RICHARDSON, HARRY ALDEN, banquier, né le 25 mai 1862 à Middleboro, Massachusetts ; il épousa Anne Margaret Macdonald (décédée le 21 février 1942), et ils eurent deux fils et une fille ; décédé le 18 mai 1923 à Toronto.

Harry Alden Richardson grandit et fit ses études à Halifax. Engagé à cet endroit par la Banque de la Nouvelle-Écosse à l’âge de 17 ans, il gravit les échelons – on ignore comment – et passa toute sa carrière au sein de cet établissement. Pendant que la banque, guidée par Thomas Fyshe*, prenait de l’expansion dans les Maritimes, Richardson dirigea des succursales à Sussex et à Newcastle au Nouveau-Brunswick, à Charlottetown, ainsi qu’à Yarmouth en Nouvelle-Écosse, où il eut à faire face aux répercussions financières des débuts de l’industrialisation sur une économie axée sur les activités maritimes. En 1900, au moment même où il prit la tête de la succursale de Toronto (inaugurée en 1897), la direction de la banque décida de transférer son siège social de Halifax dans cette ville afin d’être mieux placée pour tirer parti des possibilités engendrées par la forte croissance économique de l’Ontario et de l’Ouest. La succursale et le siège social logèrent dans l’immeuble de la Compagnie d’assurance du Canada sur la vie, rue King, en attendant que l’édifice de la Banque de la Nouvelle-Écosse soit achevé. Situé non loin de là, cet immeuble fut conçu par le cabinet d’architectes de Frank Darling ; les travaux de construction durèrent de 1902 à 1904.

Pas plus que la Banque de la Nouvelle-Écosse, Richardson ne reçut un accueil chaleureux de la part des banquiers torontois. Par des moyens imaginatifs, il mit fin à leur emprise sur un certain nombre de précieux clients, dont la municipalité de Toronto. Après s’être présenté au trésorier Richard Theodore Coady, il aurait dit « qu’il avait bien envie de flanquer une bonne raclée au gardien [des finances] municipal[es] ». Très surpris, Coady demanda pourquoi. « Parce que vous ne nous avez confié aucune de vos affaires », répondit Richardson. Ainsi naquit une fructueuse relation avec l’hôtel de ville. La Banque de la Nouvelle-Écosse fut la première banque canadienne à publier, à partir de 1902, des états financiers vérifiés, et cette preuve de l’importance accordée à la transparence de la comptabilité par le directeur général Henry Collingwood McLeod donna aussi un avantage à Richardson ; à l’époque, en raison des faillites bancaires, les clients cherchaient à déposer leur argent en lieu sûr. Sa promotion au poste de directeur général en 1910 surprit bon nombre de gens, et peut-être surtout Daniel Waters, le directeur général adjoint. Contrairement à l’irritable McLeod, qui n’avait pas hésité à se disputer ouvertement avec d’autres banquiers pendant qu’il faisait campagne pour l’inspection gouvernementale, Richardson savait, par son humour et son charme, détendre l’atmosphère dans les bureaux de direction de la banque. Pour apaiser certains membres du conseil d’administration, qui en avaient assez des querelles de McLeod, il fit des concessions, par exemple mettre fin à la publication des états financiers vérifiés. Membre de plusieurs clubs torontois et fidèle de l’église presbytérienne St Andrew, il savait comment se comporter en société. Comme il était très sensible à l’image publique des banques en faillite et des banquiers, il affichait des goûts simples et pratiquait l’épargne dans sa vie personnelle. Pendant une bonne partie du temps qu’il passa à Toronto, il se rendit au bureau à pied, vêtu de son éternel pardessus marron. Dès 1914 cependant, il avait fait l’acquisition d’une « grosse voiture avec laquelle il cueillait d’autres banquiers pour discuter affaires et s’entretenir des difficultés que les finances de guerre causaient aux banques ».

Bien que sa manière ait contrasté avec celle de McLeod, Richardson tenait, comme son prédécesseur, à donner des dimensions nationales à la Banque de la Nouvelle-Écosse. Grâce à lui, elle se distinguerait de la plupart des autres banques, qui tardèrent ou n’arrivèrent pas à cibler de nouveaux marchés. En 1910, le secteur bancaire était en plein bouleversement : le capital se concentrait dans le centre du Canada. L’extraordinaire croissance économique engendrait un optimisme débridé ; de nouvelles banques voyaient le jour et d’autres banques, négligées par des gestionnaires vénaux, faisaient faillite. Convaincre les actionnaires de financer de nouvelles succursales et courtiser des clients était difficile, mais Richardson commença à s’intéresser à l’expansion peu après être devenu directeur général. La Banque de la Nouvelle-Écosse ne délaissait pas les Maritimes pour autant : une des premières décisions de Richardson consista à maintenir les avances de fonds à la Nova Scotia Steel and Coal Company pour déjouer une prise de contrôle.

Afin de consolider les marchés et de créer une banque nationale dotée d’un réseau solide, Richardson fit plus qu’implanter de nouvelles succursales. Il prit l’initiative de réaliser des fusions et d’appliquer des mesures internes pour empêcher ses meilleurs directeurs d’aller travailler dans des banques rivales ou dans le secteur lucratif du courtage. Les fusions commencèrent en 1913 par l’absorption de la Bank of New Brunswick. Un an plus tard, ce fut au tour de la Banque métropolitaine, dont le siège social était à Toronto. En 1919, Richardson accomplit son plus grand exploit, à savoir convaincre le ministre fédéral des Finances, sir William Thomas White*, d’autoriser sa banque à acheter la Banque d’Ottawa. Aucune fusion ne pouvait avoir lieu sans l’approbation du cabinet, et White savait que la disparition de nombreuses banques entres 1915 et 1918 avait accru l’inquiétude de la population. Richardson fit valoir au ministre que, si la Banque de la Nouvelle-Écosse achetait la Banque d’Ottawa, elle serait en meilleure position de dégager des sommes pour les exportations – elle finançait plus d’expéditions de céréales à partir de Winnipeg que d’autres banques et avait une bonne expérience de la capitalisation du commerce international – et pourrait donc mieux soutenir le dollar. White accepta, malgré les protestations populaires. Les liens d’amitié qui unissaient Richarson aux directeurs généraux des autres banques, qui avaient tous été à un moment ou à un autre employés de la Banque de la Nouvelle-Écosse, facilitèrent aussi les fusions.

Pendant le premier conflit mondial, Richardson avait mis ses services personnels à la disposition du pays. Lui-même et d’autres grands banquiers, à titre de conseillers de White, facilitèrent la vente d’obligations de guerre à la population et donnèrent un bon coup de main au gouvernement en l’aidant à affronter des urgences et besoins financiers. À plusieurs reprises, Richardson et des collègues de l’Association des banquiers canadiens rencontrèrent White afin de convenir des modalités de crédit pour le ravitaillement de guerre – quoique, étant donné l’hostilité de la population envers les profiteurs, Richardson ait souhaité que personne n’attire l’attention sur les commissions perçues par les banques. Richardson profita de ses contacts avec White pour corriger un autre problème. À mesure que la Banque de Montréal encaissait les gigantesques sommes provenant notamment des emprunts de guerre, il intensifia ses pressions pour que soit cassé le monopole de cette concurrente sur les affaires gouvernementales. En 1918, il dit carrément à White que, grâce à ces énormes dépôts, la Banque de Montréal pouvait réduire ses taux sur les prêts commerciaux et que l’État devait cesser de la favoriser s’il voulait que les banques participent à parts égales au financement des exportations et des engagements gouvernementaux. La Banque de Montréal perdrait sa position privilégiée dans les années 1920.

À la fin des hostilités, Harry Alden Richardson faisait partie de la coterie de conseillers financiers de White, recrutés chez les hauts dirigeants des banques du pays. Vice-président de l’Association des banquiers canadiens au début des années 1920, il se trouvait parmi les grands banquiers canadiens et américains réunis à Toronto en juillet 1922 pour discuter des possibilités de coopération. Frappé par la dépression d’après-guerre, le Canada cherchait alors des solutions nouvelles à de vieux problèmes économiques. Toujours en 1922, Richardson nomma deux directeurs généraux adjoints et accrut le nombre de superviseurs : obligé de se rendre constamment en divers points du Canada et aux Antilles, il n’avait jamais aimé ces voyages. À la différence de McLeod, il ne vogua pas vers la retraite. Il occupait encore la direction générale quand il mourut en 1923, à l’âge de 60 ans ; apparemment, il avait eu des ennuis de santé pendant une bonne partie de sa vie. Selon un cadre de la banque, l’effondrement des prix du sucre aux Antilles et des prix du poisson à Terre-Neuve avait hâté son décès. Un ami dit à son sujet qu’il était « entièrement absorbé par la banque ». De fait, elle était presque tout pour lui : appartenir au conseil d’administration de la Compagnie d’assurance du Canada sur la vie fut, semble-t-il, sa seule autre activité dans le domaine des affaires. La Banque de la Nouvelle-Écosse témoignait de sa réussite en tant que banquier. Ses nombreuses amitiés attestaient qu’il avait une personnalité attachante.

John A. Turley-Ewart

Pour avoir une liste détaillée des sources consultées aux Canadian Bankers’ Assoc. Arch. (Toronto), on consultera J. [A.] Turley-Ewart, « Gentleman bankers, politicians and bureaucrats : the history of the Canadian Bankers’ Association, 1891–1924 » (thèse de ph.d., Univ. of Toronto, 2000). [j. a. t.-e.]

AO, F 977, cimetière Mount Pleasant, Toronto ; RG 22-305, nº 48231 ; RG 80-8-0-910, nº 4266.— Scotiabank Group Arch. (Toronto), Richardson papers.— Toronto Daily Star, 18 mai 1923.— Canadian annual rev., 1916 : 361s. ; 1920 : 57 ; 1922 : 523, 535.— H. V. Cann, Pages from a banker’s journal (s.l., 1933 ; exemplaire à BAC).— J. D. Frost, « The « nationalization » of the Bank of Nova Scotia, 1880–1910 », Acadiensis (Fredericton), 12 (1982–1983), nº 1 : 3–38.— Joseph Schull et J. D. Gibson, The Scotiabank story : a history of the Bank of Nova Scotia, 1832–1982 (Toronto, 1982).— TRL, Biog. scrapbooks (89 vol., Toronto, 1973 ; copie sur mfm dans la coll. de la bibliothèque des AO), 4 : 678.— Vital statistics from N.B. newspapers (Johnson), 81, nº 1990.

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John A. Turley-Ewart, « RICHARDSON, HARRY ALDEN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 23 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/richardson_harry_alden_15F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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