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CHIPMAN, GEORGE FISHER, éducateur, journaliste, rédacteur en chef, réformateur social et militant politique, et horticulteur, né le 18 janvier 1882 à Nictaux West, Nouvelle-Écosse, fils de Frederick Miles Chipman et d’Annie Sibella Fisher ; le 23 juillet 1907, il épousa à River Hebert, Nouvelle-Écosse, Emily Raymond Christie (décédée en 1952), et ils eurent un fils et une fille ; décédé le 26 décembre 1935 à Charleswood (Winnipeg) et inhumé au cimetière Elmwood de Winnipeg.
George Fisher Chipman naquit dans la ferme fruitière de sa famille, dans la vallée d’Annapolis en Nouvelle-Écosse. Son père tenait un rôle de leader au sein du mouvement coopératif qui rassemblait les producteurs de fruits locaux. George Fisher fréquenta l’école secondaire à Middleton, où il fut un athlète amateur actif. Après l’obtention de son diplôme à l’école normale de Truro, vers l’âge de 17 ans, il devint enseignant. Il occupa le poste de directeur d’une école secondaire de River Hebert durant trois ans. En août 1903, il se rendit dans les Territoires du Nord-Ouest pour participer à une excursion avec un groupe de moissonneurs. Il donna ensuite des cours à Cardston (Alberta) pendant quelques mois, puis dans la région de Leduc.
Las de ses conditions de vie difficiles et de sa maigre rémunération d’enseignant, Chipman s’installa à Winnipeg en 1905 et commença à travailler à la pige pour le Manitoba Free Press. Plus tard, devenu journaliste salarié, il couvrit les enquêtes policières, puis l’activité parlementaire provinciale. Il écrivit aussi des articles pour le Busy Man’s Magazine de John Bayne Maclean*, publié à Toronto, et pour d’autres périodiques. Le désenchantement de Chipman, à la suite de son expérience dans les écoles des Territoires du Nord-Ouest, influencerait son opinion sur l’éducation du nombre grandissant d’immigrants non anglophones dans l’Ouest canadien. Il favorisait un système scolaire non confessionnel où l’anglais constituait la seule langue d’instruction. Selon lui, cette approche représentait un élément crucial de la fusion des cultures, moyen de façonner le « nouveau Canadien », dont il fit la promotion dans l’édition de septembre 1909 du Canadian Magazine.
La même année, des membres de la Manitoba Grain Growers’ Association demandèrent à Chipman d’aider le leader agricole Roderick McKenzie à publier l’hebdomadaire de Winnipeg intitulé Grain Growers’ Guide. Chipman se vit rapidement nommé rédacteur en chef adjoint. Il devint rédacteur en chef en 1910, poste qu’il conserverait jusqu’à sa mort, décidant ainsi du programme éditorial du journal durant près d’un quart de siècle. Organe officiel d’associations de producteurs dans les trois provinces des Prairies, le Grain Growers’ Guide offrait des conseils sur l’élevage et les pratiques culturales ; sous la direction de Chipman, il épousa également des causes telles que le Social Gospel, la prohibition et le droit de vote des femmes. Il en coûtait cinq cents pour un exemplaire et un dollar pour un abonnement annuel en 1911. Parmi les nombreux collaborateurs figuraient Salem Goldworth Bland*, James Shaver Woodsworth*, William Charles Good*, William Irvine* et Mary Irene Parlby [Marryat*]. En 1912, Chipman invita la féministe Francis Marion Beynon* à devenir la rédactrice de la section féminine ; elle se montrerait en total désaccord avec le soutien de Chipman à la conscription durant la Première Guerre mondiale. Ce dernier était l’un des rares hommes à appartenir à la Political Equality League, fondée notamment par Helen Letita McClung [Mooney*] la même année. La ligue exerçait des pressions pour l’obtention du droit de vote des femmes au Manitoba, ce qui advint en 1916.
Pendant ses premières années à la rédaction du Grain Growers’ Guide, Chipman défendit ardemment les bienfaits économiques, puis éthiques, de l’action concertée, surtout en ce qui concernait la commercialisation du grain par la Grain Growers’ Grain Company Limited (qui se joignit aux Fermiers unis de l’Alberta en 1917 pour former la United Grain Growers Limited). Partageant l’opinion des fermiers de l’Ouest, Chipman croyait que le libre-échange avec les États-Unis s’avérait essentiel au succès de l’industrie de la culture du blé dans les Prairies. Cet avis, que les fermiers de l’Ouest adressèrent à sir Wilfrid Laurier*, influença le premier ministre dans sa décision de négocier une entente de réciprocité avec les États-Unis en novembre 1910. Le mois suivant, Chipman participa à l’organisation d’une délégation : près de 800 fermiers de l’Ouest se rendirent ainsi à Ottawa afin de plaider leur cause devant le Parlement [V. James Speakman*]. Cependant, les libéraux perdirent les élections de 1911, et le nouveau gouvernement conservateur de Robert Laird Borden se retira de l’accord commercial.
Avec le Canadian Council of Agriculture, fondé en 1909, Chipman fit du lobbyisme à l’échelle nationale au nom des fermiers, qui désiraient des terminaux (élévateurs terminaux pour recevoir le grain), des normes de pesée, l’étatisation des silos et la création d’un conseil de commissaires qui aurait autorité en matière de commerce du grain. Il préconisait une coalition entre les fermiers et les ouvriers agricoles. Initialement, il encouragea ses lecteurs à considérer favorablement la grève générale de Winnipeg de 1919 [V. Mike Sokolowiski*] ; il changea toutefois d’avis lorsque la situation dégénéra. Dans le numéro du 2 juillet du Grain Growers’ Guide, après les événements du « samedi sanglant », il se dit reconnaissant que « la loi et l’ordre » aient prévalu.
En 1916, Chipman avait participé à la création de la plateforme nationale des fermiers du Canadian Council of Agriculture, qui devint la base de celle du Parti progressiste fédéral, formation agricole et populiste fondée au début de 1920, notamment par Thomas Alexander Crerar*. En cette même année 1920, la Manitoba Grain Growers’ Association adopta le nom de Fermiers unis du Manitoba (FUM) et présenta des candidats aux élections provinciales. Chipman prit part à la campagne du groupe, qui remporta 12 des 55 sièges. Aux élections suivantes, en juin 1922, les FUM obtinrent le plus grand nombre de sièges. Quarante-trois personnes, dont Chipman et sept autres candidats de son parti, tentèrent de gagner l’un des dix sièges alloués à Winnipeg. Chef de facto de la formation, il aurait pu – n’eût été sa défaite – devenir premier ministre du Manitoba, selon nombre de ses contemporains. Conséquemment, les FUM recrutèrent John Bracken*, directeur du Manitoba Agricultural College. Avec ses partisans, Bracken revendiqua rapidement l’étiquette progressiste. Il accéda au poste de premier ministre, qu’il conserverait durant plus de 20 ans.
Chipman ralentit ses activités politiques dans les années 1920 ; il servit néanmoins au sein de la commission royale sur l’éducation du Manitoba en 1923 et 1924 [V. John Bracken]. Il s’intéressa de plus en plus à l’horticulture et à la revitalisation du Grain Growers’ Guide. Sous sa direction, le tirage du périodique avait augmenté : de 33 000 exemplaires en 1914, il passa à environ 75 000 en 1919. Le nombre d’abonnements stagna ensuite durant quelques années. La revue se transforma graduellement : d’agent de réforme politique, elle devint une source d’informations pour toute la famille. En avril 1928, on la renomma Country Guide (son lieu de parution demeura Winnipeg). Selon la nécrologie de Chipman publiée dans le Winnipeg Free Press le 27 décembre 1935, il parvint à lui faire atteindre un tirage de 130 000 exemplaires.
Durant les années 1920, Chipman avait également lancé un programme d’amélioration des plantes dans sa propriété de Charleswood, au sud-ouest de Winnipeg. Dans cette ferme expérimentale – dont la superficie s’étendit de 4 à 17 acres –, il cultiva des variétés de fruits et de légumes (surtout des pommes et des prunes, mais aussi des groseilles à maquereau, des fraises, des framboises et de la rhubarbe) plus particulièrement appropriées au climat des Prairies. Il s’inspirait des travaux de William Saunders*, qui avait dirigé le réseau des fermes expérimentales du dominion de 1886 à 1911. Chipman ne réussit pas à créer la « pomme à un million de dollars », variété robuste qui aurait pu s’épanouir durant la saison estivale sèche et chaude, et survivre au froid intense de l’hiver ; ce fut l’un de ses rêves inassouvis. Il rédigea des articles sur ses méthodes horticoles, qu’il publia dans sa revue et dans de nombreux opuscules et communiqués spéciaux. Très largement reconnu en sa qualité d’expert de la culture de fruits dans les Prairies, il distribua des semis à des centaines de fermiers de l’ouest du pays, et conseilla des horticulteurs des quatre coins du Canada et des États-Unis.
Durant les années 1920 et au début des années 1930, George Fisher Chipman vivait dans une banlieue prospère de la classe moyenne de Winnipeg avec sa femme, Emily Raymond, et leur famille. Il appartint très longtemps à l’église First Baptist et au Club de Manitoba. Le 26 décembre 1935, alors qu’il chassait les lapins qui menaçaient ses précieux pommiers, Chipman trébucha sur une souche couverte de neige, déchargeant accidentellement son arme à feu. Il reçut une balle dans la tête et mourut sur le coup. Emily Raymond poursuivrait ses expériences horticoles. En 1938, en reconnaissance posthume de ses contributions à l’agriculture des Prairies, la Manitoba Horticultural Association décerna à Chipman la Stevenson Memorial Gold Medal.
George Fisher Chipman a écrit « Winnipeg : the melting pot », Canadian Magazine, 33 (mai–octobre 1909) : 409–416.
AM, ATG 0025A (Winnipeg estate files), GR4297, file 24131, George Fisher Chipman, Q 2.— BAC, R233-37-6, N.-É., dist. Annapolis (26), sous-dist. Nictau (W) : 9 ; R233-114-9, Manitoba, dist. Winnipeg South (40), sous-dist. Winnipeg (43) : 2.— Winnipeg Free Press, 27–28 déc. 1935 ; 22 juill. 1952 ; 21 nov. 1978.— Annuaire, Winnipeg, 1905–1935.— Ramsay Cook, « Francis Marion Beynon and the crisis of Christian reformism », dans The west and the nation : essays in honour of W. L. Morton, Carl Berger et Ramsay Cook, édit. (Toronto, 1976), 187–208.— « Four Nova Scotia families : Hennigar, Elliott, Harvey, Chipman » : www.hhennigar.ca/index.php (consulté le 23 mai 2018).— « George Chipman passes », Country Guide (Winnipeg), janvier 1936 : 2.— Grain Growers’ Guide (Winnipeg), 1909–1911.— Debbie Hathaway, « The Political Equality League of Manitoba », Manitoba Hist. (Winnipeg), no 3 (1982) : 8–10.— Elaine Kisiow, « George F. Chipman – a prairie cooperator : an analysis of editorials written from 1911 to 1916 in relation to the cooperative movement in western Canada by George F. Chipman, editor-in-chief of The Grain Growers’ Guide, 1911 to 1935 » (mémoire de m.a., Univ. of Winnipeg, 1983).— Ian MacPherson, « George Chipman and the institutionalization of a reform movement », Manitoba, Hist. and Scientific Soc., Papers (Winnipeg), 3e sér., no 32 (1975–1976) : 53–65.
Gordon Goldsborough, « CHIPMAN, GEORGE FISHER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/chipman_george_fisher_16F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/chipman_george_fisher_16F.html |
Auteur de l'article: | Gordon Goldsborough |
Titre de l'article: | CHIPMAN, GEORGE FISHER |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2023 |
Année de la révision: | 2023 |
Date de consultation: | 20 déc. 2024 |