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Titre original :  Archibald McNab, 17th Chief of Clan Macnab / Archibald McNab, 17e chef du clan Macnab

Provenance : Lien

McNAB, ARCHIBALD, 17e chef du clan MACNAB, colonisateur, juge de paix et officier de milice, né vers 1781 à Bouvain, Glen Dochart, Écosse, fils unique de Robert MacNab et d’Anne Maule ; vers 1810, il épousa Margaret Robertson, et ils eurent six enfants, dont deux fils et deux filles atteignirent l’âge adulte ; il eut aussi au moins deux enfants illégitimes ; décédé le 12 août 1860 à Lannion, France.

Jusqu’en 1760, le clan Macnab de Glen Dochart avait survécu aux changements politiques survenus au cours des siècles, grâce à ses liens étroits avec la branche de Breadalbane, issue de la puissante famille Campbell. Le 16e chef du clan, Francis McNab (décédé en 1816), oncle d’Archibald, était en conflit avec son époque et menait grand train, comme les anciens chefs de clan des Highlands. Étant donné que Francis McNab n’avait pas d’héritier légitime, Archibald sut dès l’enfance qu’il deviendrait « le grand MacNab ». Il fut instruit par des maîtres presbytériens et, contrairement à la tradition, il ne termina pas ses études aux Inns of Court de Londres ni à Paris. En 1806, il vivait à Londres et avait acquis dans le milieu sportif de la capitale une solide réputation d’ivrogne, de vantard et de débauché. C’est lui qui, en 1812, introduisit son oncle dans la société londonienne, et cette visite donna lieu à de nombreuses histoires, probablement apocryphes. Tous deux étaient célèbres pour être toujours sans le sou et pour être d’une susceptibilité telle que la moindre provocation les jetait dans une rage folle.

Quand Archibald McNab succéda à son oncle en 1816, il hérita d’un domaine irrémédiablement hypothéqué et de dettes d’environ £35 000 qu’il devait acquitter à l’aide d’un revenu annuel de £1 000. Avec l’assistance du vieux conseiller et compagnon de son oncle, Dugald MacNab, il tenta pendant quelques années de conjurer un désastre inévitable. Finalement, des petits créanciers s’associèrent pour faire saisir ses terres et ses biens, puis le menacèrent d’emprisonnement en obtenant contre lui un mandat de prise de corps. McNab passa en Angleterre et trouva refuge dans le Haut-Canada ; sa fuite eut bien quelque chose d’épique, mais il n’en reste pas moins qu’il était tombé en disgrâce, qu’il était poursuivi par des huissiers et qu’il avait abandonné femme et enfants. Par la suite, il se mit en tête d’amasser une fortune sur le dos des colons des régions éloignées du Haut-Canada, projet qui souleva de vives controverses.

McNab arriva aux Canadas en 1822 avec le dessein d’obtenir une concession gratuite dans le haut de la vallée de l’Outaouais et d’y faire venir des colons écossais qui, en la mettant en valeur, lui apporteraient des profits. Son style flamboyant attira rapidement l’attention de la population. Pendant l’hiver de 1822–1823, des articles du Kingston Chronicle annoncèrent qu’il prétendait avoir découvert dans le comté de Glengarry l’épée perdue de Charles le Jeune Prétendant et qu’il avait l’intention de la présenter au roi George IV. En février 1823, à York (Toronto), il demanda par pétition que le canton de Torbolton, sur la rivière des Outaouais, demeure vacant jusqu’à ce que le secrétaire d’État aux Colonies, lord Bathurst, ait examiné son plan de colonisation. Suivant les conseils du lieutenant-gouverneur sir Peregrine Maitland, selon qui la proposition présentait des risques et pourrait embarrasser le gouvernement provincial, Bathurst refusa de l’approuver. McNab n’en reformula pas moins sa demande en octobre, disant espérer amener ses « gens » à coloniser un canton non arpenté, situé derrière celui de Fitzroy. Tout en étant prêt à « répondre personnellement » de leur conduite, il insinuait qu’il pourrait écarter tout « problème éventuel » en leur faisant signer des contrats d’engagement en Écosse. D’après l’entente, il paierait le voyage, en échange de quoi, après trois ans, chaque colon lui remettrait, à titre de redevance annuelle, un boisseau de blé ou son équivalent en farine pour chaque acre défrichée.

La demande de McNab fut déposée devant le Conseil exécutif de la province, où le révérend John Strachan* se prononça contre son acceptation parce qu’elle risquait d’« imposer aux colons et à leurs descendants une rente perpétuelle ». Il était « peu probable, prévoyait Strachan à juste titre, qu’ils demeurent satisfaits tout en portant un fardeau dont ils ne pourraient se débarrasser d’aucune manière ». Le conseil voyait bien les faiblesses du plan, mais il attendait avec tant d’impatience la colonisation de ces terres qu’il l’approuva en novembre 1823. McNab obtint immédiatement une concession de 1 200 acres et 3 800 acres supplémentaires plus tard, de même que la surintendance absolue de la colonisation des terres adjacentes qui se trouvaient dans le canton non arpenté, au confluent de la rivière des Outaouais et de la rivière Madawaska. Une fois que les colons se seraient acquittés des charges exigées par la province et qu’ils auraient remboursé McNab de ses frais, la couronne leur remettrait des lettres patentes. McNab devait exposer les conditions aux colons et les inscrire dans des ententes dont une copie serait déposée aux bureaux du gouvernement. Il devait aussi, dans un délai de 18 mois, fournir un rapport des progrès accomplis. Le canton fut arpenté et baptisé McNab en 1824. La même année, McNab construisit une maison en bois rond à l’embouchure de la Madawaska, à laquelle il donna le nom de Kinell Lodge.

McNab ne tint aucun compte des conditions du conseil et, pendant les 15 années qui suivirent, il tenta de gouverner le canton comme s’il lui appartenait en propre. L’analphabétisme et la crédulité initiale des colons, tout comme la confiance et l’appui des amis qu’il s’était faits tant à York que dans la vallée de l’Outaouais (Alexander James Christie* et Hamnett Kirkes Pinhey, par exemple), expliquent qu’il ait réussi à le faire si longtemps. Pour traiter avec les colons et les autorités gouvernementales, McNab jouait de son image de chef de clan, de gentleman digne de foi et de bienfaiteur des régions éloignées. Sa conduite colorée mais autocratique tranchait dans la société provinciale du Haut-Canada. À la fin des années 1820, John Mactaggart*, conducteur de travaux au canal Rideau, notait qu’il parcourait la colonie « toujours vêtu du costume complet des Highlands et précédé d’un cornemuseur ». Il était, observait Mactaggart, « plein d’enthousiasme à propos de l’Écosse, chose qui se rencontr[ait] rarement parmi les gens de ce côté-ci de l’Atlantique ». Henry Scadding* rendait ainsi compte des visites d’affaires que McNab faisait à York, où il logeait ordinairement chez David Archibald MacNab, membre de son clan et frère d’Allan Napier MacNab* : « Entouré ou suivi d’un groupe de ses élégants parents d’York, il parcourait d’un pas digne toute la rue King, puis la descendait ou la remontait jusqu’à la route de Kingston. [...] le chef portait toujours, avec quelques modifications, un costume des Highlands qui mettait bien en valeur son corps robuste et droit : le bonnet bleu à plume et le poignard richement ciselé attiraient toujours l’attention, tout comme le tartan aux teintes brillantes qui pendait de son épaule après avoir fait un tour en travers de sa puissante poitrine ; un gilet écarlate, orné de boutons d’argent massif, et un manteau toujours rejeté en arrière, ajoutaient au pittoresque du personnage. » Arrogant et désagréable, McNab savait aussi être charmant et obligeant. Joseph Bouchette*, arpenteur général du Bas-Canada, écrivait qu’il avait bénéficié en 1828 de l’« hospitalité caractéristique » du « noble chef » ; au cours d’une tournée de la province en 1836, le lieutenant-gouverneur sir Francis Bond Head* projetait de faire une visite spéciale à Bytown (Ottawa) en compagnie de McNab. Dans ce contexte mondain, peu de gens, sinon personne, avaient l’occasion de voir son côté vil.

Les manœuvres carrément malhonnêtes de McNab aux Canadas commencèrent avec les ententes qu’il signa avec ses colons, dont le premier groupe arriva d’Écosse en 1825. Ils durent reconnaître par acte notarié les montants excessifs qui leur avaient été imputés, mais que McNab ne paya jamais entièrement, pour leur voyage jusqu’au canton de McNab. On ne sait pas exactement combien de familles il fit venir. En 1839, il prétendit avoir payé le voyage de 29 familles écossaises et de 36 familles d’origines diverses qu’il avait recrutées à Montréal. Pourtant, parmi les 142 familles vivant alors dans le canton de McNab, à peine 12 reconnaissaient être venues aux frais de McNab. Malgré son intérêt à établir son autorité patriarcale de chef de clan, son régime de redevances était désuet et inefficace, et bien des colons ne purent pas respecter leurs engagements. Il devint de notoriété publique qu’il négligeait son canton. Là où des améliorations furent apportées avant 1840, elles furent réalisées par des colons, sans aucune contribution de sa part. Pourtant, il serait difficile de prouver que sa mauvaise gestion retarda la mise en valeur des terres, car le nombre d’acres cultivées dans le canton augmenta de 65 p. cent entre 1840, année où il était au faîte de son pouvoir, et 1844, année où il partit et où la province se mit à concéder les terres du canton de manière juste et équitable.

Le déclin de McNab, tout lent qu’il fut à commencer, vint en partie de ce qu’il chercha irrationnellement à obtenir de plus gros revenus et en partie de ce que les colons parvinrent tous ensemble à exercer des pressions sur le gouvernement. Dès 1829, des problèmes surgirent : les chefs de 15 familles amenées d’Écosse par McNab s’adressèrent au lieutenant-gouverneur sir John Colborne* pour qu’il les aide à faire déclarer nulles et non avenues les ententes qu’ils avaient signées avec le chef. À présent qu’ils connaissaient un peu « le pays, les us et coutumes [...] et la nature du sol », ils se voyaient accablés d’un « lourd fardeau qu’aucun des sujets de Sa Majesté dans la province n’a[vait] à porter et n’[aurait été] capable de porter ». L’année suivante, le gouvernement chargea Alexander McDonell*, agent des Terres de la couronne dans le district de Newcastle, d’enquêter sur le canton. Même s’il découvrit que les colons étaient incapables de poursuivre leurs travaux de défrichement et de remettre les quantités de blé ou de farine exigées, le gouvernement ne vit aucune raison d’intervenir.

Intraitable, McNab poursuivit de nombreux colons devant la Cour de district, à Perth, pour défaut de payer leurs arrérages, ce qui lui fut d’autant plus facile qu’il était juge de paix depuis 1825. En général, il les accusa de bris de contrat. Il fit souvent traîner les poursuites, obligeant les colons à se rendre plusieurs fois à Perth et leur imposant ainsi une charge considérable. Ses victoires devant les tribunaux se terminèrent en 1835, après quoi il se tourna vers une autre source de revenus. Il offrit d’abandonner ses titres sur les 5 000 acres qu’il avait acquises dans les années 1820, en échange du droit d’abattre des pins sur les lots non loués du canton de McNab ou de récolter des droits sur leur coupe. Il prétendit alors que seule une petite partie des terres du canton était « propre à la culture », de sorte qu’il avait besoin d’une autre source de revenus « pour assurer la subsistance de ses compatriotes » – distorsion caractéristique des faits. On se rendit à sa requête en 1836, même si le procureur général, Robert Sympson Jameson, craignait qu’ainsi on oppose un « obstacle permanent » à la colonisation de ces lots. Cette décision vint sanctionner des activités que McNab faisait illégalement depuis 1825. On ignore combien l’abattage lui rapportait, mais, d’après le colon Dugald C. McNab, il en retira un revenu annuel de £100 à £600 entre 1825 et 1836.

Enhardi par cette victoire, McNab, qui avait obtenu des lettres patentes sur 650 acres, outre sa concession initiale, s’assura 200 acres de plus en 1837. Sa manière étrange d’acquérir des terres lui ressemblait tout à fait. Le lot de 200 acres était occupé par Duncan McNab, un illettré qui était venu en 1832 à ses propres frais et qui avait mis une ferme en exploitation. Cinq ans plus tard, il échangea son lot contre un autre, censé être plus fertile et occupé par Duncan Anderson, qui voulait s’établir sur celui de McNab pour y construire une taverne. Le chef intervint en demandant au gouvernement de lui donner le lot à lui, et non à Duncan McNab, disant simplement qu’Anderson l’avait quitté et qu’il était occupé par un squatter. Il négligea de mentionner qu’il connaissait bien Anderson, qu’il avait pris sa belle-sœur comme femme de charge et qu’il avait eu un enfant avec elle. On ignore en quoi Duncan McNab avait offensé le chef, mais celui-ci fit valoir sa volonté. En 1840, après des poursuites judiciaires, Duncan McNab et sa famille furent délogés. Appuyé par ses voisins, celui-ci demanda de l’aide au gouvernement mais, même si le secrétaire de la province, Richard Alexander Tucker*, croyait voir là un authentique cas d’oppression, le Conseil exécutif refusa d’intervenir. Après une longue bataille juridique et des violences exercées contre Duncan McNab par Archibald McNab, et en dépit du solide soutien populaire dont bénéficiait le premier, le conseil réaffirma le droit du chef en octobre 1841 en alléguant que Duncan McNab aurait dû obtenir de lui un nouveau billet de localisation avant de déménager.

Tout essentielle que fut la question de ces 200 acres pour Duncan McNab, le chef s’était, de 1837 à 1841, concentré sur des problèmes plus vastes. Archibald McNab tenta en vain d’augmenter ses propriétés foncières et, par le fait même, ses revenus. En 1837, il se plaignit au gouverneur lord Gosford [Acheson*] que des colons vendaient leurs terres et quittaient le canton. Pour empêcher que cela continue, McNab demanda qu’on le nomme fiduciaire de l’ensemble des 5 000 acres qui lui avaient été concédées en 1823 et qu’il avait perdues en 1836. En lui assurant de nouveau une mainmise directe sur un grand territoire, prétendait-il, cette concession lui permettrait de ne transférer des lots qu’aux colons qui se seraient acquittés de leurs obligations envers lui. C’était là une autre de ses manœuvres dissimulatrices, car les colons qui souhaitaient rester ne mettaient sûrement pas en vente les lots qu’ils avaient aménagés, et ils étaient assez peu nombreux. En juin 1838, le conseil accepta la proposition de McNab mais, en octobre, il revint sur sa décision. Pendant la rébellion de 1837–1838, McNab fut humilié publiquement lorsque quelque 80 miliciens du canton de McNab refusèrent de servir sous ses ordres dans le 2nd Carleton Light Infantry, parce qu’ils contestaient les ententes signées avec lui et parce qu’il avait poursuivi nombre d’entre eux en justice. Quand McNab demanda en 1839 qu’on lui accorde les 5 000 acres sans condition, c’est-à-dire sans parler d’acte de fiducie, aucune tergiversation ne marqua les délibérations du conseil, qui refusa de nouveau sa demande.

Dès lors, McNab tenta d’être indemnisé pour les pertes qu’il prétendait avoir subies en colonisant le canton. En février 1839, il les évalua à £5 000 (valeur estimée des 5 000 acres qu’il avait perdues), en y ajoutant £4 000 pour ses dépenses des 14 années précédentes. Il s’assura à Toronto l’appui du procureur général Christopher Alexander Hagerman* et de John Strachan qui, même s’il n’était plus au conseil, estimait alors que McNab avait peu profité financièrement de son plan de colonisation. Le conseil refusa néanmoins de lui verser les £5 000, mais pensa pouvoir créer pour lui un fonds d’indemnisation en demandant aux colons d’acheter leurs terres. Quand on exigea qu’il fournisse un relevé de ses débours réels en juillet, McNab ne put remettre que des « estimations approximatives », de sorte que le conseil se contenta de son évaluation de £4 000. En septembre, un arrêté en conseil lui accorda ce montant, £1 000 devant lui être versées directement et le reste devant provenir des ventes éventuelles de terres. En même temps, on lui enjoignit d’arrêter à la fin de l’année de couper du bois dans le canton de McNab, sauf sur les 850 acres qui lui appartenaient en propre.

Les colons apprirent que quelque chose d’important s’était passé à Toronto, même s’ils ne prirent connaissance de la teneur de l’arrêté en conseil qu’en 1842. En avril 1840, un groupe de 35 colons avaient soumis au lieutenant-gouverneur sir George Arthur une pétition amère dans laquelle ils niaient que le chef avait garanti leurs frais d’installation. En outre, ils affirmaient que McNab tirait encore des revenus de la coupe du bois et de la vente ou de la location de terres. Comme ils réclamaient une enquête indépendante sur les affaires du canton, le gouvernement nomma à cette fin Francis Allan, agent des Terres de la couronne dans le district de Bathurst, qui remit son rapport en novembre.

McNab n’avait absolument pas prévu que le rapport appuierait tout à fait la position des colons et décrirait son rôle de manière accablante. Les routes étaient dans un état lamentable. La seule scierie appartenait au chef, qui bloqua la construction d’un moulin à farine jusqu’à la fin de l’année 1840. L’imposition du canton était inférieure à £32. Même pour une région clairement désavantagée par la piètre qualité du sol, ce n’était guère reluisant. Mais surtout, il s’avéra que McNab avait tenté de dominer les colons d’une manière tout à fait dictatoriale. Le rapport mentionnait en particulier Duncan McNab et le forgeron John Campbell, dont le chef avait saisi les outils et les avait conservés pendant des années, après que Campbell eut refusé de lui verser un loyer ou de lui consentir une hypothèque. Allan condamna sans détour la gestion de McNab : « Le régime de loyers et d’hypothèques, ajouté à une conduite arbitraire et à un esprit de persécution, semble avoir bloqué toute initiative et paralysé le travail des colons [...] On connaît trop bien le dévouement des Highlanders d’Écosse envers leur chef pour qu’il soit permis de croire qu’une désaffection comme celle qui s’est installée entre McNab et ses gens puisse être née sans qu’il les blesse profondément. »

La chambre d’Assemblée, où McNab comptait encore des amis, hésita à publier le rapport d’Allan, qui prit l’allure d’un enjeu politique. De plus, en juin 1841, le Conseil exécutif n’examina pas la nouvelle pétition des colons et décida de confirmer les arrangements de 1839. En conséquence, il publia un arrêté en conseil qui accordait neuf ans aux colons de McNab pour payer leurs terres et leur indiquait de verser leurs paiements non pas à McNab, mais à l’agent des Terres de la couronne, empêchant ainsi le chef d’avoir directement accès à son indemnisation. Puis, en août, Francis Hincks*, rédacteur en chef du journal réformiste l’Examiner et nouveau député, appuya la motion de Malcolm Cameron* demandant le dépôt du rapport d’Allan. Cette motion allait à l’encontre des désirs de sir Allan Napier MacNab, de Stewart Derbishire* et de 17 autres députés. L’Assemblée décida de publier le rapport, mais il fut d’abord soumis à un comité de la chambre. En 1842, il fut enfin publié : le gouvernement se trouva gêné par le dévoilement de ses interventions, et McNab vit encore fondre ses appuis.

La tournée qu’Allan avait effectuée dans le canton à l’été de 1840 avait déjà mobilisé les colons, et certains d’entre eux avaient fait part de leurs difficultés à Hincks. À compter de novembre 1840, celui-ci commença à publier dans l’Examiner des comptes rendus de la mauvaise administration de McNab. Sur ce, le chef poursuivit Hincks en diffamation et réclama des dommages-intérêts de £1 000. La cause fut entendue en avril 1842 à Toronto par Jonas Jones*, qui avait présidé le procès inique de Duncan McNab à Perth. Hincks, dont la nomination prochaine au poste d’inspecteur général des comptes publics était évidemment remise en question, était défendu par Robert Baldwin, William Hume Blake* et Adam Wilson*. Le procureur général William Henry Draper*, Henry Sherwood et John Willoughby Crawford* représentaient la partie plaignante. McNab gagna sa cause, mais il n’obtint que £5, ce qui constituait une défaite morale évidente. C’est donc sans remords que Hincks livra au public le procès-verbal des audiences, qui contenaient tant de révélations dommageables pour McNab.

Quand les colons du canton de McNab apprirent, au début de 1842, que les arrêtés en conseil de 1839 et de 1841 contenaient des clauses qui les obligeaient à acheter leurs terres, une nouvelle vague de protestations s’éleva. Il y eut deux pétitions, l’une signée par les colons que McNab avait fait venir d’Écosse, l’autre par ceux qui s’étaient rendus dans le canton à leurs frais. Au deuxième groupe de colons, à qui on n’avait jamais promis de terres gratuites, le Conseil exécutif répondit simplement, en mars 1842, qu’ils ne devraient pas tarder à faire le premier versement en vue d’un achat, sans quoi leurs terres risquaient d’être vendues. Ce fut le dernier mot des autorités sur cette fâcheuse question. En 1843 cependant, John Paris, qui avait combattu McNab pour construire un moulin à farine dans le canton, réussit à le faire déclarer coupable d’atteinte aux droits du public et à le faire condamner à une amende par la Cour des sessions trimestrielles de Perth.

Quel effet tout cela eut-il sur McNab ? En public, son attitude demeura la même. En août 1842, sa présence dans un salon tenu par lady Bagot à Kingston suscita sans doute beaucoup de commentaires. Dans un discours prononcé devant la Société calédonienne de Montréal en 1890, James Craig, avocat de la vallée de l’Outaouais, déclara : « J’ai parlé à certains de ceux qui ont connu le vieux chef aux derniers jours de son pouvoir déclinant et tous s’entendent pour dire qu’il conserva jusqu’à la fin son maintien droit et digne. Il croyait encore qu’il avait raison et que les colons avaient tort [...] Et ces amis [...] me disaient presque invariablement : « N’oubliez pas de dire que le chef était bon pour les pauvres, qu’il soignait les gens pour rien, que sa maison était toujours ouverte au passant et qu’il n’oublia jamais son pays des Highlands et les vieilles, vieilles coutumes écossaises ; et oh ! n’oubliez pas que, même s’il était dur avec certains, il avait un bon et grand cœur de Highlander. » Craig lui-même voyait dans la nature capricieuse de McNab le produit de sa « formation héréditaire » et de la tradition familiale. « Je suis prêt à croire [...] qu’il était bien intentionné, concluait-il, mais ses petites tyrannies le conduisirent à de plus grandes et, pour pouvoir affirmer illégitimement son autorité, il en vint à s’adonner au mensonge et à la cruauté. » Ainsi se construisit, sur les rives de la Madawaska, la légende du chef highlander qui avait bon cœur mais qui manquait de jugement.

Il s’avère pourtant, selon les archives, que McNab était un homme tout à fait désagréable, dangereux même pour ceux qui étaient à sa charge et obséquieux avec les plus puissants que lui. L’instabilité de son tempérament et de ses desseins provenait peut-être d’un problème d’alcool, mais rien ne permet de le démontrer. Il ne fut pas le seul chef à tenter sans succès de passer du rôle de monarque clanique du xviiie siècle à celui de sérieux propriétaire terrien du xixe. Poussé par l’ambition d’amasser une fortune dans le Haut-Canada, il ne vécut que modestement, dans une région éloignée, si l’on excepte ses voyages fréquents, presque continuels, à Perth, à Kingston et à Toronto. Il se révéla un menteur et un perfide consommé qui, par divers moyens, parfois raffinés et subtils, vola autant la couronne que les pauvres. Il imposa des fardeaux presque insupportables à ceux qui se mettaient en travers de son chemin, les poursuivant avec beaucoup d’énergie devant les tribunaux. Finalement, l’évidence de sa cupidité permit aux colons de lever le voile sur la véritable nature de son plan de colonisation, de briser son emprise sur le canton de McNab et de le chasser du dernier domaine qu’il y eut, sur les rives du lac White.

Tandis qu’Archibald McNab tentait encore, en 1844, de récolter l’indemnisation promise par le gouvernement, il partit pour Hamilton, où il bénéficia du soutien financier de sir Allan Napier MacNab. Sa perspicacité, cependant, ne diminua jamais. Au cours d’une célébration de la Saint-André à Kingston, en 1847, le major James Edward Alexander fut frappé par son allure et sa présence imposante. En 1848, la femme qu’il avait abandonnée, Margaret, lui offrit le domaine de Rendall, dans les îles Orkney, en Écosse, mais il demeura encore à Hamilton jusqu’en septembre 1851. Après son retour en Grande-Bretagne, il vécut avec Elizabeth Marshall, fille d’un ferronnier de Leeds, avec qui il eut une fille. Ils s’installèrent en France, à Passy (Paris), peut-être à l’hiver de 1854–1855, puis à Lannion. C’est là que McNab mourut en 1860, laissant une légende dans la vallée de l’Outaouais.

Alan Cameron et Julian Gwyn

Se fondant sur une généalogie des chefs établie en 1768, certains considèrent Archibald McNab comme le 13e chef (aussi appelé 13e laird). Selon la Court of the Lord Lyon, autorité héraldique officielle pour l’Écosse, son titre exact est celui de 17e chef.

AO, MU 1978 ; MU 2598, no 37 (esquisse hist. sur Archibald McNab, photocopies de coupures provenant du Chronicle (Arnprior, Ontario), 14 déc. 1894–1er mars 1895) ; RG 1, C-I-1, 33, McNab à John Davidson, 6 oct. 1841 ; McNab à Metcalfe, 4 mars 1844 ; F-I-8, 37 : 7 ; RG 22, Perth (Lanark), District Court, case files, 1837–1841 ; clerk account book, 1816–1844 ; sér. 75, 1 : 259, 285.— APC, RG 1, E3, 53 : 3–7, 60, 66–68, 75, 77, 89–92, 103–114, 117–118, 123–128, 135, 135v–w, 138, 141–148, 479–481 ; L1, 30 : 477–479 ; L3, 307 : Mc20/20, 23 ; 307a : Mc20/176 ; 308 : Mc21/10, 56, 64 ; 308a : Mc21/94, 121 ; 310 : Mc22/178 ; 311 : Mc1/32–33, 64, 71 ; RG 5, A1 : 29944–29946, 31176–31177, 33170–33172, 103387, 125156–125183, 135733–135770, 139643–139646 ; B3, 7 : 686–689 ; B26, 3 : 556, 569 ; 6 : 236, 1097 ; 8 : 1258 ; C2, 1 : 95–96 ; RG 68, General index, 1651–1841 : 454.— Court of the Lord Lyon (Édimbourg), Public reg. of all arms and bearings in Scotland, 40 : fo 133.— Ontario, Ministry of Citizenship and Culture, Heritage Administration Branch (Toronto), Hist. sect. research files, Renfrew RF.5.— SRO, GD50/119–120 ; GD112/43–46.— Univ. of Toronto, Thomas Fisher Rare Books Library, mss 5027, James Craig, « The McNab » [...] address delivered at a meeting of the Caledonian Society of Montreal in 1890 » (copie dactylographiée, 1890).— J. E. Alexander, l’Acadie ; or, seven years’ explorations in British America (2 vol., Londres, 1849), 2 : 2.— Canada, prov. du, Assemblée législative, App. des journaux, 1841, app. HH, nos 1–2.— Francis Hincks, Reminiscences of his public life (Montréal, 1884), 82–83.— John Mactaggart, Three years in Canada : an account of the actual state of the country in 1826–7–8 [...] (2 vol., Londres, 1829), 1 : 277–278.

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Alan Cameron et Julian Gwyn, « McNAB, ARCHIBALD, 17e chef du clan MACNAB », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 19 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mcnab_archibald_8F.html.

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Auteur de l'article:    Alan Cameron et Julian Gwyn
Titre de l'article:    McNAB, ARCHIBALD, 17e chef du clan MACNAB
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
Année de la révision:    2016
Date de consultation:    19 mars 2024