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NANTEL, ANTONIN, prêtre catholique, professeur, administrateur scolaire et auteur, né le 17 septembre 1839 à Saint-Jérôme, Bas-Canada, fils de Guillaume Nantel, tanneur, et d’Adélaïde Desjardins ; décédé le 30 juillet 1929 à Sainte-Thérèse-de-Blainville (Sainte-Thérèse, Québec).
En 1851, à l’âge de 12 ans, Antonin Nantel entre au petit séminaire de Sainte-Thérèse, où il passera presque toute sa vie. Son père meurt au moment où il fait sa rhétorique. Antonin entreprend ses études théologiques en 1859 et reçoit l’ordination en 1862. La même année, il devient professeur de l’établissement qui l’a formé et y met sur pied l’académie Saint-Charles. Ainsi nommée en l’honneur du fondateur du petit séminaire, Charles-Joseph Ducharme*, cette dernière convie les élèves les plus doués en littérature à s’épanouir par les lettres. Dès 1863, Nantel est préfet des études. Il publie des écrits sur la pédagogie dans la Revue canadienne de Montréal et confiera aussi d’autres articles à la Semaine religieuse de Montréal. Probablement en 1864, il fait paraître à Montréal un Nouveau cours de langue anglaise selon la méthode d’Ollendorff à l’usage des écoles, académies, pensionnats et collèges, qui connaîtra plusieurs rééditions. Ses jeunes frères Guillaume-Alphonse* et Wilfrid-Bruno*, destinés à des carrières politiques notables au sein du Parti conservateur, fréquentent eux aussi l’établissement de Sainte-Thérèse-de-Blainville.
Petit de taille mais doté d’une personnalité autoritaire, Nantel fait preuve d’une vaste culture et possède des qualités d’ordre et de méthode qui le désignent à de hautes fonctions. Sans surprise, il accède donc au poste de supérieur du petit séminaire de Sainte-Thérèse en 1870. Travailleur infatigable, il garde la main haute sur l’enseignement en se réservant le poste de préfet des études (qu’il occupera jusqu’en 1873, puis de 1879 à 1883), en continuant de donner des cours de littérature, d’histoire et de langue anglaise, et de diriger l’académie Saint-Charles. En 1880, Nantel fonde les Annales térésiennes, organe du petit séminaire de Sainte-Thérèse qui sera publié jusqu’en 1946. Cette revue est le reflet de la vision évidemment chrétienne des choses à travers laquelle le supérieur Nantel juge les événements de tout ordre pour mieux en instruire ses ouailles. Il rédige également des manuels, dont certains feront autorité dans les maisons d’enseignement. En 1881, un incendie détruit le collège. Grâce aux appuis nombreux dont Nantel jouit dans différents milieux d’influence où s’activent plusieurs de ses anciens collègues et élèves, un nouvel édifice peut ouvrir ses portes en 1883. Nantel en sera le supérieur jusqu’en 1886, puis de 1889 à 1895, et enfin de 1900 à 1905.
À première vue, Nantel a une conception conservatrice de l’éducation : il croit aux vertus des études classiques et veut faire de ses étudiants des meneurs, mais surtout des chrétiens convaincus et des patriotes. En 1874, il a reçu avec un certain enthousiasme les idées de Pierre-Auguste Leroy*. Promoteur d’une réforme de l’enseignement, ce dernier reprochait entre autres aux études classiques de ne pas tenir compte des aptitudes des élèves et de trop insister sur la mémorisation ; il préconisait de réduire de moitié le temps consacré à l’enseignement du grec et du latin au profit des matières utiles. Nantel n’a pas approuvé sa condamnation de l’enseignement des langues anciennes, mais a introduit au petit séminaire de Sainte-Thérèse un programme d’études commerciales.
En ce qui concerne l’évolution sociale et économique du Nord de la province de Québec, Nantel entretient des idées voisines de celles de Joseph-Adolphe Chapleau* et du curé François-Xavier-Antoine Labelle*. Après s’être croisés au moment de leurs études au petit séminaire de Sainte-Thérèse, Nantel et Labelle se sont liés d’amitié dans les années 1870. Cette relation cordiale repose en partie sur leur appartenance au clergé, sur leur attachement à leur alma mater, mais aussi sur leur désir commun de collaborer au progrès du Nord, à l’avancement des colons et à la formation des élites. Nantel ne rate pas une occasion de vanter l’œuvre colonisatrice de Labelle. En 1882, il fonde même, en association avec ses frères Guillaume-Alphonse et Wilfrid-Bruno, une colonie à Nominingue, où s’établissent deux autres frères Nantel, Jules et Maximien, avec leur famille.
Dans le discours qu’il prononce à l’occasion des fêtes organisées pour souligner la bénédiction du nouveau collège, en 1883, se trouve l’essentiel de la pensée politique de Nantel. « Ce que l’Église bénit et consacre, l’État le respecte et le protège », y dit-il. Si Nantel était ultramontain, il n’était pas « castor », car il considérait que la collaboration de l’Église et de l’État laissait à ce dernier une zone libre de toute intervention cléricale. En fait, Nantel croyait que l’État devait laisser la direction de l’éducation à l’Église. À la vue de l’excellence des élites formées dans les établissements d’enseignement confiés aux bons soins des communautés religieuses, l’État n’a d’ailleurs selon lui jamais eu à se repentir d’un tel partage. Pour le reste, le supérieur du petit séminaire de Sainte-Thérèse s’en remettait au leadership des hommes politiques.
Par héritage familial, par tempérament et manifestement à cause de son état ecclésiastique, Nantel a des affinités avec le Parti conservateur. En 1872, il correspond avec Louis-Rodrigue Masson*. Comme Labelle, il est cependant plus proche de Chapleau, qui, après son élection sans opposition le 12 mars 1873, se rend avec Gédéon Ouimet* à Sainte-Thérèse-de-Blainville, où on le reçoit avec chaleur. Le député de Terrebonne voue à Nantel une grande admiration. En 1897, par exemple, dans la perspective de la création d’un évêché à Saint-Jérôme, Chapleau, alors lieutenant-gouverneur de la province de Québec, désignera Nantel comme un candidat idéal à la mitre. Sans être aussi importante que celle de Labelle, l’influence politique de Nantel, discrète, n’en a pas été pour autant négligeable. Le supérieur du petit séminaire a cependant laissé à ses frères le militantisme partisan.
Toute sa vie durant, Nantel s’est intéressé aux lettres et à l’histoire. En 1868, il est devenu membre de la Société historique de Montréal. L’année suivante, il a publié à Montréal les Fleurs de la poésie canadienne. Selon Séraphin Marion*, il aurait reçu en 1877 une invitation à devenir membre de la Société littéraire du Canada. En 1905, après avoir terminé son dernier mandat de supérieur du petit séminaire, Nantel, à l’âge de 66 ans, part en France pour y approfondir des recherches. Il rentre au Canada en 1908, auteur d’un ouvrage savant qu’il a publié à Paris la même année sous le pseudonyme A. Berloin, la Parole humaine : études de philologie nouvelle d’après une langue d’Amérique. Ce travail, consacré principalement à « la langue des tribus algiques », fait l’objet de plusieurs comptes rendus, pour la plupart élogieux, dans les journaux ; l’abbé Camille Roy*, futur recteur de l’université Laval, signe l’un d’eux. Conjointement avec Benjamin Sulte, Nantel devient doyen de la Société historique de Montréal en 1919. Élevé à la dignité de prélat romain en 1923, il reçoit un doctorat honorifique ès lettres de l’université de Montréal l’année suivante. Il rend son dernier souffle à l’âge vénérable de 89 ans.
Antonin Nantel a laissé derrière lui la réputation d’avoir excellé comme homme de lettres, mais plus encore comme pédagogue. Ses écrits, en particulier la Parole humaine, ont impressionné ses contemporains, mais ont vite vieilli parce qu’ils présentaient d’abord et avant tout un intérêt didactique. Par contre, son œuvre d’éducateur a laissé une marque indélébile. Partisan convaincu de l’enseignement classique à base de christianisme, Nantel n’a cependant pas hésité à adapter les programmes d’enseignement de son collège aux exigences de la société industrielle en gestation. L’introduction d’études commerciales dans les programmes de son collège et l’accent qu’il a mis sur l’enseignement de la langue anglaise en sont des indications révélatrices. C’est toutefois en présidant aux destinées du petit séminaire de Sainte-Thérèse pendant la majeure partie de sa carrière qu’il a le plus apporté au monde de l’éducation. On parle de lui comme du deuxième fondateur de l’institution térésienne, qui a pendant longtemps été l’alma mater d’une bonne partie des élites de la région des Laurentides.
Malgré de nombreuses recherches, l’acte de baptême d’Antonin Nantel n’a pu être retrouvé. Le lecteur pourra lire des articles de Nantel, extraits des Annales térésiennes et de divers journaux et revues, dans son ouvrage Pages historiques et littéraires (Montréal, 1928). Quelques-uns de ses ouvrages ont été mentionnés dans la biographie ; pour une liste plus complète, on consultera Hamel et al., DALFAN, 1022.
Le Devoir, 31 juill., 9 août 1929.— L.-P. Audet, « le Québec à l’Exposition internationale de Paris en 1878 », Cahiers des Dix, 32 (1967) : 125–155.— DOLQ, 1.— Serge Laurin, Rouge, Bleu : la saga des Prévost et des Nantel ; chronique d’un siècle d’histoire politique dans la région des Laurentides (Sainte-Foy, Québec, 1999).— Séraphin Marion, « Origines de l’Institut canadien-français d’Ottawa et de la Société royale du Canada », Cahiers des Dix, 39 (1974) : 45–84.
Serge Laurin, « NANTEL, ANTONIN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/nantel_antonin_15F.html.
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Auteur de l'article: | Serge Laurin |
Titre de l'article: | NANTEL, ANTONIN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
Année de la révision: | 2005 |
Date de consultation: | 2 déc. 2024 |