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DANDURAND, DAMASE, premier oblat de Marie-Immaculée d’origine canadienne, architecte et vicaire général, né le 23 mars 1819 à Laprairie (La Prairie, Québec), fils de Roger-François Dandurand, notaire, et de Marie-Jovite Descombes-Porcheron ; décédé le 13 avril 1921 à Saint-Boniface (Winnipeg).
Après avoir perdu son père le 14 décembre 1821, Damase Dandurand a vu sa mère se remarier, le 15 juin 1825, au notaire Pierre-Paul Démaray*. Il fréquente d’abord une école anglaise à Montréal, tout en logeant chez son oncle Gordon Forbes, qui lui inspire le goût de la construction et de l’architecture. Il acquiert alors une bonne connaissance de l’anglais, qui lui sera indispensable dans ses futures attributions. Il revient ensuite à Saint-Jean (Saint-Jean-sur-Richelieu), lieu du domicile de sa mère, où, en raison de sa santé délicate, il poursuit ses études jusqu’aux belles-lettres sous la direction de précepteurs ; de 1832 à 1835, il termine ses études classiques au collège de Chambly.
À l’âge de 16 ans, Dandurand opte pour la vie sacerdotale. Il enseigne désormais au collège de Chambly tout en y étudiant la théologie. Sa remarquable précocité témoigne de talents au-dessus de la moyenne. Appelé à Montréal en 1840, il passe par le grand séminaire et aurait été au service de Mgr Charles-Auguste-Marie-Joseph de Forbin-Janson*, alors de séjour au Canada. Avec dispense d’âge, il est ordonné prêtre à Montréal le 12 septembre 1841 par Rémi Gaulin*, évêque de Kingston. Le 2 décembre suivant arrivent de France six oblats de Marie-Immaculée, missionnaires qu’Ignace Bourget*, évêque de Montréal, a fait venir au Canada par l’entremise de leur fondateur, Charles-Joseph-Eugène de Mazenod, évêque de Marseille [V. Jean-Baptiste Honorat*].
Dandurand songe immédiatement à se joindre à eux. Il commence son noviciat le 24 décembre et prononce ses vœux à Noël de l’année suivante. Dès lors, il participe à de nombreuses missions ou retraites dans le diocèse de Montréal et jusqu’au delà des frontières américaines. Sa présence est particulièrement recherchée là où résident des catholiques anglophones. Au début de 1844, il effectue deux grandes tournées dans les Cantons-de-l’Est (incluant Stanbridge, Dunham, Granby et Stanstead). En mai, les oblats venant d’être chargés de la mission catholique de Bytown (Ottawa), il est désigné pour s’y occuper de la communauté irlandaise mais, l’année suivante, à l’arrivée d’un authentique fils de l’Irlande, le père Michael Molloy, il reprend sa prédication dans le diocèse de Montréal.
En 1847, Dandurand est rappelé à Bytown en raison de l’épidémie de typhus qui y sévit. Terrassé par la maladie après quelques semaines, il gardera de cet épisode une vision d’horreur. Peu après son rétablissement, il est nommé, par Joseph-Bruno Guigues*, oblat de Marie-Immaculée qui est devenu évêque du lieu, curé de la paroisse de Notre-Dame, fonction qu’il assumera de 1848 à 1874. Au cours de ces années, il contribue à la construction de la cathédrale, commencée en 1841, en corrigeant le jeu des fenêtres des murs latéraux de l’église (il transforme la rangée de fenêtres superposées en une rangée de grandes fenêtres), en faisant élever deux tours et prolonger la nef par une profonde abside, tout cela en style gothique et d’après ses propres devis. Prêtre généreux et entreprenant, il participe aux développements qui permettent au bourg mal famé de Bytown de se hisser au rang de capitale. Il soutient notamment les œuvres d’enseignement et de charité de celles qui deviendront les Sœurs de la charité d’Ottawa [V. Élisabeth Bruyère*] en leur destinant certaines aumônes de paroissiens et en orientant vers elles des jeunes filles indécises quant à leur avenir. Il aurait également obtenu le concours des Frères des écoles chrétiennes. À diverses reprises, il administre officiellement le diocèse en l’absence de l’évêque dont il devient, en 1862, le vicaire général.
Certains supérieurs religieux de Dandurand, dont le père Florent Vandenberghe, soupçonnent que l’évêque ne respecte pas toujours les intérêts des oblats de Marie-Immaculée. Également inquiets des conséquences juridiques de l’administration du vicaire général, ils décident en 1870 de mettre un terme à la convention qui, depuis 1856, définissait le rôle des oblats à Ottawa, mais consentent à laisser Dandurand au service du diocèse. S’il a connu des situations conflictuelles, ce dernier n’avait rien d’un idéologue, se situant plutôt dans la ligne de pensée de son évêque dont les mandements (vraisemblablement écrits par d’autres) comportaient une forte tonalité ultramontaine, mais dont le gouvernement était plutôt empreint de réalisme et de compromis.
À la mort de Mgr Guigues, survenue le 8 février 1874, Dandurand devient administrateur du diocèse sede vacante, selon les volontés du défunt, qui l’a également désigné comme le plus apte à lui succéder : « Il a été mon bras droit, mon appui, ma consolation, un autre moi-même », a écrit Mgr Guigues quelques mois plus tôt. Cependant les oblats s’opposent à ce qu’un des leurs soit nommé ; de plus, les avis sont partagés au sujet de Dandurand. Au bout d’une douloureuse attente, le choix contesté de Mgr Joseph-Thomas Duhamel* ajoute à son désarroi. Il songe même un moment à passer au clergé séculier.
À l’évidence, Dandurand se trouve plongé dans une profonde dépression. Il accepte toutefois, comme mesure de diversion, un voyage en France, mais refuse la cure qu’on lui propose en Angleterre. C’est alors qu’Alexandre-Antonin Taché*, archevêque de Saint-Boniface, l’invite au Manitoba. L’acclimatation est pénible et Dandurand a l’impression de se survivre à lui-même. De fait, il restera à l’écart des énormes transformations que connaîtra l’Ouest à cette époque. Après un bref séjour dans la ville naissante de Winnipeg (1875–1876), il devient en 1876 le curé de la paroisse voisine, Saint-Charles, composée majoritairement de Métis. Il demeure à ce poste jusqu’en 1900.
Dandurand est octogénaire quand Adélard Langevin*, archevêque de Saint-Boniface depuis 1895, lui offre l’hospitalité de sa maison. À Saint-Boniface, loin de demeurer oisif, il s’occupe avec zèle et compassion des vieillards et des orphelines de l’hospice Taché et de l’hospice d’Youville jusqu’en 1915, année où il se retire au juniorat de la Sainte-Famille, parmi ses frères en religion.
À l’occasion de la célébration de son centenaire, Damase Dandurand, encore alerte de corps et d’esprit, a célébré la messe et pris plusieurs fois la parole. Il a fini ses jours en pleine lucidité, entouré de respect et d’affection. Inhumé le 16 avril 1921 dans le cimetière du juniorat, après des funérailles à la cathédrale de Saint-Boniface, il laissait le souvenir d’un vieillard rasséréné, tendre et attentif aux autres. Dans la première partie de sa vie, tout en demeurant en dehors des conflits de langues et de nationalités, il a contribué à l’adaptation de ses confrères européens aux réalités canadiennes et à la définition d’un rôle de premier plan pour les oblats de Marie-Immaculée à Ottawa.
On trouve des renseignements sur le père Damase Dandurand dans plusieurs dépôts d’archives, notamment dans les Arch. paroissiales de Notre-Dame (Ottawa), pour les années 1844–1845 et 1848 à 1875, de Sainte-Marie (Winnipeg), pour 1875–1876, de Saint-Charles, au Manitoba, de 1876 à 1900, de la cathédrale de Saint-Boniface (Winnipeg), ainsi que dans les Arch. de l’archidiocèse d’Ottawa, dossier paroisse Notre-Dame ; ce dépôt conserve de plus un document intitulé « Archives of the Catholic Church of Bytown » qui est en partie dû au père Dandurand. D’autres informations se retrouvent également dans les Arch. de la chancellerie de l’archevêché de Montréal, RC 4 : ff. 54, 65r., de l’archidiocèse de Québec, 321 CN (diocèse d’Ottawa), et de l’archevêché de Saint-Boniface (Winnipeg), dossier paroisse Saint-Charles. On consultera aussi : Arch. Deschâtelets, oblats de Marie-Immaculée (Ottawa), HEB 3178.D15 (dossier Damase Dandurand) ; Arch. provinciales O.M.I. (Montréal), Codex historicus, Longueuil, et Dossier Dandurand ; Arch. générales des oblats de Marie-Immaculée (Rome), Dossier Damase Dandurand, Dandurand à Mazenod, 3 déc. 1845 ; Archivio della Propaganda Fide (Rome), Scritture originali riferite nelle Congregazioni generali, vol. 1003 ; Arch. des Sœurs grises (Winnipeg), Chroniques de la maison vicariale de Saint-Boniface, VII–VIII.
ANQ-M, CE601-S3, 24 mars 1819.— Le Devoir, 14 avril 1921.— La Presse, 22 mars 1919.— Gaston Carrière, Dictionnaire biographique des oblats de Marie-Immaculée au Canada (4 vol., Ottawa, 1976–1989), 1 : 248s. ; Histoire documentaire de la Congrégation des missionnaires oblats de Marie-Immaculée dans l’est du Canada (12 vol., Ottawa, 1957–1975), 1 ; « la Vocation oblate du père Damase Dandurand », Études oblates (Ottawa), 15 (1956) : 159–163.— Le Centenaire du R. P. Damase Dandurand, o.m.i. (Saint-Boniface [Winnipeg], 1919).— Robert Choquette, l’Église catholique dans l’Ontario français du dix-neuvième siècle (Ottawa, 1984).— [Georges Derouzier, dit] père Alexis de Barbezieux, Histoire de la province ecclésiastique d’Ottawa et de la colonisation dans la vallée de l’Ottawa (2 vol., Ottawa, 1897).— « Feu le R. P. Damase Dandurand, o.m.i. », les Cloches de Saint-Boniface (Saint-Boniface), 20 (1921) : 63–68.— Émilien Lamirande, Une figure méconnue, Damase Dandurand (1819–1921) : le premier oblat canadien (Ottawa, 1996).— Normand Pagé, la Cathédrale Notre-Dame d’Ottawa ; histoire, architecture, iconographie (Ottawa, 1988).
Émilien Lamirande, « DANDURAND, DAMASE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/dandurand_damase_15F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/dandurand_damase_15F.html |
Auteur de l'article: | Émilien Lamirande |
Titre de l'article: | DANDURAND, DAMASE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
Année de la révision: | 2005 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |