SMITH, RICHARD, ingénieur minier et administrateur, industriel et homme politique, né le 30 janvier 1783 à Tipton, Staffordshire, Angleterre, fils de Thomas Smith et de Mary Morris, décédé le 21 juillet 1868, près de Lichfield, Staffordshire, Angleterre.

Fils d’un exploitant de houillères du sud du Staffordshire, Richard Smith étudia à la Royal School of Mines et acquit « dès [sa] jeunesse » une solide connaissance des charbonnages. Le 12 juin 1811, il épousa Elizabeth Fereday, fille de Samuel Fereday, important métallurgiste et charbonnier du « Pays noir ». L’avenir de Smith parut moins prometteur cependant, quand Fereday et lui subirent de lourdes pertes financières lors de l’effondrement de la vague de prospérité dans le fer et le charbon, qui marqua la fin des guerres napoléoniennes. Ces années d’expérience pratique lui ayant permis de connaître à fond le charbonnage, Smith refit sa fortune à Londres, tout en gérant des houillères dans le pays de Galles et au Portugal.

En 1826, en vertu de la prérogative royale, George IV accorda à son frère le duc d’York une concession de 60 ans sur toutes les ressources minérales inexploitées de la Nouvelle-Écosse, et le duc sous-loua les droits à ses créanciers, les joailliers londoniens Rundell, Bridge, and Rundell. Sur l’avis du cabinet britannique, la Général Mining Association, filiale minière de la maison de joaillerie, engagea Richard Smith afin d’exploiter ses mines de charbon en Nouvelle-Écosse.

À son arrivée à Pictou au début de l’été de 1827, Smith installa son importante équipe d’ouvriers et sa machinerie sur un emplacement situé à sept milles en amont de la rivière East, et qu’il nomma Albion Mines (aujourd’hui Stellarton). Pendant environ 20 ans, on y avait exploité le charbon sur une échelle réduite. Les concessionnaires voisins acceptèrent de vendre leurs concessions à la Général Mining Association et, sous la supervision de Smith, on fit de la maçonnerie de briques, on construisit des bâtiments, des quais, des fours à coke, une scierie, une fonderie, ainsi qu’un chemin de fer à traction chevaline. Bien que Smith trouvât dans le sol le gaz « abondant, presque sans précédent, et l’eau fort incommodante », le premier charbon de la General Mining Association fut extrait en septembre d’un puits de 212 pieds, nouvellement ouvert. Le 7 décembre, une machine à vapeur de 20 horse-power, vraisemblablement la première au Canada, commença à pomper l’eau et à remonter le charbon de la mine ; sa cheminée de 75 pieds devint un point de repère local. Tout aussi impressionnante était la demeure de briques de Smith, Mount Rundell, résidence fastueuse érigée sur un domaine pittoresque surplombant les installations industrielles. Bientôt, un flot régulier de visiteurs vint voir les nouveautés des mines de charbon et prendre plaisir à la vie sociale animée que menaient le représentant de la General Mining Association et sa femme à Mount Rundell.

En 1830, Smith se consacra à l’exploitation des importants gisements houillers de l’île du Cap-Breton, où les activités de la General Mining Association avaient été dirigées, depuis 1826, par le jeune ingénieur minier Richard Brown, l’un des futurs agents principaux de la General Mining Association. Là également, après un moment de confusion concernant les modalités de la concession de la compagnie, la General Mining Association reprit la concession de petits exploitants, complétant son monopole sur les ressources houillères de la colonie. Un groupe sans cesse croissant d’hommes s’établit à Sydney Mines, où l’on extrayait le charbon depuis 1785. La machinerie apparut et on construisit des bâtiments. Sous la direction de Smith et de Brown, on creusa un nouveau puits sur le gisement principal et on installa des machines à vapeur, mais l’exploitation fut retardée de deux ans en raison des problèmes posés par les pompes à eau et le fort afflux d’eau dans la mine. On ouvrit aussi des mines de moindre importance à Bridgeport et à Little Bras d’Or. En 1833, la General Mining Association employait plus de 900 hommes en Nouvelle-Écosse, et la production de charbon avait triplé, atteignant plus de 50 000 tonnes par année.

Smith s’était aussi lancé avec énergie dans la vie politique de la colonie. Au nom de la General Mining Association, il fit du lobbying à l’Assemblée pour l’obtention d’une clause spéciale dans toutes les concessions de terres, précisant les droits miniers de la General Mining Association, s’opposa à l’idée d’une taxe à l’exportation sur le charbon que favorisaient des membres de l’Assemblée, obtint une surveillance plus étroite de la contrebande de charbon sur les côtes de l’île du Cap-Breton, exigea des peines exemplaires contre les présumés coupables lors d’un incendie à Albion Mines en 1832 et, dans l’ensemble, sauvegarda les intérêts de la compagnie. L’importance des capitaux investis par la Général Mining Association lui valut le soutien local, tout comme le firent l’habileté et l’énergie de Smith dans le développement des exploitations houillères. Cependant, Smith eut aussi à faire face à la critique croissante au sujet du monopole que détenait la compagnie et des conditions généreuses de la concession dont elle jouissait. En effet, l’insistance de Smith pour l’application stricte de ces privilèges ternit son image de bienfaiteur de la colonie. L’Assemblée s’éleva surtout contre les impôts et redevances minimes que payait la compagnie, parce que les mines de charbon promettaient d’être une source importante du revenu de la colonie. En 1837, les réformistes tels que Joseph Howe* étaient devenus des adversaires résolus de la General Mining Association, mais ce ne fut qu’en 1857 que les droits miniers furent finalement rapatriés et que le monopole de la General Mining Association fut restreint.

L’acrimonie fut à son comble en 1832 lorsque Smith posa sa candidature à un nouveau siège dans le comté de Cap-Breton contre William Young*, allié du groupe réformiste naissant [V. Laurence O’Connor Doyle]. Sur les tribunes, le débat fut violent entre le « monopolisateur » et le « patriote » : à Sydney, les partisans de Smith s’armèrent de gourdins et, dans les secteurs ruraux, ceux de Young s’emparèrent des bureaux de scrutin. Young fut proclamé élu, mais, à la demande de Smith, l’Assemblée, après avoir enquêté sur les accusations d’intimidation et d’irrégularités qu’il porta, invalida l’élection de Young et déclara Smith élu. Ce dernier siégea pendant une partie des sessions de 1833 et 1834, mais retourna en Angleterre en mai 1834.

Lorsqu’il partit, Smith avait vraisemblablement peu de regrets. Il n’avait guère apprécié les rigueurs de la vie en Nouvelle-Écosse. Agressif et autoritaire, Smith laissa « des ennemis aussi bien que des amis », selon le Novascotian, et même Joseph Smith, qui succéda à son oncle à la tête des mines de la compagnie, crut sage de rebaptiser l’un des bateaux à vapeur de la compagnie, alors connu sous le nom de Richard Smith. Tout de même, Smith se vit gratifier de plusieurs hommages. Le Halifax Mechanics’ Institute le reçut membre honoraire et Howe nota que Smith avait « dans des circonstances difficiles et pénibles déployé une intelligence, une activité et une abondance de moyens scientifiques, très rarement conjuguées chez un même individu – et dont on a rarement, pour ne pas dire jamais, été témoin en Nouvelle-Écosse ».

En Angleterre, Smith poursuivit sa carrière comme un des « gentlemen professionnels » qui dirigèrent l’expansion industrielle. De 1836 à 1864, il géra les propriétés recelant du charbon, du fer et de la pierre à chaux du comte de Dudley, près de Birmingham, mettant sur pied un vaste réseau de mines, de canaux, de chemins de fer et d’usines sidérurgiques. En 1857, il ouvrit les Round Oak Ironworks, une entreprise modèle qui acquit une renommée internationale. Il remplit aussi pendant un certain temps la fonction de juge de paix et de lord-lieutenant suppléant de Staffordshire. Il se retira à l’âge de 81 ans et mourut quatre ans et demi plus tard.

Dans son ensemble, l’œuvre de Smith en Nouvelle-Écosse est digne d’éloges. Quand il quitta l’industrie du charbon, la capacité de production dépassait de beaucoup la demande : malgré les efforts de Smith et au désappointement de la General Mining Association, les marchés américains s’ouvrirent trop lentement au charbon de la Nouvelle-Écosse. Smith prétendit avoir établi l’exploitation de la houille sur « une base large et scientifique », et de cette façon avoir inauguré la révolution industrielle en Nouvelle-Écosse. De cette réalisation, cependant, Smith doit partager le mérite avec ses adjoints compétents, les ingénieurs miniers Joseph Smith à Albion Mines et Richard Brown à Sydney Mines, et avec les centaines d’inconnus, « ouvriers mineurs, houilleurs, ingénieurs et mécaniciens », également envoyés par la General Mining Association. Au lieu du duc d’York et de ses joailliers, la Nouvelle-Écosse aurait pu fournir le capital et l’esprit d’entreprise pour exploiter les mines de charbon, projet que Samuel Cunard caressait avant l’arrivée de la General Mining Association. Mais la colonie ne pouvait pas fournir les hommes qui possédaient le savoir et l’expérience pratiques de Smith et de ses subordonnés.

David Frank

PANS, MG 1, 89 (S. G. W. Archibald papers, correspondence, 1813–1835) ; 151–159 (Richard Brown papers, documents,1859–1914) ; RG 1,194–196 ; 458–464 ; RG 5, R, 18, 1833 ; RG 21, A, 2–3 ; M, 17–20.— PRO, CO 217/146–157.— Richard Brown, The coal fields and coal trade of the Island of Cape Breton (Londres, 1871 ; réimpr., Stellarton, N.-É., 1899).— G.-B., Parl., House of Commons paper, 1835, V, 603, pp.1–360, Report from the select committee on accidents in mines, together with the minutes of evidence, and index, pp. 223–236, 249–252.— N.-É., House of Assembly, Journal and proc., 1824–1836, 1857–1858.— Acadian Recorder, 1827–1834.— Colonial Patriot (Pictou, N.-É.), 1827–1834.— Mechanic and Farmer (Pictou, N.-É.), 1839.— Novascotian, 1827–1834.— Pictou Observer (Pictou, N.-É.), 1831–1834.— Times (Londres), 1825–1834, 1868.— Directory of N.S. MLAs.— J. M. Cameron, The Pictonian colliers (Halifax, 1974).— C. O. Macdonald, The coal and iron industries of Nova Scotia (Halifax, 1909).— George Patterson, A history of the county of Pictou, Nova Scotia (Montréal, 1877).— R. P. Fereday, The career of Richard Smith, Acorn [revue de la Round Oak Steel Works Limited, Brierley Hill, West Midlands, Angl.], 1966–1967.— H. B. Jefferson, Mount Rundell, Stellarton, and the Albion Railway of 1839, N.S. Hist. Soc., Coll., XXXIV (1963) : 79–120.— J. S. Martell, Early coal mining in Nova Scotia, Dal. Rev., XXV (1945–1946) : 156–172.

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David Frank, « SMITH, RICHARD », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 16 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/smith_richard_9F.html.

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Auteur de l'article:    David Frank
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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1977
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