américaines au début du xxe siècle.

Pierre Gauvreau participa activement à la vie municipale de Québec. Il fut conseiller pour le quartier Saint-Jean (1856–1862), président du comité de l’aqueduc, durant son mandat de conseiller, ainsi que membre du Bureau de commerce (1864).

Gauvreau eut huit enfants, dont trois fils qui œuvrèrent dans le domaine de la construction. Louis-Petrus prit la succession de son père comme architecte au service des Travaux publics ; Théophile-Elzéar et Théophile-Alfred reprirent la cimenterie et fabriquèrent aussi du plâtre de Paris. Les Gauvreau habitaient tous rue d’Aiguillon, dans le faubourg Saint-Jean. Paralysé les 18 derniers mois de sa vie, après une attaque d’apoplexie, Gauvreau mourut à Québec le 16 mai 1884.

Longtemps fonctionnaire, Pierre Gauvreau fut avant tout un architecte de chantier participant beaucoup plus à l’exécution des travaux de construction qu’à la conception des plans. Les quelques bâtiments qu’il a conçus lui-même ne sont qu’une réplique des modèles de l’architecture traditionnelle. Personnage conservateur et méticuleux, Gauvreau n’innova guère en matière d’architecture civile ; les rapports annuels qu’il soumettait au bureau du commissaire de l’Agriculture et des Travaux publics en témoignent.

Luc Noppen et A. J. H. Richardson

ANQ-Q, État civil, Catholiques, Notre-Dame de Québec, 8 avril 1813, 8 sept. 1835 ; Minutiers, Henri Bolduc, 9 oct. 1866 ; E. G. Cannon, 18 oct. 1845, 14 août, 14 oct. 1847, 21, 28 févr., 6 juill., 7 sept. 1850, 14 avril 1851 ; C.-M. De Foy, 9 janv. 1844 ; Josiah Hunt, 30 janv. 1830, 2 avril 1839 ; Alexandre Lemoine, 27 oct. 1849 ; C.-S. L’Espérance, 24 avril 1862 ; E. B. Lindsay, 9 août 1849 ; Joseph Petitclerc, 27 févr. 1839, 24, 25 avril, 8 mai 1857 ; J.-B. Pruneau, 10 mars 1866 ; A.-B. Sirois-Duplessis, 8 oct. 1864 ; Félix Têtu, 17 juin 1844.— APC, RG 11, A1, 8, n1 017.— AP, Saint-Roch-des-Aulnaies, Reg. des délibérations du conseil de la fabrique, 1846, 1849.— AVQ, Procès-verbaux du conseil, 1856–1862.— Canada, Parl., Doc. de la session, 1883, VI : n10 ; VII–VIII : n10a.— Québec, Parl., Doc. de la session, 1870, IV, n17, app.11 ; 1882, I, n2.— L’Événement (Québec), 19 mai 1884.— Canadian biog. dict., II : 164s.— Quebec directory, 1853–1884.— P.-G. Roy, Fils de Québec (4 sér., Lévis, Québec, 1933), III : 181s.— M. Hamelin, Premières années du parlementarisme québécois, 103.— Gérard Morisset, Peintres et tableaux (Québec, 1936), I : 241s.— Marcel Plouffe, « Quelques particularités sociales et politiques de la charte, du système administratif et du personnel politique de la cité de Québec, 1833–1867 » (thèse de m.a., univ. Laval, 1971).« Le ciment Gauvreau », BRH, 47 (1941) : 216s.

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Luc Noppen et A. J. H. Richardson, « GAUVREAU, PIERRE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/gauvreau_pierre_11F.html.

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Auteur de l'article:    Luc Noppen et A. J. H. Richardson
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1982
Année de la révision:    1982
Date de consultation:    22 déc. 2024