Titre original :  Jean-Baptiste Renaud. Créateur: Livernois Québec. Date: [Vers 1870]. 
Source: http://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/3113773

Provenance : Lien

RENAUD, JEAN-BAPTISTE, négociant, homme d’affaires et conseiller municipal, né à Lachine, Bas-Canada, le 22 juin 1816, fils de Jean-Baptiste Renaud, voyageur, et de Marie Gariépy ; le 18 janvier 1841, il épousa à Montréal Marie-Sophie Lefebvre et ils eurent quatre enfants ; décédé à Québec le 1er mars 1884.

D’origine modeste, Jean-Baptiste Renaud abandonna tôt l’école primaire pour aider son père, malade. Il travailla d’abord comme charretier à Montréal. Son frère Louis* ne tarda pas à venir le rejoindre. Tous deux se marièrent le même jour à la paroisse Notre-Dame de Montréal. L’acte de mariage les identifie comme « charretier ». Vers 1847, Louis Renaud se lança à Montréal dans le commerce des grains, de la farine, et peut-être aussi des aliments en général, puis, l’année suivante, il s’associa avec son frère afin de tenir un magasin, rue Foundling. Louis, dont le nom sera spécifié dans la raison sociale de l’entreprise, semble en avoir été le leader.

Vers 1850, Jean-Baptiste Renaud vint s’établir rue Sainte-Famille, à Québec. Le Quebec directory de 1850–1851 mentionne l’existence de la maison L. Renaud & Brother, spécialisée dans le commerce des denrées. Celle-ci connaît des transformations vers la fin des années 1850 puisque l’annuaire de 1857–1858 ne mentionne que Jean-Baptiste Renaud « marchand de denrées ». Il faisait alors le commerce des grains, de la farine, du poisson et probablement celui des huiles. Durant cette période, Renaud fit construire à Beauport le plus gros moulin à farine de la région de Québec, en plus de deux autres, de moindre envergure, où l’on préparait « de l’orge et des pois fendus d’une qualité supérieure ». Il acquit aussi quelques goélettes pour effectuer le commerce avec les villages en bordure du Saint-Laurent.

Faisant affaire au centre de la vie commerciale régionale, Renaud était conscient que la prospérité de ses affaires reposait sur la croissance des moyens de transport qui relieraient Québec à son arrière-pays. Il crut que le chemin de fer jouerait ce rôle. Durant les années 1857–1858, il figurait parmi les administrateurs de la Compagnie du chemin de fer de la rive nord [V. Guillaume-Eugène Chinic], mais, au fur et à mesure que cette compagnie s’enlisait dans les palabres et d’obscures tractations politiques, il se tourna vers la navigation, sans abandonner cependant tout intérêt dans le domaine ferroviaire. Ainsi, il participa à la reconnaissance juridique de la Compagnie du chemin de fer et de la navigation du Saint-Maurice en 1857, à celle de la Compagnie de navigation de Salaberry à Montréal la même année, puis à celle de la Compagnie de navigation du Saint-Laurent en 1861. Ses intérêts dans le commerce et la navigation l’amenèrent tout naturellement à rayonner dans d’autres secteurs de la vie économique. En 1862, il prit part à la reconnaissance juridique de la Compagnie d’assurance maritime de Québec. On ne sait s’il a été mêlé, en 1865, à la fondation de la Banque d’Union du Bas-Canada qu’un groupe de commerçants de Québec, sous la conduite de Charles E. Levey, fit reconnaître avec un capital de $2 000 000, mais l’annuaire de Québec de 1871–1872 l’inscrit comme un des administrateurs de cette société financière.

Les années 1860 constituèrent pour Renaud une période d’ascension sociale. Membre du conseil du Bureau de commerce de Québec en 1862, il siégea également au conseil municipal de cette ville comme représentant du quartier Saint-Pierre de 1862 à 1868. Loin d’abandonner son intérêt pour le développement des moyens de communication, on le retrouve, de 1866 à 1871, au sein du conseil d’administration de la Compagnie des chemins à barrière de Québec Nord. Il se peut que la diversification de son portefeuille d’actions l’ait amené en 1871 à réorganiser son établissement commercial. Cette année-là, l’annuaire de Québec fait état d’une nouvelle raison sociale : J.-B. Renaud & Co. Le même annuaire, pour l’année 1879–1880, mentionne Jean-Louis Renaud, son fils, Gaspard Le Moine et Victor Chateauvert parmi ses associés. Un peu plus tard, Le Moine et Chateauvert feront l’acquisition de la maison J.-B. Renaud ; on ignore toutefois si ces nouveaux propriétaires géreront les moulins de Beauport. Cette réorganisation de la compagnie libérait Renaud d’un lourd fardeau et lui donnait du temps pour se consacrer davantage aux entreprises qu’il dirigeait déjà et des capitaux pour se lancer dans de nouvelles transactions. Au début des années 1870, plus d’un homme d’affaires de Québec lorgnait vers la région du lac Saint-Jean comme s’il s’agissait d’une terre promise ; parmi les intéressés, il y avait les administrateurs de la Banque d’Union du Bas-Canada et son vice-président, Thomas McGreevy*, entrepreneur de construction ferroviaire. Renaud manifestait lui aussi de l’enthousiasme pour le développement de la région du lac Saint-Jean et il souhaitait ardemment la construction d’une voie ferrée entre Québec et cette région. Membre du conseil d’administration, de 1872 à 1873, de la Compagnie du chemin à lisses de Québec à Gosford, qui construit un premier tronçon de Québec au comté de Portneuf, il y siège aussi en 1875 au moment où celle-ci devient la Compagnie du chemin de fer de Québec et du lac Saint-Jean ; il en sera membre jusqu’en 1877. On peut supposer qu’il représentait les intérêts de la Banque d’Union en tant qu’administrateur de cette dernière, de 1871 à 1878. La voie ferrée menant au lac Saint-Jean était encore en construction que les capitalistes de Québec se préparaient déjà à tirer tout le parti possible de cette région de l’arrière-pays. Avec d’autres hommes d’affaires, Renaud fait partie en 1877 de la Quebec and Lake St John Lumbering and Trading Company, dont il sera un des dirigeants jusqu’à sa mort.

Faute d’une analyse de sa comptabilité, on ne sait comment Renaud fit face à la sévère dépression économique qui paralysa le commerce de 1874 à 1878. On sait seulement que ses magasins furent pillés, le 12 juin 1878, par les grévistes des chantiers de construction de Québec qui réclamaient en vain une hausse de salaire ; le Journal de Québec du 13 juin estimait à $2 000 (soit 200 barils et 150 sacs de farine) les pertes de Renaud qui n’avait pas craint à cette occasion de haranguer les émeutiers. En apparence du moins, il sortit de cette crise plein d’énergie. Profitant peut-être des faillites qui avaient secoué le commerce à Québec, il fonda, en 1878, un établissement au 24 rue Saint-Paul, spécialisé dans le commerce « de la faïence et d’argile cuite ». Cette maison existe encore aujourd’hui sous le nom de J.-B. Renaud & Cie ; par ailleurs, la première firme mise sur pied par Renaud déménagera son bureau principal à Rivière-du-Loup au cours du xxe siècle. Durant les années 1880, Renaud continua de s’intéresser à la navigation. En 1882, il devint un des administrateurs de la Compagnie de navigation du Richelieu et d’Ontario [V. Hugh Allan ; Louis-Adélard Senécal]. Cette nomination n’a pas de quoi surprendre car la Banque d’Union, la Compagnie de navigation du Richelieu et d’Ontario et la Compagnie de navigation du Saint Laurent entretenaient des liens étroits.

Spéculateur avisé, Renaud tira parti du développement urbain de Québec et des villes environnantes en effectuant, tout au long de sa vie, des placements avantageux. Il devint peu à peu un gros propriétaire foncier. Outre l’emplacement de ses magasins et de ses quais à Québec, auquel il faut ajouter son domaine de 33 arpents à Beauport, il possédait sept terrains dans divers quartiers de Québec – celui du faubourg Saint-Sauveur était subdivisé en 233 lots – et 39 à Lévis et à Lauzon, de même que deux immeubles à Québec et à Lévis, et un bâtiment à Rivière-du-Loup en copropriété avec ses associés Le Moine et Chateauvert.

Au début des années 1880, Renaud figurait parmi les principaux hommes d’affaires francophones, en raison du volume de ses investissements et de la diversité de ses transactions. Il entretenait des liens avec les milieux financiers anglophones et le milieu politique, comme en témoigne l’achat du journal conservateur la Minerve qu’il effectua avec Joseph Tassé*, Alexandre Lacoste* et Aimé Gélinas le 30 août 1880. Mais il avait toujours refusé de se porter candidat aux élections provinciales ou fédérales, prétextant qu’il n’avait pas l’instruction requise. La mort le faucha en pleine activité, le 1er mars 1884, ne lui laissant point le temps de concrétiser un projet qui lui tenait à cœur : la construction d’un pont entre Cap-Rouge et Saint Nicolas. Outre l’éloge de sa droiture et de son dynamisme, la nécrologie du Courrier du Canada signale « sa connaissance pratique des hommes et des choses, [et] sa sûreté de jugement ». Le décès de Renaud n’entraîna pas la disparition de son commerce qui continua de prospérer sous l’habile direction de ses associés Le Moine et Chateauvert. En 1912, la maison J.-B. Renaud avait un chiffre d’affaires annuel de $3 000 000 et comptait 130 employés ainsi que huit voyageurs de commerce.

En collaboration avec Jean Hamelin

ANQ-M, État civil, Catholiques, Notre-Dame de Montréal, 18 janv. 1841 ; Saints-Anges (Lachine), 23 juin 1816.— ANQ-Q, Minutiers, Édouard Glackmeyer, 4 mai, 30 juill. 1875.— AVQ, Rôles d’évaluation et d’imposition, 1871.— BE, Québec, Reg. B, 145, no 69 273.— Musée d’Odanak (Odanak, Québec), Fonds divers, Boîte 1, 30–39 ; Boîte 2, 32, 39–47 ; Boîte 7, 2.— Canada, prov. du, Statuts, 1862, c.71.— Québec, Statuts, 1884, c.91 ; 1886, c.92.— Le Courrier du Canada, 3 mars 1884.— Le Journal de Québec, 13 juin 1878.— Annuaire du commerce et de l’industrie de Québec, J.-C. Langelier, compil. (Québec, 1873).— Beaulieu et J. Hamelin, La presse québécoise, I : 57.— Quebec directory, 1850–1884.— Rumilly, Hist. de Montréal, III : 102.— B. J. Young, Promoters and politicians : the North-Shore railways in the history of Quebec, 1854–85 (Toronto, 1978).— É.-Z. Massicotte, « Deux grands négociants », BRH, 42 (1936) : 339s.

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

En collaboration avec Jean Hamelin, « RENAUD, JEAN-BAPTISTE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/renaud_jean_baptiste_11F.html.

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Auteur de l'article:    En collaboration avec Jean Hamelin
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1982
Année de la révision:    1982
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